Texte intégral
Mesdames et Messieurs, hier lagence de notation STANDARD AND POORS a pris des décisions qui concernent 16 pays de la zone euro. Avec le président de la République, je nai pas attendu le jugement dune agence de notation pour savoir quels sont nos devoirs : réduire nos déficits, améliorer notre compétitivité, donner à la zone euro la gouvernance qui lui manque. Cette décision était une décision attendue, même si on peut la juger à contretemps au regard des efforts engagés par la zone euro, des efforts que dailleurs les investisseurs commencent à reconnaître. Les marchés financiers ont dailleurs assez peu réagi vendredi aux rumeurs qui ont précédé lannonce officielle par STANDARD AND POORS.
Cette décision constitue une alerte qui ne doit pas être dramatisée, pas plus quelle ne doit être sous-estimée. Parce que la dérive de nos finances publiques depuis 30 est un handicap majeur pour la croissance, pour lemploi comme pour notre souveraineté nationale. Mais aussi parce que les insuffisances de la gouvernance européenne doivent être corrigées. Sagissant de la France, notre note est dégradée dun cran, elle passe de AAA à AA+. Je rappelle quil y a 21 crans de notation chez STANDARD AND POORS, la France était notée 21/21, elle est désormais notée 20/21. La note de la France reste donc parmi les meilleures du monde avec je le rappelle sagissant de cette agence, celle des Etats-Unis.
Cette agence motive sa décision dabord par la situation de la zone euro et par son impact sur nous. Pour autant, elle confirme que notre économie est solide, diversifiée et résistante. Elle souligne que le Gouvernement a mis en uvre les réformes nécessaires, et quil applique une stratégie de réduction du déficit et de la dette qui est crédible.
François HOLLANDE a donc particulièrement tort de prétendre que cest notre politique qui est sanctionnée. La France est un pays sûr, un pays dans lequel les investisseurs ont confiance et peuvent avoir confiance. Les agences de notation sont des baromètres utiles mais ce ne sont pas elles qui font la politique de la France. Les décisions prises lors du sommet européen du 9 décembre dernier, les mesures mises en uvre par la Banque Centrale Européenne, les réformes engagées par le Gouvernement prouvent que la France na pas attendu la décision de STANDARD AND POORS pour agir avec détermination en faveur dune solution durable à la crise de la zone euro. Chacun doit donc se garder de réactions excessives, cette décision est le fait dune agence de notation, et il serait paradoxal de lui faire jouer un rôle qui nest pas le sien en la transformant en un instrument politique.
Ceux qui dramatisent la situation devraient y réfléchir à deux fois. Ce sont en effet les mêmes qui ont refusé de voter les réformes destinées à renforcer notre compétitivité et à réduire les déficits, que ce soit la réduction des effectifs dans la Fonction Publique ou la réforme des retraites. Ce sont eux qui ont bloqué linstauration de la règle dor, qui aurait pourtant renforcé notre crédibilité au regard des investisseurs. Bref ! Chacun doit conserver son sang-froid et assumer ses responsabilités.
Je veux vous dire que le Gouvernement, lui, assumera les siennes. Il est déterminé à poursuivre la stratégie quil a définie sous lautorité du président de la République, il garantira le respect de la trajectoire de nos finances publiques sur laquelle nous nous sommes engagés, avec un retour sous les 3 % dès 2013 et un retour à léquilibre en 2016.
Cet objectif de déficit, jai eu plusieurs fois loccasion de le dire devant vous, est un objectif intangible, et dailleurs les résultats de 2011 montrent que la France respecte ses engagements. Comme vous le savez nous aurons sagissant de 2011 un résultat en matière de déficit qui sera nettement inférieur aux prévisions qui étaient de 5,7 %. Les mesures budgétaires que nous avons prises sont donc suffisantes à ce stade. Lorsque nous aurons une meilleure visibilité sur notre croissance, nous pourrons procéder à des ajustements. Jai déjà indiqué que nous avions des marges de précaution dans le budget 2012, nous procéderons si nécessaire à des ajustements mais au regard de la croissance constatée.
