Interview de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à RMC le 1er septembre 2011, sur la protection sociale et le contrôle de l'attribution des aides sociales et l'indemnisation du chômage.

Prononcé le 1er septembre 2011

Intervenant(s) : 

Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral


 
 
 
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ est notre invité ce matin. Bonjour.
 
LAURENT WAUQUIEZ Bonjour.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ, nous allons parler des étudiants, nous allons parler sociale puisque, ne l’oublions pas, vous avez été secrétaire d’État à l’emploi, on va parler emploi, Laurent WAUQUIEZ. Revenons rapidement sur les allégations contenues dans le livre dont on parle beaucoup en France depuis hier matin. Vous me disiez tout à l'heure avant l’émission : « Je suis choqué ».
 
LAURENT WAUQUIEZ Je trouve ça surréaliste parce que pour moi, il y a une triple faute éthique. D’abord une juge qui rapporte des propos qui datent d’un an, qu’on aurait donné à sa greffière par un témoin qui moins de vingt-quatre heures plus tard dément ce qui a été dit – il y a des procédures dans ce pays. Deuxièmement, un journaliste – vous êtes journaliste, vous êtes très attaché aux questions d’éthique – un journaliste qui avoue ne même pas avoir croisé ses sources. Et puis enfin des politiques, un problème d’éthique politique, qui reprennent tout ça comme si de rien n’était pendant vingt-quatre heures. Vous savez ce que ça me rappelle ? Ça me rappelle un des grands scandales dans l’histoire de la France, un peu comme l’affaire Dreyfus, qui était l’affaire Calas, où Voltaire a dit…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Voltaire, oui.
 
LAURENT WAUQUIEZ « Il y a des gens dans ce pays qui sont incroyables et qui arrivent à transformer des ouï-dire en quarts de preuve ». Eh bien c’est exactement ce à quoi on a assisté.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. J’ai une question toute simple à vous poser parce que nous nous sommes intéressés ce matin sur RMC aux déclarations de Bruno LE MAIRE qui est l’un des responsables du programme du candidat Nicolas SARKOZY. Alors Bruno LE MAIRE est très clair, il dit : « Il va falloir qu’en France on se pose toutes les questions autour de l’assistanat ». Est-ce qu’en France il y a trop d’assistanat ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Bien, vous le savez.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Quelle est votre position, dites-moi ? Vous, vous représentez la droite sociale, l’UMP sociale. Alors ?
 
LAURENT WAUQUIEZ J’ai été le premier à le dénoncer.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Trop d’assistanat en France ? Est-ce qu’il y a trop d’assistanat en France ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je considère qu’il y a trop d’assistanat en France ; pourquoi ? D’abord parce qu’il ne faut jamais oublier que nos systèmes de protection sociale sont financés par les classes moyennes et notamment les classes moyennes modestes. Si cet argent est mal utilisé, c’est l’argent public, c’est les ressources de nos compatriotes qu’on gaspille : c’est un problème de justice. La deuxième chose, c’est que j’ai toujours pensé qu’une bonne politique sociale, c’est une politique sociale qui accompagne les gens vers l’activité ; ce n’est pas une politique sociale qui se contente de verser un chèque chaque mois. Et ma conviction, c’est que dans la conception des politiques sociales françaises on est trop souvent uniquement dans le registre de : « Je verse un chèque chaque mois » et pas suffisamment dans le registre de : « J’accompagne et je mise tout de suite sur le retour sur l’activité ». Et je reste convaincu qu’une des propositions sur lesquelles on doit travailler, c’est de proposer à des gens qui sont en situation de non-emploi, qui perçoivent le RSA, de pouvoir avoir contre rémunération éventuellement, 5 heures tout de suite d’activité qui permette de se remettre sur le chemin de l’emploi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il n’y a pas que le RSA qui est en cause, Laurent WAUQUIEZ.
 
