Texte intégral
Mesdames et messieurs les parlementaires, monsieur le secrétaire général du ministère de lAgriculture, mesdames et messieurs les représentants du monde agricole, et surtout chers amis. Je suis très heureux de vous recevoir aujourdhui Rue de Varenne, pour ma troisième cérémonie de vux, cette fois-ci pour lannée 2012, qui est une année un petit peu particulière, jaurai loccasion dy revenir. Je vais essayer de ne pas être trop long, cest toujours des promesses que lon fait en début de discours, mais quand je vois la qualité des buffets qui sont dressés à lextérieur, je suppose que vous navez quune envie, cest que le ministre fasse le plus court possible, et que vous puissiez vous précipiter vers les magnifiques produits agricoles que jai vus à lextérieur. Mais comme je nai pas souvent loccasion davoir autant damis de cette qualité autour de moi, je voudrais en profiter pour passer un certain nombre de messages sur lagriculture et bien entendu, cher Louis GUEDON, la pêche française.
Depuis 3 ans que je suis ministre de lAgriculture, nous avons fait, avec le président de la République, avec mes amis parlementaires, que je salue, des choix stratégiques pour lagriculture française. Des choix qui sont nouveaux, des choix qui ont pu paraître parfois audacieux, mais des choix qui sont nécessaires. Et je suis convaincu que le jour où je fermerai la porte de la Rue de Varenne et que je quitterai ce ministère, nous pourrons nous dire que nous avons fait entrer définitivement lagriculture française dans la mondialisation, dans la compétitivité, et que les choix que nous aurons fait tous ensemble, seront des choix irréversibles. Après 3 ans passés à la tête de ce ministère, lagriculture naura plus le même visage, et lagriculture sera plus forte, mieux à même daffronter la concurrence européenne et la concurrence mondiale. Cétait pour moi le défi à relever, et je crois que tous ensemble, avec les administrations auxquelles je rends hommage, avec les responsables syndicaux, avec les professionnels, avec les parlementaires qui ont joué un rôle déterminant avec ladoption de la loi de modernisation de lagriculture et de la pêche, nous aurons réussi à relever ce défi.
Le premier choix courageux que nous avons fait, cest celui de la compétitivité. La compétitivité cétait un mot tabou dans lagriculture française, cest devenu, aujourdhui, une exigence pour chacune des exploitations agricoles, et je rends hommage à tous les paysans français qui ont su sadapter à cette exigence de compétitivité. La compétitivité cest la réduction du coût du travail, nous lavons fait sur le travail occasionnel. A un moment où la France débat de la nécessité de réduire les charges sur le travail, les paysans français peuvent dire que, eux, ont fait cet allègement de charges, ont compris cette exigence, et que nous avons, ensemble, réduit le coût du travail occasionnel, qui a été abaissé, pour être très précis, de près de 13 euros à un peu plus de 9 euros de lheure. Il en allait de la survie de milliers dexploitations agricoles françaises. Et jétais encore dans le Limousin, jai eu loccasion de discuter avec des producteurs de pommes, qui mont redit à quel point il était essentiel quon réduise les charges qui pèsent sur le travail en France. Et jappuie totalement linitiative du président de la République, dengager cette réduction des charges sur le travail, pour gagner en compétitivité et être tout simplement à la hauteur de nos concurrents européens. Je ne parle même pas du Brésil, de la Chine, de lInde, je vous parle de lAllemagne, je vous parle de lEspagne, je vous parle de lItalie. Nous devons réduire les charges qui pèsent encore sur le travail, en particulier le travail agricole.
Deuxième choix que nous avons fait, la réduction des coûts énergétiques. Je pourrais citer beaucoup de décisions qui ont été prises, qui sont parfois oubliées, mais le plan de performance énergétique, cest cette majorité qui la voulu, cest cette majorité qui la mise en place. Le développement de la méthanisation, cest cette majorité qui la voulu, cest cette majorité qui la mise en place. Il mest apparu très rapidement, en voyageant très souvent, comme vous le savez, en Allemagne, que nous ne pouvions pas continuer à avoir des tarifs de rachat du biogaz, pour la méthanisation, très en deçà de ce que pratiquent les Allemands, quon ne pouvait pas accepter quil y ait 4000 unités de méthanisation en activité en Allemagne, quand il y en avait à peine une dizaine en France. Là encore, compétitivité, cest une exigence absolue. Et je souhaite quen matière de méthanisation, nous parvenions, dans les 10 ans, à faire sortir de terre plus de 1000 unités de méthanisation en France, pour rattraper notre retard par rapport à lAllemagne, sur ce dossier.
La compétitivité cest aussi lorganisation des filières, et des interprofessions, alors ça cest un vaste sujet lorganisation des filières, jaurai loccasion de revenir dessus. Il faut que nous travaillions ensemble. Avant tous les problèmes techniques, avant tous les problèmes économiques, il y a en France une difficulté culturelle, nous ne savons pas travailler ensemble. Nous dressons des murs les uns entre les autres, entre les industriels, entre les grands distributeurs, entre les producteurs, nous sommes tous dans la même barque, les murs doivent tomber, et nous devons travailler ensemble, et les filières, de ce point de vue là, ont accompli, depuis 3 ans, sous notre impulsion, un travail de réorganisation qui est absolument décisif. Et je constate que ce sont les filières qui ont le plus avancé dans leur réorganisation, qui ont aujourdhui les meilleurs résultats économiques, jespère que cela pourra servir de modèle pour tous. Prenez lexemple, que je prends souvent, de la viticulture dans le Languedoc-Roussillon. Les viticulteurs de Languedoc-Roussillon ont fait un travail exceptionnel, ils ont consenti des sacrifices personnels humains extraordinairement importants, pour arracher leurs vignes, pour gagner en qualité, pour exporter, mais ils ont su dans le même temps réorganiser les filières, ils ont su limiter le nombre dinterprofessions pour être plus compétitifs. Eh bien ce que les viticulteurs du Languedoc ont réussi à faire, dautres filières commencent également à le faire, mais je souhaite que ça serve de modèle pour lagriculture française dans son ensemble. Et vous me permettrez de penser que ça pourrait servir de modèle à léconomie française dans son ensemble. Nous sommes tous dans le même bateau. On ne doit pas lutter les uns contre les autres, on doit être solidaire les uns des autres, cest une des voies de redressement de léconomie française.
Je pourrais aussi citer la filière du bois, la réorganisation que nous avons, avec cette majorité, engagée sur la forêt privée. Je pense à la participation des communes forestières, je pense au travail, tout à fait remarquable, qui a été engagé par lONF pour mieux valoriser le bois, qui est une des très belles filières industrielles et agricoles de la France. Là aussi, quand on sorganise, les résultats viennent.
Jaurai pu citer également des points plus techniques, mais qui sont essentiels, parce quil ny a pas de détail dans lagriculture française, la réforme des systèmes de cotations, laudit que nous avons engagé sur les abattoirs parce que nous savons quil faudra réformer aussi notre outil industriel, notamment en matière dabattage, si nous voulons être toujours plus comp??titifs. Ces choix ont été faits, ces choix ont été assumés depuis 3 ans.
Je termine sur ces choix de compétitivité, par un point qui me tient particulièrement à cur, parce quil a été au cur de nos débats sur la loi de modernisation de lagriculture et de la pêche, ce sont les contrats. Les contrats je ne les ai jamais vendus comme la solution miracle aux difficultés de lagriculture française, mais les contrats cest une garantie de visibilité et de stabilité pour les producteurs. Et moi ce que je porte au fond de moi comme lexigence, cest davoir des paysans français correctement rémunérés, qui ont devant eux le minimum de visibilité nécessaire pour investir dans des conditions de sécurité acceptables. Vous ne ferez pas venir un jeune de 20, de 22 ou de 23 ans sur une exploitation, vous ne lui ferez pas investir sur cette exploitation, financer sa remise aux normes, si vous ne pouvez pas lui dire que sur 4 ans, sur 5 ans, il a un minimum de visibilité sur son revenu, cest indispensable. Je ne mésestime pas les difficultés qui se posent dans cette révolution que représentent les contrats, je dis simplement que nous sommes en train dy arriver, notamment dans la filière laitière, où DANONE a déjà mis en place des contrats avec les producteurs, où jai déjà participé à la signature du premier contrat, et on doit progresser, car les contrats cest la stabilité, et la stabilité cest ce que souhaitent des producteurs qui sont exposés à un nombre de risques, climatiques, environnementaux, sanitaires, absolument considérables. La responsabilité politique aujourdhui cest de mettre de la stabilité là où il y a de linstabilité. Cest de mettre de la sécurité et de la protection là où il y a de linsécurité et du risque. Les contrats, de mon point de vue, répondent à cette exigence.