Je précise que notre financement moyen et long-terme se fait depuis le début de lannée à des taux qui sont nettement inférieurs à ceux prévus dans le budget 2012, et qui par ailleurs sont nettement inférieurs à ceux auxquels nous empruntions il y a quelques années. Par exemple hier soir, la dette française à 10 ans séchangeait sur le marché au taux de 3,08 %, alors que nous avons inscrit un taux moyen de 3,7 % dans le budget 2012. Nous avons donc une marge de manuvre en cas de hausse de notre taux dendettement, pour lannée 2012 je ne vois pas de coût significatif qui mettrait en cause notre trajectoire budgétaire.
Le Gouvernement, sans attendre les observations de STANDARD AND POORS, a engagé une stratégie pour améliorer notre compétitivité au service de la croissance. Depuis le début du Quinquennat, la réforme du crédit impôt recherche, la réforme de la taxe professionnelle, le développement des investissements davenir vont dans ce sens.
Nous allons, avec le sommet sur la crise de mercredi, engager une nouvelle étape au service de la compétitivité de léconomie française et de la croissance. Une nouvelle étape avec la formation des demandeurs demploi, avec une discussion autour des accords de compétitivité dans les entreprises, autour de la réforme du financement de la protection sociale pour abaisser le coût du travail. Et enfin, comme vous le savez, le président de la République a invité les représentants des associations des collectivités locales à un débat dans les prochains jours, pour voir comment les collectivités locales elles-mêmes doivent pouvoir sengager dans cet effort de réduction des déficits.
Qui pourrait encore prétendre que ces décisions peuvent attendre ? Et qui fait preuve de responsabilité ? Ceux qui veulent des décisions maintenant avec ce sommet de crise, ou ceux qui continuent de caricaturer tous les projets de réforme comme cela a encore été le cas de façon spectaculaire ces derniers jours avec les débats autour de la TVA anti-délocalisation.
Enfin STANDARD AND POORS souligne à juste titre lurgence de mettre en place une gouvernance de la zone euro qui la prémunisse contre les crises comme celle que nous sommes en train de vivre. Cest précisément ce qui a été décidé par les chefs dEtat et de gouvernement le 9 décembre, il nous revient dappliquer ces décisions sans délai, cela passera par la signature dun traité sur la zone euro en ce début dannée.
Voilà Mesdames et Messieurs, avec le président de la République nous navons jamais caché la gravité de la crise aux Français. Après le sommet social, nous prendrons des décisions fortes, des décisions fortes qui conduiront à des réformes structurelles, pour poursuivre dans la voie du renforcement de la croissance et de la compétitivité de la France.
Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.
JOURNALISTE
Monsieur le Premier ministre, François BAROIN a exclu hier un troisième plan de rigueur. Vous, vous dites quil ny aura pas de nouvelle mesure prise mais la France reste sous observation pendant les 3 mois qui viennent. Alors est-ce quil ne va pas falloir malgré tout prendre quelques mesures.
FRANÇOIS FILLON
Comme je lai indiqué, ce ne sont pas les agences de notation qui feront notre politique et qui feront notre agenda. Nous avons pris, à deux reprises, des décisions pour ajuster nos prévisions budgétaires, nous sommes en ligne avec ces prévisions sagissant de lexécution du budget 2011. Nous pensons pouvoir être en ligne sagissant du budget 2012.
Deuxièmement, je voudrais indiquer que depuis le début de cette crise, avec le président de la République, nous avons cherché en permanence à trouver léquilibre entre la nécessité de réduire les déficits, et limpératif de ne pas casser la faible croissance qui caractérise déjà la situation dans la zone euro. Vouloir aujourdhui ajouter des décisions massives de réduction de dépenses, dans le contexte économique que nous connaissons, ce serait prendre un risque majeur pour la croissance. Nous ne le prendrons pas. Cest la raison pour laquelle nous concentrons nos efforts sur des réformes structurelles pour améliorer la compétitivité de léconomie française. Baisser le coût du travail, cest une réforme structurelle qui doit nous permettre de répondre de la même manière quavec des réductions de dépenses, mais de façon plus efficace pour la croissance, aux interrogations des investisseurs.
JOURNALISTE
Monsieur le Premier ministre, comment expliquez-vous que lagence FITCH qui appartient je crois à un Français, qui est un de vos amis Marc de LACHARRIERE pourquoi elle avait-elle affirmé quelle ne dégraderait pas la note de la France ? Etait-ce à votre demande ?
