Texte intégral
Q - Est-ce difficile, lorsqu'on est le ministre français des Affaires étrangères, de tenter de faire valoir la puissance française et européenne dans le monde, à l'heure où l'Union européenne est elle-même confrontée à une très grave crise économique et politique ?
R - Vous avez raison, la situation en Europe est difficile en ce moment, en particulier la situation économique et financière. Les effets de la crise ont été très graves pour certaines économies européennes, certains de nos partenaires de l'Union européenne ont commis des erreurs, et doivent maintenant en payer le prix. Mais les États membres sont fermement déterminés à sauver tout ce travail que nous avons accompli tous ensemble depuis cinquante ans. C'est pourquoi une décision appropriée sera prise pour renforcer la zone euro et l'Union européenne dans son ensemble.
Q - Mais pensez-vous que cela soit si grave que cela, et que ce qui a été accompli, comme vous le dites, depuis plus de cinquante ans soit en jeu actuellement ?
R - Non, je ne le crois pas car nous n'avons pas le choix. Si la zone euro disparaissait, l'Union européenne elle-même serait en danger et nous ne pouvons laisser cela se produire, car il n'y aurait pas d'avenir pour nos pays dans un monde globalisé en l'absence de progression de l'Union européenne.
Q - Mais acceptez-vous, soyons précis, admettez-vous le fait que la Grèce finira par être en défaut de paiement pour ses dettes ?
R - Non. Non, la Grèce ne sera pas en défaut de paiement, et nous prendrons la décision qui s'impose pour l'éviter. Les ministres des Finances de l'Union européenne sont très clairs sur ce point.
Q - Oui, les ministres sont clairs, mais ce sont des hommes politiques. Si l'on observe le marché obligataire et les agences de notation, honnêtement, le message qu'ils envoient c'est que tôt ou tard, quelles que soient les mesures d'urgence adoptées par les dirigeants européens pour résoudre le problème, la Grèce finira par être contrainte de se déclarer en défaut de paiement.
R - Je ne le crois pas. Le message de l'UE est très clair : nous ne laisserons pas la crise grecque en arriver là. Je pense que nous disposons des moyens pour empêcher un tel scénario.
Q - Jack Straw, que vous connaissez certainement et qui a été ministre des Affaires étrangères britannique sous Tony Blair, a déclaré il y a peu que l'euro sous sa forme actuelle allait s'effondrer et qu'il vaudrait mieux que cela arrive rapidement plutôt que d'assister à une lente agonie.
R - Cela a déjà été annoncé, il y a bien longtemps, par de nombreuses personnes et l'euro est toujours là.
Q - Mais un euro bien malade à l'heure actuelle !
R - Non, je ne crois pas
Q - Vous ne pensez pas que la zone euro est en bien mauvaise santé ?
R Non. La zone euro rencontre des difficultés, auxquelles nous faisons face, mais je ne crois pas qu'il y ait un risque d'effondrement. Je sais que de nombreux spéculateurs aimeraient que cela se produise, mais nous ne le permettrons pas car l'euro est absolument crucial pour l'avenir de nos pays.
Q - Je souhaiterais vous interroger sur les ressorts politiques de la situation. N'est-il pas exact que c'est en réalité l'Allemagne qui est aux commandes et dicte les événements actuellement s'agissant de...
R - Non, pas du tout. Je crois plutôt qu'on pourrait dire que le président français a une capacité d'initiative qui répond aux préoccupations allemandes.
Q - Pensez-vous que cette crise aboutira, au minimum, à la naissance d'une zone euro à deux vitesses : d'une part un noyau dur de pays qui auraient un niveau d'intégration bien plus élevé, appelons-le le groupe euro-mark, et d'autre part des pays périphériques incapables de réaliser la même convergence et de respecter la même discipline financière ?
R - Non. Pas dans la zone euro. Bien évidemment. Il est impossible d'avoir deux zones euros avec une monnaie unique. Mais vous avez raison, si l'on considère la situation d'un autre point de vue, je crois que l'avenir de la zone euro est une sorte - j'ose le mot - de fédéralisme. Il ne peut y avoir de monnaie unique sans un budget, une politique budgétaire et financière intégrée. Je crois donc que la bonne réponse à la crise n'est pas l'effondrement de l'Union européenne mais, au contraire, une intégration renforcée entre ses membres.
Je crois que vous serez surpris. Je n'ignore pas que l'Europe suscite un fort scepticisme, cela n'est pas nouveau, c'est le cas depuis la création de l'Union européenne. Nous n'avons pas le choix. Imaginez un instant ce qui arriverait à la Grèce si le drachme venait à remplacer l'euro ; la dette grecque demeurerait, les remboursements seraient en euros, et donc la dette serait multipliée par deux ou trois si le nouveau drachme s'effondrait. Il est donc impossible d'envisager un tel scénario, et c'est pourquoi nous trouverons un moyen d'aider la Grèce à surmonter la crise actuelle.
