Texte intégral
Nous avons eu des débats intéressants sur la stratégie de lUnion européenne dans le domaine international et particulièrement sur le rôle du Service européen dAction extérieure. Comme je navais pu participer à la réunion dhier, jai fait parvenir à Mme Ashton un document dans lequel je faisais un certain nombre de suggestions. Certains y ont vu des critiques. Ce nétait pas du tout lesprit dans lequel jai rédigé ce document. Pensez bien en effet que Mme Ashton assume sa tâche difficile, il me semble, avec grande efficacité. Elle joue un rôle très important, par exemple dans les négociations avec lIran, en Bosnie aussi et dans bien dautres cas.
Le Service européen dAction extérieure est encore un «petit enfant», si je puis dire. Cet «enfant» se renforce, grandit et nous souhaitons quil améliore encore sa coordination, dabord avec les services diplomatiques nationaux et puis aussi, sur le terrain, dans chaque pays. Nous souhaitons que les délégations de lUnion européenne et les ambassades puissent travailler la main dans la main dans chaque pays pour coordonner aussi laide au développement multilatérale et bilatérale, bref pour travailler dans le même sens. Nous avons eu un débat intéressant sur les sanctions. Est-ce que les sanctions sont utiles ou inutiles ? Ce nest certainement pas une panacée. Certaines peuvent être efficaces, dautres moins mais dans certaines situations, le choix était très clair : soit ne rien faire ; soit utiliser cette arme des sanctions qui peut présenter une certaine efficacité. Nous nous sommes finalement retrouvés sur cette analyse.
Jai eu loccasion aussi de rappeler la position de la France sur la Syrie, car je ne voudrais pas que notre capacité dindignation faiblisse au fur et à mesure que le temps passe. Cette capacité dindignation doit garder toute sa place. Je vous signale quau moment même où M. Kofi Annan arrive à Damas, le régime bombarde une nouvelle ville, Idleb, et continue à faire des dizaines de morts. Il ne faut donc pas renoncer à atteindre nos objectifs. Ces objectifs, cest bien sûr la cessation des violences, laccès à laide humanitaire, mais cest aussi la possibilité de donner loccasion au peuple syrien de sexprimer, de conquérir sa liberté et de bâtir une véritable démocratie, selon le processus qui a été proposé par la Ligue arabe.
Cest la raison pour laquelle nous agissons sur plusieurs fronts.
Dabord, bien entendu, en soutenant Kofi Annan qui a pour mission de mettre en uvre la résolution de lAssemblée générale, qui elle-même endosse le plan de la Ligue arabe. Ensuite nous continuons à soutenir le processus du Groupe des Amis du peuple syrien. En troisième lieu, nous poursuivons le travail sur nos positions, qui vont se fédérer, sunir, se renforcer.
Enfin, il y a le Conseil de sécurité : je serai lundi à New York à loccasion du débat organisé par la Présidence britannique. Actuellement, toute possibilité de parvenir à un accord sur une résolution du Conseil de sécurité est bloquée et nous naccepterons jamais que soient renvoyés dos à dos ou mis sur le même plan le régime et ceux qui se battent contre la répression du régime. Cest au régime de prendre linitiative darrêter la répression, de faire cesser lensemble des violences, de permettre lacheminement de laide humanitaire, mais aussi de permettre la mise en uvre de la solution de transition politique. Sur ce point là, nous avons une vision cohérente et claire à laquelle nous resterons fidèles. Voilà ce que je voulais vous dire brièvement sur cette réunion. Nous avons eu plus de temps que dhabitude - une discussion un peu plus stratégique. Je remercie la Présidence danoise de son accueil et de sa parfaite organisation.
Q - La France a rappelé son ambassadeur en Syrie. Beaucoup dÉtats membres de lUE ne lont pas fait. Quen pensez-vous ?
R - Nous espérions que le rappel dambassadeurs soit une décision collective. Nous avons appelé nos partenaires à prendre ensemble cette décision. Cela na pas été possible. Certains États membres avaient une appréciation différente de la situation. La France a pris cette décision parce que la sécurité de nos diplomates était en cause. Notre ambassadeur est revenu à Paris il y a quelques jours.
Q - Le ministre allemand a suggéré hier quil était temps de reconsidérer le concept dune Constitution européenne. Il se fait des soucis Quel est votre avis ?
