Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN Jeannette BOUGRAB bonjour.
JEANNETTE BOUGRAB Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN Parlons des adolescentes. Pas des adolescentes, des jeunes filles qui ont moins de 18 ans et qui tombent enceintes. Le dernier chiffre 2010 : 18 000 jeunes filles mineurs qui sont tombées enceintes en France. Est-ce que ce chiffre progresse ?
JEANNETTE BOUGRAB Alors le chiffre progresse, le nombre dIVG de mineurs en fait a doublé depuis le depuis des années 90, et je disais on assiste à un phénomène très surprenant cest à dire que les nouvelles héroïnes des adolescentes sont des jeunes filles mères. On se souvient du succès du téléfilm « Clem », on voit par exemple la chanson de Colonel REYEL qui cet été était sur les ondes, Aurélie, de cette gamine de 16 ans, qui tombe enceinte et qui garde un bébé, qui est mise à la porte et qui vit dans un HLM. Dans la série « Gli » pareil. Et donc on a une sorte de fascination alors quêtre enceinte à 14 ans cest pas la normalité.
JEAN-JACQUES BOURDIN Fascination, mais fascination pourquoi ? Est-ce quon a réfléchi à cette fascination ?
JEANNETTE BOUGRAB On na pas réfléchi
JEAN-JACQUES BOURDIN Au-delà des exemples que vous donnez effectivement
JEANNETTE BOUGRAB Moi je trouve ça irresponsable. Je trouve ça irresponsable parce que quand on est une enfant on na pas un enfant. Parce que la plupart du temps ces jeunes filles ont un bébé parce quelle manque dinformation, parce quil ny a pas déducation à la sexualité. Elles ont un enfant parce quelles sont victimes dune certaine
JEAN-JACQUES BOURDIN Pas suffisamment déducation à la sexualité, au collège, au lycée par exemple ?
JEANNETTE BOUGRAB Au collège, au lycée. Il y a un travail qui est formidable qui est fait par les infirmières scolaires, mais il fau aller plus loin parce que cest la question du corps
JEAN-JACQUES BOURDIN Qui sont débordés, qui ne sont pas assez nombreuses, mais ça cest un autre débat.
JEANNETTE BOUGRAB Cest un autre débat, mais cest plus large en réalité que ce débat, cest le débat du corps parce quon a constaté par exemple une augmentation de certaines opérations comme la reconstitution de lhymen. On voit assisté à une forme de régression de la question du corps de ces jeunes filles, le retour de la virginité
JEAN-JACQUES BOURDIN On voit aussi le recours à la chirurgie esthétique de plus en plus fréquent.
JEANNETTE BOUGRAB Oui bien sur parce que des jeunes filles en fait elles savent très bien que si jamais leur famille apprenait quelle avait eu un rapport sexuel, elles seraient victimes de violence et de menace. Souvent ces jeunes filles ont un bébé parce quelles ont en détresse, en carence affective, et quelles pensent en réalité quavoir un enfant elles seront enfin aimées. Et enfin cest le troisième point quon voulait signer, cest que comme il ny a pas de lieu ou éventuellement dadulte référent pour pouvoir parler de sujets qui interpellent ces adolescents Quand on est adolescent on a du désir, on se pose des questions, il y a internet. Et il y a internet et il y a la pornographie. Et donc quand on sait que 30 % en réalité des films pornographiques sur internet sont vus par des gamins qui ont 13-14 ans, que presque 90 % des 15-17 ans ont vu un film porno dans lannée qui sest écoulée, quand on sait que ces images dans ces films porno eh bien cest pas je dirais on est un peu loin par exemple des films de Brigitte LAHAIE qui est chroniqueuse sur RMC, ces films sont devenus extrêmement trash, des images dune violences terribles, qui donnent en tout cas une représentation, une image de la sexualité qui nest pas la réalité.
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors vous souhaitez rendre gratuit et anonyme tous les moyens de contraception pour ces jeunes filles mineurs.
JEANNETTE BOUGRAB Je pense que cest important, cest important parce que beaucoup de jeunes filles nont pas accès
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors « je suis mineur, je vais dans une pharmacie, je peux acheter gratuitement cest ça enfin je peux acheter gratuitement je suis remboursé , alors comment je peux faire ? ». Soyons concrets.
