Déclaration de M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, sur la maitrise des dépenses de santé et l'évolution de la consommation des soins médicaux, Paris le 14 septembre 2011.

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Circonstance : Audition par la Commission des comptes de la santé le 14 septembre 2011

Texte intégral


Je pense que nous en conviendrons tous ici, nous avons la chance d’avoir l’un des meilleurs systèmes de santé au monde, même s’il est bien sûr perfectible.
Ma mission, avec Nora Berra, est de poursuivre nos efforts pour que nous ayons toujours un système de santé de qualité, non seulement pour les prochains mois, mais aussi pour les dix ans qui viennent.
Voilà pourquoi la maîtrise des dépenses de santé et l’accès de tous les Français à des soins de qualité au meilleur coût sont deux priorités de mon ministère.
Les analyses présentées dans le rapport des comptes de la santé confirment que les efforts du Gouvernement pour tenir les dépenses de santé et limiter le reste à charge des ménages portent leurs fruits.
Comme je vais le détailler devant vous, nous sommes sur la bonne trajectoire, celle d’une évolution responsable des dépenses, qui protège également les patients.
1/ Premier point, l’évolution de la consommation de soins et de biens médicaux ralentit en 2010 pour la 3ème année consécutive.
La consommation de soins et de biens médicaux ralentit en 2010 pour la 3ème année consécutive et se stabilise à 9 % du PIB. C’est la traduction des efforts du Gouvernement pour améliorer la gouvernance de nos dépenses de santé.
Le signe le plus fort de cette meilleure gouvernance est le respect de l’ONDAM.
Pour la première fois depuis 1997, l’ONDAM a été respecté en 2010, avec un taux de progression en valeur de 3 % : c’est une évolution responsable et historiquement modérée. Je rappelle qu’au début des années 2000, le taux de progression de l’ONDAM oscillait entre 4 % et 7 %.
Nous n’avons pas atteint cet objectif par hasard : comme vous le savez, le Gouvernement a renforcé la qualité du suivi des dépenses de santé et rénové la gouvernance du pilotage de l’ONDAM.
D’abord, nous avons mis en oeuvre les recommandations formulées par le groupe de travail présidé par Raoul Briet.
Le comité de pilotage de l’ONDAM qui réunit l’ensemble des directeurs concernés, et que je préside avec le ministre des comptes publics, joue un rôle essentiel pour assurer le suivi de l’objectif, en lien avec groupe de suivistatistique.
En outre, la LFSS 2011 a renforcé le rôle du Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie.
Non seulement nous allons maintenir cet effort, mais nous allons le poursuivre : la progression de l’ONDAM sera contenue à 2,9 % en 2011, puis 2,8 % par an entre 2012 et 2014. Ces cibles sont d’autant plus ambitieuses que l’ONDAM est voté en valeur, c’est à dire que cette évolution ne tient pas compte de l’inflation.
On me dit parfois que ce n’est pas beaucoup : je préfère que l’on propose un ONDAM à 2,9 % ou à 2,8 %, plutôt que l’on soit un jour obligé d’imposer un ONDAM en diminution de 2,9 % ou de 2,8 %, tout simplement parce que je préfère avoir à faire des choix difficiles plutôt qu’avoir à faire un jour des choix catastrophiques et particulièrement douloureux pour la santé des Français.
Comme le montrent les indicateurs présentés dans votre rapport, le ralentissement des dépenses concerne aussi bien les soins hospitaliers que les soins de ville.
Concernant la maîtrise des dépenses hospitalières, l’encadrement des hausses de tarifs à l’hôpital permet de respecter l’ONDAM hospitalier dans le cadre de la progression dynamique en volume de l’activité.
Nos efforts portent leurs fruits. Je voudrais rappeler les mesures structurelles adoptées par le Gouvernement :
* les dispositions de la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires (HPST) ont modernisé la gouvernance de l’hôpital.
* l’offre de soins est désormais pilotée par les ARSde façon transversale. Cela permet de renforcer la cohérence territoriale entre les secteurs ambulatoire, hospitalier et médicosocial.
* les audits de performance menés dans les hôpitaux aident les établissements à améliorer leur pilotage interne.
