Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie pour votre présence si nombreuse, qui est synonyme dune importante mobilisation. Je veux également vous dire ma satisfaction douvrir pour la première fois cette assemblée, dans un contexte où léconomie sociale et solidaire obtient pour la première fois une reconnaissance institutionnelle et trouve logiquement sa place au sein du Ministère de lEconomie et des Finances.
Jai déjà rencontré bon nombre dentre vous à loccasion dentretiens ces dernières semaines, et jai apprécié de constater que nos visions convergent largement. La création de ce ministère est une réponse aux attentes du secteur, mais aussi une opportunité pour créer en France une véritable politique publique en faveur de léconomie sociale et solidaire. Dans la situation économique que connaît notre pays, il sagit également den faire un vecteur important dune nouvelle stratégie de croissance et de « léconomie du changement » qui est partie prenante du projet du Président de la République. Mais ceci na été rendu possible que pour deux raisons.
La feuille de route du Président de la République
La première raison réside dans le fait que le Président de la République ma donné une feuille de route à la fois précise et ambitieuse ; je me permets den rappeler devant vous les points principaux :
- élaboration dune loi dorientation de léconomie sociale et solidaire ;
- participation à la mise en oeuvre de la BPI avec affectation de 500 millions deuros à léconomie sociale et solidaire ;
- accompagnement du secteur de linsertion par lactivité économique avec un objectif daugmentation du nombre de contrats dinsertion dès 2012 et la mobilisation des futurs emplois davenir ;
- améliorer les conditions de reprise des entreprises en difficulté par leurs salariés eux-mêmes, notamment sous une forme coopérative ;
- faciliter laccès aux marchés publics des entreprises de léconomie sociale et solidaire ;
- et inscrire léconomie sociale et solidaire à lordre du jour de la conférence sociale des 9 et 10 juillet.
Les travaux et le rôle du Conseil supérieur de léconomie sociale et solidaire (CSESS)
La deuxième raison qui a permis lexistence de mon ministère réside dans le secteur de léconomie sociale et solidaire lui-même. Fort de son dynamisme et de sa diversité, il ne manque pas didées et de projets, même sil faut parfois réconcilier les visions et surtout trouver les moyens pour mettre en oeuvre ces idées.
Je veux à ce titre vous remercier pour les travaux qui ont été conduits au sein du CSESS, de ses commissions et groupes de travail. Ils démontrent quil y a une dynamique propre à ce conseil depuis deux ans, sur laquelle jentends bien évidemment mappuyer encore. Le CSESS sera dailleurs sollicité directement pour accompagner la préparation de la loi que jentends présenter devant le Parlement. Je devrai également me pencher prochainement sur la composition de notre Conseil car il y a eu ces derniers temps des changements ou des évolutions de fonctions qui nont pas encore été actés ; je ne le ferai pas dans la précipitation, et les nouveaux textes réglementaires seront pris après lété.
Ainsi que je lai dit au Bureau du CSESS en le recevant dès ma prise de fonctions, le CSESS a vocation à devenir un lieu permanent de concertation entre les pouvoirs publics et les nombreux acteurs des différents secteurs de léconomie sociale et solidaire sur lensemble des questions qui lintéressent. Il doit également continuer à être un lieu autonome de réflexion et de proposition, notamment dans le cadre de ses commissions ou de ses formations spécialisées, dont la définition devra correspondre à la logique daction du ministère.
Comme vous sans doute, je regrette la décision du précédent gouvernement de supprimer la délégation interministérielle et avec elle lessentiel des moyens humains et techniques quelle comprenait. Cela nest guère surprenant au regard des orientations portées par lancienne majorité, mais cela traduit surtout la méconnaissance de léconomie sociale et solidaire et de son rôle majeur dans le développement économique et social de notre pays, en dépit des efforts méritoires de ses acteurs ou de parlementaires, et je veux saluer à ce titre et de façon républicaine le député Francis VERCAMER pour la qualité de son rapport.
La conséquence immédiate de cette disparition est que les moyens que nous pouvons consacrer au développement et à la promotion de léconomie sociale et solidaire sont aujourdhui des plus limités ; dans le contexte budgétaire actuel, je mettrai toute mon énergie dans la préservation des crédits dintervention de mon ministère, mais nous devrons également amplifier les accords de collaboration avec les acteurs eux-mêmes, que ce soit à laide des programmes existants (je pense notamment au programme « Jeunes ESS ») ou de nouveaux à élaborer. Je veux toutefois souligner le rôle que la MIIESES a continué de jouer en dépit dun contexte politique et administratif défavorable ; elle demeurera une structure dappui incontournable, même si la création du ministère et son rattachement à Bercy modifient quelque peu la donne.