Q - Lorsque vous entendez le Premier ministre britannique David Cameron déclarer devant le parlement que le Royaume-Uni ne donnera pas un penny de plus pour un plan de sauvetage de la Grèce ou toute autre économie en difficulté de la zone euro, pensez-vous qu'il partage ce raisonnement ?
R - Je pense que même pour les pays extérieurs à la zone euro, c'est une question de solidarité ; vers quelle zone économique, vers quels pays va la majeure partie des exportations britanniques ? Vers l'Union européenne. Il n'est donc pas dans l'intérêt du Royaume-Uni de voir la zone euro et l'Union européenne en général s'effondrer. C'est pourquoi je suis convaincu que nous trouverons un terrain d'entente entre nous, notamment pour l'avenir financier de l'Union européenne.
Q - Pensez-vous que le Royaume-Uni raisonne à courte vue ?
R - Je n'ai pas dit cela. Je ne souhaite pas critiquer un ami.
Q - Tournons-nous à présent vers l'horizon plus large que vous, en tant que ministre français des Affaires étrangères, devez contempler en permanence. Les Printemps arabes, il me semble, ont contraint les décideurs ici, à Paris, à revoir en profondeur leur manière de faire de la politique étrangère. Est-ce exact ?
R - Tout à fait. Tout le monde a été pris de court par les Printemps arabes. Personne n'avait anticipé ce qui s'est passé en Tunisie, puis en Égypte et dans d'autres pays. Pourquoi ? Parce que, pendant longtemps, notre priorité était la stabilité de ces pays. Cet objectif de stabilité nous avait conduits à accepter des régimes tyranniques et des violations de la démocratie et des droits de l'Homme. Nous avons accepté cela car nous étions convaincus que cela constituait une sorte de rempart contre l'extrémisme et le fondamentalisme.
Q - C'était un renoncement conscient à des principes ?
R - Oui, tout à fait. C'est ce que nous appelons habituellement la «Realpolitik». Nous pensions à l'époque que les avantages de cette politique étrangère étaient plus importants que le respect de nos principes.
Q - Et la France, si je puis me permettre, a appliqué cette Realpolitik jusqu'à l'extrême. Je pense à votre prédécesseur immédiat à votre poste qui a proposé à Ben Ali de l'aider à réprimer les manifestations
R - Non, pas plus que d'autres. Je ne suis pas sûr que le Royaume-Uni ou les États-Unis aient davantage anticipé ce qui s'est passé dans les pays arabes. Moubarak était à Washington quelques semaines avant les événements au Caire. Personne ne l'avait prévu, je le répète. Aujourd'hui nous devons changer le cours de notre politique, c'est parfaitement exact. Nous devons donner la priorité à nos principes, à la démocratie, à la liberté, aux réformes, au changement de gouvernance dans ces pays. C'est ce que nous faisons avec la Tunisie, l'Égypte, la Syrie, avec bien sûr des résultats divers.
Q - Nous allons parler de certains de ces pays, mais je voudrais que nous abordions le sujet de la Libye. On peut affirmer sans se tromper que les Français, et en particulier le président Sarkozy, ont été à l'avant-garde de la prise de décision concernant la Libye : pour plaider en faveur d'une résolution des Nations unies, pour lancer l'intervention militaire, pour reconnaître le Conseil national de transition. Tout cela a été accompli dans l'enthousiasme ici, à Paris. Mais tout ne se déroule pas comme vous l'aviez prévu, n'est-ce pas ?
Le 12 mai, vous avez vous-même déclaré au journal Al-Hayat, que cette intervention militaire était une affaire de semaines et non de mois.
R - C'était il y a trois mois. Je crois que cette déclaration ne durera pas de nombreux mois de plus.
Q - Combien de temps durera-t-elle ?
R - Je ne souhaite pas indiquer un chiffre précis bien sûr.
Q - Vous l'aviez fait à l'époque, et manifestement vous
R - C'est une question de mois, peut-être pas de semaines, j'en conviens, mais cela ne durera bien évidemment pas des années. Je souhaite juste rappeler pourquoi nous sommes intervenus en Libye il y a trois mois. Kadhafi avait annoncé une intervention contre la population de Benghazi et déclaré qu'il tuerait tous ses opposants, des personnes qui manifestaient pour la liberté et la démocratie. Ses troupes étaient en route vers Benghazi, nous le savions. Si la communauté internationale avait été totalement inefficace, cela aurait été un massacre à Benghazi. Je pense donc que la résolution 1973 était juste et que notre intervention est positive. Aujourd'hui, dans le respect total de la résolution du Conseil de sécurité, nous protégeons la population civile contre l'utilisation d'armes lourdes par Kadhafi.
Q - Le problème c'est que certains de vos partenaires dans cette entreprise ne sont plus d'accord avec vous. Je pense pour commencer à la Ligue arabe. Il avait été claironné qu'il était capital que les Arabes soutiennent à la fois la résolution des Nations unies et l'intervention militaire. Or Amr Moussa a déclaré hier qu'il souhaitait un cessez-le-feu immédiat avec Kadhafi toujours au pouvoir, suivi de négociations sur l'avenir politique de la Libye probablement avec le régime Kadhafi ?