R - Je crois que M. Westerwelle doit organiser bientôt un séminaire à Berlin ; il ma invité, jessaierai dy être. Cette réflexion est tout à fait utile. Je suis absolument convaincu que quand nous allons sortir de cette crise - parce que nous allons en sortir - il faudra aller plus loin dans lintégration européenne, entre ceux qui voudront bien le faire, notamment au sein des pays de lEurogroupe. De ce point de vue, je pense quune réflexion sur une nouvelle constitution, lamélioration des procédés, une meilleure gouvernance de la zone euro - à laquelle la France est très attachée - simpose.
Il faut aussi une progression dans la Politique de sécurité et de défense commune. Je le disais ce matin : quels sont les objectifs de laction extérieure de lUnion européenne ? Dabord, notre voix dans le monde doit être porteuse de valeurs et les promouvoir : la démocratie, les droits de lHomme, la paix aussi. Ensuite, notre objectif, cest de défendre nos intérêts, sans naïveté. Vous savez que la France est attachée au principe de la réciprocité dans les échanges commerciaux. Enfin, pour atteindre ces objectifs, il faut que nous soyons des acteurs à part entière sur la scène internationale pour ne pas nous limiter à être un «guichet». Nous distribuons beaucoup dargent. Nous avons beaucoup dactions positives pour laide au développement. Mais il faut aussi que nous participions à la décision et, pour cela, il faut que nous améliorions encore notre cohésion et nos mécanismes de gouvernance ; je vais parler de cela à mon collègue allemand.
Q - Concernant le refus russe, que peut faire la diplomatie européenne et la France pour, au moins, ramener la Russie à une résolution qui soit acceptée par tout le monde ?
R - Persévérer. Continuer. Ne pas renoncer. Je vous ai dit quelle est laction que nous menions. Il y a dabord Kofi Annan, qui a pris des contacts avec les Russes, les Chinois, les Syriens, et avec nous bien sûr. Je lui fais confiance pour trouver des amorces de solution. Il faut maintenir la pression de la communauté internationale. Il y avait 60 pays et un certain nombre dorganisations internationales réunis à Tunis ; il y en aura encore plus à Ankara.
Il faut aider lopposition, je le dis encore. Ce régime ne pourra pas survivre. Quand un chef dÉtat massacre des milliers de ses concitoyens, en faisant bombarder ses villes, il est condamné à disparaître de la scène politique. Donc, cest avec beaucoup de ténacité que nous allons continuer notre action. Le plus tôt sera le mieux, bien entendu, parce que malheureusement les morts sajoutent aux morts.
Q - (Sur la Syrie)
R - Je vous ai dit ce que nous étions en train de faire. Nous allons continuer sur cette voie. Nous pensons que loption militaire, dautant plus quil ny a pas de mandat du Conseil de sécurité des Nations unies, nest pas à lordre du jour. La Syrie nest pas la Libye. Jai eu loccasion de le dire à plusieurs reprises. Ce qui me préoccupe le plus, cest le risque dune guerre civile entre les communautés syriennes et ce sera une nouvelle responsabilité extrêmement lourde du régime syrien si ce risque de guerre civile se confirmait.
Q - (Sur les corridors humanitaires en Syrie)
R - Vous savez, il y a plusieurs semaines maintenant, pour ne pas dire plusieurs mois, que jai rencontré le président du Conseil national syrien et un certain nombre de ses amis. Ils mont dit : «vous devriez demander lorganisation de corridors humanitaires pour permettre lacheminement de laide». À lépoque, cette idée na pas eu beaucoup de succès et je crois quil faut la remettre à lordre du jour. Cela fait dailleurs partie des travaux que nous faisons au Conseil de sécurité. La difficulté, cest quil faut concevoir ces corridors humanitaires dans deux situations : ou bien le régime syrien accepte que la communauté internationale organise ces corridors et que les grandes ONG humanitaires, la Croix-Rouge et dautres, puissent accéder aux sites dans lesquels la situation humanitaire est épouvantablement dégradée ; ou bien le régime ne laccepte pas et on se retrouve à ce moment-là devant une difficulté de caractère militaire.
Q - Sur la Russie. Est-ce que vous pensez que larrivée de M. Poutine va faciliter les choses ou pas. Comment voyez-vous lévolution de nos relations ?
R - Vous voulez plutôt dire le retour de M. Poutine. Je pensais quune fois les élections passées, le dialogue avec les autorités russes pourrait sengager de façon un peu plus consensuelle. Pour linstant, cette attente de ma part, ne se vérifie pas.
Q - On a eu des informations ces derniers jours sur des défections à la fois au niveau politique et au niveau militaire. Est-ce que vous croyez en un délitement du régime dans les semaines ou dans les mois qui viennent ?
