Interview de M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique, à "LCI" le 26 janvier 2012, sur le programme de François Hollande notamment en ce qui concerne les fonctionnaires et sur le maintien de la candidature d'Hervé Morin à l'élection présidentielle.

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Média : La Chaîne Info

Texte intégral

 GUILLAUME ROQUETTE Alors ça y est, on connait le programme de François HOLLANDE, on connait son programme pour les fonctionnaires, 60.000 recrutements dans l’Education nationale, mais aussi 1.000 recrutements par an dans la police, la justice. Les socialistes traitent mieux les fonctionnaires que la majorité à laquelle vous appartenez.
 
FRANÇOIS SAUVADET Non, ce n’est pas sérieux ce qu’il propose aujourd'hui, d’ailleurs je lui demande de s’expliquer sur comment il va faire. Il nous dit, voilà il faut renoncer au non remplacement du un sur deux des fonctionnaires partant à la retraite. Je vais créer 60.000 postes de fonctionnaires nouveaux dans l’Education, je vais en créer 1.000 dans la justice, dans la police et dans la gendarmerie. Et il nous dit, on gardera le même nombre de fonctionnaires en France. Enfin ce n’est juste pas sérieux. Je comprends pourquoi il a dit qu’il fallait renoncer au non remplacement du un sur deux partants en retraite, parce que, avec ce système, il va falloir ne pas remplacer 70% des fonctionnaires, notamment dans des ministères sociaux. Alors il faut qu’il s’en explique devant les Français. On vient bien qu’il y a un véritable flou, le projet qu’il propose, en tout cas dont il va donner les grandes lignes, est absolument flou, il n’est pas chiffré, il nous dit, on va supprimer 30 milliards de niches fiscales, mais il va les prendre où ces niches fiscales ? Est-ce que ça va être sur la politique du logement, le moment où il faut encourager la relance et la croissance ? Enfin franchement moi je pense que là il faut qu’il y ait, le peuple a besoin de vérité, il faut qu’il n’avance pas masqué. Moi j’ai l’impression que c’est vraiment le chevalier masqué de la présidentielle.
 
GUILLAUME ROQUETTE Sur la fonction publique, on a bien compris, vous nous dites que le programme d’HOLLANDE n’est pas tenable.
 
FRANÇOIS SAUVADET Il n’est pas tenable, il est irréaliste et s’il devait être appliqué avec le même périmètre de fonction publique que nous avons aujourd'hui, il faudrait supprimer, vous m’entendez bien, supprimer 70% des postes de personnes partants à la retraite dans les ministères sociaux…
 
GUILLAUME ROQUETTE Non pas un sur deux, mais plus de deux sur trois ?
 
FRANÇOIS SAUVADET Bien sûr, plus de deux sur trois. Moi j’ai des chiffres à disposition d’ailleurs, je lui transmettrai. Enfin ce n’est tout juste pas sérieux. Vous connaissez un pays en Europe aujourd'hui où on annonce la création de fonctionnaires nouveaux ? Tous les pays qui n’ont pas fait les efforts que nous avons faits de maîtrise de la dépense publique et du non remplacement, qu’est-ce qui se passe dans ces pays-là ? Ce sont des baisses de pensions et de traitements sur les fonctionnaires, ce sont des licenciements secs comme en Angleterre. Donc voilà, ce n’est juste pas sérieux. Alors on peut raconter, on peut essayer de faire plaisir aux Français, je crois qu’aujourd'hui l’ampleur de la crise impose de la vérité et moi je demande au candidat, notamment socialiste, de sortir de ce flou artistique qu’il entretient pour séduire le peuple. L’heure n’est pas à la séduction il est à la responsabilité.
 
GUILLAUME ROQUETTE Alors le problème c’est que malgré ce programme que vous dénoncez, François HOLLANDE n’a jamais été aussi en tête dans les intentions de vote, il creuse l’écart avec Nicolas SARKOZY, est-ce que la majorité peut encore le rattraper ?
 
FRANÇOIS SAUVADET Oui je pense que tout ça, vous savez, ce ne sont pas les sondages qui font l’élection. Le président de la République rentrera en campagne, il aura lui aussi un programme auquel d’ailleurs nous centristes nous voulons contribuer pour porter des valeurs de justice, d’équité, mais aussi de responsabilité. Donc voilà, moi je pense que ce n’est pas perdu, loin s’en faut, et au contraire, il faut qu’on continue à expliquer la politique qui était conduite pendant ces cinq dernières années, et puis surtout, être responsables par rapport au peuple, je le répète. Ce sera vraiment la volonté du président de la République je le sais, qui est inspiré par un seul souci c’est de se sortir de la crise le plus vite possible en travaillant sur la compétitivité et notamment sur la production, sur les conditions dans lesquelles on peut encourager et revenir sur la situation de l’emploi d’aujourd'hui.
 
GUILLAUME ROQUETTE Mais notamment avec la TVA sociale qu’il devrait annoncer dimanche prochain, vous la soutenez cette mesure de TVA sociale ? C’est presque suicidaire d’annoncer une hausse d’impôts comme ça à 87 jours des élections.
 