Comme vous avez sans doute pu le constater, le décret dattributions de mon ministère me permet de solliciter de nombreuses ressources administratives. Par nécessité, la coordination interministérielle sera assurée par mon cabinet, avec le soutien de Sabine FOURCADE qui est toujours déléguée interministérielle en titre, et que je remercie pour son soutien ainsi que celui de Jérôme FAURE et de son équipe dans ces premières semaines. Je peux également compter sur lappui entier des services du Ministère de lEconomie et des Finances, et nous bénéficions déjà dune collaboration constructive avec le Ministère du Redressement Productif dans le cadre du traitement de la situation dentreprises en difficulté.
Prochainement, je madresserai aux préfets de régions pour leur demander leur concours dans la mise en oeuvre de nos orientations. Le développement de léconomie sociale et solidaire dépend en effet de notre capacité à aider concrètement des entrepreneurs pour créer leur activité ; le réseau des correspondants départementaux de léconomie sociale et solidaire sera donc fortement sollicité et au besoin revivifié. Je constate malheureusement dès aujourdhui le manque dexpertise publique en faveur du développement de léconomie sociale et solidaire (je pense notamment à la situation de salariés qui souhaitent porter un projet de reprise dentreprise sous forme coopérative, et qui se retournent légitimement vers mon ministère) ; ce manque pèsera sur la réalisation de nos ambitions si nous ny apportons pas une réponse.
Je nai pas pour projet de créer une administration dédiée à léconomie sociale et solidaire, ce qui serait un contre-sens par rapport à ses besoins, mais je souhaite que toutes les compétences, les énergies et les moyens soient fédérés au niveau local pour assurer le développement de léconomie sociale et solidaire. Des propositions existent, notamment la « consularisation » des CRESS, et il nest pas interdit den faire de nouvelles ; je vous ferai part de mes propositions sur ce sujet dici quelques semaines.
La Conférence sociale
Mais revenons à lactualité immédiate. Jai précisément souhaité tenir cette première réunion plénière sous ma présidence juste avant la Conférence sociale organisée par le Premier ministre car jai souhaité que la voix de léconomie sociale et solidaire, avec ses spécificités comme avec ses réalisations, soit entendue de tous.
Le Gouvernement, à la différence du précédent, a en effet décidé de mettre le dialogue social, et plus largement la concertation, au coeur de son action. Dans ce cadre, aux côtés des partenaires sociaux et des organisations professionnelles non représentatives invitées à la conférence, jai décidé de vous associer aux sept grands débats qui font lobjet de tables-rondes thématiques : ainsi sur lemploi, sur la formation professionnelle, sur les salaires, sur la protection sociale et les retraites, sur le redressement productif, sur la fonction publique, le CSESS peut apporter son avis. Vos contributions écrites, nos échanges du jour sur ce thème (cest le point 3 de notre ordre du jour) seront transmis au Premier ministre et aux ministres pilotes des tables rondes.
Ainsi les propositions du secteur de léconomie sociale et solidaire seront partie intégrante des travaux de ce premier temps fort du dialogue social du quinquennat. Dans cet esprit, je recevrai le 5 juillet les organisations syndicales et ce même jour, je terminerai avec lUNIFED le tour de consultation des organisations demployeurs du secteur, que javais entamé en recevant lUSGERES et le GEMA. Comme Alain CORDESSE le sait lui-même, jai dailleurs fait en sorte que lUSGERES soit représentée au meilleur niveau possible dans les tables-rondes ; ce sera finalement le cas pour les tables-rondes consacrées dune part à la formation professionnelle, et dautre part à légalité professionnelle et à la qualité de vie au travail. Cela constitue un premier signe de reconnaissance de la place des employeurs de léconomie sociale et solidaire dans le dialogue social.
Jajoute pour votre bonne information que jai veillé à ce que les grandes têtes de réseaux, mais aussi les acteurs qui lont explicitement souhaité, soient associés à lappel à contributions écrites organisé par le ministre du Travail, de lEmploi et du Dialogue social. Enfin, je piloterai, aux côtés de Pierre MOSCOVICI la table-ronde sur les salaires : le secteur de léconomie sociale et solidaire est plutôt exemplaire en la matière puisquil propose une répartition des salaires plus équitable. Ainsi, une étude de lINSEE réalisée cette année a confirmé que dans toutes les familles de léconomie sociale, les écarts de salaires sont plus resserrés que dans le reste de léconomie privée. Nous sommes donc légitimes à apporter notre pierre au débat.