LAURENT WAUQUIEZ Bien sûr. C’est l’ensemble de nos politiques sociales.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN C’est l’ensemble : trop d’assistanat, il va falloir faire des coupes dans les aides sociales. Oui ou non ? Réduire les aides sociales ou pas ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce n’est pas ça seulement, ce n’est pas seulement.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Je vous pose la question : est-ce qu’il faudra réduire les aides sociales ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je vais vous répondre très clairement. Ma conception, ce n’est pas réduire les aides sociales : c’est mieux contrôler l’utilisation des aides sociales. En clair, ne pas se contenter de vous verser une bourse, ne pas se contenter de vous verser un RSA, ne pas se contenter de vous verser une prestation chômage mais faire un accompagnement qui fait en sorte que ça vous motive tout de suite, que cet argent serve à quelque chose. Je crois qu’on s’est trop enfermé depuis une trentaine d’années dans un système dans lequel on verse des allocations – on a du mal d’ailleurs à contrôler si le montant de toutes ces allocations cumulées est équitable ou non par rapport à celui qui travaille – et surtout on ne contrôle pas derrière le fait que ça permet aux gens de bouger, et c’est ça pour moi qui compte. Ce qui m’intéresse dans le social, ce n’est pas le chèque : c’est le retour à l’activité.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN On va entrer dans le détail. Ce sera l’axe – on est bien d’accord ? – l’axe majeur selon vous de la prochaine présidentielle ? le débat majeur de la prochaine présidentielle ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Pour moi, cette question du bon paramétrage de la protection sociale, de comment est-ce qu’on conçoit le social dans ce pays, comment est-ce qu’on évite que ce soit toujours les classes moyennes qui en fassent les frais et qui ont un peu l’impression d’être toujours là pour payer mais pas tellement être pris en compte, c’est pour moi le sujet majeur de l’élection présidentielle – c’est très clair – avec une question : comment on remet les classes moyennes au coeur de la société française ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors soyons concrets. L’allocation chômage, là aussi il y a débat et Bruno LE MAIRE a lancé le débat. Bruno LE MAIRE dénonce les indemnités chômage qu’il juge parfois trop généreuses, notamment celles des cadres. Vous avez été secrétaire d’État à l’emploi : est-ce que vous êtes d’accord avec lui ? Est-ce qu’en France les indemnités chômage sont parfois trop généreuses ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors c’est exactement la déclinaison de ma conviction.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc vous dites oui ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non. Le problème n’est pas le montant pour moi : le problème, c’est l’accompagnement.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous n’êtes pas d’accord avec Bruno LE MAIRE ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, on a des débats, c’est normal.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien sûr, mais c’est normal.
 
LAURENT WAUQUIEZ Qu’est-ce qui me choque, moi ? Ce qui me choque, ce n’est pas que quelqu'un perçoive une assurance chômage. Ce qui me choque, ce n’est pas que quelqu'un qui a perdu son emploi – ce n’est pas facile, j’ai des cas encore très récemment chez moi en Haute-Loire d’entreprises qui ferment, les gens qui perdent leur emploi, ce n’est pas évident – ce n’est pas ça qui me choque. Ce qui me choque, c’est que quelqu'un garde son allocation chômage, qu’on lui propose un travail, qu’il le refuse et qu’il utilise les deux ans par exemple d’allocation chômage en restant chez lui alors qu’il aurait pu avoir des opportunités de retrouver un emploi. Donc pour moi, la bataille ce n’est pas de commencer à faire des coupes dans le niveau des aides : c’est s’assurer que les gens ne profitent pas de ces aides alors que des offres d’emploi pourraient être sur la table.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN J’imagine que c’est déjà fait.
 
LAURENT WAUQUIEZ Pas suffisamment à mon avis, et ça c’est des points sur lesquels on doit avancer.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais vous étiez en charge de ce dossier. Donc on ne l’a pas fait suffisamment ?
 