FRANÇOIS FILLON
Ecoutez, je ne ferai vraiment aucun commentaire sur les décisions des agences. Ce que je constate cest quil y a trois agences, lune qui a estimé que la France conserverait son triple A tout au long de lannée 2012, une qui a pris les décisions que vous savez, je le rappelle, pour 16 pays européens. Je note avec intérêt quil est difficile de voir, dans les commentaires par exemple, le fait que des pays, qui ont peu de dettes, voire pas de dettes du tout comme le Luxembourg ou comme les Pays-Bas, sont mis en surveillance négative par lagence STANDARD AND POORS. Et puis une agence, MOODYS, qui a indiqué quelle prendrait sa décision dans les prochaines semaines. Nous, nous observons ces décisions, jai dit tout à lheure que cétait un thermomètre, mais je me garde de porter des jugements sur les agences de notation. Et en tout cas, je le répète une nouvelle fois, ce ne sont pas elles qui font la politique de notre pays.
JOURNALISTE
Est-ce que rétrospectivement, vous ne regrettez pas davoir un peu dramatisé le maintien du triple A, puisque dans votre camp on disait que cétait le trésor national, quil fallait absolument le conserver ? Aujourdhui vous dites : finalement, ce nest pas si grave que ça.
FRANÇOIS FILLON
Je ne dis pas que ça nest pas si grave que ça, je ne regrette rien du tout. Je constate dailleurs que, sagissant de dramatisation, vous nêtes pas mal non plus ces dernières heures. Ce nest évidemment pas une bonne nouvelle et ce nest pas une bonne nouvelle pour lensemble de la zone euro, mais en même temps cest une décision qui est cohérente avec la perception quun certain nombre dinvestisseurs ont de la situation dans la zone euro. Et je voudrais bien que chacun lise avec attention la décision de STANDARD AND POORS, parce quelle montre à quel point la question fondamentale cest celle de la gouvernance de la zone euro, cest celle de la crédibilité de la zone euro. Et chacun sait linvestissement qui a été celui de la France et singulièrement celui du président de la République française depuis des mois et des mois pour tirer la sonnette dalarme sur la crédibilité de la gouvernance de la zone euro, pour mettre en place un gouvernement économique, pour mettre en place des barrières pour protéger les pays les plus faibles de la zone euro. De ce point de vue-là, dire que la situation est grave, que la crise européenne est une crise grave, cest juste la vérité et je ne regrette pas et nous ne regrettons pas de dire cette vérité.
JOURNALISTE
Bonjour. DOW JONES - WALL STREET JOURNAL. Monsieur le Premier ministre, est-ce que vous pourriez exclure ou tenter dexclure une révision à la baisse de la croissance dici la fin du premier trimestre ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je nai pas dit cela, jai dit que nous regarderions les chiffres constatés de la croissance au dernier trimestre 2011, au premier trimestre 2012, comme nous lavons fait en 2011, pour faire les ajustements nécessaires. Il ny a pas aujourdhui de raisons objectives qui nous permettent de procéder à une révision de croissance. Quand nous connaîtrons les chiffres du dernier trimestre 2011, alors nous ferons les ajustements nécessaires. Et comme je lai indiqué, il y a une réserve de précaution dans le budget 2012, il va falloir naturellement transformer cette réserve de précaution en annulation de dépenses, ce qui est un travail auquel les ministères sont en train de se livrer. Et cest au regard des chiffres constatés de la croissance que nous procèderons tout au long de lannée 2012 à des ajustements si cela est nécessaire.
JOURNALISTE
Monsieur le Premier ministre, on prête à Nicolas SARKOZY le fait davoir dit : « si je perds le triple A, je suis mort. » Alors est-il mort ?
FRANÇOIS FILLON
Je nai jamais entendu le président de la République prononcer une phrase pareille. Ca nest dailleurs pas dans sa nature dêtre dun pessimisme aussi noir. On maccuse parfois, moi, dêtre celui qui est le plus pessimiste, et tout cela na évidemment aucun sens. Au contraire, je pense que la gravité de la crise sur laquelle je nai dailleurs cessé dalerter depuis le début du Quinquennat cette gravité de la crise nécessite la mise en uvre de réformes structurelles qui vont dans le sens de la compétitivité.