R - Je vous lai dit : ce régime ne pourra pas survivre et je pense en effet quil sera lâché de plus en plus par certains nombres de responsables, peut-être par davantage de militaires. Simplement, il exerce une véritable terreur sur tous les responsables y compris sur leur famille. Je pense que si cette terreur nexistait pas, il y a bien longtemps que le régime se serait effondré.
Cest une situation extraordinairement difficile, mais il faut tenir. Jai une pensée bien sûr pour la population syrienne qui est soumise à un traitement scandaleux. Nous avons eu des témoignages de ce qui sest passé à Homs et de ce qui est en train de se passer dans dautres villes. Il est scandaleux de mettre sur le même plan des citoyens qui essaient de se défendre et puis un régime qui les bombarde et fait tirer des snipers. Dans Homs, il y a eu des snipers qui tiraient sur tout - femmes, enfants - pour créer la terreur. Voilà la réalité de ce qui se passe en Syrie et qui mérite dêtre dénoncé. Je vous ai dit ce que lon essayait de faire. Un de mes amis français a dit récemment que la Syrie lempêchait de dormir. Il sagissait de Dominique de Villepin. Moi aussi.
Q - Si les Européens et si la communauté internationale narrivent pas à changer les choses en Syrie, quel genre de message envoie-t-on sur la capacité dintervention des Européens ?
R - Vous savez, on critique beaucoup les Européens parce quils sont impuissants. Est-ce que les Américains sont plus puissants que nous ? Cest difficile pour tout le monde. Je crois que lEurope avance bien et quelle est capable de prendre des initiatives.
Ce qua fait Catherine Ashton vis-à-vis de lIran, dans les différentes réunions quelle a animées, a été bien fait. Son action dans les Balkans, particulièrement en Bosnie, est également positive. Loctroi du statut de candidat à la Serbie lest également. Bref, lUnion européenne est attractive et elle agit dans beaucoup dautres secteurs aussi. Nous menons par exemple des actions dans la Corne de lAfrique ; nous nous préparons à monter une opération dans le Sahel.
Cette idée que lEurope serait totalement impuissante et ne servirait à rien est véhiculée par des gens qui ne nous veulent pas de bien. On sait très bien quil y a différentes visions de lEurope. Pour certains - je lisais certains articles de la presse britannique tout à lheure - le seul avenir, cest lélargissement indéfini de lEurope. Je ne pense pas cela. Je pense que cest lintégration plus poussée de ceux qui veulent aller plus loin dans le domaine économique, dans le domaine de la politique étrangère, dans le domaine de la politique de sécurité.
Ne perdons pas notre foi européenne, même si cest difficile.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 mars 2012
Le Service européen dAction extérieure est encore un «petit enfant», si je puis dire. Cet «enfant» se renforce, grandit et nous souhaitons quil améliore encore sa coordination, dabord avec les services diplomatiques nationaux et puis aussi, sur le terrain, dans chaque pays. Nous souhaitons que les délégations de lUnion européenne et les ambassades puissent travailler la main dans la main dans chaque pays pour coordonner aussi laide au développement multilatérale et bilatérale, bref pour travailler dans le même sens. Nous avons eu un débat intéressant sur les sanctions. Est-ce que les sanctions sont utiles ou inutiles ? Ce nest certainement pas une panacée. Certaines peuvent être efficaces, dautres moins mais dans certaines situations, le choix était très clair : soit ne rien faire ; soit utiliser cette arme des sanctions qui peut présenter une certaine efficacité. Nous nous sommes finalement retrouvés sur cette analyse.
Jai eu loccasion aussi de rappeler la position de la France sur la Syrie, car je ne voudrais pas que notre capacité dindignation faiblisse au fur et à mesure que le temps passe. Cette capacité dindignation doit garder toute sa place. Je vous signale quau moment même où M. Kofi Annan arrive à Damas, le régime bombarde une nouvelle ville, Idleb, et continue à faire des dizaines de morts. Il ne faut donc pas renoncer à atteindre nos objectifs. Ces objectifs, cest bien sûr la cessation des violences, laccès à laide humanitaire, mais cest aussi la possibilité de donner loccasion au peuple syrien de sexprimer, de conquérir sa liberté et de bâtir une véritable démocratie, selon le processus qui a été proposé par la Ligue arabe.
Cest la raison pour laquelle nous agissons sur plusieurs fronts.
Dabord, bien entendu, en soutenant Kofi Annan qui a pour mission de mettre en uvre la résolution de lAssemblée générale, qui elle-même endosse le plan de la Ligue arabe. Ensuite nous continuons à soutenir le processus du Groupe des Amis du peuple syrien. En troisième lieu, nous poursuivons le travail sur nos positions, qui vont se fédérer, sunir, se renforcer.