LAURENT WAUQUIEZ On l’a lancé, on a les outils. Après, vous connaissez ça par coeur : la question ensuite, c’est la détermination à utiliser ces outils et je pense que surtout sur une période où on a quelques secteurs qui redémarrent – je pense à l’artisanat, je pense à des secteurs qui cherchent à embaucher, où on a quelques tensions – eh bien là-dessus c’est très important qu’on soit extrêmement vigilant.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce qu’il faut rendre les indemnités chômage dégressives ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Juste, pardonnez-moi, pour bien être au clair sur ce que je viens de dire. Le problème pour moi n’est pas le niveau de l’indemnisation ; le problème c’est les abus : quand vous avez quelqu'un qui perçoit ces indemnisations sans reprendre un emploi. C’est ça pour moi le problème. C’est la différence avec Bruno LE MAIRE.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. Les indemnités chômage doivent-elles être dégressives ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je ne suis pas convaincu que là encore ce soit la meilleure solution. Qu’est-ce qu’on voit dans les pays étrangers et notamment en Europe ? Vous prenez les Pays Bas, vous prenez la Suède, vous prenez le Danemark : pourquoi est-ce qu’ils y arrivent ? Parce qu’ils mettent tout de suite la pression sur la personne, mais de façon presque sur mesure. C'est-à-dire que l’interlocuteur, le demandeur d’emploi, a un conseiller qui le suit, qui dit : « Voilà, aujourd'hui vous vous êtes levé à 7 heures et demi ? Très bien. Demain vous le faites, vous venez me voir, vous me passez un coup de fil. Vous avez un rendez-vous avec telle entreprise : je veux avoir la certitude que vous avez bien eu ce rendez-vous ». Quelqu'un qui motive tout de suite et qui ne laisse pas le piège de l’inactivité se refermer : ça, c’est dans l’intérêt de tout le monde.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Autre chose : Frédéric LEFEBVRE, secrétaire d’État lui aussi, a déclaré qu’on pourrait faire baisser le chômage en France si on faisait moins d’enfants.
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, ce n’est pas ce qu’il a dit.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Enfin, c’est pratiquement ce qu’il a dit.
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, non, non, non ! Jean-Jacques BOURDIN…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ…
 
LAURENT WAUQUIEZ Qu’a dit Frédéric LEFEBVRE ? Frédéric LEFEBVRE a dit : « En France, on a une démographie… »
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il comparait la France à l’Allemagne.
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui. « On a une démographie qui augmente ». Mais il a raison ! En France, la population active augmente à peu près de 200 000. En Allemagne, elle baisse de 200 000. C’est évidemment plus facile de faire artificiellement baisser le chômage quand vous avez moins de gens sur le marché du travail que quand vous en avez plus, mais est-ce que c’est un problème ? Non, c’est une chance. C'est-à-dire que c’est une chance pour la France.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Dommage qu’il n’ait pas dit que c’était une chance, pardon Laurent WAUQUIEZ.
 
LAURENT WAUQUIEZ Moi je le dis.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous, vous le dites mais lui ne l’a pas dit, la différence avec vous.
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est une chance pour la France d’avoir une démographie. Ça veut dire qu’on a un pays jeune, un pays qui a de l’enthousiasme, un pays qui aura de la ressource et quand parfois on a une petite tendance…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN La démographie, ce n’est pas mauvais pour les chiffres du chômage.
 
LAURENT WAUQUIEZ Mais la démographie, c’est positif sur la durée pour la croissance, mais à court terme c’est plus difficile pour le chômage, oui.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, mais alors c’est bon d’avoir une démographie, une bonne démographie ? C’est bon ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Mais oui, c’est bon. Jean-Jacques, vous n’avez pas envie d’avoir un pays vieillissant ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non, mais pas du tout.
 
LAURENT WAUQUIEZ Vous avez envie d’avoir un pays où on a des enfants, on a des étudiants, où on construit notre avenir. La France est peut-être le seul pays en Europe à avoir ça : c’est positif.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. On va parler des mesures Fillon puisque vous représentez encore une fois la droite sociale à l’UMP, on va parler des hauts revenus, on va parler des efforts que chacun doit faire. On l’a compris : on doit faire des efforts sur le terrain social, mais aussi sur le terrain financier, le capital, les revenus, les très hauts revenus. On en parle, Laurent WAUQUIEZ est notre invité ce matin ; et puis on va parler des étudiants, évidemment, puisque vous avez en charge ce dossier-là.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ, quelques pistes avancées encore par Bruno LE MAIRE, en charge du programme de Nicolas SARKOZY en 2012. Allocations chômage réduites, on vient d’en parler, allocation dès le premier enfant, versement d’une allocation familiale dès le premier enfant. Oui, non ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ecoutez, je vais être très simple…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et très clair.
 