Or je note quen face du Gouvernement, en face du président de la République, toutes les propositions qui sont sur la table sont des propositions qui visent à accroître la dépense publique, et qui refusent denvisager des réformes structurelles sur les sujets de compétitivité, et notamment sur ces sujets qui font lécart entre lAllemagne et la France.
Jai choqué plusieurs fois en disant que nous devions nous inspirer de la politique économique qui avait été conduite en Allemagne, parce que lAllemagne est notre partenaire et nous devons être le plus proche possible des performance de léconomie allemande. Je vois que les décisions qui viennent dêtre prises me confortent encore dans cette idée que, pendant que lAllemagne prenait des décisions importantes depuis plus de 10 ans, nous avons, nous, tardé à le faire. Nous avons engagé ces décisions depuis le début du Quinquennat de Nicolas SARKOZY, avec une opposition qui sest manifestée en permanence contre ces choix. Il faut simplement maintenant aller plus vite. Et je veux insister sur un point, il ny a pas de délai et la perspective de lélection présidentielle ne peut en aucun cas être un alibi pour ne pas agir et pour ne pas réformer.
JOURNALISTE
FRANKFURTER ALLGEMEINE. Selon STANDARD AND POORS, lAllemagne et la France ne sont plus au même niveau, est-ce que ça va changer la relation entre la France et lAllemagne ? Et deuxième question, est-ce que vous allez pousser, par rapport à lAllemagne, est-ce que vous allez pousser pour plus de mesures de croissance et un peu moins de mesures daustérité ?
FRANÇOIS FILLON
Dabord je ne crois pas que cette décision changera quoi que ce soit à la relation entre la France et lAllemagne. Dabord parce que cette relation est structurelle. Elle correspond à notre géographie, à nos économies, à notre histoire. Parce que le sort de la France et de lAllemagne sont des sorts qui sont complètement liés, lAllemagne sait très bien quil ne peut pas y avoir de prospérité durable sans une zone euro qui soit une zone euro en croissance, une zone euro forte, une zone euro stable. Et donc il ny a aucune raison pour que nos relations changent.
Deuxièmement, nous défendons, nous soutenons - les efforts sont dailleurs des efforts que nous avons faits en commun pour quil y ait plus de discipline budgétaire à lintérieur des pays de la zone euro. Nous avons dailleurs proposé et cela a été adopté par le Conseil européen que chaque pays mette en place une règle dor qui rendrait constitutionnel lobjectif déquilibre. Nous voulons aussi des mesures de croissance, mais ces mesures de croissance elles doivent être prises, et la France a fait beaucoup de propositions ces derniers mois dans ce sens elles doivent prises par lUnion européenne, elles doivent être prises au sein de lUnion européenne. Il y a beaucoup de sujets qui sont sur la table sur les brevets, sur le soutien à linnovation dans les petites entreprises, sur la question de laffectation des fonds structurels européens, la France a fait des propositions et je crois que nous sommes très en ligne avec lAllemagne sur ces propositions. Peut-être une dernière question ?
JOURNALISTE
Justement, STANDARD AND POORS a critiqué le pacte fiscal qui a été adopté par les Européens le 9 décembre dernier, en disant que cétait une réponse qui nétait pas complète. Est-ce que cela veut dire quil faut reprendre des nouvelles initiatives ? Et puis on voit que cette décision va impacter notamment lun des pare-feux, le Fonds européen de soutien financier. Donc est-ce que ça veut dire quune nouvelle fois, il faut reprendre des nouvelles décisions, faire un nouveau sommet de la dernière chance ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je crois quil faut maintenant mettre en uvre les décisions. On a pris des décisions qui sont très fortes, avec un calendrier de mise en uvre qui est très court. Il a notamment été décidé davancer au mois de juillet prochain la mise en place de ce quon appelle -pour faire les choses simplement - le Fonds monétaire européen. Ce Fonds monétaire européen sera doté de son propre capital, il aura donc une vraie crédibilité, une vraie solidité face aux marchés, il faut que ce Fonds soit opérationnel au mois de juillet. Je ne crois pas quil faille courir après de nouvelles décisions plus spectaculaires les unes que les autres, alors même que nous navons pas encore mis en uvre les décisions qui ont été prises.