Le deuxième choix que nous avons fait depuis 3 ans, sur lequel je nai jamais dévié dun pouce, pas plus que sur le choix de la compétitivité, cest le choix européen. Le choix européen ça a consisté dabord à dire la vérité aux producteurs, en leur rappelant quon ne peut pas à la fois profiter des aides européennes sur le terrain, dans nos régions et dans nos départements, et dans le même temps tricher avec ces mêmes aides européennes, en acceptant de distribuer des aides illégales sur le terrain à un certain nombre de producteurs. Tout cela a bien failli me coûter mon poste dans les premières semaines de ministre de lAgriculture, ça aurait été dommage, vous lavouerez, mais je ne regrette pas davoir fait ce choix-là, même sil y a pu y avoir ici ou là des maladresses dans les expressions. Je pense que pour les agriculteurs français, réconcilier ce qui est fait à léchelle nationale et ce qui est décidé à léchelle européenne, cest le choix courageux et cest le seul choix qui vaille. Ceux qui aujourdhui tapent à bras raccourci sur lEurope, ne devraient jamais oublier quil ny a pas dagriculture française sans le soutien de la Politique Agricole Commune.
Sur cette Politique Agricole Commune, et dans le choix que nous avons fait, il y a une chose dont cette majorité, dont le président de la République, dont nous tous ici nous pouvons être fiers, cest davoir sauvé le budget de la Politique Agricole Commune, car il en allait de la survie des paysans français. Lorsque je suis arrivé ici, en juillet 2009, la proposition de la Commission Européenne était de baisser le budget de la PAC de 30 à 40%. Après 1 an de négociation avec les Allemands nous avons eu une position commune franco-allemande sur le maintien du budget de la PAC. Après 2 ans de négociation, avec la Commission Européenne, au plus haut niveau, entre José-Manuel BARROSO et le président de la République Nicolas SARKOZY, nous avons obtenu le maintien du budget de la PAC. Cest un acquis majeur, un acquis essentiel, pour tous les paysans français pour les années à venir. Et je tiens à redire que qui que ce soit qui me succédera, ici, il aura un devoir, cest de garantir que ce résultat qui a été obtenu par cette majorité, ne soit jamais remis en cause. Il ne faut même pas accepter dentrer dans une négociation sur le montant du budget de la PAC. Nous avons obtenu sa sécurisation à leuro près, nous devons lassurer jusquau bout de la négociation.
Nous avons aussi obtenu, en matière européenne, une régulation des marchés, là aussi ce nétait pas gagné davance. Je me souviens de débats avec Marianne FISCHER-BOEL, qui mexpliquait que les marchés cétaient cette espèce de main invisible qui répartissait correctement les richesses, et quà partir du moment où il y avait une crise, il fallait laisser les marchés fonctionner et que ça permettrait de séparer le bon grain de livraie. Idiotie et scandale intellectuel, je nhésite pas à le dire. Eh bien contre cette idiotie, et contre ce scandale intellectuel qui consiste à croire quen matière agricole les marchés font la pluie et le beau temps de manière positive, nous avons commencé à mettre en place une régulation. Nous avons obtenu le paquet lait, nous sommes en train dobtenir, sur la viticulture, un renversement sur les droits de plantation pour rétablir ces droits de plantation qui sont indispensables aux viticulteurs et à la qualité des vins français. Je ne céderai pas un pouce sur cette idée de régulation des marchés qui me paraît indispensable.
Enfin, troisième exemple que je veux citer sur lEurope, et je salue la présence du président des Restos du Cur ici, Olivier BERTHE, cest ce que nous avons obtenu sur laide aux plus démunis. Ça peut vous paraître un sujet accessoire, cétait, pour moi, un combat moral essentiel. En pleine période de crise, voir lUnion Européenne, supprimer les crédits aux plus démunis, jai voulu dire haut et fort « non, jamais, et pas avec moi. » Et on sest battu. On sest battu contre lavis de beaucoup dEtats européens, on sest battu avec lAllemagne qui ne concevait pas que lUnion Européenne puisse continuer à financer un programme dont je reconnais quelle ne bénéficie pas. On sest battu avec laide des parlementaires, et on sest battu avec laide des associations, et je tiens à rendre hommage à leur sens des responsabilités sur la manière dont on a conduit cette négociation. Eh bien nous avons réussi à obtenir, contre toutes les évaluations faites par nos amis diplomates, le maintien de cette aide aux plus démunis, à léchelle européenne, jusquen 2014, et je souhaite que dès maintenant nous commencions à réfléchir sur les modalités de financement après 2014, pour garantir là aussi la stabilité des ressources financières dassociations aussi remarquables que les Restos du Cur qui en pleine période de crise apportent le soutien aux plus démunis, ça me paraît absolument indispensable. Mais là encore, évitons les grandes paroles, évitons les grandes déclarations définitives sur les antennes ou sur les ondes, ce qui compte cest le résultat. Et cest en faisant le choix européen, cest en négociant, cest en allant à Berlin, cest en expliquant nos arguments, cest en prenant le temps de convaincre, quon arrive aux résultats. Monter sur son tonneau et faire de grandes déclarations, ça ne change rien au résultat final. Or aujourdhui lexigence politique ce nest pas les déclarations, ce sont les résultats, cest ce quon peut dire les yeux dans les yeux aux Français dont on a la responsabilité. Et de ce point de vue je suis fier de pouvoir dire les yeux dans les yeux du président des Restos du Cur, que ces financements sont sécurisés jusquen 2014, et quon fera le nécessaire pour trouver des solutions pour après 2014.
Le troisième choix que nous avons fait, avec le président de la République, avec cette majorité, cest le choix du monde, cest le choix de lexportation, cest le choix de louverture vers les marchés qui sont aujourdhui porteurs de croissance. Nous lavons fait, je le dis devant Dominique LANGLOIS, devant Pierre CHEVALIER, sur un sujet qui me tenait particulièrement à cur, qui était lélevage bovin. Nous avons les meilleures bêtes bovines au monde, la meilleure génétique, la meilleure production, et nous avons, jose dire nous avions, une situation dramatique pour les éleveurs bovins en France. Cherchez lerreur. Comment peut-on avoir autant datouts dans les mains, et ne pas arriver à les valoriser pour les producteurs ? Cest parce que nous navions pas fait, jusquà présent, les bons choix économiques. Eh bien en mettant en place un GIE à lexportation, en ouvrant les marchés, en Russie, en Turquie, en Afrique du Nord, nous avons réussi à favoriser lexportation, et enfin à faire remonter les prix pour que les producteurs aient, sur le terrain, le revenu de leur travail. Je ne dis pas que tout est résolu, je sais très bien que les coûts de production restent élevés pour les producteurs bovins, jétais encore dans le Limousin hier, je vois Pierre CHEVALIER, et je sais que ça reste difficile, simplement cette voie de lexportation, de la mise en place du GIE Export, tout cela donne des résultats, fait monter les prix, améliore le revenu des producteurs, cest le choix à faire, et cest le choix à poursuivre.
