Interview de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, à France Inter, sur la polémique autour de la candidature de Ségolène Royal au second tour des élections législatives 2012, le scond tour des élections législatives et le décret sur le salaires des dirigeants de grandes entreprises publiques.

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Média : France Inter

Texte intégral

PATRICK COHEN  Valérie TRIERWEILER, à votre avis, doit-elle fermer son compte Twitter ou son  bureau à l'Elysée ? 
 
MARISOL TOURAINE  Franchement cette affaire prend des proportions que je trouve un peu  déplacées… 
 
PATRICK COHEN  Si vous répondez rapidement, on va y passer… 
 
MARISOL TOURAINE  On va pouvoir passer… 
 
PATRICK COHEN  Vite à autre chose, oui. 
 
MARISOL TOURAINE  Non ! Oui… Voilà ! Je trouve que c'est un peu déplacé, que c'était un  positionnement privé qui n'exclut pas le fait, n'empêche rien au fait que le Parti  Socialiste soutient la candidature de Ségolène ROYAL… Voilà ! 
 
PATRICK COHEN  Et, donc, vous soutenez la candidature de Ségolène ROYAL ? 
 
MARISOL TOURAINE  Ah oui ! Je soutiens la candidature de Ségolène ROYAL. 
 
PATRICK COHEN  Parce que, contrairement à Valérie TRIERWEILER, vous ne pouvez pas  contredire François HOLLANDE. Mais… 
 
MARISOL TOURAINE  Non ! Mais parce que Ségolène ROYAL est la candidate du Parti Socialiste et  qu'elle porte… elle est celle qui a été désignée par le Parti Socialiste et donc il  m'apparaît normal que tout le monde se rassemble derrière elle. 
 
PATRICK COHEN  Je reviens à ma première question ! Valérie TRIERWEILER peut conserver sa  liberté de parole, contredire le président, tout en dirigeant un cabinet de sept personnes  à l'Elysée ? 
 
MARISOL TOURAINE  Je ne crois pas qu'elle ait cherché à contredire le président !  
 
PATRICK COHEN  C'est ce qu'elle a fait ! 
 
MARISOL TOURAINE  Mais j'imagine qu'elle réfléchira à la façon dont elle entend s'exprimer. 
 
PATRICK COHEN  C'est une faute, a dit ce matin le député PS Claude BARTOLONE ? 
 
MARISOL TOURAINE  Ecoutez ! Moi je ne me sens pas apte à décider de qui est en faute ou pas en  faute, je pense qu'elle a exprimé un sentiment privé et que les choses doivent en rester  là. 
 
PATRICK COHEN  Ce sentiment privé d'un personnage public qui fait des déclarations publiques.  Que répondez-vous à la Droite qui explique que la présidence normale aura duré un peu  plus d'un mois ? 
 
MARISOL TOURAINE  Que franchement je ne vois absolument pas en quoi on a là un mélange de la vie  privée et de la vie publique, quand on pense à d'autres périodes où effectivement il  s'agissait de mettre les intérêts publics ou les moyens publics au service d'intérêts  privés de la famille proche du président, on est dans une situation totalement différente.  Et je pense d'ailleurs que la Droite se sert de ce Twitt et de cette affaire pour gommer la  réalité de l'entre-deux tours qui est l'effritement de la Droite républicaine face aux appels  du pied de l'Extrême droite et que le vrai sujet de l'entre-deux tours des législatives il est  là, il est dans le déplacement du positionnement de la Droite et pas du tout dans ce qui  se passe à La Rochelle. 
 
PATRICK COHEN  J'allais y venir ! Mais je vous rappelle que ce président avait promis qu'il ne se  mêlerait pas de la vie des partis et il laisse aujourd'hui écrire son nom sur la profession  de foi d'une candidate, il n'y a pas une entorse, Marisol TOURAINE ? 
 
MARISOL TOURAINE  Je crois qu'on est dans une situation très particulière qui est que le président  soutient une ancienne candidate aux primaires, qui l'a elle-même soutenu, et donc on  est dans un cadre très particulier. Par ailleurs, je vous ferai observer que l'adversaire de  Ségolène ROYAL n'est pas UMP, donc il ne se mêle pas de la vie entre les partis, il  soutient… 
 
PATRICK COHEN  Il se mêle de la vie intérieure des partis… 
 
MARISOL TOURAINE  Oui ! Face à une ancienne candidate So… 
 
PATRICK COHEN  Alors, c'est pire ? 
 
MARISOL TOURAINE  Non ! Une candidate Socialiste, non une candidate Socialiste à la présidentielle.  J'ai eu l'occasion de le dire, elle a un statut à part, elle a été candidate à la fonction  présidentielle et, de ce point de vue là, je crois que le soutien de François HOLLANDE  me parait naturel. 
 
PATRICK COHEN  D'accord ! Tout est exceptionnel donc dans cette histoire de… 
 
MARISOL TOURAINE  Oh ! C'est un peu exceptionnel oui. 
 
PATRICK COHEN  De présidence normale. 
 
MARISOL TOURAINE  Eh bien c'est ce que vous dites vous-même. 
 
PATRICK COHEN  Oui ! Alors un mot encore sur les législatives. 
 
