Déclaration de M. David Douillet, ministre des sports, sur la responsabilité civile des pratiquants de sport et la pratique sportive, Paris le 8 février 2012.

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Texte intégral

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Je voudrais tout d’abord vous dire mon plaisir de me retrouver devant la représentation nationale pour discuter d’une nouvelle proposition de loi sur le sport.
Je remercie Eric BERDOATI, auteur et rapporteur du texte. Eric BERDOATI a été un rapporteur très impliqué lors du vote de la loi Ethique du sport, adoptée dans la nuit du 18 janvier 2012, dans cet hémicycle. En tant que Président du comité du supportérisme, il est également un appui important pour le ministère des sports.
Je voudrais le remercier d’être à nouveau à l’initiative de cette proposition de loi qui vient régler une difficulté réelle pour les sports nécessitant l’utilisation d’objets, comme par exemple un vélo en cyclisme.
Tout sportif sait qu’il prend des risques dans le cadre de sa pratique sportive. C’est le fondement de la « théorie de l’acceptation des risques » qui a longtemps prévalu en matière de responsabilité civile des sportifs.
L’une des difficultés de cette théorie était qu’elle ne s’appliquait qu’aux compétitions et non aux entraînements. Il y avait une forme d’incohérence, comme vous l’avez très justement souligné dans l’exposé des motifs.
Lorsqu’elle a eu à statuer sur un cas d’accident dans un circuit fermé, lors d’un entraînement, la Cour de Cassation a donc fait le choix d’harmoniser sa jurisprudence, dans le sens le plus protecteur pour la victime.
L’arrêt du 4 novembre 2010 marque l’abandon de la théorie de l’acceptation des risques que ce soit pour l’entraînement ou la compétition.
La Cour lui substitue le principe de la responsabilité sans faute du fait des choses, défini à l’article 1384 du code civil.
Avec la responsabilité sans faute du fait des choses, les victimes n’ont plus à établir la faute du gardien de la chose à l’origine du dommage causé. Les conditions d’indemnisation des victimes s’en trouvent très largement renforcées.
La Cour a voulu apporter une plus grande protection aux victimes.
Toutefois, ce revirement de jurisprudence va faire peser une charge très lourde sur les organisateurs de manifestations sportives et les fédérations.
Si le nombre de dommages à indemniser devient beaucoup plus important, les assureurs de ces organisateurs ou fédérations vont augmenter très fortement leurs primes d’assurance. C’est d’ailleurs déjà le cas.
Dans ce contexte, il est évident que certains organisateurs seront obligés d’abandonner leur activité, faute de pouvoir payer ou faire payer à leurs licenciés de telles primes.
Ce serait extrêmement regrettable pour le sport français. Des sports et des événements sportifs, qui occupaient jusqu’alors une place importante dans notre patrimoine sportif, seraient en effet amenés à disparaître.
Ce pourrait être le cas d’événements aussi emblématiques que le Tour de France, le Trophée Jules-Verne, l’Enduropale, le Super Cross de Paris-Bercy ou le Rallye d’Alsace.
Des milliers d’emplois sont concernés. 4500 personnes travaillent sur le Tour de France. Le Rallye d’Alsace représente 30 à 45 millions d’euros de retombées directes. Les répercussions économiques seront majeures et il y a urgence à agir.
L’orateur du groupe UMP, Jean-Pierre DOOR, qui est également président du groupe d’études « sports mécaniques », mesure bien les enjeux qu’il y a derrière cette loi.
Vous le voyez, la proposition de loi soumise à votre examen tente de répondre à un problème réel pour le mouvement sportif.
Elle propose d’exonérer de leur responsabilité civile sans faute les pratiquants à l’origine de dommages matériels causés à d’autres pratiquants, lors d’un entraînement ou d’une compétition sur un lieu spécifiquement réservé à la pratique sportive.
On considère que les sportifs connaissent et assument les risques inhérents à leur sport.
Il faudra désormais à nouveau prouver une faute caractérisée pour engager la responsabilité du sportif gardien de la chose ayant causé des dommages matériels.
Il reste la question des dommages corporels. Je suis défavorable aux amendements qui ont été déposés à ce sujet. Si on inclut le corporel dans la loi, les victimes n’auront plus aucun recours. Pourtant, il faut régler la question de leur indemnisation et des primes d’assurance.
Nous allons donc mettre en place un fonds d’indemnisation des victimes. Le monde du sport est prêt à assumer ses responsabilités. J’ai d’ailleurs eu des discussions très positives avec Denis MASSEGLIA et le mouvement sportif sur ce sujet. Le fonds a un autre avantage.
Ce fonds permettra de régler tous les problèmes d’indemnisation et non pas seulement les dommages corporels causés par une chose sous la garde d’un autre sportif.
Concernant les autres amendements qui ont été déposés, je suis favorable à l’article additionnel proposé par Monsieur Lionel TARDY.
La revente illégale de billets pose des problèmes importants de sécurité dans les stades. Elle crée également un effet d’inflation sur le prix des billets. Cela va à l’encontre des efforts faits par les fédérations et les acteurs culturels pour démocratiser l’accès aux manifestations sportives et culturelles.
Mesdames et Messieurs les députés,
Je sais que la représentation nationale est soucieuse de préserver la diversité du sport français. Je vous engage donc à adopter cette loi dont le seul but est de préserver l’existence et le dynamisme de l’ensemble des disciplines sportives.
Je vous remercie.
Source http://www.sports.gouv.fr, le 13 février 2012