Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs les Vice-présidents,
Mesdames et Messieurs les membres de lAssemblée des Français de létranger,
Monsieur le Directeur des Français à létranger et de ladministration consulaire,
Mesdames et Messieurs,
Merci dabord de votre invitation à mexprimer devant vous aujourdhui. Cest une marque dintérêt que japprécie. Il est naturel que le Secrétaire dEtat chargé des Français de létranger entretienne le dialogue avec lAssemblée des Français de létranger.
I. Lorsque je me suis adressé à vous en septembre dernier, je vous ai annoncé les grands axes de mon action. Je vous ai dit ce que je ferai ; jai fait ce que jai dit.
A. En premier lieu, je vous ai annoncé que jirai à la rencontre des Français.
Depuis ma nomination jai beaucoup voyagé. Je ne vois pas comment jaurais pu faire autrement pour rencontrer nos compatriotes là où ils vivent, pour entendre de vive voix leurs préoccupations au plus près des réalités.
Chaque fois que jen ai eu loccasion, jai visité létablissement denseignement français pour en souligner lexcellence, évoquer les perspectives de développement avec ses responsables et avec les autorités locales, dialoguer avec les élèves et leurs familles sur le soutien que leur apporte lEtat et mentretenir des difficultés du moment avec la communauté éducative. Cest, par exemple, ce que jai fait au lycée René Cassin à Oslo, au Collège et lycée Voltaire à Berlin, à lécole française de Manille, au lycée français de Madrid, au lycée Rochambeau à Washington ou au lycée Jules Supervielle de Montevideo. Dans cet ordre didée, jai visité des charter schools à New York et à la Nouvelle-Orléans, forme de partenariat dont on pourrait sinspirer pour développer lenseignement français à létranger dans lesprit de la labellisation Francéducation.
Jai aussi voulu aller à la rencontre dentrepreneurs et de décideurs économiques avec qui, sans restriction ni tabou, jai dressé le tableau local de nos forces, de nos chances et de nos atouts mais aussi de nos faiblesses, de nos handicaps et de nos défauts en matière de compétitivité. A Wuhan, je suis allé me rendre compte des conditions dinstallation et de vie de nos compatriotes venus créer une chaîne de montage automobile au centre de la Chine. Jai aussi pris la mesure dopérations plus modestes comme cette boulangerie franchisée ouverte par de jeunes entrepreneurs à Georgetown.
Je me suis adressé aux élèves de lESSEC à Singapour, pépinière de responsables économiques. Aujourdhui, camarades de promotion assis sur les mêmes bancs, ces garçons et ces filles seront demain, des partenaires sans doute, des associés sûrement, des concurrents peut-être. Mais ayant en commun davoir été formés à lécole française des affaires, quel que soit le contexte, ils se comprendront.
Partout jai rencontré des Français dynamiques, entreprenants, courageux et créatifs dont on peut être fiers.
Comme on peut être fiers des représentants des ONG qui, à Haïti, portent haut les couleurs de la solidarité de la France avec les peuples déshérités.
Comme on peut être fiers de nos associations qui se dévouent pour nos compatriotes dans le besoin. Je lai par exemple constaté lorsque jai visité la maison de retraite à Santiago-du-Chili qui adoucit les vieux jours de nos compatriotes.
B. Je vous ai dit ensuite que je souhaitais travailler avec les élus
Je voudrais à cet égard souligner la qualité de mon dialogue avec les élus de lAssemblée des Français de létranger à chacune de mes étapes. Jen témoigne : les relations ont toujours été des plus cordiales dans le plus parfait esprit républicain. Les échanges ont toujours été très constructifs car évoquer sur place les problèmes locaux apporte une plus value incontestable à leur compréhension.
Je lai fait également, le 10 novembre, dans le contexte parlementaire lors dune audition par la commission des affaires étrangères et des forces armées du Sénat. Les débats ont été riches et denses sur les thèmes de la sécurité, de la protection sociale ou de lenseignement. Sujets dont je voudrais vous faire remarquer au passage quils figurent expressément dans mon décret dattributions. Cest une innovation importante sur laquelle je veux mettre laccent.