* le plan hôpital 2012 prévoit des projets de restructuration hospitalière pour renforcer les gains d’efficacité du secteur.
Concernant les soins de ville à présent, la croissance de consommation de médicaments se stabilise.
Quand on compare en volume, les médicaments restent le principal contributeur de la croissance de la consommation de soins et de biens médicaux (+0,7 point), devant la consommation de soins hospitaliers (+0,6 point). La consommation de médicaments en France s’élève ainsi à 525 € par habitant, ce qui nous place au 4ème rang mondial.
Qui peut me dire, face à ces chiffres, que nous ne consommons pas trop de médicaments en France ?
Nous pouvons et nous devons encore réduire cette consommation : avant même l’enjeu financier, c’est une question de santé publique. Je pense que nous pouvons aller plus loin en agissant sur plusieurs leviers :
* D’abord, la politique de baisses de prix des médicaments : En 2011, les baisses de prix auront représenté 500 millions d’euros pour les produits de santé (médicaments et dispositifs médicaux). Nous allons continuer dans ce sens.
* Deuxième levier, le développement des génériques : ces derniers représentent 13 % du marché en France, mais entre 20 % et 24 % aux Pays-Bas, en Allemagne ou au Royaume-Uni. Les efforts que nous avons engagés depuis plusieurs années vont se poursuivre pour accroître le taux de pénétration des génériques.
* Troisième levier, la maîtrise médicalisée, parce que c’est en responsabilisant les prescripteurs que l’on arrive à changer les comportements. Et cela marche : chaque année, il y a 250 millions d’euros de prescriptions de médicaments en moins.
La généralisation de la rémunération à la performance de médecins va nous permettre de poursuivre les efforts de régulation de la prescription.
L’intégration dans la nouvelle Convention médicale d’objectifs de taux de prescription dans le répertoire générique va dans ce sens.
Le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, que je vais présenter prochainement au Parlement, prévoit également des avancées notables, telles que :
* l’obligation de certification des logiciels d’aide à la prescription, conformément au référentiel de la HAS ;
* l’obligation de prescrire en dénomination commune pour tous les médicaments ;
* une régulation accrue de la visite médicale.
Enfin, maîtriser les dépenses, c’est aussi maîtriser les dépenses abusives. La lutte contre les fraudes est une de mes priorités.
J’ai demandé à l’Assurance maladie de poursuivre ses efforts de contrôle envers les plus forts prescripteurs d’indemnités journalières. Les indemnités journalières ont représenté 12,5 Md€ en 2010 (+4,4 % en valeur, après +4,2 % en 2009).
Voilà pourquoi nous avons créé un dispositif qui fixe un objectif de réduction des prescriptions, dans la loi de financement de la sécurité sociale de l’an dernier.
2/ Voilà pour la maîtrise des dépenses. Deuxième point notable de votre rapport, le reste à charge des ménages diminue par rapport à 2009.
Les comptes de la santé montrent que pour la 2ème année consécutive, le reste à charge a baissé en 2010 : il est passé à 9,4 % de la consommation de soins et de biens médicaux, contre 9,6 % en 2009 et 9,7 % en 2008 : c’est une diminution qui confirme la tendance observée depuis 2008.
Nous sommes l’un des pays où le reste à charge des ménages est le plus limité : la France est en deuxième position, juste derrière les Pays-Bas, en termes de reste à charge pour les assurés.
Je voudrais aussi rappeler que la France est l’un des pays de l’OCDE où la prise en charge des dépenses de santé par les fonds publics est la plus importante : nous sommes en 9ème position, derrière les pays nordiques et le Japon. En 2010, comme le souligne le rapport des comptes de la santé, la part des fonds publics dans la consommation de soins et bien médicaux a représenté 77 %, soit plus des trois quarts.
Au fond, le rapport nous renvoie l’image d’un système de santé que le monde nous envie : maîtrise des dépenses, reste à charge qui est l’un des meilleurs au monde pour les patients, bonne prise en charge collective, voilà une photographie qui témoigne fidèlement de la qualité de notre système de santé.