Enfin, toujours sur ce choix du monde, je rappelle que nous avons réussi à faire prendre conscience aux 20 pays les plus puissants de la planète, que la question de lalimentation mondiale était probablement une des questions les plus stratégiques du 21ème siècle. On ne sait pas comment nourrir la population dans les 10, 20 ou 30 prochaines années. On ne sait pas comment faire pour produire plus, tout en produisant mieux, cest-à-dire en respectant les sols, en respectant lenvironnement, en respectant la propriété des terres dans les pays en développement. On ne sait pas, encore, comment stabiliser les prix pour éviter des variations de 100, 200 ou 300%, qui déstabilisent les producteurs. Eh bien en mettant lagriculture au cur du G20, à linitiative du président de la République, nous avons réussi à obtenir des résultats concrets, il y aura enfin de la transparence sur ces marchés, il y aura enfin le début dune organisation et dune lutte contre la spéculation sur les marchés de matières premières agricoles. Il y aura enfin un système dalerte, il y aura enfin une limitation des restrictions à lexportation pour que lorsquun pays développé décide de limiter ses exportations, eh bien les pays les plus pauvres ne soient pas les premiers à en souffrir. Tout cela, nous ne sommes pas au bout du chemin, tout nest pas encore achevé, mais nous avons progressé, et surtout nous avons enfin fait prendre conscience de la gravité de ce sujet, nourrir la planète, aux yeux des plus grandes puissances mondiales, je crois que là aussi cest un des choix importants que nous avons fait et qui sur 3 ans a donné des résultats.
Alors, ces choix stratégiques, choix de la compétitivité, choix de lEurope, choix du monde, je vous le disais, ils donnent aujourdhui, en ce début dannée 2012, des résultats, et ces résultats je voudrais évidemment les attribuer dabord aux agriculteurs et aux pêcheurs eux-mêmes, car ce sont eux qui ont fait le travail, en priorité, eux qui se sont réorganisés, je voudrais saluer les professionnels, qui se sont tous engagés pour participer à ces débats, pour permettre de faire bouger les lignes, et puis vous me permettrez quand même, même si ce nest pas lusage dans des vux, de rendre hommage aussi à la qualité de ladministration du ministère de lAgriculture, le secrétaire général, Jean-Marie AURAND, sait tout le respect et ladmiration que je porte au personnel du ministère de lAgriculture, et puis de manière plus personnelle, à lensemble de mon cabinet, mon directeur de cabinet doit être ici, Jean-Marc, en ton nom cest tout mon cabinet que je veux saluer, car il ne compte pas ses heures de travail et il fait, là aussi, un travail tout à fait remarquable au service des agriculteurs et des pêcheurs français.
Ces résultats cest dabord la prise de conscience en France de ce que lagriculture est un secteur stratégique, que derrière lagriculture il y a la qualité de notre alimentation, que derrière lalimentation il y a ce programme national pour lalimentation que nous avons mis en place, il y a des nouvelles règles nutritionnelles, il y a le développement des circuits courts, il y a la possibilité, désormais, pour les collectivités locales de saffranchir de la règle du mieux-disant, pour aller chercher des produits locaux, même sils sont un peu plus chers, parce que je dois dire que la première fois que jai visité une cantine scolaire en Normandie et que je me suis aperçu quen Normandie on ne consommait que des pommes du Chili parce quelles étaient moins chères que les pommes normandes, je me suis dit on va prendre le temps quil faut, on va y mettre lénergie nécessaire, mais on va changer ça. Et on a changé ça. On permet, aujourdhui, aux appels doffre dans les cantines scolaires, de saffranchir pour 20% de leurs volumes, de la règle du prix, pour préférer un produit de proximité. Je vais vous dire, là aussi je parle pour mes successeurs, je crois que si on arrivait à 50% ce serait une bonne chose et ça permettrait de valoriser davantage les circuits courts et les produits locaux.
Je pense que nous avons aussi ouvert des débats sur laménagement du territoire, nous avons fait prendre conscience, avec la taxe sur les transactions sur les terres agricoles et sur la spéculation sur les terres agricoles, avec lObservatoire des prix agricoles, de la nécessité absolue quil y a à préserver les terres agricoles en France. On ne peut pas se dire une grande puissance agricole et de lautre côté laisser partir des milliers dhectares de terres agricoles chaque année. Il est impératif de protéger ces terres et de défendre les terres agricoles, là aussi nous avons pris des décisions dans ce domaine, et nous avons ouvert le débat. Nous avons fait prendre conscience aussi, je le dis devant Jean-Marie BINETRUY qui est élu dune zone de montagne, de ce que lagriculture française navait pas vocation à se concentrer dans certains points du territoire, mais quelle participait de laménagement du territoire et quelle devait être présente partout, dans les zones de plaine, dans les zones de piémont, dans les zones de montagne, parce quagriculture veut dire emploi, agriculture veut dire activité, et pour vous dire le fond de ma pensée, agriculture veut dire vie. Là où il y a de lagriculture, il y a de la vie, et cest pour ça quil faut protéger lagriculture partout sur les territoires français.
Ces résultats ce nest pas simplement cette prise de conscience, ce nest pas simplement la mise en place de ce grand débat sur lavenir de lagriculture française et du lien entre agriculture et alimentation, cest aussi des résultats économiques. Nous sommes une grande puissance agricole mondiale et nous avons vocation à le rester. Nous en avons souvent discuté avec les responsables syndicaux que je vois ici, dans un moment où la crise économique frappe lEurope toute entière, et frappe durement la France, quel est le seul secteur qui enregistre aujourdhui des excédents commerciaux en forte croissance, qui continue à représenter des centaines de milliers demplois, qui ne connaît pas la crise de manière aussi dure que dautres secteurs, qui arrive à prendre des parts de marché à lexportation, cest lagriculture. Eh bien quand on a un secteur économique qui marche, permettez-moi de vous dire que cest le bon sens de le soutenir, de le défendre, et de lui permettre de rapporter encore plus demplois et de richesses à la nation. Je rappelle que lindustrie agroalimentaire aujourdhui, cest plus de 400 000 emplois, cest des milliards deuros dexcédent sur notre balance commerciale, là aussi hommage soit rendu à la qualité de notre industrie agroalimentaire qui permet de valoriser les produits français, cest un atout majeur pour notre économie. Ces résultats économiques ils se traduisent, mais pas suffisamment encore, dans les revenus des paysans. 2009 a été une année catastrophique pour le revenu des paysans, 2010 a été une année de reprise, 2011 une année de stabilisation, mais je constate quen 2011 les points positifs que nous avons pu enregistrer sur les prix, ont malheureusement été quasiment effacés par laugmentation des coûts de production et par certaines catastrophes que nous avons connues comme la sécheresse, donc il faut continuer à saccrocher pour améliorer encore le revenu des paysans, cest la priorité absolue. Le paysan français, comme le pêcheur français, doit avoir des revenus décents.
Enfin je tiens à dire, sur le point des résultats, que nous ne resterons une grande puissance agricole, et nous ne continuerons à avoir cette influence agricole en Europe et dans le monde, qui est respectée, jusquau fin fond de la Chine, que si nous sommes capables de continuer à innover et à soutenir la recherche agricole. Ne sombrons pas dans lobscurantisme sur ce sujet. Nous avons besoin dinnovation et de recherche. Alors je ne vais pas soulever ce soir les sujets qui fâchent, car sinon ça pourrait gâcher la soirée, donc je vais prendre un sujet qui est hors débat, qui au moins ne prête pas à la controverse, la question à laquelle je suis très attaché, de lostréiculture française et des huîtres. Il y a une surmortalité des huîtres qui touche tout le littoral français, si vous ne faites pas de recherche, si vous naméliorez pas la bio-résistance des huîtres, si vous navez pas lIFREMER, si vous navez pas les chercheurs, eh bien il ny a plus dostréiculture, en France, dans quelques années. Alors avant de condamner la recherche en agriculture, avant de repousser toute innovation, avant de repousser toute recherche sur les biotechnologies, regardons aussi ce que ça nous rapporte, regardons aussi à quel point ça nous protège, et regardons aussi à quel point ça nous attire le respect des autres puissances agricoles mondiales. Sur ce point de vue je tiens à saluer là aussi le travail qui est fait par les instituts de recherche qui sont sous ma tutelle, et à dire à quel point je suis fier de lenseignement agricole français, qui est un enseignement de très grande qualité, et là aussi, en période de crise, dont je constate très simplement quil assure un taux demploi de quasiment 9 élèves sur 10 à la sortie, jaimerai que ce soit le cas de tous les autres instituts denseignement en France.