II. Jai beaucoup apprécié ce contact de terrain. Je tire de lexpérience acquise, plusieurs enseignements, idées ou réflexions dont je voudrais maintenant vous faire part :
1. Dabord, il me paraît nécessaire davoir une approche globale de la situation des Français de létranger : ce nest pas la simple transposition de celle des Français de métropole ou doutremer. Les différentes mesures utiles, intelligentes et pertinentes, prises en leur faveur, ces dernières années, doivent désormais être resituées dans un ensemble cohérent avec des perspectives à moyen et long terme : quelle politique voulons-nous pour les Français de létranger ? Quelle place doivent-ils avoir sur notre échiquier national ?
2. Loin de les atténuer, de les aplanir ou de les ignorer, cette vision globale doit prendre en compte les particularismes géographiques ou sociologiques. Cest le sens des tables rondes géographiques qui ont été inaugurées lors de la session de septembre. Elles me semblent nécessaires. Il faut, de mon point de vue, les maintenir, les enrichir et bien les préparer afin quelles permettent de cerner des problématiques dans toute la variété de leurs aspects, de les examiner de façon approfondie afin desquisser des solutions.
Je vous propose de prolonger cette vision des choses en dressant un panorama des conditions de vie dans chaque région du monde, en commençant par lEurope, pour rester cohérent avec la première table ronde. Menée et coordonnée par la Commission de lUnion européenne avec lapport de tous les élus de la zone, cette étude ferait émerger des problématiques et des propositions de solutions par pays et de façon synthétique pour lensemble du continent. Un premier rapport détape pourrait être présenté lors de la prochaine session.
3. Je suis convaincu que les Français de létranger sont une vraie richesse pour la France. Il est facile de dire quils sont aux avant-postes de la mondialisation, quils comprennent, ou mieux encore, quils ressentent physiquement et instinctivement, les pulsations de ce monde avec toutes les forces qui le parcourent. Cest facile, oui, mais cest la vérité.
Ils ne sont ni des inclassables partis courir laventure ou des originaux en mal dexotisme. Vous le savez bien. Cette image na rien à voir avec la vérité. Pourtant, elle persiste dans lesprit de beaucoup. Cest pourquoi il nous faut aider les Français de létranger à sen débarrasser.
Le projet dune année des Français de létranger en 2014, que jévoquai en septembre, me paraît être un moyen de mieux faire connaître les Français de létranger qui, pendant un an, pourraient se mettre en valeur en montrant leurs réalisations, leurs projets et leurs créations. Ce serait une excellente occasion, inédite de surcroît, de montrer toute leur capacité, leurs talents et leur savoir-faire. Ce nest pas un gadget : jai la conviction quils ont une chance à saisir. Je réitère donc ma proposition détudier ce projet car si lAssemblée des Français de létranger ne le porte pas, qui le fera ?
En outre, je crois aussi quil faut appeler lattention des Français de létranger sur linterprétation quon ne manquera pas de faire de leur participation aux scrutins de lannée prochaine. Elle sera analysée non seulement comme la mesure de leur civisme mais aussi comme le signe de leur volonté clairement affirmée de faire partie de la Nation, de peser sur ses choix, de faire véritablement entendre la voix dune composante désormais importante du Peuple français. A travers les scrutins de 2012, les Français de létranger ont une carte majeure à jouer. Il faut quils le comprennent et quils saisissent cette occasion.
4. Jai trouvé aussi dans les consulats généraux, consulats et sections consulaires que jai visités, des femmes et des hommes dévoués, compétents et disponibles. Nous avons avec notre réseau consulaire un instrument dexcellence. Il est sans équivalent. Soyez assurés, et je le dis de la façon la plus claire devant vous, devant les Sénateurs et le directeur des Français à létranger et de ladministration consulaire : je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour le préserver et le soutenir.
Partout, le travail de préparation des élections est bien engagé. Les encouragements à sinscrire sur les listes électorales consulaires ont porté leurs fruits : le cap du million délecteurs a été franchi ces derniers jours. Le millionième électeur est un jeune diplômé français dune école de commerce qui vient de sétablir à Moscou : M. Elie ZELERANSKI.