MARISOL TOURAINE  Donc… 
 
PATRICK COHEN  Vous faisiez allusion tout à l'heure au débat sur l'attitude de l'UMP à l'égard du  Front National, que répondez justement à l'UMP qui met sur un même plan Extrême  droite et Extrême gauche et, quand vous lui parlez de Front National, vous renvoie à vos  alliances ou à vos accords de désistement avec le Front de Gauche ? 
 
MARISOL TOURAINE  Le Front de Gauche ne porte pas de valeurs qui soient contraire à celles de la  République, ce qui se passe avec l'Extrême droite c'est l'affirmation de valeurs qui sont  en contradiction avec celles que nous défendons à travers les différents partis de la  République et donc je crois que cette mise sur un pied d'égalité n'a absolument aucun  sens et, aujourd'hui, on s'aperçoit que la Droite dite républicaine est en train d'imploser  puisque certains refusent cette dérive alors que d'autres se laissent tenter. Donc…  Voilà ! Je pense que c'est grave aujourd'hui de voir que, à l'occasion de quelques  situations particulières - parce que le Front National n'a pas réussi la percée qu'il  espérait - et donc que, à l'occasion de quelques situations particulières… 
 
PATRICK COHEN  13,5% des voix tout de même ! 
 
MARISOL TOURAINE  Oui ! Mais… mais en termes de maintien au second tour, on a quelques cas  isolés qui sont préoccupants – mais qui sont isolés – et à cette occasion là la Droite  républicaine a montré qu'elle s'interrogeait au fond sur son avenir. 
 
PATRICK COHEN  Au conseil des ministres ce matin les grandes lignes du décret qui fera que les  salaires des dirigeants du public soient au maximum vingt fois plus élevés que… 
 
MARISOL TOURAINE  Oui ! 
 
PATRICK COHEN  Non pas le plus bas de celui de ses employés mais la moyenne des plus bas  salaires toutes entreprises confondues, ça va concerner qui, Marisol TOURAINE,  précisément ? 
 
MARISOL TOURAINE  Oh ! Ca va concerner les patrons, les responsables, les mandataires sociaux des  grandes entreprises publiques. Concrètement cela signifie que leur salaire sera plafonné  autour de 28.000 euros brut, ce qui est déjà un salaire significatif… 
 
PATRICK COHEN  Mais c'est plus de vingt fois le SMIC en fait, c'est ça ? 
 
MARISOL TOURAINE  Non ! C'est à peu près vingt fois le SMIC… 
 
PATRICK COHEN  Oui ! 
 
MARISOL TOURAINE  Brut, c'est à peu près vingt fois le SMIC brut, et donc cela permet de marquer un  écart de rémunération qui reste dans les limites de la décence et d'une certaine sobriété. 
 
PATRICK COHEN  Quitte à ce que ces dirigeants, notamment dans le secteur de la finance, se  retrouvent moins bien payés que certains de leurs collaborateurs ? 
 
MARISOL TOURAINE  Mais c'est déjà le cas aujourd'hui dans des entreprises publiques. 
 
PATRICK COHEN  Eh bien ça sera encore plus le cas. 
 
MARISOL TOURAINE  Eh bien, écoutez, on pourra revoir la situation des autres salariés lorsque leur  contrat sera arrivé à terme, puisqu'on ne peut pas mettre… enfin changer complètement  les règles des contrats de travail pour les salariés autres que les responsables et les  patrons. 
 
PATRICK COHEN  Quid dans les entreprises où l'Etat est minoritaire, comme RENAULT ou AIR  FRANCE ? 
 
MARISOL TOURAINE  L'Etat peut marquer sa volonté, intervenir, il peut voter dans les conseils de  surveillance… 
 
PATRICK COHEN  Il le proposera ? 
 
MARISOL TOURAINE  Ah ! Certainement. 
 
PATRICK COHEN  Il proposera des réductions de rémunérations pour les… 
 
MARISOL TOURAINE  Oui ! Je crois que… 
 
PATRICK COHEN  Les grands patrons ? 
 
MARISOL TOURAINE  Absolument ! Je pense qu'il y a là une exigence globale de cohérence et, encore  une fois, de sobriété à un moment où beaucoup de Français sont amenés eux-mêmes à  faire des efforts et à se restreindre. 
 
PATRICK COHEN  Donc, il y a une exemplarité.  Vous avez peut-être entendu dans le journal de 8 h cette enquête autour de  l'entreprise SPI BATIGNOLLES… 
 
MARISOL TOURAINE  Oui ! 
 
PATRICK COHEN  Grande entreprise de BTP, qui sous-déclare ses accidents du travail ou qui  dissuaderait ses accidentés de se déclarer pour payer moins de cotisations à la Sécurité  Sociale, c'est un phénomène que vous connaissez Marisol TOURAINE ? 
 
MARISOL TOURAINE  Oui ! C'est un phénomène que nous connaissons bien, que nous dénonçons  depuis des années, qui est préoccupant, lorsque l'on parle de fraude et lorsque la Droite  parle de fraude on aurait aimé qu'elle s'attaque davantage à des phénomènes comme  celui-là et donc, chaque année, il faut mettre davantage l'accent sur la lutte contre ces  sous-déclarations qui coûtent beaucoup d'argent à l'assurance maladie et c'est donc un  chantier que nous allons poursuivre aujourd'hui au gouvernement. 
 Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 19 juin 2012