Enfin, sur ces résultats, tous ceux qui connaissent un tout petit peu lEurope, savent que désormais la France est à nouveau la puissance qui donne le la en Europe, sur les questions agricoles. Tant mieux. Et ça doit rester le cas, car nous avons vocation à rester la première puissance agricole européenne.
Alors vous me permettrez de terminer en disant quil reste des choses à faire, et je redis suffisamment souvent dans mes interventions politiques à quel point je crois à un discours de sincérité, et à quel point je crois aussi à un discours dhumilité, pour vous dire que malgré la fierté que nous pouvons tous avoir, davoir fait passer à lagriculture française un cap très important, qui est le cap de la compétitivité, de la modernité, de louverture au monde, de la réorganisation, eh bien oui il reste des choses à faire, et il nous reste des choses à accomplir. Sur 3 mois, ça va faire court, mais je dis quand même ce que je souhaiterai voir progresser pour être tout à fait satisfait.
La première chose qui doit progresser, cest un message que je passais en introduction, cest que le monde agricole doit être un monde rassemblé. La question nest plus de nous diviser les uns les autres, la question est de nous rassembler pour faire face à nos concurrents qui ne nous feront aucun cadeau, ni nos concurrents européens, ni nos concurrents venus des pays émergents. Ne cédons pas à cette facilité dopposer les uns aux autres, dopposer par exemple lagriculture biologique aux grandes cultures, comme si on ne pouvait pas à la fois avoir une agriculture biologique puissante, que je soutiens, et en même temps continuer à exporter nos produits vers les marchés extérieurs qui rapportent de la richesse et des emplois au pays. Pourquoi est-ce quà chaque fois que lon parle du bio, on loppose aux grandes cultures, et quà chaque fois quon parle de grandes cultures, on loppose au bio ? Ça na aucun sens. Il y a de la place pour tout le monde. Cessons dopposer lagriculture de proximité, les circuits courts et lexportation, comme si lavenir de la culture française ne pouvait reposer que sur les circuits courts ou que sur lexportation, alors quil est évident que lavenir de lagriculture française repose aussi bien sur le développement des circuits courts que sur le maintien de filières exportatrices puissantes, les deux ne sont pas incompatibles, il y a de la place pour tout le monde. Arrêtons dopposer les producteurs, les industriels et la grande distribution, alors que chacun a besoin de chaque maillon de la filière. Et si jai voulu mettre en place un observatoire des prix et des marges, dont jai vu le représentant, Philippe CHALMIN, dans la salle, si jai voulu renforcer cet observatoire, cest bien parce quen mettant de la transparence sur la formation du prix, quon évitera ces oppositions stériles entre les différents acteurs de la filière. Nopposons pas non plus les filières entre elles, les grandes cultures dun côté, les éleveurs de lautre, essayons au contraire, comme la proposé Xavier BEULIN, et je salue toute lénergie quil a mis à avancer dans cette direction-là, essayons au contraire de mettre en place des contrats interfilières pour sécuriser un prix dapprovisionnement sur lalimentation animale qui soit stable pour les éleveurs. Il faut de la solidarité là où il y a eu trop de querelles. Il faut du travail en commun là où il y a eu trop de divisions. Et il faut du rassemblement et de lunité là où il y a eu trop de murs dressés entre les différentes parties de lagriculture française. Jen suis profondément convaincu. Et cest un message essentiel à mes yeux. Nopposons pas non plus les syndicats agricoles les uns aux autres. Je suis le premier ministre de lAgriculture à avoir participé à chaque congrès de chaque organisation syndicale représentative du monde agricole. Quest-ce que je nai pas entendu. Je serai aller faire des fréquentations très douteuses je ne sais trop où, je naurai pas eu moins de critiques, mais cest le rôle du ministre de lAgriculture dêtre au service de tous les paysans, et cest le rôle du ministre de lAgriculture découter tous les représentants du monde agricole. Et je continue à penser, même si cela doit rester un choix libre et indépendant des interprofessions, que les interprofessions auraient tout intérêt à travailler avec lensemble des représentants du monde agricole. Je le dis comme je le pense. Réunissons-nous, ne nous divisons pas, faisons preuve de sens de responsabilités plutôt que de nous opposer les uns aux autres, cela me paraît essentiel.
La deuxième chose sur laquelle il nous reste des progrès à faire, cest sur la simplification des règles. Là-dessus, soyons clairs, soyons honnêtes, le compte ny est pas. Et je comprends le ras-le-bol des producteurs sur le terrain, qui me disent que dans une situation économique difficile, on vient les embêter pour un centimètre carré de prairie qui a été retourné, on vient les embêter pour un millimètre deau qui ne correspond pas aux normes de lAgence de leau, on vient systématiquement les critiquer, on ne reconnait pas les efforts qui ont été faits, on ne simplifie pas leur vie quotidienne, on ne les aide pas à produire dans de bonnes conditions. Il est impératif, et cette fois-ci ce nest pas à reporter dans les 3 mois, que dans les jours et dans les semaines à venir, nous obtenions des résultats sur lallègement de certaines contraintes et surtout sur la simplification de la mise en uvre de ces règles, car ce sont moins les règles qui posent problème, que la mise en uvre tatillonne et parfois suspicieuse de ces règles sur le terrain. Je passerai le message aux DRAAF et aux DREAL, que je réunirai dans les prochains jours, pour leur demander de respecter ces orientations qui sont celles fixées à Pamiers par le président de la République, et sur lesquelles je me bats depuis désormais 3 ans, oui à la conjugaison entre environnement et agriculture, chacun sait que cest lavenir de notre agriculture qui est en jeu, mais les règles environnementales nous devons les appliquer avec le minimum de bon sens que les producteurs sont en droit dattendre de leur administration.
La troisième chose pour laquelle il reste du travail à faire, et jen termine par-là, cest évidemment sur lEurope, nous avons sécurisé le budget de la Politique Agricole Commune, je lai dit, mais il faut que sur la régulation nous obtenions que tous les marchés soient régulés. Pas simplement le marché du lait, pas simplement la viticulture sur laquelle nous sommes en passe, je pense, demporter le combat, mais sur tous les marchés il faut de la régulation, parce que régulation veut dire sécurité et régulation veut dire amélioration des performances des paysans qui, avec la sécurité suffisante, seront encore plus efficaces quils ne lont été par le passé. Et puis il faudra mener la bataille du verdissement, car le verdissement tel quil est proposé aujourdhui ne convient pas et il reste un travail important à faire.
Voilà les quelques éléments que je voulais vous présenter, vous voyez que comme de bien entendu je nai pas tenu mes promesses sur un discours court, mais cétaient des choses qui me tenaient à cur, dautant plus à cur que jai entamé, comme vous le savez, un tour de la France rurale depuis le début du mois de janvier, cest pour moi un immense plaisir de circuler dans toutes les exploitations rurales de France, dans tous les départements, et découter ce que les producteurs ont à dire sur le terrain. Et je crois quil est essentiel découter davantage, de prendre davantage de temps, avec les producteurs sur le terrain, pour comprendre leurs difficultés, et y apporter les meilleures réponses. Lagriculture ma appris une chose, cest que les grandes réformes, les caps que lon peut fixer, cest affaire de temps. Il ne sagit pas de changer de pied dun jour à lautre, il sagit de fixer un cap et de sy tenir, quels que soient les obstacles, sur un temps long, pour obtenir des résultats qui soient des résultats durables.