Quant à la crédibilité du Fonds européen, je voudrais faire remarquer quelle ne sera pas moins bonne que celle de notre pays. Et notre pays emprunte aujourdhui autour de 3 %. Je voudrais faire remarquer que dans les années 2002 la France empruntait à 5 %. Donc il faut aussi relativiser cette menace daugmentation du coût du crédit, qui reste pour le moment, à des niveaux historiquement bas dans la zone euro. Voilà, je vous remercie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 16 janvier 2012
Cette décision constitue une alerte qui ne doit pas être dramatisée, pas plus quelle ne doit être sous-estimée. Parce que la dérive de nos finances publiques depuis 30 est un handicap majeur pour la croissance, pour lemploi comme pour notre souveraineté nationale. Mais aussi parce que les insuffisances de la gouvernance européenne doivent être corrigées. Sagissant de la France, notre note est dégradée dun cran, elle passe de AAA à AA+. Je rappelle quil y a 21 crans de notation chez STANDARD AND POORS, la France était notée 21/21, elle est désormais notée 20/21. La note de la France reste donc parmi les meilleures du monde avec je le rappelle sagissant de cette agence, celle des Etats-Unis.
Cette agence motive sa décision dabord par la situation de la zone euro et par son impact sur nous. Pour autant, elle confirme que notre économie est solide, diversifiée et résistante. Elle souligne que le Gouvernement a mis en uvre les réformes nécessaires, et quil applique une stratégie de réduction du déficit et de la dette qui est crédible.
François HOLLANDE a donc particulièrement tort de prétendre que cest notre politique qui est sanctionnée. La France est un pays sûr, un pays dans lequel les investisseurs ont confiance et peuvent avoir confiance. Les agences de notation sont des baromètres utiles mais ce ne sont pas elles qui font la politique de la France. Les décisions prises lors du sommet européen du 9 décembre dernier, les mesures mises en uvre par la Banque Centrale Européenne, les réformes engagées par le Gouvernement prouvent que la France na pas attendu la décision de STANDARD AND POORS pour agir avec détermination en faveur dune solution durable à la crise de la zone euro. Chacun doit donc se garder de réactions excessives, cette décision est le fait dune agence de notation, et il serait paradoxal de lui faire jouer un rôle qui nest pas le sien en la transformant en un instrument politique.
Ceux qui dramatisent la situation devraient y réfléchir à deux fois. Ce sont en effet les mêmes qui ont refusé de voter les réformes destinées à renforcer notre compétitivité et à réduire les déficits, que ce soit la réduction des effectifs dans la Fonction Publique ou la réforme des retraites. Ce sont eux qui ont bloqué linstauration de la règle dor, qui aurait pourtant renforcé notre crédibilité au regard des investisseurs. Bref ! Chacun doit conserver son sang-froid et assumer ses responsabilités.
Je veux vous dire que le Gouvernement, lui, assumera les siennes. Il est déterminé à poursuivre la stratégie quil a définie sous lautorité du président de la République, il garantira le respect de la trajectoire de nos finances publiques sur laquelle nous nous sommes engagés, avec un retour sous les 3 % dès 2013 et un retour à léquilibre en 2016.
Cet objectif de déficit, jai eu plusieurs fois loccasion de le dire devant vous, est un objectif intangible, et dailleurs les résultats de 2011 montrent que la France respecte ses engagements. Comme vous le savez nous aurons sagissant de 2011 un résultat en matière de déficit qui sera nettement inférieur aux prévisions qui étaient de 5,7 %. Les mesures budgétaires que nous avons prises sont donc suffisantes à ce stade. Lorsque nous aurons une meilleure visibilité sur notre croissance, nous pourrons procéder à des ajustements. Jai déjà indiqué que nous avions des marges de précaution dans le budget 2012, nous procéderons si nécessaire à des ajustements mais au regard de la croissance constatée.
Je précise que notre financement moyen et long-terme se fait depuis le début de lannée à des taux qui sont nettement inférieurs à ceux prévus dans le budget 2012, et qui par ailleurs sont nettement inférieurs à ceux auxquels nous empruntions il y a quelques années. Par exemple hier soir, la dette française à 10 ans séchangeait sur le marché au taux de 3,08 %, alors que nous avons inscrit un taux moyen de 3,7 % dans le budget 2012. Nous avons donc une marge de manuvre en cas de hausse de notre taux dendettement, pour lannée 2012 je ne vois pas de coût significatif qui mettrait en cause notre trajectoire budgétaire.