Enfin, il y a le Conseil de sécurité : je serai lundi à New York à loccasion du débat organisé par la Présidence britannique. Actuellement, toute possibilité de parvenir à un accord sur une résolution du Conseil de sécurité est bloquée et nous naccepterons jamais que soient renvoyés dos à dos ou mis sur le même plan le régime et ceux qui se battent contre la répression du régime. Cest au régime de prendre linitiative darrêter la répression, de faire cesser lensemble des violences, de permettre lacheminement de laide humanitaire, mais aussi de permettre la mise en uvre de la solution de transition politique. Sur ce point là, nous avons une vision cohérente et claire à laquelle nous resterons fidèles. Voilà ce que je voulais vous dire brièvement sur cette réunion. Nous avons eu plus de temps que dhabitude - une discussion un peu plus stratégique. Je remercie la Présidence danoise de son accueil et de sa parfaite organisation.
Q - La France a rappelé son ambassadeur en Syrie. Beaucoup dÉtats membres de lUE ne lont pas fait. Quen pensez-vous ?
R - Nous espérions que le rappel dambassadeurs soit une décision collective. Nous avons appelé nos partenaires à prendre ensemble cette décision. Cela na pas été possible. Certains États membres avaient une appréciation différente de la situation. La France a pris cette décision parce que la sécurité de nos diplomates était en cause. Notre ambassadeur est revenu à Paris il y a quelques jours.
Q - Le ministre allemand a suggéré hier quil était temps de reconsidérer le concept dune Constitution européenne. Il se fait des soucis Quel est votre avis ?
R - Je crois que M. Westerwelle doit organiser bientôt un séminaire à Berlin ; il ma invité, jessaierai dy être. Cette réflexion est tout à fait utile. Je suis absolument convaincu que quand nous allons sortir de cette crise - parce que nous allons en sortir - il faudra aller plus loin dans lintégration européenne, entre ceux qui voudront bien le faire, notamment au sein des pays de lEurogroupe. De ce point de vue, je pense quune réflexion sur une nouvelle constitution, lamélioration des procédés, une meilleure gouvernance de la zone euro - à laquelle la France est très attachée - simpose.
Il faut aussi une progression dans la Politique de sécurité et de défense commune. Je le disais ce matin : quels sont les objectifs de laction extérieure de lUnion européenne ? Dabord, notre voix dans le monde doit être porteuse de valeurs et les promouvoir : la démocratie, les droits de lHomme, la paix aussi. Ensuite, notre objectif, cest de défendre nos intérêts, sans naïveté. Vous savez que la France est attachée au principe de la réciprocité dans les échanges commerciaux. Enfin, pour atteindre ces objectifs, il faut que nous soyons des acteurs à part entière sur la scène internationale pour ne pas nous limiter à être un «guichet». Nous distribuons beaucoup dargent. Nous avons beaucoup dactions positives pour laide au développement. Mais il faut aussi que nous participions à la décision et, pour cela, il faut que nous améliorions encore notre cohésion et nos mécanismes de gouvernance ; je vais parler de cela à mon collègue allemand.
Q - Concernant le refus russe, que peut faire la diplomatie européenne et la France pour, au moins, ramener la Russie à une résolution qui soit acceptée par tout le monde ?
R - Persévérer. Continuer. Ne pas renoncer. Je vous ai dit quelle est laction que nous menions. Il y a dabord Kofi Annan, qui a pris des contacts avec les Russes, les Chinois, les Syriens, et avec nous bien sûr. Je lui fais confiance pour trouver des amorces de solution. Il faut maintenir la pression de la communauté internationale. Il y avait 60 pays et un certain nombre dorganisations internationales réunis à Tunis ; il y en aura encore plus à Ankara.
Il faut aider lopposition, je le dis encore. Ce régime ne pourra pas survivre. Quand un chef dÉtat massacre des milliers de ses concitoyens, en faisant bombarder ses villes, il est condamné à disparaître de la scène politique. Donc, cest avec beaucoup de ténacité que nous allons continuer notre action. Le plus tôt sera le mieux, bien entendu, parce que malheureusement les morts sajoutent aux morts.