R - La semaine dernière, le Groupe de contact, dont la Ligue arabe est membre, s'est réuni à Abou Dhabi et nous nous sommes tous mis d'accord pour affirmer que nous devions maintenir notre pression militaire. Tout le monde recherche bien sûr une solution politique à cette crise ; nous ne souhaitons pas poursuivre trop longtemps cette intervention militaire. Nous pensons qu'à l'heure actuelle il convient d'exercer une pression sur le régime afin de convaincre Kadhafi de se retirer ; mais l'intervention militaire ne durera pas éternellement et nous menons des discussions avec de nombreux interlocuteurs pour trouver une issue politique.
Q - Cependant, Monsieur le Ministre, le problème c'est que les Américains au moins évoquent une impasse sur le terrain. Le message que vous souhaitez faire passer aujourd'hui est-il toujours que l'action militaire ne cessera pas, ne peut pas cesser, en ce qui vous concerne, avant le départ de Kadhafi ?
R - L'action militaire progresse, la situation s'améliore à Misrata et à Djebel de Nefoussa, Tripoli est de plus en plus encerclée par les troupes du CNT. Nous allons donc poursuivre cette intervention militaire jusqu'à ce que notre objectif soit atteint ; et notre objectif est un cessez-le-feu véritable. Nous sommes favorables à un cessez-le-feu, mais un cessez-le feu qui gèle la situation des troupes sur le terrain.
Q - Mais, qu'en est-il de votre objectif, celui que vous avez déjà indiqué à ce micro, à savoir le départ de Kadhafi ?
R - Oui, bien évidemment
Q - Donc votre message aujourd'hui
R - Tout le monde partage ce point de vue. Les Américains sont d'accord, l'UE est unanime sur ce point, le Groupe de contact le dit également et de nombreux dirigeants africains, par exemple le président du Sénégal, sont exactement du même avis.
Q - Êtes-vous déçu que les Américains ne vous apportent pas un soutien militaire plus important ? Par exemple, ils disposent de l'avion anti-char A10 bien connu, mais ne l'ont pas déployé sur le terrain.
R - Nous comprenons, ils ont de nombreuses troupes en Afghanistan.
Q - Tout le monde est à la limite de ses possibilités, n'est-ce pas? La France est à la limite de ses possibilités, le Royaume-Uni est à la limite de ses possibilités
R - Non, non.
Q - Les responsables militaires britanniques affirment que si la situation se poursuit encore 90 jours de plus, leurs opérations militaires dans le monde seront affectées.
R - Certains militaires font ce type de déclaration, mais nous ne partageons pas leur avis ; nous disposons des moyens de maintenir notre intervention en Libye aussi longtemps que nécessaire. Je le répète, c'est une question de semaines, ou d'un ou deux mois, pas plus. Les mêmes personnes qui critiquent notre intervention en Libye nous demandent pourquoi nous n'intervenons pas en Syrie. La réponse est très claire. Tout d'abord, la situation est complètement différente, nous n'avons aucune intention d'intervenir en Syrie ; deuxièmement
Q - Pardon, mais si vous vivez à Jisr Al-Shigour et que vous avez vu votre famille se faire tuer et avez dû fuir vers la Turquie, et que vous savez que plus de mille civils syriens, sans arme, qui ont eu l'audace de manifester dans les rues ont été tués - en quoi la situation est-elle si différente ?
R - C'est différent de ce qui se serait passé à Benghazi. Je ne vais pas citer des chiffres de victimes bien sûr, mais il y a
Q - Êtes-vous bien le ministre qui a déclaré qu'un régime qui tire au canon contre sa population n'a plus de légitimité ?
R - Nous avons condamné cette situation ; mais il y a une autre différence que je souhaite souligner. La différence c'est qu'en Libye nous avons agi dans le cadre de la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, et nous avons obtenu une majorité, sans veto, au Conseil de sécurité. La question est la suivante, mais il faudrait la poser à d'autres que moi : pourquoi n'y a-t-il pas de consensus aujourd'hui au Conseil de sécurité pour condamner la Syrie ? La réponse est très claire : la Russie et la Chine sont opposés à cette résolution.
Q - Vous avez déclaré récemment qu'Assad avait atteint le point de non retour ; vous avez dit que le processus de réforme en Syrie était mort, et que Bachar al Assad avait perdu toute légitimité pour diriger le pays. Qu'est-ce que cela signifie en pratique, point de non retour» ? Selon vous, que doit-il se passer maintenant dans vos relations avec la Syrie ?
R - Il n'y a pas deux poids deux mesures dans notre politique, mais il appartient à Assad de prouver sa capacité à mettre en uvre un véritable programme de réformes... Personnellement, je ne l'en crois pas capable, c'est pourquoi j'ai parlé de point de non retour.