Le Gouvernement, sans attendre les observations de STANDARD AND POORS, a engagé une stratégie pour améliorer notre compétitivité au service de la croissance. Depuis le début du Quinquennat, la réforme du crédit impôt recherche, la réforme de la taxe professionnelle, le développement des investissements davenir vont dans ce sens.
Nous allons, avec le sommet sur la crise de mercredi, engager une nouvelle étape au service de la compétitivité de léconomie française et de la croissance. Une nouvelle étape avec la formation des demandeurs demploi, avec une discussion autour des accords de compétitivité dans les entreprises, autour de la réforme du financement de la protection sociale pour abaisser le coût du travail. Et enfin, comme vous le savez, le président de la République a invité les représentants des associations des collectivités locales à un débat dans les prochains jours, pour voir comment les collectivités locales elles-mêmes doivent pouvoir sengager dans cet effort de réduction des déficits.
Qui pourrait encore prétendre que ces décisions peuvent attendre ? Et qui fait preuve de responsabilité ? Ceux qui veulent des décisions maintenant avec ce sommet de crise, ou ceux qui continuent de caricaturer tous les projets de réforme comme cela a encore été le cas de façon spectaculaire ces derniers jours avec les débats autour de la TVA anti-délocalisation.
Enfin STANDARD AND POORS souligne à juste titre lurgence de mettre en place une gouvernance de la zone euro qui la prémunisse contre les crises comme celle que nous sommes en train de vivre. Cest précisément ce qui a été décidé par les chefs dEtat et de gouvernement le 9 décembre, il nous revient dappliquer ces décisions sans délai, cela passera par la signature dun traité sur la zone euro en ce début dannée.
Voilà Mesdames et Messieurs, avec le président de la République nous navons jamais caché la gravité de la crise aux Français. Après le sommet social, nous prendrons des décisions fortes, des décisions fortes qui conduiront à des réformes structurelles, pour poursuivre dans la voie du renforcement de la croissance et de la compétitivité de la France.
Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.
JOURNALISTE
Monsieur le Premier ministre, François BAROIN a exclu hier un troisième plan de rigueur. Vous, vous dites quil ny aura pas de nouvelle mesure prise mais la France reste sous observation pendant les 3 mois qui viennent. Alors est-ce quil ne va pas falloir malgré tout prendre quelques mesures.
FRANÇOIS FILLON
Comme je lai indiqué, ce ne sont pas les agences de notation qui feront notre politique et qui feront notre agenda. Nous avons pris, à deux reprises, des décisions pour ajuster nos prévisions budgétaires, nous sommes en ligne avec ces prévisions sagissant de lexécution du budget 2011. Nous pensons pouvoir être en ligne sagissant du budget 2012.
Deuxièmement, je voudrais indiquer que depuis le début de cette crise, avec le président de la République, nous avons cherché en permanence à trouver léquilibre entre la nécessité de réduire les déficits, et limpératif de ne pas casser la faible croissance qui caractérise déjà la situation dans la zone euro. Vouloir aujourdhui ajouter des décisions massives de réduction de dépenses, dans le contexte économique que nous connaissons, ce serait prendre un risque majeur pour la croissance. Nous ne le prendrons pas. Cest la raison pour laquelle nous concentrons nos efforts sur des réformes structurelles pour améliorer la compétitivité de léconomie française. Baisser le coût du travail, cest une réforme structurelle qui doit nous permettre de répondre de la même manière quavec des réductions de dépenses, mais de façon plus efficace pour la croissance, aux interrogations des investisseurs.
JOURNALISTE
Monsieur le Premier ministre, comment expliquez-vous que lagence FITCH qui appartient je crois à un Français, qui est un de vos amis Marc de LACHARRIERE pourquoi elle avait-elle affirmé quelle ne dégraderait pas la note de la France ? Etait-ce à votre demande ?