FRANÇOIS SAUVADET Attendez, on a une situation de l’emploi qui, vous l’avez vu, s’est dégradée et qui s’est dégradée partout en Europe…
 
GUILLAUME ROQUETTE 30.000 chômeurs en plus au mois de décembre.
 
FRANÇOIS SAUVADET On constate que d’autres pays se portent un peu mieux que le nôtre, notamment parce qu’ils ont pris des mesures d’allégements des charges qui pèsent sur le travail. Aujourd’hui 50% de charges sur le travail en France, sur un salaire de 100, en Allemagne 36%. Vous voyez bien le différentiel. Donc ce sont des éléments de compétitivité. Bien sûr que ça peut, ça va susciter débat, mais en même temps, doit-on renoncer à des mesures qui privilégient l’emploi ? Aujourd’hui la question, la vraie question centrale c’est celle de relancer l’emploi et ça passera par la compétitivité de nos entreprises.
 
GUILLAUME ROQUETTE Hervé MORIN le président du Nouveau Centre, le candidat officiel du parti auquel vous appartenez est à 0,5% dans les derniers sondages, vous avez appelé vous à soutenir Nicolas SARKOZY dans une tribune, mais apparemment ça ne suffit pas.
 
FRANÇOIS SAUVADET Non mais vous savez, la crise est tellement grave qu’il n’y a pas place pour des candidatures de témoignage et vous voyez bien que ça ne décolle pas dans les sondages. Il reste scotché Hervé MORIN à 0,5 il ne franchit même pas la barre des 1%. Donc voilà, chacun est appelé à prendre ses responsabilités et moi je lui demande de renoncer à cette candidature dont chacun sait d’ailleurs qu’elle n’ira pas à son terme. Donc nous avons pris nos responsabilités avec un bon nombre de parlementaires, de responsables de fédérations du Nouveau Centre, et nous disons tout simplement, travaillons, sortons de la posture et travaillons à un contrat de mandature. D’ailleurs je vais lancer aujourd'hui même un appel, cet appel que nous avons déjà publié à l’ensemble de ceux qui se reconnaissent dans la démarche que nous avons conduite, ce sera un site « centriste2012.fr ». Tous ceux qui se reconnaissent, qui veulent porter nos convictions dans l’action autour du président de la République, eh bien nous rejoignent. C’est l’appel que je lance aujourd’hui.
 
GUILLAUME ROQUETTE Ca veut dire que vous créez une pétition sur Internet pour appeler au retrait de la candidature d’Hervé MORIN ?
 
FRANÇOIS SAUVADET Non ce n’est pas pour appeler au retrait, c'est simplement pour dire que cette démarche de responsabilité que nous voulons engager elle est soutenue et donc je lance un appel au rassemblement, éviter l’éparpillement ou en tout cas, les candidatures de témoignage qui n’ont pas une portée dans l’opinion.
 
GUILLAUME ROQUETTE Vous êtes un centriste, François BAYROU est à 15%, toujours dans les intentions de vote, il talonne Marine LE PEN, ça doit vous faire réfléchir quand même, est-ce que la place du centrisme ce n’est pas ni la gauche ni la droite ?
 
FRANÇOIS SAUVADET Non mais attendez, on est en train de revivre le remake de 2007…
 
GUILLAUME ROQUETTE Oui mais ça marche.
 
FRANÇOIS SAUVADET Le remake de 2007 ça marche ? Oui ça marche pendant trois mois et ensuite, pendant cinq ans, François BAYROU qui s’est mis dans une posture du « ni ni » a été le commentateur du match France pendant que nous, nous avons décidé d’être l’acteur du match France. Vous savez, renoncer à une candidature à la présidentielle, ce n’est pas renoncer à porter des convictions, c'est simplement se dire est-ce qu’on veut compter dans un débat pendant trois mois ou est-ce qu’on veut compter pendant cinq ans quand on est confronté à une telle crise. Eh bien moi je le dis, nous voulons un groupe parlementaire, nous souhaitons un contrat de mandature avec l’UMP, nous voulons rendre utiles nos idées, c’est ce que nous avons fait pendant les cinq dernières années.
 
GUILLAUME ROQUETTE C'est pour sauver ce groupe parlementaire centriste que vous soutenez Nicolas SARKOZY ?
 
FRANÇOIS SAUVADET Ce n’est pas pour le sauver, c’est simplement parce que les temps exigent de la responsabilité et il faut éviter la dispersion. Vous voyez bien combien l’opinion est troublée. Oui nous voulons former un pacte majoritaire autour du président sortant parce que je pense qu’il est en mesure de sortir le pays avec une majorité élargie, avec une majorité qui soit solide sur ses deux pieds de justice, d’équité, mais en même temps d’engagements qui puisse se permettre de voir un avenir collectif. Et je ne souhaite pas le retour de la gauche.
 
Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 26 janvier 2012