Q - Alors pourquoi la France ne prend-elle pas l'initiative comme elle l'a fait en Libye et ne montre-t-elle pas l'exemple à Barak Obama et à d'autres en déclarant que, de son point de vue, Bachar al Assad doit partir, car il n'a plus de légitimité en Syrie ?
R - Pour la même raison qu'en Libye, et pour moi il est très clair que nous n'acceptons pas les dirigeants de pays qui répriment violemment les manifestations de la population, en utilisant des armes lourdes, des chars, des bombes et des avions contre la population civile. Nous avons exactement la même ligne de conduite sur ces deux points, c'est pourquoi j'ai déclaré cela à propos de Bachar al Assad. C'est pourquoi la France a obtenu une résolution, une liste de sanctions de l'Union européenne qui cite le nom de Bachar al Assad.
Q - Il est intéressant de noter qu'au début de notre conversation vous avez déclaré, à propos des Printemps arabes, qu'il y avait eu un changement fondamental. Maintenant, il n'est plus question de Realpolitik et de pragmatisme, notre politique doit être fondée sur des principes, des principes fondamentaux et humanitaires.
R - Des principes non pas humanitaires mais démocratiques. Bien sûr nous devons aider les populations confrontées à une situation humanitaire grave. Mais nos principes sont ceux de la démocratie, du respect de l'aspiration des populations à la liberté et à l'égalité entre hommes et femmes ; pour nous cela ne se discute pas.
Q - Bien, et comment cela cadre-t-il avec votre déclaration du 12 mai dernier, je vous cite : « nos relations avec l'Arabie saoudite sont bonnes à tous les niveaux »?
R - À ma connaissance, le gouvernement saoudien n'utilise pas actuellement des bombes, des chars et des avions contre sa population.
Q - Je suis sûr que vous savez mieux que moi que, premièrement, puisque vous avez mentionné l'égalité entre hommes et femmes, les Saoudiens ont arrêté des femmes qui ont tenté de manifester pour la liberté et leur liberté de conduire une voiture, vous le savez certainement, et vous savez également que des chars saoudiens se trouvent actuellement au Bahreïn et participent à la répression des mouvements là-bas ?
R - Nous avons appelé les autorités du Bahreïn à mettre en uvre un programme de réformes, et, exactement de la même manière, nous avons appelé les autorités d'autres pays à le faire.
Q - Des chars saoudiens se trouvent au Bahreïn et pourtant vous avez déclaré que les relations avec les Saoudiens étaient bonnes à tous égards. Je trouve juste cela surprenant, considérant que vous avez indiqué que la Realpolitik était terminée.
R - Je le répète, nous avons appelé les autorités du Bahreïn à mettre en uvre un programme de réformes et à dialoguer avec la population.
Q - Avez-vous dit aux Saoudiens de reprendre leurs chars ?
R - Nous avons dit aux autorités saoudiennes qu'elles devaient également réfléchir à des réformes de la société saoudienne, dans le respect de son identité.
Q - Je souhaiterais vous interroger sur l'Afghanistan. Il y a eu une certaine irritation à Washington, concernant la contribution européenne. Je souhaiterais savoir quelles sont les intentions de la France au sujet de sa contribution militaire, il est vrai limitée, de 4.000 hommes environ. Vont-ils bientôt rentrer ?
R - Je pense que le président français l'indiquera après l'annonce faite par le président Obama. Je crois que nous adopterons la même attitude que les Américains.
Q - Si je puis me permettre, vous n'avez que 4.000 hommes sur place, pas 115.000
R Notre retrait progressif se déroulera dans les mêmes proportions, selon le même calendrier et au même rythme bien évidemment.
Q - Quelques questions rapides avant que nous en terminions. La première concerne Christine Lagarde.
R - Oui, c'est une femme très intelligente, très compétente.
Q - Oui, elle est compétente, et semble convaincue qu'elle obtiendra la direction.
R - Elle a de bonnes raisons d'être confiante.
Q - Est-il important, à votre avis, que la France, l'Europe conservent la direction du FMI ?
R - Aujourd'hui, l'Europe est la zone dans laquelle le FMI intervient le plus
Q - En raison d'une mauvaise gestion de l'économie.
R - Nous avons évoqué ce point au début de cet entretien.
Q - Oui nous avons évoqué ce point au début, et vous avez déclaré qu'il y avait une mauvaise gestion.
R - C'est une réalité. Nous n'allons pas reprendre notre conversation précédente sur ce point. Le rôle du FMI en Europe est très important aujourd'hui. Il ne s'agit plus de l'Argentine, du Mexique ou de l'Asie du Sud-Est, il s'agit de l'Europe. Je crois qu'il serait logique que le directeur général soit européen.
Q - Mais bien sûr, de nombreux pays, et non des moindres comme la Chine, ainsi que plusieurs économies émergentes puissantes, à vrai dire déjà émergées, ne partagent pas du tout cet avis, et pense que cela n'a plus de sens. Depuis sa création, le FMI a déjà eu quatre directeurs français.