Et vous me permettrez de terminer avec une touche un peu plus personnelle. Dans quelques jours nous aurons le Salon de lagriculture, ce sera mon troisième Salon de lagriculture, le premier je lai fait avec Jean-Michel LEMETAYER, je men souviens, dans des conditions parfois un petit peu agitées, ensuite nous lavons fait avec dautres personnes, ce sera probablement mon dernier Salon de lagriculture comme ministre de lAgriculture, et je peux vous dire que où que je sois après le mois de mai 2012, chaque année jirai au Salon de lagriculture, chaque année je retrouverai les agriculteurs avec à la fois une immense fierté et un immense plaisir. Vous avez vu entrer dans ce ministère il y a 3 ans, un jeune technocrate, qui avait je crois encore ses lunettes, un peu coincé, un peu raide parfois dans son expression et dans son contact, jai été totalement transformé par ce poste, et totalement transformé par les paysans français. Et je voudrais les en remercier, les paysans français cest de lhumanité, cest de la générosité, cest de la vie, cest tout ce quils mont donné au cours de ces trois années, ils doivent savoir quils ont un ministre de lAgriculture qui nest plus le même aujourdhui, très différent de ce quil était il y a 3 ans quand il a franchi, avec beaucoup de fierté, les portes de la Rue de Varenne. Très bonne année à tous.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 7 février 2012
Depuis 3 ans que je suis ministre de lAgriculture, nous avons fait, avec le président de la République, avec mes amis parlementaires, que je salue, des choix stratégiques pour lagriculture française. Des choix qui sont nouveaux, des choix qui ont pu paraître parfois audacieux, mais des choix qui sont nécessaires. Et je suis convaincu que le jour où je fermerai la porte de la Rue de Varenne et que je quitterai ce ministère, nous pourrons nous dire que nous avons fait entrer définitivement lagriculture française dans la mondialisation, dans la compétitivité, et que les choix que nous aurons fait tous ensemble, seront des choix irréversibles. Après 3 ans passés à la tête de ce ministère, lagriculture naura plus le même visage, et lagriculture sera plus forte, mieux à même daffronter la concurrence européenne et la concurrence mondiale. Cétait pour moi le défi à relever, et je crois que tous ensemble, avec les administrations auxquelles je rends hommage, avec les responsables syndicaux, avec les professionnels, avec les parlementaires qui ont joué un rôle déterminant avec ladoption de la loi de modernisation de lagriculture et de la pêche, nous aurons réussi à relever ce défi.
Le premier choix courageux que nous avons fait, cest celui de la compétitivité. La compétitivité cétait un mot tabou dans lagriculture française, cest devenu, aujourdhui, une exigence pour chacune des exploitations agricoles, et je rends hommage à tous les paysans français qui ont su sadapter à cette exigence de compétitivité. La compétitivité cest la réduction du coût du travail, nous lavons fait sur le travail occasionnel. A un moment où la France débat de la nécessité de réduire les charges sur le travail, les paysans français peuvent dire que, eux, ont fait cet allègement de charges, ont compris cette exigence, et que nous avons, ensemble, réduit le coût du travail occasionnel, qui a été abaissé, pour être très précis, de près de 13 euros à un peu plus de 9 euros de lheure. Il en allait de la survie de milliers dexploitations agricoles françaises. Et jétais encore dans le Limousin, jai eu loccasion de discuter avec des producteurs de pommes, qui mont redit à quel point il était essentiel quon réduise les charges qui pèsent sur le travail en France. Et jappuie totalement linitiative du président de la République, dengager cette réduction des charges sur le travail, pour gagner en compétitivité et être tout simplement à la hauteur de nos concurrents européens. Je ne parle même pas du Brésil, de la Chine, de lInde, je vous parle de lAllemagne, je vous parle de lEspagne, je vous parle de lItalie. Nous devons réduire les charges qui pèsent encore sur le travail, en particulier le travail agricole.
Deuxième choix que nous avons fait, la réduction des coûts énergétiques. Je pourrais citer beaucoup de décisions qui ont été prises, qui sont parfois oubliées, mais le plan de performance énergétique, cest cette majorité qui la voulu, cest cette majorité qui la mise en place. Le développement de la méthanisation, cest cette majorité qui la voulu, cest cette majorité qui la mise en place. Il mest apparu très rapidement, en voyageant très souvent, comme vous le savez, en Allemagne, que nous ne pouvions pas continuer à avoir des tarifs de rachat du biogaz, pour la méthanisation, très en deçà de ce que pratiquent les Allemands, quon ne pouvait pas accepter quil y ait 4000 unités de méthanisation en activité en Allemagne, quand il y en avait à peine une dizaine en France. Là encore, compétitivité, cest une exigence absolue. Et je souhaite quen matière de méthanisation, nous parvenions, dans les 10 ans, à faire sortir de terre plus de 1000 unités de méthanisation en France, pour rattraper notre retard par rapport à lAllemagne, sur ce dossier.
La compétitivité cest aussi lorganisation des filières, et des interprofessions, alors ça cest un vaste sujet lorganisation des filières, jaurai loccasion de revenir dessus. Il faut que nous travaillions ensemble. Avant tous les problèmes techniques, avant tous les problèmes économiques, il y a en France une difficulté culturelle, nous ne savons pas travailler ensemble. Nous dressons des murs les uns entre les autres, entre les industriels, entre les grands distributeurs, entre les producteurs, nous sommes tous dans la même barque, les murs doivent tomber, et nous devons travailler ensemble, et les filières, de ce point de vue là, ont accompli, depuis 3 ans, sous notre impulsion, un travail de réorganisation qui est absolument décisif. Et je constate que ce sont les filières qui ont le plus avancé dans leur réorganisation, qui ont aujourdhui les meilleurs résultats économiques, jespère que cela pourra servir de modèle pour tous. Prenez lexemple, que je prends souvent, de la viticulture dans le Languedoc-Roussillon. Les viticulteurs de Languedoc-Roussillon ont fait un travail exceptionnel, ils ont consenti des sacrifices personnels humains extraordinairement importants, pour arracher leurs vignes, pour gagner en qualité, pour exporter, mais ils ont su dans le même temps réorganiser les filières, ils ont su limiter le nombre dinterprofessions pour être plus compétitifs. Eh bien ce que les viticulteurs du Languedoc ont réussi à faire, dautres filières commencent également à le faire, mais je souhaite que ça serve de modèle pour lagriculture française dans son ensemble. Et vous me permettrez de penser que ça pourrait servir de modèle à léconomie française dans son ensemble. Nous sommes tous dans le même bateau. On ne doit pas lutter les uns contre les autres, on doit être solidaire les uns des autres, cest une des voies de redressement de léconomie française.
Je pourrais aussi citer la filière du bois, la réorganisation que nous avons, avec cette majorité, engagée sur la forêt privée. Je pense à la participation des communes forestières, je pense au travail, tout à fait remarquable, qui a été engagé par lONF pour mieux valoriser le bois, qui est une des très belles filières industrielles et agricoles de la France. Là aussi, quand on sorganise, les résultats viennent.
Jaurai pu citer également des points plus techniques, mais qui sont essentiels, parce quil ny a pas de détail dans lagriculture française, la réforme des systèmes de cotations, laudit que nous avons engagé sur les abattoirs parce que nous savons quil faudra réformer aussi notre outil industriel, notamment en matière dabattage, si nous voulons être toujours plus comp??titifs. Ces choix ont été faits, ces choix ont été assumés depuis 3 ans.
Je termine sur ces choix de compétitivité, par un point qui me tient particulièrement à cur, parce quil a été au cur de nos débats sur la loi de modernisation de lagriculture et de la pêche, ce sont les contrats. Les contrats je ne les ai jamais vendus comme la solution miracle aux difficultés de lagriculture française, mais les contrats cest une garantie de visibilité et de stabilité pour les producteurs. Et moi ce que je porte au fond de moi comme lexigence, cest davoir des paysans français correctement rémunérés, qui ont devant eux le minimum de visibilité nécessaire pour investir dans des conditions de sécurité acceptables. Vous ne ferez pas venir un jeune de 20, de 22 ou de 23 ans sur une exploitation, vous ne lui ferez pas investir sur cette exploitation, financer sa remise aux normes, si vous ne pouvez pas lui dire que sur 4 ans, sur 5 ans, il a un minimum de visibilité sur son revenu, cest indispensable. Je ne mésestime pas les difficultés qui se posent dans cette révolution que représentent les contrats, je dis simplement que nous sommes en train dy arriver, notamment dans la filière laitière, où DANONE a déjà mis en place des contrats avec les producteurs, où jai déjà participé à la signature du premier contrat, et on doit progresser, car les contrats cest la stabilité, et la stabilité cest ce que souhaitent des producteurs qui sont exposés à un nombre de risques, climatiques, environnementaux, sanitaires, absolument considérables. La responsabilité politique aujourdhui cest de mettre de la stabilité là où il y a de linstabilité. Cest de mettre de la sécurité et de la protection là où il y a de linsécurité et du risque. Les contrats, de mon point de vue, répondent à cette exigence.
