Texte intégral
Je veux tout dabord vous dire limportance que jattache à ces premières Rencontres parlementaires sur lautisme.
Environ 600 000 personnes en France sont porteuses dautisme ou de troubles envahissants du développement.
Cette question a longtemps été littéralement portée par toutes les associations, réunies aujourdhui dans le Collectif Autisme que vous présidez, Vincent Gerhards.
Elle a suscité en mai 2011, à votre initiative, Cher Daniel Fasquelle, la création dun groupe détudes composé de plus de 80 députés.
La représentation nationale a ainsi montré sa capacité à se saisir de la question de lautisme, son aptitude à travailler étroitement avec la société civile, ce qui a rendu possible ces Rencontres parlementaires.
Ces dernières sont particulièrement importantes, car tant la pertinence des sujets choisis que la grande qualité des intervenants de vos 4 Tables rondes nous assurent de la richesse des échanges. Le Gouvernement, soyez en assurés, y sera très attentif.
Cest également la mobilisation des parlementaires, avec lappui du Président de lAssemblée nationale lui-même, qui a permis de « pousser » la pétition citoyenne afin que le Conseil économique, social et environnemental (CESE) se saisisse de la question du « coût économique et social de lautisme ». Jean-Paul Delevoye en a parlé il y a un instant. Permettez-moi de saluer la désignation de Christel Prado comme rapporteur. Je ne doute pas un instant quelle conduira ces travaux avec finesse et exigence. Il est en effet déterminant de mettre en lumière ce que jappelle, moi, le « coût de non qualité » associé aujourdhui encore, dans notre pays, à nos choix pour lautisme.
La souffrance des personnes, celle, tout aussi intolérable, de leurs familles place aujourdhui lautisme au cur des préoccupations des pouvoirs publics. Cest pour cette raison, jy reviendrai tout à lheure, que lautisme a obtenu le label de grande cause nationale 2012. Cest aussi pour cette raison quau moment où nous avons adopté la loi du 11 février 2005, qui a accordé sa pleine reconnaissance à lautisme, jai lancé, fin 2004, le premier plan autisme. Cest pourquoi le mouvement a été poursuivi et amplifié : trois ans plus tard, le Président de la République et le Gouvernement lançaient, en 2008, le plan autisme.
Ce plan, vous le savez tous, a pour ambition de traiter la question de lautisme dans toutes ses dimensions.
Ce plan sarticule en trois axes visant, dune part, à renforcer la connaissance scientifique, les pratiques et la formation des professionnels ; dautre part, à améliorer le diagnostic, la connaissance des besoins des personnes, pour mieux les accompagner et les orienter le plus possible vers le milieu ordinaire ; et enfin à promouvoir une offre sanitaire et médico-sociale diversifiée et enfin tolérante aux innovations, seules réponses pertinentes à lattente légitime des familles.
Mais le plan autisme, cest dabord et avant tout un plan de création de places non seulement en établissements mais aussi en services, car cest ainsi que lon vient en soutien aux familles, cest ainsi que lon se donne les moyens de préparer la participation sociale des personnes concernées. Ce plan prévoit en effet 4 100 places supplémentaires dédiées aux personnes autistes. Pour les enfants, la moitié des places sont aujourdhui ouvertes, et pour les adultes, plus du tiers sont déjà en cours dinstallation.
Surtout, le gouvernement a voulu tourner le dos aux postures dogmatiques qui ont nui à la qualité de laccueil des enfants autistes dans notre pays. Cest pourquoi, pour la première fois dans notre pays, 23 structures expérimentales ont été autorisées depuis 2009. Elles mettent en uvre les méthodes dites comportementalistes, type ABA, qui sont trop peu développées en France, mais pourtant plébiscitées par les familles car elles permettent de construire un projet avec lenfant.
Pour évaluer la mise en uvre de ce plan, Roselyne Bachelot-Narquin et moi-même avons confié une mission à Valérie Létard. Elle nous a rendu son rapport il y a quelques minutes. Elle vous en dira certainement plus au cours de la table ronde qui y est consacrée tout à lheure. Croyez bien que le Gouvernement en tiendra le plus grand compte.
Permettez-moi néanmoins de vous dire quelles sont pour moi les questions prioritaires.
Lautisme est devenu un enjeu prioritaire de santé publique. En effet, lévolution de la prévalence est telle que les pouvoirs publics se doivent de mieux comprendre pour agir en faveur des personnes autistes et de leurs familles.
Mieux comprendre, cest la recherche dabord.
Nos connaissances ont déjà progressé, comme la montré létat des lieux publié en 2010 par la Haute Autorité de Santé (HAS). Les troubles sont mieux connus, mieux cernés dans leurs symptômes et leurs origines.
Nous savons désormais, notamment grâce à limagerie médicale et la génétique, que les troubles envahissants du développement et les troubles du spectre de lautisme recouvrent la même réalité clinique.