Q - (Sur la Syrie)
R - Je vous ai dit ce que nous étions en train de faire. Nous allons continuer sur cette voie. Nous pensons que loption militaire, dautant plus quil ny a pas de mandat du Conseil de sécurité des Nations unies, nest pas à lordre du jour. La Syrie nest pas la Libye. Jai eu loccasion de le dire à plusieurs reprises. Ce qui me préoccupe le plus, cest le risque dune guerre civile entre les communautés syriennes et ce sera une nouvelle responsabilité extrêmement lourde du régime syrien si ce risque de guerre civile se confirmait.
Q - (Sur les corridors humanitaires en Syrie)
R - Vous savez, il y a plusieurs semaines maintenant, pour ne pas dire plusieurs mois, que jai rencontré le président du Conseil national syrien et un certain nombre de ses amis. Ils mont dit : «vous devriez demander lorganisation de corridors humanitaires pour permettre lacheminement de laide». À lépoque, cette idée na pas eu beaucoup de succès et je crois quil faut la remettre à lordre du jour. Cela fait dailleurs partie des travaux que nous faisons au Conseil de sécurité. La difficulté, cest quil faut concevoir ces corridors humanitaires dans deux situations : ou bien le régime syrien accepte que la communauté internationale organise ces corridors et que les grandes ONG humanitaires, la Croix-Rouge et dautres, puissent accéder aux sites dans lesquels la situation humanitaire est épouvantablement dégradée ; ou bien le régime ne laccepte pas et on se retrouve à ce moment-là devant une difficulté de caractère militaire.
Q - Sur la Russie. Est-ce que vous pensez que larrivée de M. Poutine va faciliter les choses ou pas. Comment voyez-vous lévolution de nos relations ?
R - Vous voulez plutôt dire le retour de M. Poutine. Je pensais quune fois les élections passées, le dialogue avec les autorités russes pourrait sengager de façon un peu plus consensuelle. Pour linstant, cette attente de ma part, ne se vérifie pas.
Q - On a eu des informations ces derniers jours sur des défections à la fois au niveau politique et au niveau militaire. Est-ce que vous croyez en un délitement du régime dans les semaines ou dans les mois qui viennent ?
R - Je vous lai dit : ce régime ne pourra pas survivre et je pense en effet quil sera lâché de plus en plus par certains nombres de responsables, peut-être par davantage de militaires. Simplement, il exerce une véritable terreur sur tous les responsables y compris sur leur famille. Je pense que si cette terreur nexistait pas, il y a bien longtemps que le régime se serait effondré.
Cest une situation extraordinairement difficile, mais il faut tenir. Jai une pensée bien sûr pour la population syrienne qui est soumise à un traitement scandaleux. Nous avons eu des témoignages de ce qui sest passé à Homs et de ce qui est en train de se passer dans dautres villes. Il est scandaleux de mettre sur le même plan des citoyens qui essaient de se défendre et puis un régime qui les bombarde et fait tirer des snipers. Dans Homs, il y a eu des snipers qui tiraient sur tout - femmes, enfants - pour créer la terreur. Voilà la réalité de ce qui se passe en Syrie et qui mérite dêtre dénoncé. Je vous ai dit ce que lon essayait de faire. Un de mes amis français a dit récemment que la Syrie lempêchait de dormir. Il sagissait de Dominique de Villepin. Moi aussi.
Q - Si les Européens et si la communauté internationale narrivent pas à changer les choses en Syrie, quel genre de message envoie-t-on sur la capacité dintervention des Européens ?
R - Vous savez, on critique beaucoup les Européens parce quils sont impuissants. Est-ce que les Américains sont plus puissants que nous ? Cest difficile pour tout le monde. Je crois que lEurope avance bien et quelle est capable de prendre des initiatives.
Ce qua fait Catherine Ashton vis-à-vis de lIran, dans les différentes réunions quelle a animées, a été bien fait. Son action dans les Balkans, particulièrement en Bosnie, est également positive. Loctroi du statut de candidat à la Serbie lest également. Bref, lUnion européenne est attractive et elle agit dans beaucoup dautres secteurs aussi. Nous menons par exemple des actions dans la Corne de lAfrique ; nous nous préparons à monter une opération dans le Sahel.
Cette idée que lEurope serait totalement impuissante et ne servirait à rien est véhiculée par des gens qui ne nous veulent pas de bien. On sait très bien quil y a différentes visions de lEurope. Pour certains - je lisais certains articles de la presse britannique tout à lheure - le seul avenir, cest lélargissement indéfini de lEurope. Je ne pense pas cela. Je pense que cest lintégration plus poussée de ceux qui veulent aller plus loin dans le domaine économique, dans le domaine de la politique étrangère, dans le domaine de la politique de sécurité.
Ne perdons pas notre foi européenne, même si cest difficile.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 mars 2012