Interview de Mme Roselyne Bachelot, ministre des solidarités et de la cohésion sociale à I Télé le 27 octobre 2011, sur la crise économique et financière et les différents plans d'austérité du Gouvernement.

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Média : Itélé

Texte intégral

 
 
 
CHRISTOPHE BARBIER Alors au lendemain de ce sommet européen êtes-vous soulagée, un peu déçue qu’on n’aille pas plus loin dans le fédéralisme ? Méfiante peut-être sur l’application des décisions.
 
ROSELYNE BACHELOT Je suis soulagée et je suis admirative...
 
CHRISTOPHE BARBIER De qui ?
 
ROSELYNE BACHELOT ...devant la volonté, le courage, la détermination des dirigeants européens, tout spécialement de Nicolas SARKOZY qui vraiment a mouillé sa chemise avec Angela MERKEL, ils sont arrivés à un résultat, j’allais dire, inespéré. Et aussi bien sur la maximisation du fonds de solidarité financière, sur l’effacement de la dette grecque, ce n’était pas était pas évident à obtenir de la part des banquiers européens. Véritablement on peut dire que le résultat est maintint à la hauteur de ce que nous attendions. Et je crois que c’est salué par l’ensemble des commentateurs.
 
CHRISTOPHE BARBIER Est-ce qu’il ne manque pas quand même quelque chose, c’est une vraie nouvelle gouvernance européenne, plus fédérale, qu’on ait les mêmes politiques ?
 
ROSELYNE BACHELOT C’est le chantier qui nous attend. Cette nouvelle gouvernance ne pouvait pas évidemment surgir de ce sommet qui était destiné à couvrir des mesures d’urgence, c’est également la volonté de Nicolas SARKOZY d’aller plus loin dans ce domaine. Je ne parlerai pas d’Europe fédérale, je dirais Europe intégrée. Je pense que le mot est plus juste.
 
CHRISTOPHE BARBIER Un président de la zone euro c’est un gadget, c’est quelque chose d’important, c’est ...
 
ROSELYNE BACHELOT C’était absolument indispensable. Il est tout à fait évident que c’est ce qui a manqué au moment de la création de la monnaie unique, c'est-à-dire une vraie gouvernance et maintenant il faut s’y coller.
 
CHRISTOPHE BARBIER Et la Banque Centrale doit devenir un outil de cette gouvernance ou doit rester totalement...
 
ROSELYNE BACHELOT La Banque Centrale doit rester indépendante, c’est évidemment la définition d’une banque centrale, mais qu’elle soit un outil et j’allais dire de participer à la gouvernance de cette zone euro, c’est déjà ce qui se passe.
 
CHRISTOPHE BARBIER Alors chaque Etat s’engage à adopter avant la fin de 2012, une règle d’or. Est-ce que vous souhaitez qu’on rouvre le débat en France, qu’on réunisse le congrès, la règle d’or elle est prête, il n’y a plus qu’à la voter.
 
ROSELYNE BACHELOT J’en appelle à la responsabilité évidemment de l’opposition française qui dans ce domaine n’a pas vraiment été à la hauteur, a privilégié des intérêts partisans et électoralistes sur l’intérêt du pays. On voit bien que si on avait à ce moment-là envoyé le message fort de la règle d’or, on se serait peut-être épargné quelques déconvenues. Donc oui, j’en appelle à cette responsabilité.
 
CHRISTOPHE BARBIER Le président parle ce soir aux Français, qu’attendez-vous de lui ? Une déclaration de campagne présidentielle, c’est parti ?
 
ROSELYNE BACHELOT J’attends de lui qu’il continue ce qu’il a fait la nuit dernière. Il va nous expliquer exactement ce qui se passe, il va nous dire quels sont les enjeux, il n’est pas douteux qu’à la suite de cette déclaration nous aurons nous, le gouvernement, autour de François FILLON, beaucoup de travail à effectuer pendant ce week-end de la Toussaint.
 
CHRISTOPHE BARBIER Ce travail ça s’appelle un plan de rigueur, un plan d’austérité ?
 
ROSELYNE BACHELOT Ca s’appelle prendre toutes les décisions qui conviennent, le président va nous fixer la route et nous ferons le travail.
 
CHRISTOPHE BARBIER Ministre des Solidarités, ça concerne tous les Français, est-ce que vous allez approuver une hausse de la TVA, on y réfléchit en ce moment au gouvernement, c'est-à-dire tout le monde paye.
 
ROSELYNE BACHELOT Il est encore trop tôt, il est encore tôt pour le dire. Moi ce que je veux dire comme ministre des Solidarités, je suis en train de proposer un plan de Sécurité sociale qui vraiment a décidé de ménager les plus faibles. Nous avons tenu le choc malgré les difficultés sur l’augmentation de l’allocation d’adulte handicapé de 25%, sur les créations de places pour les personnes handicapées et les personnes âgées. Je vais présenter une loi de financement de Sécurité sociale en augmentation de 6,3% pour les personnes âgées et dépendantes. Nous avons préservé le RSA, nous avons voulu avec Nicolas SARKOZY et François FILLON que les plus modestes d’entre nous ne soient pas la variable d’ajustement...
 
CHRISTOPHE BARBIER Qui va payer ? Alors c’est les plus riches qui vont payer, qui vont devoir faire un effort ?
 