LAURENT WAUQUIEZ Il y a suffisamment de choses dans ce pays qui ne marchent pas, pour qu’on ne s’attaque pas à ce qui marche. La politique familiale, on l’a évoqué tout à l’heure, ça marche. Ça concerne toutes les familles, c’est des outils qui concernent notamment les familles des classes moyennes.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais pas d’allocation dès le premier enfant, vous n’y êtes pas favorable ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Bruno LE MAIRE dit, en contrepartie je soumettrai à impôt les allocations familiales de toutes les familles.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN C'est-à-dire que les familles paieraient des impôts sur leurs allocations familiales.
 
LAURENT WAUQUIEZ Et bien ça, moi je n’y suis pas favorable. Pourquoi ? Toujours la même conviction pour moi, les classes moyennes c’est un des rares outils qui est fait pour elles. Donc, de grâce, n’enlevons pas aux classes moyennes les quelques outils qui marchent.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. Les hauts revenus, taxation des revenus supérieurs à 500 000 euros, ça va venir en discussion la semaine prochaine à l’Assemblée nationale. Alors, je vois, par exemple, il y a de nombreuses voix à l’UMP qui disent il faut aller plus loin. Fabienne KELLER, sénateur UMP du Bas-Rhin qui dit…
 
LAURENT WAUQUIEZ Qui appartient à la droite sociale.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Voilà, c’est pour ça que je vous pose la question, qui dit il faudrait aller jusqu’à 200 000 euros. Oui, non ?
 
LAURENT WAUQUIEZ On va être simple. Un, d’abord, avec notre groupe des députés de la droite sociale, on avait dit qu’il fallait absolument dans le cadre de ce plan une contribution des plus hauts revenus, parce que la justice elle se construit en luttant contre l’assistanat, mais elle se construit aussi sur la question de l’éthique des plus hauts revenus dans ce pays. Donc on était favorable à cette contribution. Elle y est, c’est bien, moi je trouve que si dans le débat parlementaire on peut approfondir les choses, aller plus loin…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN C'est-à-dire qu’on pourrait aller jusqu’à 200 000 euros ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Et que les pistes qui sont avancées par Fabienne KELLER, en tout cas ça mérite un débat parlementaire. Et la droite sociale sera à ce rendez-vous.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous y êtes favorable ?
 
LAURENT WAUQUIEZ J’attends de voir le débat parlementaire, mais vous avez compris que ça m’intéresse.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non, non, mais vous y êtes favorable ? Pourquoi ne pas dire j’y suis favorable ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça m’intéresse, j’attends de voir les tenants et les aboutissants dessus.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous avez étudié le dossier quand même, non ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, mais…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous le connaissez, Laurent WAUQUIEZ. Ne me faites pas peur, vous le connaissez ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Evidemment que je le connais, puisqu’on est même intervenu dessus.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Je sais, c’est pour ça que je vous interroge.
 