Le deuxième choix que nous avons fait depuis 3 ans, sur lequel je nai jamais dévié dun pouce, pas plus que sur le choix de la compétitivité, cest le choix européen. Le choix européen ça a consisté dabord à dire la vérité aux producteurs, en leur rappelant quon ne peut pas à la fois profiter des aides européennes sur le terrain, dans nos régions et dans nos départements, et dans le même temps tricher avec ces mêmes aides européennes, en acceptant de distribuer des aides illégales sur le terrain à un certain nombre de producteurs. Tout cela a bien failli me coûter mon poste dans les premières semaines de ministre de lAgriculture, ça aurait été dommage, vous lavouerez, mais je ne regrette pas davoir fait ce choix-là, même sil y a pu y avoir ici ou là des maladresses dans les expressions. Je pense que pour les agriculteurs français, réconcilier ce qui est fait à léchelle nationale et ce qui est décidé à léchelle européenne, cest le choix courageux et cest le seul choix qui vaille. Ceux qui aujourdhui tapent à bras raccourci sur lEurope, ne devraient jamais oublier quil ny a pas dagriculture française sans le soutien de la Politique Agricole Commune.
Sur cette Politique Agricole Commune, et dans le choix que nous avons fait, il y a une chose dont cette majorité, dont le président de la République, dont nous tous ici nous pouvons être fiers, cest davoir sauvé le budget de la Politique Agricole Commune, car il en allait de la survie des paysans français. Lorsque je suis arrivé ici, en juillet 2009, la proposition de la Commission Européenne était de baisser le budget de la PAC de 30 à 40%. Après 1 an de négociation avec les Allemands nous avons eu une position commune franco-allemande sur le maintien du budget de la PAC. Après 2 ans de négociation, avec la Commission Européenne, au plus haut niveau, entre José-Manuel BARROSO et le président de la République Nicolas SARKOZY, nous avons obtenu le maintien du budget de la PAC. Cest un acquis majeur, un acquis essentiel, pour tous les paysans français pour les années à venir. Et je tiens à redire que qui que ce soit qui me succédera, ici, il aura un devoir, cest de garantir que ce résultat qui a été obtenu par cette majorité, ne soit jamais remis en cause. Il ne faut même pas accepter dentrer dans une négociation sur le montant du budget de la PAC. Nous avons obtenu sa sécurisation à leuro près, nous devons lassurer jusquau bout de la négociation.
Nous avons aussi obtenu, en matière européenne, une régulation des marchés, là aussi ce nétait pas gagné davance. Je me souviens de débats avec Marianne FISCHER-BOEL, qui mexpliquait que les marchés cétaient cette espèce de main invisible qui répartissait correctement les richesses, et quà partir du moment où il y avait une crise, il fallait laisser les marchés fonctionner et que ça permettrait de séparer le bon grain de livraie. Idiotie et scandale intellectuel, je nhésite pas à le dire. Eh bien contre cette idiotie, et contre ce scandale intellectuel qui consiste à croire quen matière agricole les marchés font la pluie et le beau temps de manière positive, nous avons commencé à mettre en place une régulation. Nous avons obtenu le paquet lait, nous sommes en train dobtenir, sur la viticulture, un renversement sur les droits de plantation pour rétablir ces droits de plantation qui sont indispensables aux viticulteurs et à la qualité des vins français. Je ne céderai pas un pouce sur cette idée de régulation des marchés qui me paraît indispensable.
Enfin, troisième exemple que je veux citer sur lEurope, et je salue la présence du président des Restos du Cur ici, Olivier BERTHE, cest ce que nous avons obtenu sur laide aux plus démunis. Ça peut vous paraître un sujet accessoire, cétait, pour moi, un combat moral essentiel. En pleine période de crise, voir lUnion Européenne, supprimer les crédits aux plus démunis, jai voulu dire haut et fort « non, jamais, et pas avec moi. » Et on sest battu. On sest battu contre lavis de beaucoup dEtats européens, on sest battu avec lAllemagne qui ne concevait pas que lUnion Européenne puisse continuer à financer un programme dont je reconnais quelle ne bénéficie pas. On sest battu avec laide des parlementaires, et on sest battu avec laide des associations, et je tiens à rendre hommage à leur sens des responsabilités sur la manière dont on a conduit cette négociation. Eh bien nous avons réussi à obtenir, contre toutes les évaluations faites par nos amis diplomates, le maintien de cette aide aux plus démunis, à léchelle européenne, jusquen 2014, et je souhaite que dès maintenant nous commencions à réfléchir sur les modalités de financement après 2014, pour garantir là aussi la stabilité des ressources financières dassociations aussi remarquables que les Restos du Cur qui en pleine période de crise apportent le soutien aux plus démunis, ça me paraît absolument indispensable. Mais là encore, évitons les grandes paroles, évitons les grandes déclarations définitives sur les antennes ou sur les ondes, ce qui compte cest le résultat. Et cest en faisant le choix européen, cest en négociant, cest en allant à Berlin, cest en expliquant nos arguments, cest en prenant le temps de convaincre, quon arrive aux résultats. Monter sur son tonneau et faire de grandes déclarations, ça ne change rien au résultat final. Or aujourdhui lexigence politique ce nest pas les déclarations, ce sont les résultats, cest ce quon peut dire les yeux dans les yeux aux Français dont on a la responsabilité. Et de ce point de vue je suis fier de pouvoir dire les yeux dans les yeux du président des Restos du Cur, que ces financements sont sécurisés jusquen 2014, et quon fera le nécessaire pour trouver des solutions pour après 2014.
Le troisième choix que nous avons fait, avec le président de la République, avec cette majorité, cest le choix du monde, cest le choix de lexportation, cest le choix de louverture vers les marchés qui sont aujourdhui porteurs de croissance. Nous lavons fait, je le dis devant Dominique LANGLOIS, devant Pierre CHEVALIER, sur un sujet qui me tenait particulièrement à cur, qui était lélevage bovin. Nous avons les meilleures bêtes bovines au monde, la meilleure génétique, la meilleure production, et nous avons, jose dire nous avions, une situation dramatique pour les éleveurs bovins en France. Cherchez lerreur. Comment peut-on avoir autant datouts dans les mains, et ne pas arriver à les valoriser pour les producteurs ? Cest parce que nous navions pas fait, jusquà présent, les bons choix économiques. Eh bien en mettant en place un GIE à lexportation, en ouvrant les marchés, en Russie, en Turquie, en Afrique du Nord, nous avons réussi à favoriser lexportation, et enfin à faire remonter les prix pour que les producteurs aient, sur le terrain, le revenu de leur travail. Je ne dis pas que tout est résolu, je sais très bien que les coûts de production restent élevés pour les producteurs bovins, jétais encore dans le Limousin hier, je vois Pierre CHEVALIER, et je sais que ça reste difficile, simplement cette voie de lexportation, de la mise en place du GIE Export, tout cela donne des résultats, fait monter les prix, améliore le revenu des producteurs, cest le choix à faire, et cest le choix à poursuivre.
Enfin, toujours sur ce choix du monde, je rappelle que nous avons réussi à faire prendre conscience aux 20 pays les plus puissants de la planète, que la question de lalimentation mondiale était probablement une des questions les plus stratégiques du 21ème siècle. On ne sait pas comment nourrir la population dans les 10, 20 ou 30 prochaines années. On ne sait pas comment faire pour produire plus, tout en produisant mieux, cest-à-dire en respectant les sols, en respectant lenvironnement, en respectant la propriété des terres dans les pays en développement. On ne sait pas, encore, comment stabiliser les prix pour éviter des variations de 100, 200 ou 300%, qui déstabilisent les producteurs. Eh bien en mettant lagriculture au cur du G20, à linitiative du président de la République, nous avons réussi à obtenir des résultats concrets, il y aura enfin de la transparence sur ces marchés, il y aura enfin le début dune organisation et dune lutte contre la spéculation sur les marchés de matières premières agricoles. Il y aura enfin un système dalerte, il y aura enfin une limitation des restrictions à lexportation pour que lorsquun pays développé décide de limiter ses exportations, eh bien les pays les plus pauvres ne soient pas les premiers à en souffrir. Tout cela, nous ne sommes pas au bout du chemin, tout nest pas encore achevé, mais nous avons progressé, et surtout nous avons enfin fait prendre conscience de la gravité de ce sujet, nourrir la planète, aux yeux des plus grandes puissances mondiales, je crois que là aussi cest un des choix importants que nous avons fait et qui sur 3 ans a donné des résultats.