Le consensus scientifique est total sur le caractère organique de son origine. Je veux le dire avec force : pour le Gouvernement, les choses sont très claires : il nest pas question dune prétendue responsabilité des parents du fait dune éducation déficiente ou inadaptée dans les troubles autistiques de leurs enfants. Lautisme est enfin sorti du répertoire des psychoses en France en 2010. Cette réalité doit être connue de lensemble de nos compatriotes.
Nous connaissons aussi le caractère évolutif, tout au long de la vie, des symptômes de ce quon appelle la triade autistique (troubles de la communication et du langage, troubles des interactions sociales, comportements répétitifs).
Enfin, cela peut paraître évident, mais ça ne létait pas pour beaucoup, on sait maintenant que les personnes qui vivent avec ces symptômes ont certes des besoins spécifiques, mais aussi les besoins de tout un chacun. La réponse en termes de soin et daccompagnement doit donc intégrer cette double perspective.
Cest un des enjeux, et non des moindres, du diagnostic précoce. Cest pourquoi nous avons renforcé les équipes de diagnostic : 5,6 M leur ont été consacrés au total sur la période 2009 -2011.
Mesdames et Messieurs, vous avez évoqué ce matin la panne de la recherche. Je veux vous le dire aujourdhui, nous devons ensemble nous ouvrir à toutes les pistes. Je pense bien sûr à la poursuite des travaux de recherche génétique, mais je pense aussi à la tout nouvelle thèse infectieuse. Cette nouvelle piste, comme dautres qui pourraient apparaître, nous nous devons de les explorer, de les encourager. Nayons pas peur de faire éclater les certitudes ! Ne laissons pas lautisme devenir ou redevenir lapanage exclusif de telle ou telle école ! Plus jamais ça !
Je vous le dis en vérité, dans la France de 2012, ceux qui semprisonneraient dans leurs convictions, dans leurs chapelles, seraient responsables et coupables sur cette question de santé publique ! Plus jamais ça !
Alors, Mesdames et Messieurs, il faut poursuivre et accroître cet effort de recherche, bien sûr. Mais plus encore il me semble fondamental de réussir la traduction de toutes ces connaissances et acquis de la science en pratiques nouvelles.
Lenjeu daujourdhui est bien me semble-t-il celui de la formation des professionnels de santé, et de lensemble des intervenants auprès des personnes autistes et de leurs famille.
Il sagit de passer, si vous me permettez lexpression, de la recherche fondamentale à la recherche appliquée, et vite !
Quoi quil en soit, cest par le développement des coopérations entre les associations, les chercheurs et les pouvoirs publics que nous réussirons collectivement à répondre à la question de lautisme.
Il sagit là, Mesdames et Messieurs, de ce nouveau partenariat social que je ne cesse dappeler de mes vux.
Cest en effet à partir des expériences de qualité portées par le monde associatif et le terrain, accompagnées par lEtat, qui doit également soutenir la recherche, que nous réussirons à répondre aux aspirations des personnes autistes et de leurs familles.
Ces aspirations de nos compatriotes autistes, nous les connaissons, cest avoir le plus possible, une vraie vie, la vie de tout le monde.
Cet objectif est ambitieux, car cest celui de linclusion sociale des personnes porteuses dautisme, cest celui de leur autonomie, cest celui du respect de leur projet de vie.
Cet objectif, croyez-moi, cest celui du Gouvernement.
Il a été rappelé avec force le 8 juin dernier, à loccasion de la conférence nationale du handicap. Comme le Président de la République la souligné dans son allocution de clôture, nous sommes au milieu du gué. Certes, la société est devenue plus accueillante pour les personnes handicapées, mais il reste encore beaucoup à faire.
Cet objectif, vous en trouvez une nouvelle traduction concrète par lattribution du label grande cause nationale 2012 par le Premier ministre au rassemblement « ensemble pour lautisme ». Ce label permet à des organismes à but non lucratif, souhaitant organiser des campagnes faisant appel à la générosité publique, dobtenir des diffusions gratuites sur les radios et les télévisions publiques. Mesdames et messieurs, il sagit dune distinction, dun levier puissant qui permettra de mieux faire connaître lautisme à lensemble de nos compatriotes et de mettre en lumière les avancées de la sciences pour faire reculer les préjugés et les idées préconçues qui subsistent, génératrices de malentendus et de blocages que nous devons dépasser ensemble.
Mesdames et Messieurs les parlementaires, Cher Daniel Fasquelle, Mesdames et Messieurs les militants du monde associatif, Mesdames et Messieurs, je sais pouvoir compter sur vous tous pour cela, comme vous pouvez compter sur moi.
Je vous remercie.
Source http://www.solidarite.gouv.fr, le 13 janvier 2012