LAURENT WAUQUIEZ Après, je suis membre du gouvernement, je m’occupe de l’enseignement supérieur, on va en dire aussi un petit mot. Il y a des propositions qui seront faites par la droite sociale, dans le débat parlementaire, on va les suivre.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais là vous êtes favorable… ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je trouve que c’est une proposition intéressante de la droite sociale.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Nouvelle tranche d’impôt sur les hauts revenus, c’est ce qu’elle propose aussi, vous y êtes favorable ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, ça je n’y suis pas favorable, pour une raison, c’est qu’on sait très bien comment ça tourne quand les politiques commencent à toucher aux outils d’impôt sur le revenu. C’est toute les Français qui ensuite trinquent. Donc trafiquer sur le niveau des impôts, je n’y suis pas favorable.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors aujourd’hui, est-ce que l’effort demandé – je vais être très bref – est-ce que l’effort demandé aux plus riches est suffisant ? Oui ou non ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je pense que c’est déjà très bien qu’on ait un effort qui est demandé aux plus riches…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais est-ce qu’il est suffisant ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Et que dans le cadre du débat parlementaire on doit se demander si on peut aller plus loin. C’est clair ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, il est suffisant ou pas ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Je pense qu’on peut aller plus loin.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Pourquoi ne pas dire il est insuffisant ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Parce que déjà je trouve très bien qu’on ait cette contribution, c’est un premier pas, c’est un pas important. Ensuite il y a des parlementaires qui disent on peut aller plus loin, et bien moi je dis ça mérite d’être regardé. Voilà.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Chacun comprendra. Laurent WAUQUIEZ, parlons du logement étudiant. 2,3 millions étudiants en France, la moitié des étudiants vivent avec moins de 400 euros par mois, donc beaucoup sont obligés de travailler, et beaucoup sont obligés de se loger dans des conditions bien difficiles, bien difficiles. A tel point qu’on leur propose quoi, on leur propose 8 mètres carré à 5 ou 600 euros dans certaines villes, et, qu’est-ce que je dis, 5, 600 euros, peut-être plus, 700, 800 euros…
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça peut aller jusqu’à 800 euros à Paris.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Il y a des pratiques, mais insupportables, que comptez-vous faire pour lutter contre cela, contre ces abus ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Les conditions d’études, l’amélioration des conditions d’études, du budget des étudiants et des familles, c’est ma priorité sur cette rentrée. Quand je dis ça, ce n’est pas des grandes paroles en l’air. On a commencé et il y a des actes qui sont sur la table. Qu’est-ce qu’on a fait ? Première chose, améliorer les bourses. Il y avait 9 mois de bourse, 10 mois d’études, on est passé, là maintenant, à 10 mois de bourse, c’est une question qui va beaucoup aider sur le budget des boursiers et des étudiants.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, premier mois de bourse versé quand ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Ce sera versé mi-septembre pour tous les dossiers qui sont complets, les étudiants c’est maintenant qu’ils doivent sortir l’argent…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN 15 septembre ?
 
LAURENT WAUQUIEZ 15 septembre pour les dossiers qui sont complets, on a des très bonnes équipes de CROUS, auxquelles je rends hommage, c’est les gens qui instruisent ces dossiers, ils sont très efficaces, on sera mi-septembre. Ce qui est quand même un record, parce que la décision je l’ai annoncée la semaine dernière, donc en moins de 3 semaines on l’aura appliquée sur le terrain, et je dis bien pour les dossiers complets, parce qu’un étudiant qui ne remplit pas son dossier on ne sait pas faire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Evidemment.
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça c’est la première chose. Mais ça ne suffit pas. Là encore, toujours la même conviction pour moi, il y a les familles dans lesquelles vous allez avoir deux personnes au SMIC, qui vont être au-dessus des seuils d’aide de bourse, ça fait partie des 3 étudiants sur 4 pour lesquels ce n’est pas forcément évident de boucler son budget, même si les parents ont un emploi, et pour lesquels financer les études, le logement c’est difficile. C’est pour ça que j’ai voulu m’attaquer au principal sujet de dépenses, le poste de logement, ce que vous avez dénoncé, pour les étudiants c’est la principale dépense, avec une mesure de bon sens. Qu’est-ce qui se passe à la rentrée quand vous rentrez dans votre logement étudiant, on vous demande 1 mois de caution. Ce n’est pas accessoire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Un mois ou plus.
 
LAURENT WAUQUIEZ 400, 500, 600…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Un mois ou plus…
 
LAURENT WAUQUIEZ La règle législative, la loi, et je le dis bien pour que tout le monde le sache, un propriétaire n’a pas le droit de vous demander plus d’un mois.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, mais il y a beaucoup de propriétaires qui demandent beaucoup plus Laurent WAUQUIEZ.
 
LAURENT WAUQUIEZ Je vais y venir. On va enclencher des phases de contrôles aussi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN On va en parler.
 
LAURENT WAUQUIEZ Ça c’est le premier point. Le deuxième point c’est qu’on vous demande la caution de votre famille, on dit « moi je veux un chèque de quelqu’un qui s’engage, si jamais il y a un problème, à payer. » Toutes les familles n’ont pas les moyens de proposer cette caution. Et donc pendant l’été on a travaillé dessus, j’ai fait des déplacements sur le terrain, et on a trouvé un dispositif qui, à mon avis, est un très bon sujet de bon sens. Un fonds, alimenté par les banques, qui ont accepté de rentrer dedans, c’est bien, parce que c’est un signe, les banques on a beaucoup critiqué, je trouve bien aussi qu’elles soient…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qu’on a beaucoup aidé aussi.
 