R - Je ne pense pas que cela n'a pas de sens, pas aujourd'hui. Nous devons changer cela de manière progressive
( ).source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 juin 2011
R - Vous avez raison, la situation en Europe est difficile en ce moment, en particulier la situation économique et financière. Les effets de la crise ont été très graves pour certaines économies européennes, certains de nos partenaires de l'Union européenne ont commis des erreurs, et doivent maintenant en payer le prix. Mais les États membres sont fermement déterminés à sauver tout ce travail que nous avons accompli tous ensemble depuis cinquante ans. C'est pourquoi une décision appropriée sera prise pour renforcer la zone euro et l'Union européenne dans son ensemble.
Q - Mais pensez-vous que cela soit si grave que cela, et que ce qui a été accompli, comme vous le dites, depuis plus de cinquante ans soit en jeu actuellement ?
R - Non, je ne le crois pas car nous n'avons pas le choix. Si la zone euro disparaissait, l'Union européenne elle-même serait en danger et nous ne pouvons laisser cela se produire, car il n'y aurait pas d'avenir pour nos pays dans un monde globalisé en l'absence de progression de l'Union européenne.
Q - Mais acceptez-vous, soyons précis, admettez-vous le fait que la Grèce finira par être en défaut de paiement pour ses dettes ?
R - Non. Non, la Grèce ne sera pas en défaut de paiement, et nous prendrons la décision qui s'impose pour l'éviter. Les ministres des Finances de l'Union européenne sont très clairs sur ce point.
Q - Oui, les ministres sont clairs, mais ce sont des hommes politiques. Si l'on observe le marché obligataire et les agences de notation, honnêtement, le message qu'ils envoient c'est que tôt ou tard, quelles que soient les mesures d'urgence adoptées par les dirigeants européens pour résoudre le problème, la Grèce finira par être contrainte de se déclarer en défaut de paiement.
R - Je ne le crois pas. Le message de l'UE est très clair : nous ne laisserons pas la crise grecque en arriver là. Je pense que nous disposons des moyens pour empêcher un tel scénario.
Q - Jack Straw, que vous connaissez certainement et qui a été ministre des Affaires étrangères britannique sous Tony Blair, a déclaré il y a peu que l'euro sous sa forme actuelle allait s'effondrer et qu'il vaudrait mieux que cela arrive rapidement plutôt que d'assister à une lente agonie.
R - Cela a déjà été annoncé, il y a bien longtemps, par de nombreuses personnes et l'euro est toujours là.
Q - Mais un euro bien malade à l'heure actuelle !
R - Non, je ne crois pas
Q - Vous ne pensez pas que la zone euro est en bien mauvaise santé ?
R Non. La zone euro rencontre des difficultés, auxquelles nous faisons face, mais je ne crois pas qu'il y ait un risque d'effondrement. Je sais que de nombreux spéculateurs aimeraient que cela se produise, mais nous ne le permettrons pas car l'euro est absolument crucial pour l'avenir de nos pays.
Q - Je souhaiterais vous interroger sur les ressorts politiques de la situation. N'est-il pas exact que c'est en réalité l'Allemagne qui est aux commandes et dicte les événements actuellement s'agissant de...
R - Non, pas du tout. Je crois plutôt qu'on pourrait dire que le président français a une capacité d'initiative qui répond aux préoccupations allemandes.
Q - Pensez-vous que cette crise aboutira, au minimum, à la naissance d'une zone euro à deux vitesses : d'une part un noyau dur de pays qui auraient un niveau d'intégration bien plus élevé, appelons-le le groupe euro-mark, et d'autre part des pays périphériques incapables de réaliser la même convergence et de respecter la même discipline financière ?
R - Non. Pas dans la zone euro. Bien évidemment. Il est impossible d'avoir deux zones euros avec une monnaie unique. Mais vous avez raison, si l'on considère la situation d'un autre point de vue, je crois que l'avenir de la zone euro est une sorte - j'ose le mot - de fédéralisme. Il ne peut y avoir de monnaie unique sans un budget, une politique budgétaire et financière intégrée. Je crois donc que la bonne réponse à la crise n'est pas l'effondrement de l'Union européenne mais, au contraire, une intégration renforcée entre ses membres.
Je crois que vous serez surpris. Je n'ignore pas que l'Europe suscite un fort scepticisme, cela n'est pas nouveau, c'est le cas depuis la création de l'Union européenne. Nous n'avons pas le choix. Imaginez un instant ce qui arriverait à la Grèce si le drachme venait à remplacer l'euro ; la dette grecque demeurerait, les remboursements seraient en euros, et donc la dette serait multipliée par deux ou trois si le nouveau drachme s'effondrait. Il est donc impossible d'envisager un tel scénario, et c'est pourquoi nous trouverons un moyen d'aider la Grèce à surmonter la crise actuelle.
Q - Lorsque vous entendez le Premier ministre britannique David Cameron déclarer devant le parlement que le Royaume-Uni ne donnera pas un penny de plus pour un plan de sauvetage de la Grèce ou toute autre économie en difficulté de la zone euro, pensez-vous qu'il partage ce raisonnement ?