Alors, ces choix stratégiques, choix de la compétitivité, choix de lEurope, choix du monde, je vous le disais, ils donnent aujourdhui, en ce début dannée 2012, des résultats, et ces résultats je voudrais évidemment les attribuer dabord aux agriculteurs et aux pêcheurs eux-mêmes, car ce sont eux qui ont fait le travail, en priorité, eux qui se sont réorganisés, je voudrais saluer les professionnels, qui se sont tous engagés pour participer à ces débats, pour permettre de faire bouger les lignes, et puis vous me permettrez quand même, même si ce nest pas lusage dans des vux, de rendre hommage aussi à la qualité de ladministration du ministère de lAgriculture, le secrétaire général, Jean-Marie AURAND, sait tout le respect et ladmiration que je porte au personnel du ministère de lAgriculture, et puis de manière plus personnelle, à lensemble de mon cabinet, mon directeur de cabinet doit être ici, Jean-Marc, en ton nom cest tout mon cabinet que je veux saluer, car il ne compte pas ses heures de travail et il fait, là aussi, un travail tout à fait remarquable au service des agriculteurs et des pêcheurs français.
Ces résultats cest dabord la prise de conscience en France de ce que lagriculture est un secteur stratégique, que derrière lagriculture il y a la qualité de notre alimentation, que derrière lalimentation il y a ce programme national pour lalimentation que nous avons mis en place, il y a des nouvelles règles nutritionnelles, il y a le développement des circuits courts, il y a la possibilité, désormais, pour les collectivités locales de saffranchir de la règle du mieux-disant, pour aller chercher des produits locaux, même sils sont un peu plus chers, parce que je dois dire que la première fois que jai visité une cantine scolaire en Normandie et que je me suis aperçu quen Normandie on ne consommait que des pommes du Chili parce quelles étaient moins chères que les pommes normandes, je me suis dit on va prendre le temps quil faut, on va y mettre lénergie nécessaire, mais on va changer ça. Et on a changé ça. On permet, aujourdhui, aux appels doffre dans les cantines scolaires, de saffranchir pour 20% de leurs volumes, de la règle du prix, pour préférer un produit de proximité. Je vais vous dire, là aussi je parle pour mes successeurs, je crois que si on arrivait à 50% ce serait une bonne chose et ça permettrait de valoriser davantage les circuits courts et les produits locaux.
Je pense que nous avons aussi ouvert des débats sur laménagement du territoire, nous avons fait prendre conscience, avec la taxe sur les transactions sur les terres agricoles et sur la spéculation sur les terres agricoles, avec lObservatoire des prix agricoles, de la nécessité absolue quil y a à préserver les terres agricoles en France. On ne peut pas se dire une grande puissance agricole et de lautre côté laisser partir des milliers dhectares de terres agricoles chaque année. Il est impératif de protéger ces terres et de défendre les terres agricoles, là aussi nous avons pris des décisions dans ce domaine, et nous avons ouvert le débat. Nous avons fait prendre conscience aussi, je le dis devant Jean-Marie BINETRUY qui est élu dune zone de montagne, de ce que lagriculture française navait pas vocation à se concentrer dans certains points du territoire, mais quelle participait de laménagement du territoire et quelle devait être présente partout, dans les zones de plaine, dans les zones de piémont, dans les zones de montagne, parce quagriculture veut dire emploi, agriculture veut dire activité, et pour vous dire le fond de ma pensée, agriculture veut dire vie. Là où il y a de lagriculture, il y a de la vie, et cest pour ça quil faut protéger lagriculture partout sur les territoires français.
Ces résultats ce nest pas simplement cette prise de conscience, ce nest pas simplement la mise en place de ce grand débat sur lavenir de lagriculture française et du lien entre agriculture et alimentation, cest aussi des résultats économiques. Nous sommes une grande puissance agricole mondiale et nous avons vocation à le rester. Nous en avons souvent discuté avec les responsables syndicaux que je vois ici, dans un moment où la crise économique frappe lEurope toute entière, et frappe durement la France, quel est le seul secteur qui enregistre aujourdhui des excédents commerciaux en forte croissance, qui continue à représenter des centaines de milliers demplois, qui ne connaît pas la crise de manière aussi dure que dautres secteurs, qui arrive à prendre des parts de marché à lexportation, cest lagriculture. Eh bien quand on a un secteur économique qui marche, permettez-moi de vous dire que cest le bon sens de le soutenir, de le défendre, et de lui permettre de rapporter encore plus demplois et de richesses à la nation. Je rappelle que lindustrie agroalimentaire aujourdhui, cest plus de 400 000 emplois, cest des milliards deuros dexcédent sur notre balance commerciale, là aussi hommage soit rendu à la qualité de notre industrie agroalimentaire qui permet de valoriser les produits français, cest un atout majeur pour notre économie. Ces résultats économiques ils se traduisent, mais pas suffisamment encore, dans les revenus des paysans. 2009 a été une année catastrophique pour le revenu des paysans, 2010 a été une année de reprise, 2011 une année de stabilisation, mais je constate quen 2011 les points positifs que nous avons pu enregistrer sur les prix, ont malheureusement été quasiment effacés par laugmentation des coûts de production et par certaines catastrophes que nous avons connues comme la sécheresse, donc il faut continuer à saccrocher pour améliorer encore le revenu des paysans, cest la priorité absolue. Le paysan français, comme le pêcheur français, doit avoir des revenus décents.
Enfin je tiens à dire, sur le point des résultats, que nous ne resterons une grande puissance agricole, et nous ne continuerons à avoir cette influence agricole en Europe et dans le monde, qui est respectée, jusquau fin fond de la Chine, que si nous sommes capables de continuer à innover et à soutenir la recherche agricole. Ne sombrons pas dans lobscurantisme sur ce sujet. Nous avons besoin dinnovation et de recherche. Alors je ne vais pas soulever ce soir les sujets qui fâchent, car sinon ça pourrait gâcher la soirée, donc je vais prendre un sujet qui est hors débat, qui au moins ne prête pas à la controverse, la question à laquelle je suis très attaché, de lostréiculture française et des huîtres. Il y a une surmortalité des huîtres qui touche tout le littoral français, si vous ne faites pas de recherche, si vous naméliorez pas la bio-résistance des huîtres, si vous navez pas lIFREMER, si vous navez pas les chercheurs, eh bien il ny a plus dostréiculture, en France, dans quelques années. Alors avant de condamner la recherche en agriculture, avant de repousser toute innovation, avant de repousser toute recherche sur les biotechnologies, regardons aussi ce que ça nous rapporte, regardons aussi à quel point ça nous protège, et regardons aussi à quel point ça nous attire le respect des autres puissances agricoles mondiales. Sur ce point de vue je tiens à saluer là aussi le travail qui est fait par les instituts de recherche qui sont sous ma tutelle, et à dire à quel point je suis fier de lenseignement agricole français, qui est un enseignement de très grande qualité, et là aussi, en période de crise, dont je constate très simplement quil assure un taux demploi de quasiment 9 élèves sur 10 à la sortie, jaimerai que ce soit le cas de tous les autres instituts denseignement en France.
Enfin, sur ces résultats, tous ceux qui connaissent un tout petit peu lEurope, savent que désormais la France est à nouveau la puissance qui donne le la en Europe, sur les questions agricoles. Tant mieux. Et ça doit rester le cas, car nous avons vocation à rester la première puissance agricole européenne.