LAURENT WAUQUIEZ Et qu’on a beaucoup aidées, et bien je trouve bien que sur ce sujet elles soient capables de montrer qu’elles vont aider les étudiants aussi. Et je les réunis cet après-midi à mon ministère, j’espère qu’on convaincra les principaux réseaux bancaires de s’engager. Ce fonds va servir à quoi, deux choses. Un, les étudiants n’auront plus à sortir le mois de garantie, c’est le fonds qui le sortira. On épargne sur la rentrée, dans le budget des étudiants, entre 500 et 800 euros de sortie de trésorerie, ce n’est pas rien pour les familles. Et deuxio, c’est nous qui produirons la caution. C'est-à-dire qu’il n’y aura plus besoin de demander à des familles de produire la caution pour le logement de leur enfant, c’est ce fonds qui le prendra en charge.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais alors ça c’est une expérience, on est bien d’accord ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Moi je n’aime pas lancer les choses en l’air, donc on va l’expérimenter sur deux académies, Lille et Lyon, 200 000 étudiants. Mais surtout ce qui m’intéresse, c’est que ça coûte combien ? 1 million d’euros. Avec 1 million d’euros de trésorerie, on arriver à aider 200 000 étudiants. Ça montre que si on est un peu malin…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN 2,3 millions étudiants, c’est ça ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Oui, mais là on commence sur Lille et Lyon, 200 000 étudiants…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc sur 2 millions ça fait 10 fois plus ! Ça va coûter 10 fois plus.
 
LAURENT WAUQUIEZ On va voir en fonction des résultats de l’expérimentation. JEAN-JACQUES BOURDIN Ça va coûter 100 millions d’euros.
 
LAURENT WAUQUIEZ Non, 10 millions.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN 10 millions, 1 milliard.
 
LAURENT WAUQUIEZ 10 millions d’euros.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, 10 millions d’euros dans un premier temps, mais 1 milliard au bout du compte.
 
LAURENT WAUQUIEZ Non.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN L’année prochaine.
 
LAURENT WAUQUIEZ Juste, qu’est-ce que ça montre, ça montre que quand on a un tout petit peu de bon sens, quand on va chercher des idées simples, on peut arriver à trouver des aides et des bons dispositifs. Ça c’est une question de bon sens, d’éviter à nos étudiants de sortir ce mois de garantie.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Parlons quand même de ces abus. Qu’est-ce que vous pouvez faire pour lutter contre ça ? Parce que les témoignages, vous les connaissez, vous les avez, je les reçois, les témoignages.
 
LAURENT WAUQUIEZ Je suis allé à Lille, où j’ai eu des témoignages là-dessus, témoignages de logements insalubres, témoignages de surloyers pour des mini surfaces.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais ça fait des mois et des mois que j’entends ça ! Que faites-vous, avec Benoist APPARU ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Qu’est-ce qu’on va faire. D’abord, première chose, campagne de contrôles. Il y a des règles dans ce pays, vous ne pouvez pas mettre n’importe quel loyer, il y a des règles sur la salubrité, j’ai demandé à la DGCCRF, en lien avec Frédéric LEFEBVRE et avec les équipes de Bercy, de pouvoir aller contrôler sur les pratiques qui sont malsaines. Deuxième chose, je veux donner une plus-value aux propriétaires qui jouent le jeu, et mettre à l’index ceux qui ne jouent pas le jeu. Ça veut dire quoi ? Par exemple à Lille on fait une base de données pour tous les propriétaires qui respectent les règles, des logements bien insonorisés, des logements sur lesquels les dépenses d’énergie sont raisonnables, des logements avec des loyers qui sont raisonnables, eux on les aide. On met leurs logements sur les bases de données, ces logements sont loués tout de suite, donc ils ont une plus value. Et à l’inverse, ceux qui sont des propriétaires indélicats, on va les mettre sur des listes rouges, et eux ne seront pas aidés. Par exemple le dispositif de caution, qui est quand même une garantie pour un propriétaire, ça veut dire qu’il est sûr d’être remboursé, on ne le fera que pour les propriétaires qui louent à des tarifs raisonnables aux étudiants. Et je pense qu’en faisant ça, on accompagne les propriétaires qui jouent le jeu, on met au pilori ceux qui ne jouent pas le jeu, on peut arriver à redresser les choses.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et bien nous verrons, nous verrons Laurent WAUQUIEZ. J’attends les témoignages.
 