ROSELYNE BACHELOT Nous avons présenté une loi de financement de la sécurité sociale qui réduit les déficits, 24 milliards d’euros il ya deux ans, 18 milliards d’euros l’année dernière et pour 2012, encore une rétractation de 4 milliards d’euros.
 
CHRISTOPHE BARBIER Augmenter la TVA c’est de l’argent qui rentre tout de suite dans les caisses, c’est peut-être nécessaire.
 
ROSELYNE BACHELOT Il est encore prématuré Christophe BARBIER, pour vous annoncer ces décisions.
 
CHRISTOPHE BARBIER La TVA sociale, c’est quelque chose qui vous plait intellectuellement ?
 
ROSELYNE BACHELOT Que nous soyons obligés de repenser notre système de financement et de protection sociale, c’est à l’évidence un chantier de la prochaine élection présidentielle. Nicolas SARKOZY, dont j’espère qu’il sera candidat indiquera la route à ce moment-là.
 
CHRISTOPHE BARBIER Et la TVA sur la restauration, on l’a baissé, on et un peu déçu sur les prix, sur l’emploi, il faut la remonter.
 
ROSELYNE BACHELOT Je ne suis pas d’accord avec vous, la restauration a été un secteur particulièrement menacé en cette période de crise, c’est vrai que la restauration peut souvent être une variable d’ajustement pour des ménages modestes et la préservation de l’emploi et la création de l’emploi ont été au rendez-vous.
 
CHRISTOPHE BARBIER Le chômage a bondi en septembre, record depuis 1999, on a tout essayé comme disait François MITTERRAND ?
 
ROSELYNE BACHELOT Nous payons évidemment les dividendes si je puis dire de la crise dans ce rebond du chômage, ce que je note c’est que Xavier BERTRAND et Nadine MORANO ont pris des mesures fortes qui prennent, dont on voit les prémices, augmentation de 5,9% de l’entrée dans les contrats en alternance, on peut aussi commencer l’apprentissage, la formation en apprentissage avant même d’avoir le contrat. Tout ça ce sont des mesures structurantes qui porteront leurs fruits.
 
CHRISTOPHE BARBIER On pourrait faire un peu d’emploi public, un peu d’emploi jeune pour soulager les familles non ?
 
ROSELYNE BACHELOT On fait des contrats aidés bien entendu et d’ailleurs dans le cadre du revenu de solidarité active, j’ai créé un contrat unique d’insertion d’une journée pour permettre à des gens qui sont très exclus de l’emploi, d’avoir une marche d’entrée vers l’emploi. Mais ça ne peut pas être une solution générale appliquée à tout le monde. Il faut vraiment cibler ces contrats aidés sur les plus faibles et les plus exclus.
 
CHRISTOPHE BARBIER Approuvez-vous l’idée de Laurent WAUQUIEZ, réserver le logement social ou favoriser l’accès au logement social pour les travailleurs modestes, peut-être au détriment des chômeurs ?
 
ROSELYNE BACHELOT Ah non je ne partage pas cette idée et d’ailleurs elle est en opposition totale avec la politique du gouvernement, la politique menée par Benoist APPARU parce que nous savons bien une chose, c’est que le logement c’est la condition cardinale de l’insertion et de la réinsertion. Et Benoist APPARU pour les plus pauvres, les plus démunis, mènent une politique qu’on appelle la politique du logement d’abord. Sans logement, c’est la première marche, on ne peut pas continuer sur la deuxième marche, c'est-à-dire la formation et puis ensuite l’emploi. Donc c’est justement ces publics fragiles qu’il faut préserver dans leur maintien dans le logement et leur accès dans le logement.
 
CHRISTOPHE BARBIER Et l’idée de la droite populaire de réserver l’allocation de ressource pour les personnes âgées, aux Français, de nationalité française et aux étrangers qui ont combattu pour la France ?
 
ROSELYNE BACHELOT Ecoutez, nous, nous sommes dans une législation européenne, moi je suis la ministre des Solidarités, la législation qui s’applique en ce domaine doit être préservée.
 
CHRISTOPHE BARBIER Pagaille à Paris à l’UMP, François FILLON contre Rachida DATI. Vous êtes proche de François FILLON alors est-ce que vous êtes à fond avec lui contre Rachida DATI ?
 
ROSELYNE BACHELOT Je suis à fond derrière François FILLON, j’aime bien Rachida DATI, mais là je l’appelle à la modération, à la modération et au respect. Je lui dis, Rachida tu as tenu des propos inqualifiables sur le Premier ministre, la politique et l’ambition politique n’excuse pas tout et il faut vraiment revenir maintenant, je lui dis Rachida il faut revenir à la raison, à la décence. Tu es députée européenne, tu es maire du 7ème arrondissement, c’est véritablement une décision du Premier ministre et du président de la République qui t’ont permis d’avoir ces beaux postes, il faut les exercer, voilà...
 
CHRISTOPHE BARBIER Ca fait un peu déserteur quand même François FILLON qui quitte la Sarthe à laquelle il doit tant.
 
ROSELYNE BACHELOT François FILLON est un homme politique d’envergure nationale et internationale et de toute façon il n’abandonnera jamais la Sarthe.
 
CHRISTOPHE BARBIER Roselyne BACHELOT, merci, bonne journée.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 18 novembre 2011