FRANÇOIS FILLON
Ecoutez, je ne ferai vraiment aucun commentaire sur les décisions des agences. Ce que je constate cest quil y a trois agences, lune qui a estimé que la France conserverait son triple A tout au long de lannée 2012, une qui a pris les décisions que vous savez, je le rappelle, pour 16 pays européens. Je note avec intérêt quil est difficile de voir, dans les commentaires par exemple, le fait que des pays, qui ont peu de dettes, voire pas de dettes du tout comme le Luxembourg ou comme les Pays-Bas, sont mis en surveillance négative par lagence STANDARD AND POORS. Et puis une agence, MOODYS, qui a indiqué quelle prendrait sa décision dans les prochaines semaines. Nous, nous observons ces décisions, jai dit tout à lheure que cétait un thermomètre, mais je me garde de porter des jugements sur les agences de notation. Et en tout cas, je le répète une nouvelle fois, ce ne sont pas elles qui font la politique de notre pays.
JOURNALISTE
Est-ce que rétrospectivement, vous ne regrettez pas davoir un peu dramatisé le maintien du triple A, puisque dans votre camp on disait que cétait le trésor national, quil fallait absolument le conserver ? Aujourdhui vous dites : finalement, ce nest pas si grave que ça.
FRANÇOIS FILLON
Je ne dis pas que ça nest pas si grave que ça, je ne regrette rien du tout. Je constate dailleurs que, sagissant de dramatisation, vous nêtes pas mal non plus ces dernières heures. Ce nest évidemment pas une bonne nouvelle et ce nest pas une bonne nouvelle pour lensemble de la zone euro, mais en même temps cest une décision qui est cohérente avec la perception quun certain nombre dinvestisseurs ont de la situation dans la zone euro. Et je voudrais bien que chacun lise avec attention la décision de STANDARD AND POORS, parce quelle montre à quel point la question fondamentale cest celle de la gouvernance de la zone euro, cest celle de la crédibilité de la zone euro. Et chacun sait linvestissement qui a été celui de la France et singulièrement celui du président de la République française depuis des mois et des mois pour tirer la sonnette dalarme sur la crédibilité de la gouvernance de la zone euro, pour mettre en place un gouvernement économique, pour mettre en place des barrières pour protéger les pays les plus faibles de la zone euro. De ce point de vue-là, dire que la situation est grave, que la crise européenne est une crise grave, cest juste la vérité et je ne regrette pas et nous ne regrettons pas de dire cette vérité.
JOURNALISTE
Bonjour. DOW JONES - WALL STREET JOURNAL. Monsieur le Premier ministre, est-ce que vous pourriez exclure ou tenter dexclure une révision à la baisse de la croissance dici la fin du premier trimestre ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je nai pas dit cela, jai dit que nous regarderions les chiffres constatés de la croissance au dernier trimestre 2011, au premier trimestre 2012, comme nous lavons fait en 2011, pour faire les ajustements nécessaires. Il ny a pas aujourdhui de raisons objectives qui nous permettent de procéder à une révision de croissance. Quand nous connaîtrons les chiffres du dernier trimestre 2011, alors nous ferons les ajustements nécessaires. Et comme je lai indiqué, il y a une réserve de précaution dans le budget 2012, il va falloir naturellement transformer cette réserve de précaution en annulation de dépenses, ce qui est un travail auquel les ministères sont en train de se livrer. Et cest au regard des chiffres constatés de la croissance que nous procèderons tout au long de lannée 2012 à des ajustements si cela est nécessaire.
JOURNALISTE
Monsieur le Premier ministre, on prête à Nicolas SARKOZY le fait davoir dit : « si je perds le triple A, je suis mort. » Alors est-il mort ?
FRANÇOIS FILLON
Je nai jamais entendu le président de la République prononcer une phrase pareille. Ca nest dailleurs pas dans sa nature dêtre dun pessimisme aussi noir. On maccuse parfois, moi, dêtre celui qui est le plus pessimiste, et tout cela na évidemment aucun sens. Au contraire, je pense que la gravité de la crise sur laquelle je nai dailleurs cessé dalerter depuis le début du Quinquennat cette gravité de la crise nécessite la mise en uvre de réformes structurelles qui vont dans le sens de la compétitivité.
Or je note quen face du Gouvernement, en face du président de la République, toutes les propositions qui sont sur la table sont des propositions qui visent à accroître la dépense publique, et qui refusent denvisager des réformes structurelles sur les sujets de compétitivité, et notamment sur ces sujets qui font lécart entre lAllemagne et la France.
