Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, en réponse à une question sur les craintes exprimées à propos de la politique budgétaire du gouvernement, à l'Assemblée nationale le 25 octobre 2011.

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Circonstance : Question au gouvernement posée par M. Jean-Marc Ayrault, député (PS, président du groupe SRC) de Loire-Atlantique, à l'Assemblée nationale le 25 octobre 2011

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Président Ayrault,
Le cercle vicieux qui a conduit à la crise que nous connaissons et qui est à l’origine de la chute de la croissance dans le monde, c’est exactement le contraire de celui que vous venez d’évoquer. C’est l’endettement excessif des Etats qui a créé une situation où, aujourd’hui, le monde entier s’interroge sur la question de savoir si l’Union européenne est capable d’apporter une solution à la crise des dettes souveraines. Il n’y a aucune autre raison objective à la baisse de la croissance mondiale. Il n’y a pas de problèmes de demande, il n’y a pas de contractions des liquidités financières dans le monde. Il y a simplement une inquiétude, une crise de confiance sur la capacité de l’Union européenne à résoudre ces problèmes. Et donc il est inutile d’opposer une politique de soutien à la croissance et la solution des problèmes que rencontrent l’Union européenne et la zone euro.
C’est la raison pour laquelle pour le Gouvernement, pour le président de la République, la priorité absolue c’est de réussir le rendez-vous de mercredi. Nous avons dimanche dernier, obtenu plusieurs accords. Le premier sur un nouveau décaissement d’une tranche d’aide à la Grèce, ce qui permet au passage de montrer qu’après beaucoup d’hésitation, l’ensemble des pays européens ont désormais intégré l’idée qu’il n’est pas possible de laisser tomber la Grèce, que nous devons faire preuve de solidarité avec ce pays pour sauver la zone Euro et pour sauver soixante ans de construction européenne.
Nous avons ensuite obtenu un accord sur la recapitalisation des banques. Cette recapitalisation des banques se fera de manière ordonnée, sur l’ensemble des banques européennes qui en ont besoin et s’agissant de la France, je veux indiquer que cette recapitalisation devrait être de l’ordre d’une dizaine de milliards d’euros c’est-à-dire inférieure aux résultats de ces mêmes banques françaises ce qui signifie que les banques françaises doivent pouvoir se recapitaliser sans avoir besoin de demander l’aide des finances publiques.
Alors il reste maintenant trois points de discussion qui vont être à l’ordre du jour de la réunion de mercredi. Le premier, le plus important, c’est la question de savoir si nous sommes capables de mettre en place un Fonds européen de solidarité financière qui est suffisamment puissant pour stopper toute tentative de spéculation contre d’autres pays de la zone euro. Chacun sait que la France – comme vient de le dire François Baroin – appuyée par un grand nombre de pays a proposé de transformer ce FESF en une banque adossée à la BCE. C’est une situation, c’est une proposition française. Je veux d’ailleurs faire remarquer que depuis le début de cette crise toutes les propositions originales qui ont été faites ont été faites par la France. Et toutes les initiatives qui ont été prises ont été prises par la France. Et d’ailleurs c’est très simple, je mets tous les membres de cette Assemblée au défi de me citer un seul exemple d’une proposition originale pour faire face à cette crise, qui ne soit pas venue du gouvernement français, du président de la République et de notre pays.
Alors maintenant c’est vrai, il faut se mettre d’accord à vingt-sept ; il faut se mettre d’accord à dix-sept, c’est compliqué ; il faut obtenir des compromis avec nos voisins allemands et il n’y a rien d’anormal à cela. Et obtenir un compromis avec nos voisins allemands c’est une condition essentielle du succès. Je ne comprends pas cet acharnement d’un certain nombre de commentateurs et de responsables politiques à vouloir en permanence abaisser notre pays en négligeant les initiatives qu’il prend et le rôle qui est le sien dans la lutte contre cette crise. C’est la France depuis plusieurs années qui réclame la mise en place d’un gouvernement économique. L’Allemagne y était opposée, elle a décidé finalement de se ranger à cette solution. C’est la France qui a proposé que l’on donne un effet de levier au Fonds européen de solidarité financière. C’est la France qui a pris l’initiative de hâter plusieurs rendez-vous européens pour faire en sorte que nous soyons capables de résoudre cette crise.
Enfin, il y a un dernier sujet qui sera au cœur des discussions de mercredi, c’est le niveau de restructuration de la dette grecque. Là aussi, le progrès que nous avons obtenu c’est que personne n’envisage plus désormais de laisser tomber la Grèce. Nous sommes donc tous d’accord pour dire qu’il faut une restructuration qui ne se traduise pas par ce qu’on appelle pudiquement un évènement de crédit. Et c’est la raison pour laquelle se déroule depuis dimanche soir une négociation entre les créanciers privés de la Grèce et un certain nombre d’institutions et le gouvernement français pour fixer le niveau de cette restructuration. J’entends sur les bancs de la gauche tous ceux qui m’expliquent qu’on aurait pu faire plus vite ; c’est très intéressant. La seule chose qu’ils oublient c’est qu’on est dix-sept, qu’il faut mettre dix-sept partenaires autour de la table et qu’il ne suffit pas d’une pétition de principe pour y parvenir.
Alors Mesdames et Messieurs les Députés si nous parvenons à un accord mercredi alors le président de la République pourra enclencher une séquence très importante pour la croissance mondiale, avec la réunion du G.20. Et cette réunion du G.20 elle sera, du fait de la situation internationale, axée autour de deux grandes priorités : la première c’est une coordination des politiques économiques des grandes puissances pour faire en sorte que celles qui ont accumulé beaucoup de réserves dépensent un peu plus sur leur marché intérieur, et que celles qui ont accumulé beaucoup de dettes, se désendettent. Et je voudrais en terminer par-là en vous disant Monsieur Ayrault, que la solution à la crise économique, à la crise financière que nous rencontrons, elle ne peut en aucun cas être dans un surcroît de dépenses publiques et cela impose au Parti socialiste de réviser complètement son programme.
Source http://www.gouvernement.fr, le 26 octobre 2011