5. Jai aussi pu mesurer les progrès de ladministration électronique et son impact sur nos compatriotes. Succédant au guichet dadministration électronique, Monconsulat.fr que jannonçai en septembre est opérationnel depuis le 18 novembre. Déjà plus 25 000 connexions ont été enregistrées. De mon point de vue, Monconsulat.fr a vocation, à terme, à remplir la même mission et à rendre les mêmes services, à légard des Français de létranger, que Monservicepublic.fr.
En tout état de cause, le succès de son lancement est de bon augure pour le vote électronique.
Mesdames et Messieurs, partout aussi on ma alerté sur ce que les Français considèrent comme des lourdeurs administratives. Mais faisons honnêtement la part des choses : sil faut combattre la complexité, elle se justifie parfois dans lintérêt même des administrés. Cest le cas en matière de documents didentité ou de voyage pour se prémunir contre les risques de fraude. Parfois, jen conviens, ce risque de fraude doit être ramené à sa juste proportion. Je voudrais aborder à ce propos la question des certificats de vie ou dexistence, non seulement parce que jen ai pris lengagement lors de mon intervention au Sénat le 22 novembre dernier en réponse à une question de Madame Claudine LEPAGE, mais aussi parce que cest, à mon sens, un véritable cas décole qui illustre la démarche quil convient de suivre :
1. Cest une préoccupation ancienne, encore mise en exergue par la table ronde Europe.
2. Elle répond à notre objectif commun visant à faciliter la vie des Français.
3. La transposition en bloc à létranger dun dispositif concernant les Français vivant sur le territoire national conduit à une impasse.
4. Une approche densemble, une vue globale est nécessaire car les enjeux sont multiples :
1/. Un enjeu administratif : quelle procédure mettre en oeuvre ? Qui établira le formulaire ? Quand ? Selon quelle fréquence ? Ladministration a besoin de ces réponses pour sorganiser.
2/. Un enjeu de relations avec les administrés : le nouveau dispositif doit être simple, rapide et présenter des avantages certains par rapport à la situation précédente. Il ne doit pas faire peser la suspicion sur celui à qui on réclame le certificat de vie.
3/. Un enjeu en matière de lutte contre la fraude : évidemment, dans leur grande majorité, les retraités ne sont pas des fraudeurs. Mais lutter contre la fraude est lintérêt de tous. Convenons quen matière de versement de pension, les risques de fraude ne sont pas nuls. Convenons aussi que le fait de demander une fois par an un certificat de vie ne prémunit pas contre le versement indu dune pension si le décès survient avant la prochaine demande de preuve dexistence.
5. Cest une population ciblée mais qui ne concerne pas que des retraités français.
6. Lapproche densemble ne fait pas obstacle à des solutions différentes selon le cadre géographique.
7. Enfin, pour toutes ces raisons, seule une réflexion interministérielle permettra daboutir. Des contacts ont déjà eu lieu au niveau de mon cabinet. Jai obtenu, comme je lai annoncé, quune large concertation soit engagée. Elle débutera en janvier.
Mesdames et Messieurs, devoir repousser la solution à un problème dont toutes les ramifications échappent à nos compatriotes retraités a un côté agaçant. Je déplore que lémergence de solutions opérationnelles à des problèmes anciens bien connus prenne autant de temps.
Mais comme je lai dit à ladresse des Sénateurs de la commission des affaires étrangères et des forces armées du Sénat, mon rôle ne consiste pas à faire des coups, ni à vouloir attacher mon nom à une loi ou à me lancer dans des réformes qui ne verraient pas le jour avant lélection du Président de la République et les élections législatives. Je veux faire oeuvre utile. Je veux mettre toute mon énergie, ma capacité découte et ma ténacité à faire avancer les dossiers concrets et à trouver des solutions pratiques.
Cest ainsi que je conçois mon rôle de Secrétaire dEtat chargé des Français de létranger.Source http://www.assemblee-afe.fr, le 28 décembre 2011