Texte intégral
« La culture nest pas un luxe, cest une nécessité », écrit Gao Xingjian dans La Montagne de lâme.
Nécessité pour réfléchir.
Nécessité pour sépanouir.
En un mot, nécessité pour vivre. Pour moi, comme pour toi, cher Frédéric, la culture, ce nest donc pas un privilège réservé à une élite.
La culture, cest un droit une nécessité pour toutes et pour tous.
Le rôle du politique est précisément de garantir à chacune et chacun laccès à ce droit.
Cet accès à la culture de toutes et de tous, vous le savez, jy suis très attachée.
Lorsque jai pris mes fonctions de Ministre des solidarités et de la cohésion sociale, jai voulu témoigner de cet engagement à travers un symbole très fort.
Ainsi, je me suis rendue, à loccasion de mon tout premier déplacement, au Musée du Quai Branly pour saluer sa politique daccessibilité.
Je dois dire que, sur ce sujet de laccessibilité, nous avons uvré de concert, cher Frédéric.
Car je sais que tu as été et que tu es, toi aussi, extrêmement vigilant et extrêmement concerné.
Cest précisément pour permettre des avancées réelles que mon ministère et le tien ont noué un partenariat, dont je veux souligner la grande qualité.
Ce partenariat a eu plusieurs occasions de sexprimer.
Dans le cadre de cette commission, devant laquelle je suis très heureuse de mexprimer pour la première fois et je te remercie, cher Frédéric, de mavoir conviée à le faire aujourdhui.
Dans le cadre également de la convention culture et handicap, signée en 2006. Dans le cadre, enfin, de la commission nationale chargée de la mise en uvre de lexception au droit dauteur.
Et, plus récemment, le 12 décembre 2011, ce partenariat fructueux sest incarné très concrètement à travers la signature de la charte relative à la qualité du sous-titrage pour les personnes sourdes ou malentendantes, aux côtés du CSA, des chaînes de télévision, des laboratoires de sous-titrage et des associations.
Mais ce combat en faveur des droits des personnes en situation de handicap, je lai aussi mené en tant que Ministre de la santé et des sports. Ainsi, jai signé en 2010, avec toi, cher Frédéric, la convention culture santé, dont larticle 12 prévoit la création dun groupe de travail visant à examiner les conditions de transposition au secteur médico-social des actions entreprises dans le domaine.
Ce groupe devrait rendre ses conclusions au mois davril prochain.
Alors, naturellement, on peut sinterroger sur la pertinence de voir coexister deux conventions dun côté, la convention culture handicap, et, de lautre, la convention culture santé.
A titre personnel et je pense que nous pourrions nous rejoindre sur ce point, cher Frédéric , je serais favorable à la rédaction dune convention unique, qui intégrerait lensemble du champ médico-social et se nourrirait de tous les travaux menés jusquà ce jour.
Favoriser laccès à la culture des personnes en situation de handicap : telle est notre ambition, une ambition qui se fonde sur trois convictions sur lesquelles je voudrais revenir maintenant.
Première conviction : laccès des personnes handicapées à la culture est un droit reconnu par la Convention de lONU sur les personnes handicapées (article 30), convention que notre pays a ratifiée en 2010. Il sagit donc dune liberté fondamentale.
Cest aussi lesprit de la loi de 2005 : permettre laccès de tous à tout.
Je veux le rappeler : laccessibilité est le premier des droits car cest lui qui rend possibles tous les autres.
Cest pourquoi, précisément, ce sujet était au cur de la conférence nationale du handicap (CNH), qui sest tenue le 8 juin dernier. Le Président de la République a rappelé que nous tiendrions nos engagements.
De la même manière, nous avons souhaité que chacun de nos plans « handicap » propose un volet important consacré à la culture. Je crois en effet que cest la culture qui fait lêtre humain.
Favoriser laccessibilité donc, mais le faire avec les personnes en situation de handicap : telle est la deuxième conviction que je voudrais vous faire partager. Je rappelle souvent cette formule de Nelson Mandela que je trouve très juste : « Tout ce qui est fait pour moi, sans moi, est fait contre moi.
Je me réjouis que ce principe constitue dailleurs lun des fondements de cette commission.
A cet égard, vous le savez, jai toujours accordé la plus grande importance à la représentation des usagers dans les agences régionales de santé (ARS). Cest pour moi une impérieuse nécessité, à laquelle jai toujours veillé.
En matière daccessibilité, je le citais en préambule il y a quelques instants, des exemples comme celui du Quai Branly doivent nous inspirer.
En associant les personnes en situation de handicap à ses travaux, le comité de suivi de laccessibilité de cet établissement a permis à ce musée non seulement de rattraper son retard, mais aussi de devenir lun des plus accessibles en France.
Je crois que cela doit nous guider : pour avancer, il faut agir ensemble.
Enfin, ma dernière conviction est que cest dabord par la culture que nous ferons changer le regard que nous portons collectivement sur le handicap.
Nous le savons bien, lart est souvent précurseur et il devance les grandes évolutions des sociétés.
Jen veux pour preuve, par exemple, lextraordinaire succès du film Intouchables, bien plus efficace que nimporte quelle campagne de communication sur le handicap.
Je pense également aux expositions que jaccueille régulièrement au sein de mon ministère.
A travers leur maîtrise artistique et leur univers si singulier, les différents artistes notamment, très récemment, Julien Faure, dont les uvres mont particulièrement touchée modifient notre regard.
Convaincus de la force de la culture sur nos vies, nous avons décidé, cher Frédéric, dorganiser ensemble le festival du film qui se tiendra à Saint Gilles Croix de Vie.
Il permettra de réaffirmer le dialogue fécond quentretiennent et que doivent entretenir culture et handicap au service de nos concitoyens, de tous nos concitoyens les personnes handicapées bien sûr, mais aussi toutes les autres.
Car ne nous y trompons pas : en ouvrant à tous laccès à la culture, cest-à dire à luniversel, cest notre projet du vivre ensemble que nous réaffirmons.
Source http://www.solidarite.gouv.fr, le 8 février 2012