Alors vous me permettrez de terminer en disant quil reste des choses à faire, et je redis suffisamment souvent dans mes interventions politiques à quel point je crois à un discours de sincérité, et à quel point je crois aussi à un discours dhumilité, pour vous dire que malgré la fierté que nous pouvons tous avoir, davoir fait passer à lagriculture française un cap très important, qui est le cap de la compétitivité, de la modernité, de louverture au monde, de la réorganisation, eh bien oui il reste des choses à faire, et il nous reste des choses à accomplir. Sur 3 mois, ça va faire court, mais je dis quand même ce que je souhaiterai voir progresser pour être tout à fait satisfait.
La première chose qui doit progresser, cest un message que je passais en introduction, cest que le monde agricole doit être un monde rassemblé. La question nest plus de nous diviser les uns les autres, la question est de nous rassembler pour faire face à nos concurrents qui ne nous feront aucun cadeau, ni nos concurrents européens, ni nos concurrents venus des pays émergents. Ne cédons pas à cette facilité dopposer les uns aux autres, dopposer par exemple lagriculture biologique aux grandes cultures, comme si on ne pouvait pas à la fois avoir une agriculture biologique puissante, que je soutiens, et en même temps continuer à exporter nos produits vers les marchés extérieurs qui rapportent de la richesse et des emplois au pays. Pourquoi est-ce quà chaque fois que lon parle du bio, on loppose aux grandes cultures, et quà chaque fois quon parle de grandes cultures, on loppose au bio ? Ça na aucun sens. Il y a de la place pour tout le monde. Cessons dopposer lagriculture de proximité, les circuits courts et lexportation, comme si lavenir de la culture française ne pouvait reposer que sur les circuits courts ou que sur lexportation, alors quil est évident que lavenir de lagriculture française repose aussi bien sur le développement des circuits courts que sur le maintien de filières exportatrices puissantes, les deux ne sont pas incompatibles, il y a de la place pour tout le monde. Arrêtons dopposer les producteurs, les industriels et la grande distribution, alors que chacun a besoin de chaque maillon de la filière. Et si jai voulu mettre en place un observatoire des prix et des marges, dont jai vu le représentant, Philippe CHALMIN, dans la salle, si jai voulu renforcer cet observatoire, cest bien parce quen mettant de la transparence sur la formation du prix, quon évitera ces oppositions stériles entre les différents acteurs de la filière. Nopposons pas non plus les filières entre elles, les grandes cultures dun côté, les éleveurs de lautre, essayons au contraire, comme la proposé Xavier BEULIN, et je salue toute lénergie quil a mis à avancer dans cette direction-là, essayons au contraire de mettre en place des contrats interfilières pour sécuriser un prix dapprovisionnement sur lalimentation animale qui soit stable pour les éleveurs. Il faut de la solidarité là où il y a eu trop de querelles. Il faut du travail en commun là où il y a eu trop de divisions. Et il faut du rassemblement et de lunité là où il y a eu trop de murs dressés entre les différentes parties de lagriculture française. Jen suis profondément convaincu. Et cest un message essentiel à mes yeux. Nopposons pas non plus les syndicats agricoles les uns aux autres. Je suis le premier ministre de lAgriculture à avoir participé à chaque congrès de chaque organisation syndicale représentative du monde agricole. Quest-ce que je nai pas entendu. Je serai aller faire des fréquentations très douteuses je ne sais trop où, je naurai pas eu moins de critiques, mais cest le rôle du ministre de lAgriculture dêtre au service de tous les paysans, et cest le rôle du ministre de lAgriculture découter tous les représentants du monde agricole. Et je continue à penser, même si cela doit rester un choix libre et indépendant des interprofessions, que les interprofessions auraient tout intérêt à travailler avec lensemble des représentants du monde agricole. Je le dis comme je le pense. Réunissons-nous, ne nous divisons pas, faisons preuve de sens de responsabilités plutôt que de nous opposer les uns aux autres, cela me paraît essentiel.
La deuxième chose sur laquelle il nous reste des progrès à faire, cest sur la simplification des règles. Là-dessus, soyons clairs, soyons honnêtes, le compte ny est pas. Et je comprends le ras-le-bol des producteurs sur le terrain, qui me disent que dans une situation économique difficile, on vient les embêter pour un centimètre carré de prairie qui a été retourné, on vient les embêter pour un millimètre deau qui ne correspond pas aux normes de lAgence de leau, on vient systématiquement les critiquer, on ne reconnait pas les efforts qui ont été faits, on ne simplifie pas leur vie quotidienne, on ne les aide pas à produire dans de bonnes conditions. Il est impératif, et cette fois-ci ce nest pas à reporter dans les 3 mois, que dans les jours et dans les semaines à venir, nous obtenions des résultats sur lallègement de certaines contraintes et surtout sur la simplification de la mise en uvre de ces règles, car ce sont moins les règles qui posent problème, que la mise en uvre tatillonne et parfois suspicieuse de ces règles sur le terrain. Je passerai le message aux DRAAF et aux DREAL, que je réunirai dans les prochains jours, pour leur demander de respecter ces orientations qui sont celles fixées à Pamiers par le président de la République, et sur lesquelles je me bats depuis désormais 3 ans, oui à la conjugaison entre environnement et agriculture, chacun sait que cest lavenir de notre agriculture qui est en jeu, mais les règles environnementales nous devons les appliquer avec le minimum de bon sens que les producteurs sont en droit dattendre de leur administration.
La troisième chose pour laquelle il reste du travail à faire, et jen termine par-là, cest évidemment sur lEurope, nous avons sécurisé le budget de la Politique Agricole Commune, je lai dit, mais il faut que sur la régulation nous obtenions que tous les marchés soient régulés. Pas simplement le marché du lait, pas simplement la viticulture sur laquelle nous sommes en passe, je pense, demporter le combat, mais sur tous les marchés il faut de la régulation, parce que régulation veut dire sécurité et régulation veut dire amélioration des performances des paysans qui, avec la sécurité suffisante, seront encore plus efficaces quils ne lont été par le passé. Et puis il faudra mener la bataille du verdissement, car le verdissement tel quil est proposé aujourdhui ne convient pas et il reste un travail important à faire.
Voilà les quelques éléments que je voulais vous présenter, vous voyez que comme de bien entendu je nai pas tenu mes promesses sur un discours court, mais cétaient des choses qui me tenaient à cur, dautant plus à cur que jai entamé, comme vous le savez, un tour de la France rurale depuis le début du mois de janvier, cest pour moi un immense plaisir de circuler dans toutes les exploitations rurales de France, dans tous les départements, et découter ce que les producteurs ont à dire sur le terrain. Et je crois quil est essentiel découter davantage, de prendre davantage de temps, avec les producteurs sur le terrain, pour comprendre leurs difficultés, et y apporter les meilleures réponses. Lagriculture ma appris une chose, cest que les grandes réformes, les caps que lon peut fixer, cest affaire de temps. Il ne sagit pas de changer de pied dun jour à lautre, il sagit de fixer un cap et de sy tenir, quels que soient les obstacles, sur un temps long, pour obtenir des résultats qui soient des résultats durables.
Et vous me permettrez de terminer avec une touche un peu plus personnelle. Dans quelques jours nous aurons le Salon de lagriculture, ce sera mon troisième Salon de lagriculture, le premier je lai fait avec Jean-Michel LEMETAYER, je men souviens, dans des conditions parfois un petit peu agitées, ensuite nous lavons fait avec dautres personnes, ce sera probablement mon dernier Salon de lagriculture comme ministre de lAgriculture, et je peux vous dire que où que je sois après le mois de mai 2012, chaque année jirai au Salon de lagriculture, chaque année je retrouverai les agriculteurs avec à la fois une immense fierté et un immense plaisir. Vous avez vu entrer dans ce ministère il y a 3 ans, un jeune technocrate, qui avait je crois encore ses lunettes, un peu coincé, un peu raide parfois dans son expression et dans son contact, jai été totalement transformé par ce poste, et totalement transformé par les paysans français. Et je voudrais les en remercier, les paysans français cest de lhumanité, cest de la générosité, cest de la vie, cest tout ce quils mont donné au cours de ces trois années, ils doivent savoir quils ont un ministre de lAgriculture qui nest plus le même aujourdhui, très différent de ce quil était il y a 3 ans quand il a franchi, avec beaucoup de fierté, les portes de la Rue de Varenne. Très bonne année à tous.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 7 février 2012