R - Je pense que même pour les pays extérieurs à la zone euro, c'est une question de solidarité ; vers quelle zone économique, vers quels pays va la majeure partie des exportations britanniques ? Vers l'Union européenne. Il n'est donc pas dans l'intérêt du Royaume-Uni de voir la zone euro et l'Union européenne en général s'effondrer. C'est pourquoi je suis convaincu que nous trouverons un terrain d'entente entre nous, notamment pour l'avenir financier de l'Union européenne.
Q - Pensez-vous que le Royaume-Uni raisonne à courte vue ?
R - Je n'ai pas dit cela. Je ne souhaite pas critiquer un ami.
Q - Tournons-nous à présent vers l'horizon plus large que vous, en tant que ministre français des Affaires étrangères, devez contempler en permanence. Les Printemps arabes, il me semble, ont contraint les décideurs ici, à Paris, à revoir en profondeur leur manière de faire de la politique étrangère. Est-ce exact ?
R - Tout à fait. Tout le monde a été pris de court par les Printemps arabes. Personne n'avait anticipé ce qui s'est passé en Tunisie, puis en Égypte et dans d'autres pays. Pourquoi ? Parce que, pendant longtemps, notre priorité était la stabilité de ces pays. Cet objectif de stabilité nous avait conduits à accepter des régimes tyranniques et des violations de la démocratie et des droits de l'Homme. Nous avons accepté cela car nous étions convaincus que cela constituait une sorte de rempart contre l'extrémisme et le fondamentalisme.
Q - C'était un renoncement conscient à des principes ?
R - Oui, tout à fait. C'est ce que nous appelons habituellement la «Realpolitik». Nous pensions à l'époque que les avantages de cette politique étrangère étaient plus importants que le respect de nos principes.
Q - Et la France, si je puis me permettre, a appliqué cette Realpolitik jusqu'à l'extrême. Je pense à votre prédécesseur immédiat à votre poste qui a proposé à Ben Ali de l'aider à réprimer les manifestations
R - Non, pas plus que d'autres. Je ne suis pas sûr que le Royaume-Uni ou les États-Unis aient davantage anticipé ce qui s'est passé dans les pays arabes. Moubarak était à Washington quelques semaines avant les événements au Caire. Personne ne l'avait prévu, je le répète. Aujourd'hui nous devons changer le cours de notre politique, c'est parfaitement exact. Nous devons donner la priorité à nos principes, à la démocratie, à la liberté, aux réformes, au changement de gouvernance dans ces pays. C'est ce que nous faisons avec la Tunisie, l'Égypte, la Syrie, avec bien sûr des résultats divers.
Q - Nous allons parler de certains de ces pays, mais je voudrais que nous abordions le sujet de la Libye. On peut affirmer sans se tromper que les Français, et en particulier le président Sarkozy, ont été à l'avant-garde de la prise de décision concernant la Libye : pour plaider en faveur d'une résolution des Nations unies, pour lancer l'intervention militaire, pour reconnaître le Conseil national de transition. Tout cela a été accompli dans l'enthousiasme ici, à Paris. Mais tout ne se déroule pas comme vous l'aviez prévu, n'est-ce pas ?
Le 12 mai, vous avez vous-même déclaré au journal Al-Hayat, que cette intervention militaire était une affaire de semaines et non de mois.
R - C'était il y a trois mois. Je crois que cette déclaration ne durera pas de nombreux mois de plus.
Q - Combien de temps durera-t-elle ?
R - Je ne souhaite pas indiquer un chiffre précis bien sûr.
Q - Vous l'aviez fait à l'époque, et manifestement vous
R - C'est une question de mois, peut-être pas de semaines, j'en conviens, mais cela ne durera bien évidemment pas des années. Je souhaite juste rappeler pourquoi nous sommes intervenus en Libye il y a trois mois. Kadhafi avait annoncé une intervention contre la population de Benghazi et déclaré qu'il tuerait tous ses opposants, des personnes qui manifestaient pour la liberté et la démocratie. Ses troupes étaient en route vers Benghazi, nous le savions. Si la communauté internationale avait été totalement inefficace, cela aurait été un massacre à Benghazi. Je pense donc que la résolution 1973 était juste et que notre intervention est positive. Aujourd'hui, dans le respect total de la résolution du Conseil de sécurité, nous protégeons la population civile contre l'utilisation d'armes lourdes par Kadhafi.
Q - Le problème c'est que certains de vos partenaires dans cette entreprise ne sont plus d'accord avec vous. Je pense pour commencer à la Ligue arabe. Il avait été claironné qu'il était capital que les Arabes soutiennent à la fois la résolution des Nations unies et l'intervention militaire. Or Amr Moussa a déclaré hier qu'il souhaitait un cessez-le-feu immédiat avec Kadhafi toujours au pouvoir, suivi de négociations sur l'avenir politique de la Libye probablement avec le régime Kadhafi ?