LAURENT WAUQUIEZ On aura toujours des témoignages d’abus, mais ce qu’il faut c’est pas baisser les bras.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Laurent WAUQUIEZ, vous avez comme moi examiné toutes les mesures, vous avez participé à l’élaboration des mesures présentées par François FILLON la semaine dernière. Selon vous, quelle est la plus impopulaire ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Celle qui pour moi était la plus symbolique, et je ne suis pas sûr d’ailleurs que c’était la meilleure, et on doit pouvoir le corriger, c’est cette mesure quand même sur les parcs à thèmes.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Est-ce que vous croyez que la plus impopulaire ce n’est pas celle-là ?
 
LAURENT WAUQUIEZ On en a beaucoup parlé, parce qu’elle était très symbolique.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN De toute façon vous allez revenir dessus.
 
LAURENT WAUQUIEZ On va essayer en tout cas… François BAROIN a dit qu’il était ouvert dessus.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais quelle est la mesure la plus impopulaire ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Visiblement vous avez votre idée.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN J’ai mon idée parce que j’entends, j’ai mon idée parce que j’ai les auditeurs qui m’appellent, qui me disent. Vous savez ce que c’est la plus impopulaire ? C’est l’augmentation des mutuelles.
 
LAURENT WAUQUIEZ On m’en a beaucoup parlé chez moi en Haute-Loire, aussi.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN En Haute-Loire, je suis sûr qu’on vous en a beaucoup parlé. Et d’ailleurs, quand je suis étudiant, pour m’offrir une mutuelle, ce n’est pas facile, alors là si en plus ces mutuelles augmentent pour les étudiants, là il n’y a pas un petit geste à faire, il n’y a pas… non ? Les exempter, je ne sais pas, les aider encore un peu plus, je ne sais pas, non ?
 
LAURENT WAUQUIEZ Alors, sur les mutuelles étudiantes, on a un dispositif, qui est un dispositif d’aide, qui est un accompagnement aux étudiants pour se payer sa mutuelle étudiante. On a à peu près 9 étudiants sur 10, ce qui est pas mal, qui ont une mutuelle, mais il y a 1 étudiant sur 10 qui n’a pas mutuelle.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qui n’a pas de mutuelle, donc qui se soigne mal, qui ne se soigne pas.
 
LAURENT WAUQUIEZ Et qui sacrifie sa santé. Et donc, par ce biais-là, c’est une aide qu’on peut mobiliser, qui peut être actionnée au niveau des CROUS, elle n’est pas accessible à tout le monde, c’est vraiment sur les étudiants qui ont le plus de difficultés, mais voilà un exemple concret de ce que dans mon domaine on peut faire sur la santé.
 
EAN-JACQUES BOURDIN Oui, ce qu’on peut faire, mais on peut aller plus loin, non ? Je ne sais pas, la mutuelle on peut la rendre, je ne sais pas…
 
LAURENT WAUQUIEZ Déjà on peut commencer à bien le faire tourner, c’est la première chose, je ne suis pas sûr que tout le monde connaît l’existence de cette aide, je ne suis pas sûr qu’elle est bien utilisée, bien connue, ça fait partie d’éléments sur lesquels on peut avancer.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Un dernier chiffre. Un tiers des étudiants renonçait à une consultation en 2011.
 
LAURENT WAUQUIEZ C’est des chiffres de l’Observatoire de la vie étudiante, et pourquoi ? D’abord parce que sur les campus on ne parle pas assez de santé étudiante, ensuite parce que sur le travail de prévention je pense qu’on peut faire plus. La prévention, la santé étudiante, ce n’est pas des sujets qui doivent être la dernière roue du carrosse. J’ai peut-être, avec Xavier BERTRAND, bientôt des initiatives qu’on va prendre sur le sujet, on poursuit l’amélioration des conditions d’études.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Je suis content. Merci Laurent WAUQUIEZ d’être venu nous voir.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 1er septembre 2011