La diminution du reste à charge des ménages et la part importante que représentent les fonds publics dans les dépenses de santé s’expliquent notamment par la progression du nombre d’affections longue durée (ALD). Je crois que c’est bien cela, un système solidaire : que l’assurance maladie obligatoire prenne en charge à 100 % les soins les plus graves et les plus coûteux pour garantir à tous les meilleurs soins thérapeutiques.
Pour contenir ces dépenses d’ALD, préserver la soutenabilité de notre système de soins, et dans l’intérêt des patients, nous avons pris plusieurs mesures :
* Nous avons créé dans la LFSS pour 2010 une exonération du suivi post ALD cancer : concrètement, avec ce nouveau dispositif, on incite les patients en voie de rémission complète à sortir du dispositif ALD. Cela permet notamment qu’ils ne soient plus pénalisés pour l’accès au crédit, au logement et à l’emploi.
* Deuxième exemple, nous avons recentré la prise en charge à 100 % des frais de transport pour les patients en ALD sur ceux qui ont besoin d’un transport médicalement encadré. Il est normal que l’Assurance malade se concentre sur les patients qui en ont le plus besoin : c’est envers eux que la solidarité doit s’exprimer pleinement.
S’agissant des dépassements d’honoraires qui préoccupent légitimement nombre de patients, conformément aux engagements pris en 2009 par l’assurance maladie et les représentants de médecins libéraux, je souhaite que le secteur optionnel soit mis en place dans les meilleurs délais. Il constituera un outil d’encadrement des dépassements.
Je sais les critiques qui sont faites à la mesure annoncée de hausse de la TSCA. Je rappelle que nous avions deux options : taxer les organismes de complémentaires santé ou relever le ticket Modérateur. J’assume pleinement le choix que nous avons fait car je n’ai pas souhaité diminuer les remboursements de l’assurance maladie, ce qui aurait entraîné une moindre prise en charge des assurés malades.
Soyons clairs, les mutuelles ne sont pas obligées de répercuter cette taxe sur les coûts. De plus, les assurés sont libres du choix de leur complémentaire. Et la santé financière des complémentaires santé est bonne.
Les complémentaires santé bénéficient des mesures du Gouvernement garantissant l’évolution responsable des dépenses de santé ainsi que de la prise en charge à 100 % des ALD par la sécurité sociale.
Par ailleurs, nous sommes attentifs aux plus modestes.
J’en ai bien conscience, le renoncement aux soins pour raisons financières est encore trop élevé : il représente 15,4 % de la population adulte. La CMU-C et l’ACS ont prouvé qu’elles étaient des réponses pertinentes. Ainsi, sans la CMU-C, qui offre une protection aux plus démunis, le refus de soins des bénéficiaires serait de 40 % au lieu de 22 %.
Je rappelle que 4, 3 millions de personnes bénéficient à ce jour de la CMU C : cela veut dire qu’ils bénéficient du tiers payant intégral, du remboursement à 100 % de leurs dépenses de soins, du forfait hospitalier sans limite et d’un « panier de soins » au sein duquel ils n’ont aucun reste à charge à assumer.
En outre, le Gouvernement, depuis le début du quinquennat, a renforcé l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé.
L’ACS a ainsi été doublée pour les personnes âgées de plus de 60 ans et pour les 16-25 ans. Le plafond de ressources a été progressivement relevé : le seuil, jusqu’ici situé à 26 % au-delà du plafond de la CMU complémentaire, est porté à +30 % au-delà de ce même plafond à partir de 2012.
Je peux d’ores et déjà vous dire que j’irai plus loin en PLFSS 2012.
Ainsi, comme le montrent les chiffres de la commission des comptés de la santé sur l’ensemble des indicateurs, nous progressons sur la maîtrise des dépenses de santé. En même temps, la prise en charge se maintient et le reste à charge reste modéré. C’est la preuve que nos efforts portent leurs fruits pour préserver notre système de santé et ses principes fondateurs, la responsabilité et la solidarité. Ces efforts, nous allons les poursuivre, en lien avec l’ensemble des acteurs de la santé.
Je vous remercie.
Source http://www.sante.gouv.fr, le 15 septembre 2011