R - La semaine dernière, le Groupe de contact, dont la Ligue arabe est membre, s'est réuni à Abou Dhabi et nous nous sommes tous mis d'accord pour affirmer que nous devions maintenir notre pression militaire. Tout le monde recherche bien sûr une solution politique à cette crise ; nous ne souhaitons pas poursuivre trop longtemps cette intervention militaire. Nous pensons qu'à l'heure actuelle il convient d'exercer une pression sur le régime afin de convaincre Kadhafi de se retirer ; mais l'intervention militaire ne durera pas éternellement et nous menons des discussions avec de nombreux interlocuteurs pour trouver une issue politique.
Q - Cependant, Monsieur le Ministre, le problème c'est que les Américains au moins évoquent une impasse sur le terrain. Le message que vous souhaitez faire passer aujourd'hui est-il toujours que l'action militaire ne cessera pas, ne peut pas cesser, en ce qui vous concerne, avant le départ de Kadhafi ?
R - L'action militaire progresse, la situation s'améliore à Misrata et à Djebel de Nefoussa, Tripoli est de plus en plus encerclée par les troupes du CNT. Nous allons donc poursuivre cette intervention militaire jusqu'à ce que notre objectif soit atteint ; et notre objectif est un cessez-le-feu véritable. Nous sommes favorables à un cessez-le-feu, mais un cessez-le feu qui gèle la situation des troupes sur le terrain.
Q - Mais, qu'en est-il de votre objectif, celui que vous avez déjà indiqué à ce micro, à savoir le départ de Kadhafi ?
R - Oui, bien évidemment
Q - Donc votre message aujourd'hui
R - Tout le monde partage ce point de vue. Les Américains sont d'accord, l'UE est unanime sur ce point, le Groupe de contact le dit également et de nombreux dirigeants africains, par exemple le président du Sénégal, sont exactement du même avis.
Q - Êtes-vous déçu que les Américains ne vous apportent pas un soutien militaire plus important ? Par exemple, ils disposent de l'avion anti-char A10 bien connu, mais ne l'ont pas déployé sur le terrain.
R - Nous comprenons, ils ont de nombreuses troupes en Afghanistan.
Q - Tout le monde est à la limite de ses possibilités, n'est-ce pas? La France est à la limite de ses possibilités, le Royaume-Uni est à la limite de ses possibilités
R - Non, non.
Q - Les responsables militaires britanniques affirment que si la situation se poursuit encore 90 jours de plus, leurs opérations militaires dans le monde seront affectées.
R - Certains militaires font ce type de déclaration, mais nous ne partageons pas leur avis ; nous disposons des moyens de maintenir notre intervention en Libye aussi longtemps que nécessaire. Je le répète, c'est une question de semaines, ou d'un ou deux mois, pas plus. Les mêmes personnes qui critiquent notre intervention en Libye nous demandent pourquoi nous n'intervenons pas en Syrie. La réponse est très claire. Tout d'abord, la situation est complètement différente, nous n'avons aucune intention d'intervenir en Syrie ; deuxièmement
Q - Pardon, mais si vous vivez à Jisr Al-Shigour et que vous avez vu votre famille se faire tuer et avez dû fuir vers la Turquie, et que vous savez que plus de mille civils syriens, sans arme, qui ont eu l'audace de manifester dans les rues ont été tués - en quoi la situation est-elle si différente ?
R - C'est différent de ce qui se serait passé à Benghazi. Je ne vais pas citer des chiffres de victimes bien sûr, mais il y a
Q - Êtes-vous bien le ministre qui a déclaré qu'un régime qui tire au canon contre sa population n'a plus de légitimité ?
R - Nous avons condamné cette situation ; mais il y a une autre différence que je souhaite souligner. La différence c'est qu'en Libye nous avons agi dans le cadre de la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, et nous avons obtenu une majorité, sans veto, au Conseil de sécurité. La question est la suivante, mais il faudrait la poser à d'autres que moi : pourquoi n'y a-t-il pas de consensus aujourd'hui au Conseil de sécurité pour condamner la Syrie ? La réponse est très claire : la Russie et la Chine sont opposés à cette résolution.
Q - Vous avez déclaré récemment qu'Assad avait atteint le point de non retour ; vous avez dit que le processus de réforme en Syrie était mort, et que Bachar al Assad avait perdu toute légitimité pour diriger le pays. Qu'est-ce que cela signifie en pratique, point de non retour» ? Selon vous, que doit-il se passer maintenant dans vos relations avec la Syrie ?
R - Il n'y a pas deux poids deux mesures dans notre politique, mais il appartient à Assad de prouver sa capacité à mettre en uvre un véritable programme de réformes... Personnellement, je ne l'en crois pas capable, c'est pourquoi j'ai parlé de point de non retour.
Q - Alors pourquoi la France ne prend-elle pas l'initiative comme elle l'a fait en Libye et ne montre-t-elle pas l'exemple à Barak Obama et à d'autres en déclarant que, de son point de vue, Bachar al Assad doit partir, car il n'a plus de légitimité en Syrie ?
