Texte intégral
Your Highness Shriji Arvind Singh Mewar of Udaipur,
Honorable Dr Karan Singh, Chairman of Indian Council for Cultural Relations,
Monsieur l’Ambassadeur,
Mesdames, Messieurs,
«Un poème épique résume un monde tout entier». Aujourd’hui, alors que nous sommes réunis pour célébrer l’édition du Ramayana par la maison Diane de Selliers, ces mots d’Alphonse de Lamartine (in Cours familier de littérature) résonnent d’un écho particulier.
Avec cet ouvrage, c’est en effet une nouvelle fenêtre qui s’ouvre sur la civilisation indienne, un nouveau ferment qui nous est offert pour nourrir la relation d’amitié et de confiance entre nos deux pays.
J’ai eu l’occasion de réaffirmer aujourd’hui auprès du Premier ministre, Manmohan Singh, et du ministre des Affaires étrangères, Somanahalli Mallaiah Krishna, l’importance que nous accordons à cette relation. Nos liens sont ceux qui unissent deux partenaires politiques, stratégiques, et économiques de premier plan. Ils sont ceux qui unissent deux peuples attachés aux mêmes valeurs : la démocratie, la liberté, la tolérance et le respect de la diversité. Mais nos liens sont aussi ceux de l’esprit et du coeur.
Ils sont le fruit de la rencontre de deux cultures antiques d’une très grande richesse, qui ont su préserver leur identité propre à travers les siècles pour l’affirmer avec confiance, dans un monde en proie à la tentation de l’uniformisation.
Cette rencontre, c’est celle d’Anquetil Duperron, pionnier de l’orientalisme, qui de son voyage dans l’Inde du XVIIIème siècle ramena la traduction des Upanishad - il est à l’origine de cette aspiration intellectuelle qui allait guider la France vers l’Asie et vers l’Inde au cours des trois siècles suivants et déboucher en 1898 sur la création de l’École française d’Extrême Orient.
Cette rencontre, c’est aussi celle des écrivains et poètes français, qui, du romantisme au symbolisme, d’Alphonse de Lamartine à Henri Michaux, ont jeté à travers leur oeuvre de nouveaux ponts entre nos deux cultures. Je ne saurais ici oublier André Malraux : à Elephanta, à Bénarès et à Ellora, au fil de ses conversations amicales et profondes avec le Pandit Nehru, il sut mieux que tout autre saisir l’essence de l’Inde et pressentir le rôle qu’elle était appelée à jouer dans le destin du monde.
Cette rencontre, c’est enfin celle de nos chercheurs. Au sein de l’École française d’Extrême Orient ou de l’Institut français de Pondichéry, les héritiers d’August Barth, d’Émile Senart et de Sylvain Levi portent avec les pandits et les érudits indiens un regard sans cesse renouvelé sur les textes fondateurs de votre civilisation. En progressant avec eux dans l’exégèse des grandes sources de l’hindouisme et des spiritualités indiennes, ils contribuent à la défense de l’indianisme et témoignent du respect de mon pays pour votre culture.
Aujourd’hui, la relation culturelle entre nos deux pays est plus vivante que jamais.
Elle est portée par nos centres culturels et par nos 16 alliances françaises, qui font rayonner la culture française dans l’Inde toute entière et accueillent un public de plus en plus nombreux, avide de mieux connaître la France et d’apprendre notre langue. Chez nous, en France, l’ouverture prochaine d’un centre culturel indien à Paris permettra de répondre aux aspirations de mes compatriotes, qui éprouvent également pour l’Inde un intérêt grandissant.
Elle est portée par les étudiants toujours plus nombreux qui participent à des échanges universitaires entre nos deux pays. Nous sommes déterminés à développer ces échanges, car ils contribuent à renforcer nos liens culturels et à préparer l’avenir de la relation franco-indienne.
Elle est portée par tous les acteurs de la vie culturelle française et indienne, qui se mobilisent pour faire de chacune des manifestations que nous organisons ensemble une réussite. Je pense aux festivals «Bonjour India» et «Namaste France», qui ont largement contribué à structurer les échanges entre nos professionnels et nos artistes. Nous devons poursuivre nos efforts en ce sens, en renouvelant et en modernisant notre accord d’échanges culturels, qui est arrivé à son terme en 2010.
Elle est portée enfin par nos deux peuples, qui éprouvent l’un pour l’autre une fascination réciproque et profonde. J’en veux pour preuve le récent succès des expositions «Art et culture à Lucknow» au Musée Guimet et «Paris, Delhi, Bombay» au Centre Pompidou. La présentation l’an prochain au Petit Palais des peintures de Rabindranath Tagore, surtout connu comme romancier, dramaturge, compositeur et prix Nobel de littérature, permettra de mieux faire connaître en France cette grande figure de l’art indien, qui aujourd’hui encore, inspire les artistes les plus modernes de votre pays.
C’est dans cet esprit de dialogue et d’échange que s’inscrit le remarquable travail dont nous voyons ce soir les fruits.
Chère Diane de Selliers,
En publiant pour la première fois l’intégralité de ce texte sacré qu’est le Ramayana, dans l’excellente traduction française du texte de Valmiki réalisée sous la direction de Madeleine Biardeau et Marie-Claude Porcher, vous nous invitez à un merveilleux voyage au coeur de la spiritualité indienne. Aujourd’hui encore, cette formidable épopée vieille de près de deux mille cinq cent ans est chantée sur les rives du Gange et récitée au cours des cérémonies religieuses qui rythment la vie du pays. Je sais d’ailleurs que ma visite intervient entre les fêtes de Dussehra et de Diwali, qui célèbrent deux épisodes majeurs de la geste de Rama.
Avec ce magnifique Ramayana, vous nous conviez également à la découverte de l’art indien, à travers près de 700 miniatures sélectionnées parmi plus de 5 000 oeuvres. Ce travail n’aurait pas été possible sans l’aide de vos nombreux amis indiens. Je pense à His Highness Maharaja Gaj Singh II of Jodhpur, qui vous a ouvert sa fabuleuse collection. Je pense aussi à His Highness Shriji Arvind Singh Mewar of Udaipur, que je salue, et au Dr. Karan Singh, qui préside l’Indian Council for Cultural Relations avec une hauteur de vues et un souci de protéger la tradition culturelle indienne auxquels je souhaite rendre hommage.
Avec cette publication, vous nous présentez enfin le compagnon de chaque instant qui guide la vie quotidienne de tous les Indiens. Des foyers au coin des rues, des spectacles de marionnettes aux théâtres de village, la geste de Rama est la référence qui dicte la conduite, la sagesse qui inspire les choix. Elle est l’un de ces socles de valeurs qui fondent la société indienne et donnent à votre civilisation un caractère unique et irremplaçable.
Mesdames, Messieurs,
«Tant qu’il y aura sur terre des montagnes et des rivières, l’histoire du Ramayana circulera dans les mondes», chante le poète au début de son épopée.
Chère Diane de Selliers, en faisant uvre de passeur entre nos deux mondes, vous rendez un magnifique hommage à la culture indienne. Vous mettez en lumière des convergences profondes entre nos peuples. Vous guidez vos lecteurs vers de nouvelles découvertes spirituelles et de nouveaux échanges entre l’Inde et la France.
Soyez-en remerciée.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 octobre 2011