JEANNETTE BOUGRAB Alors aujourdhui concrètement une jeune fille qui a 15 ou 16 ans qui a envie Qui se pose des questions, elle a deux possibilités. Soit elle va dans un planning familial que tout le monde connait, soit elle va dans un centre de planification qui en fait est rattaché aux hôpitaux. Le problème cest que des plannings il ny en a pas sur tout le territoire. Donc il y a une vraie inégalité entre les zones rurales, y compris les zones urbaines sensibles, parce que certaines associations qui peuvent proposer des contraceptifs gratuits refusent daller dans certains quartiers parce quelles savent pertinemment que les jeunes filles qui sortiront de lassociation se feront agresser parce quelles seront considérées comme des filles indignes. Voilà, en gros comme des filles faciles et elles se feront agresser par les jeunes hommes. Donc cest la raison pour laquelle avec Israël NISAND, ce que lon pense cest quil faut travailler avec le réseau de professionnels, il faut travailler aujourdhui il y a le pass contraception, et cest vrai que je rendrais hommage aux infirmières scolaires en Poitou-Charentes et en Ile de France, mais cest pas suffisant. Ce nest pas suffisant et cest la raison pour laquelle on doit travailler avec les pharmaciens, avec les médecins généralistes, avec les gynécologues obstétriciens et donc il faut faire travailler ce réseau pour que nimporte quel point Que vous soyez à Châteauroux, que vous soyez à Roubaix, que vous soyez à Béthune
JEAN-JACQUES BOURDIN Concrètement « je suis une jeune fille, jai mon premier rapport sexuel »
JEANNETTE BOUGRAB Aujourdhui, sil ny a pas de planning, et sil ny a pas de centre de planification ce nest pas possible. Voilà, ce nest pas possible. Cest la raison pour laquelle vous savez le cout dune plaquette de pilules, vous savez aussi que ce mode de contraception nest pas nécessairement adapté à des jeunes filles, que
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc la pilule gratuite pour les jeunes filles de moins de 18 ans ?
JEANNETTE BOUGRAB Ce qui est important, pas uniquement la pilule, il y a le patch, il y a limplant, parce que souvent vous savez aujourdhui un mariage sur deux se solde par un divorce, il y a une garde alternée, une semaine la jeune fille elle est chez sa mère, le père, donc elle peut oublier sa plaquette et on a laccident. Autre chose, la plupart du temps les gamines ont peur que leur mère tombe sur la plaquette de pilules, donc souvent elle le cache et ça devient difficile. Aujourdhui il y a eu des progrès, et la seule chance
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc tous les moyens de contraception, tous, gratuits, on est bien daccord ?
JEANNETTE BOUGRAB Ca devrait être gratuit pour toutes les jeunes filles.
JEAN-JACQUES BOURDIN Et anonyme.
JEANNETTE BOUGRAB Sauf si les parents sont parce quil y a des familles où tout se passe bien.
JEAN-JACQUES BOURDIN Cest à dire que la jeune fille va chez un pharmacien, on lui donne gratuitement la pilule ?
JEANNETTE BOUGRAB Non, il faut une consultation. Il faut une consultation.
JEAN-JACQUES BOURDIN Et la consultation est gratuite ?
JEANNETTE BOUGRAB Oui, il faut la prévoir. Cest ce que nous proposons, parce que aujourdhui vous avez des jeunes filles qui ont peu de revenu, parce que comme on le disait ces grossesses précoces, ces gamines Relisez le dossier de Marie-Claire ce mois ci, cest des gamines qui sont souvent de milieux défavorisés. Quand elles doivent payer 30 ou 40 euros En plus la consultation cest impossible. Et vous savez il y a eu un testing à Nice par exemple sur la pilule du lendemain qui est gratuite pour les mineurs, qui est gratuite, vous allez chez votre pharmacien, vous pouvez avoir une pilule gratuite. LIGV est gratuite et anonyme pour les mineurs également. Mais par contre ce qui au quotidien éviterait lavortement eh bien on ne le rend pas gratuit et anonyme. Et quand des gamines vont demander parfois la pilule du lendemain, alors que le pharmacien est en obligation de lui donner, certains refusent, refusent par idéologie
JEAN-JACQUES BOURDIN Jeannette BOUGRAB, est-ce que vous pensez que lUMP partage ce point de vue ? Le gouvernement et le président de la République et candidat, ce soir ?
JEANNETTE BOUGRAB Ecoutez, en tout cas . Moi ce que je peux dire cest quil y a convergence de vue, il y a lIGAS, vous savez linspection générale des affaires sociales qui a rendu un rapport dans ce sens, en 2010, il y a eu une position de la direction générale de la Santé, il y a eu le conseil danalyses stratégiques, il y a eu le rapport de Bérangère POLETTI qui est quand même députée UMP, donc qui est présidente du groupe
JEAN-JACQUES BOURDIN Non mais daccord, mais enfin jai pas entendu ni le Premier ministre, ni le président candidat nous parler de ça.
JEANNETTE BOUGRAB Cest la raison pour laquelle on sest saisi de ce problème, ministre de la Jeunesse, et quon
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous voulez pousser Aller dans ce sens.
JEANNETTE BOUGRAB On la fait, et je voulais vous remercier davoir reçu Boris CYRULNIK on la fait sur le suicide des enfants et désormais la prévention du suicide des enfants est inscrit dans le plan de prévention du suicide, et on le fait aujourdhui sur les grossesses précoces, ça sert à ça un ministre de la Jeunesse, cest en tout cas être utile pour les jeunes.
EAN-JACQUES BOURDIN Merci Jeannette BOUGRAB dêtre venue nous parler de ça. JEANNETTE BOUGRAB Cest moi qui vous remercie.
JEAN-JACQUES BOURDIN Et je poserai la question à un autre membre de du gouvernement Roselyne BACHELOT. On verra, ancienne ministre de la Santé et aussi proche de François FILLON.
JEANNETTE BOUGRAB Mais je pense quon sera à peu près, vous le savez elle est très progressiste, on partage des idées communes, alors jespère en tout cas quelle me soutiendra.
Source : Premier ministre, Service dInformation du Gouvernement, le 24 février 2012