R - Pour la même raison qu'en Libye, et pour moi il est très clair que nous n'acceptons pas les dirigeants de pays qui répriment violemment les manifestations de la population, en utilisant des armes lourdes, des chars, des bombes et des avions contre la population civile. Nous avons exactement la même ligne de conduite sur ces deux points, c'est pourquoi j'ai déclaré cela à propos de Bachar al Assad. C'est pourquoi la France a obtenu une résolution, une liste de sanctions de l'Union européenne qui cite le nom de Bachar al Assad.
Q - Il est intéressant de noter qu'au début de notre conversation vous avez déclaré, à propos des Printemps arabes, qu'il y avait eu un changement fondamental. Maintenant, il n'est plus question de Realpolitik et de pragmatisme, notre politique doit être fondée sur des principes, des principes fondamentaux et humanitaires.
R - Des principes non pas humanitaires mais démocratiques. Bien sûr nous devons aider les populations confrontées à une situation humanitaire grave. Mais nos principes sont ceux de la démocratie, du respect de l'aspiration des populations à la liberté et à l'égalité entre hommes et femmes ; pour nous cela ne se discute pas.
Q - Bien, et comment cela cadre-t-il avec votre déclaration du 12 mai dernier, je vous cite : « nos relations avec l'Arabie saoudite sont bonnes à tous les niveaux »?
R - À ma connaissance, le gouvernement saoudien n'utilise pas actuellement des bombes, des chars et des avions contre sa population.
Q - Je suis sûr que vous savez mieux que moi que, premièrement, puisque vous avez mentionné l'égalité entre hommes et femmes, les Saoudiens ont arrêté des femmes qui ont tenté de manifester pour la liberté et leur liberté de conduire une voiture, vous le savez certainement, et vous savez également que des chars saoudiens se trouvent actuellement au Bahreïn et participent à la répression des mouvements là-bas ?
R - Nous avons appelé les autorités du Bahreïn à mettre en uvre un programme de réformes, et, exactement de la même manière, nous avons appelé les autorités d'autres pays à le faire.
Q - Des chars saoudiens se trouvent au Bahreïn et pourtant vous avez déclaré que les relations avec les Saoudiens étaient bonnes à tous égards. Je trouve juste cela surprenant, considérant que vous avez indiqué que la Realpolitik était terminée.
R - Je le répète, nous avons appelé les autorités du Bahreïn à mettre en uvre un programme de réformes et à dialoguer avec la population.
Q - Avez-vous dit aux Saoudiens de reprendre leurs chars ?
R - Nous avons dit aux autorités saoudiennes qu'elles devaient également réfléchir à des réformes de la société saoudienne, dans le respect de son identité.
Q - Je souhaiterais vous interroger sur l'Afghanistan. Il y a eu une certaine irritation à Washington, concernant la contribution européenne. Je souhaiterais savoir quelles sont les intentions de la France au sujet de sa contribution militaire, il est vrai limitée, de 4.000 hommes environ. Vont-ils bientôt rentrer ?
R - Je pense que le président français l'indiquera après l'annonce faite par le président Obama. Je crois que nous adopterons la même attitude que les Américains.
Q - Si je puis me permettre, vous n'avez que 4.000 hommes sur place, pas 115.000
R Notre retrait progressif se déroulera dans les mêmes proportions, selon le même calendrier et au même rythme bien évidemment.
Q - Quelques questions rapides avant que nous en terminions. La première concerne Christine Lagarde.
R - Oui, c'est une femme très intelligente, très compétente.
Q - Oui, elle est compétente, et semble convaincue qu'elle obtiendra la direction.
R - Elle a de bonnes raisons d'être confiante.
Q - Est-il important, à votre avis, que la France, l'Europe conservent la direction du FMI ?
R - Aujourd'hui, l'Europe est la zone dans laquelle le FMI intervient le plus
Q - En raison d'une mauvaise gestion de l'économie.
R - Nous avons évoqué ce point au début de cet entretien.
Q - Oui nous avons évoqué ce point au début, et vous avez déclaré qu'il y avait une mauvaise gestion.
R - C'est une réalité. Nous n'allons pas reprendre notre conversation précédente sur ce point. Le rôle du FMI en Europe est très important aujourd'hui. Il ne s'agit plus de l'Argentine, du Mexique ou de l'Asie du Sud-Est, il s'agit de l'Europe. Je crois qu'il serait logique que le directeur général soit européen.
Q - Mais bien sûr, de nombreux pays, et non des moindres comme la Chine, ainsi que plusieurs économies émergentes puissantes, à vrai dire déjà émergées, ne partagent pas du tout cet avis, et pense que cela n'a plus de sens. Depuis sa création, le FMI a déjà eu quatre directeurs français.
R - Je ne pense pas que cela n'a pas de sens, pas aujourd'hui. Nous devons changer cela de manière progressive
( ).source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 29 juin 2011