Jai choqué plusieurs fois en disant que nous devions nous inspirer de la politique économique qui avait été conduite en Allemagne, parce que lAllemagne est notre partenaire et nous devons être le plus proche possible des performance de léconomie allemande. Je vois que les décisions qui viennent dêtre prises me confortent encore dans cette idée que, pendant que lAllemagne prenait des décisions importantes depuis plus de 10 ans, nous avons, nous, tardé à le faire. Nous avons engagé ces décisions depuis le début du Quinquennat de Nicolas SARKOZY, avec une opposition qui sest manifestée en permanence contre ces choix. Il faut simplement maintenant aller plus vite. Et je veux insister sur un point, il ny a pas de délai et la perspective de lélection présidentielle ne peut en aucun cas être un alibi pour ne pas agir et pour ne pas réformer.
JOURNALISTE
FRANKFURTER ALLGEMEINE. Selon STANDARD AND POORS, lAllemagne et la France ne sont plus au même niveau, est-ce que ça va changer la relation entre la France et lAllemagne ? Et deuxième question, est-ce que vous allez pousser, par rapport à lAllemagne, est-ce que vous allez pousser pour plus de mesures de croissance et un peu moins de mesures daustérité ?
FRANÇOIS FILLON
Dabord je ne crois pas que cette décision changera quoi que ce soit à la relation entre la France et lAllemagne. Dabord parce que cette relation est structurelle. Elle correspond à notre géographie, à nos économies, à notre histoire. Parce que le sort de la France et de lAllemagne sont des sorts qui sont complètement liés, lAllemagne sait très bien quil ne peut pas y avoir de prospérité durable sans une zone euro qui soit une zone euro en croissance, une zone euro forte, une zone euro stable. Et donc il ny a aucune raison pour que nos relations changent.
Deuxièmement, nous défendons, nous soutenons - les efforts sont dailleurs des efforts que nous avons faits en commun pour quil y ait plus de discipline budgétaire à lintérieur des pays de la zone euro. Nous avons dailleurs proposé et cela a été adopté par le Conseil européen que chaque pays mette en place une règle dor qui rendrait constitutionnel lobjectif déquilibre. Nous voulons aussi des mesures de croissance, mais ces mesures de croissance elles doivent être prises, et la France a fait beaucoup de propositions ces derniers mois dans ce sens elles doivent prises par lUnion européenne, elles doivent être prises au sein de lUnion européenne. Il y a beaucoup de sujets qui sont sur la table sur les brevets, sur le soutien à linnovation dans les petites entreprises, sur la question de laffectation des fonds structurels européens, la France a fait des propositions et je crois que nous sommes très en ligne avec lAllemagne sur ces propositions. Peut-être une dernière question ?
JOURNALISTE
Justement, STANDARD AND POORS a critiqué le pacte fiscal qui a été adopté par les Européens le 9 décembre dernier, en disant que cétait une réponse qui nétait pas complète. Est-ce que cela veut dire quil faut reprendre des nouvelles initiatives ? Et puis on voit que cette décision va impacter notamment lun des pare-feux, le Fonds européen de soutien financier. Donc est-ce que ça veut dire quune nouvelle fois, il faut reprendre des nouvelles décisions, faire un nouveau sommet de la dernière chance ?
FRANÇOIS FILLON
Non, je crois quil faut maintenant mettre en uvre les décisions. On a pris des décisions qui sont très fortes, avec un calendrier de mise en uvre qui est très court. Il a notamment été décidé davancer au mois de juillet prochain la mise en place de ce quon appelle -pour faire les choses simplement - le Fonds monétaire européen. Ce Fonds monétaire européen sera doté de son propre capital, il aura donc une vraie crédibilité, une vraie solidité face aux marchés, il faut que ce Fonds soit opérationnel au mois de juillet. Je ne crois pas quil faille courir après de nouvelles décisions plus spectaculaires les unes que les autres, alors même que nous navons pas encore mis en uvre les décisions qui ont été prises.
Quant à la crédibilité du Fonds européen, je voudrais faire remarquer quelle ne sera pas moins bonne que celle de notre pays. Et notre pays emprunte aujourdhui autour de 3 %. Je voudrais faire remarquer que dans les années 2002 la France empruntait à 5 %. Donc il faut aussi relativiser cette menace daugmentation du coût du crédit, qui reste pour le moment, à des niveaux historiquement bas dans la zone euro. Voilà, je vous remercie.
Source http://www.gouvernement.fr, le 16 janvier 2012