La question de lexemplarité du secteur est pour moi essentielle. Je sais quelle lest aussi pour vous puisque au coeur de votre action figure la promotion dune économie fondée sur des valeurs. Elle manimera donc de façon continue et transversale dans les prochains mois, à la faveur des débats et des réformes que lancera le Gouvernement, par exemple en matière de rémunération des dirigeants et de gouvernance dentreprise : cela veut dire clairement que léconomie sociale et solidaire ne pourra pas sextraire des décisions qui sont à prendre concernant la modération de lécart salarial au sein des entreprises du secteur, quelle que soit leur activité économique.
Les emplois davenir
Il est un sujet sur lequel jattends tout particulièrement lengagement de vos organismes : celui des emplois davenir et des contrats de génération.
Au-delà de ce temps fort quest la Conférence sociale, jai souhaité que vos avis viennent nourrir les travaux qui ont débuté pour traduire concrètement les engagements pris par le Président de la République pour améliorer lemploi des jeunes. Le chômage a atteint un niveau historique dans notre pays, laccès des jeunes à un emploi stable est un véritable parcours du combattant. Les 150 000 emplois davenir et les 500 000 contrats de génération sont lun des remèdes à cette situation : ils doivent permettre aux jeunes peu ou pas qualifiés qui en bénéficieront dacquérir une première expérience et de bénéficier dune formation qui leur donnera les meilleures chances daccéder à un parcours professionnel durable.
Jai engagé les travaux sur ce sujet avec le Ministre du Travail, qui est le grand ordonnateur densemble de la politique publique de lemploi ; jai dores et déjà obtenu que le secteur non lucratif soit le bénéficiaire principal des emplois davenir, et que les contrats de génération puissent lui bénéficier, là où les besoins de main doeuvre et les activités en fort développement économique et social le justifieront. Je suis dailleurs convaincu que les contrats de génération constitueront une réponse pertinente au défi démographique du secteur.
Jai par ailleurs proposé au Premier ministre que la mise en oeuvre des emplois davenir se fasse dans le cadre dune procédure dappels à projets de recrutements, de façon à sassurer de la qualité des emplois et de leur utilité sociale. Jentends également mobiliser fortement mon ministère dans la mise en oeuvre concrète de ce programme, et jen territorialiserai laction autant que possible.
Les associations, les coopératives, les mutuelles et les fondations ayant ainsi vocation à recruter des jeunes en emplois davenir et en contrats de génération, jai souhaité, le plus en amont possible du processus de travail gouvernemental sur le sujet, recueillir votre avis. Nous échangerons au cours de cette réunion (cest le point 2 de notre ordre du jour) sur vos propositions mais je tenais dores et déjà à vous remercier davoir répondu à cet appel dans un délai très contraint. La richesse de vos contributions confirme lintérêt de cette consultation : le processus va donc se poursuivre sur les sujets « emploi » et plus largement sur dautres thèmes car manifestement la méthode est la bonne.
La Banque Publique d'Investissement
Dans le même esprit, jai souhaité quun certain nombre de vos organismes soient consultés en vue de la constitution de la future Banque Publique dInvestissement. Cest pourquoi jai transmis à Bruno PARENT, qui est en charge de la mission de préfiguration de la BPI, une liste dinterlocuteurs à prendre à considération, et jai signalé à la CDC comme à OSEO ma vision de la place de léconomie sociale et solidaire dans le dispositif, convaincu quelle est à même de construire de construire de nouvelles filières dactivités.
Je vous rappelle que le projet de Banque Publique dInvestissement, conçu par le Président de la République, vise à unifier lensemble des opérateurs publics de financement pour proposer un réseau unique local piloté par la BPI, en lien avec les régions. Il permettra donc damplifier les moyens de financement de léconomie sociale et solidaire, au-delà du programme « Investissement dAvenir » de 100 M géré par la CDC, puisque le Président de la République a annoncé un objectif de 500 M en faveur de léconomie sociale et solidaire.
Au-delà de lengagement financier, il sagit également de restaurer les capacités danalyse stratégique et de pilotage par lEtat du financement public des PME : cela pourra passer par une fusion des trois entités OSEO/CDC-Entreprises/FSI dont la holding sera contrôlée par lEtat. Une gouvernance forte permettra dassurer un pilotage stratégique des trois entités et dexploiter les synergies, dunifier le réseau commercial des trois entités, et une séparation stricte sera maintenue entre les métiers de prêts et de soutien au fonds propres pour éviter les conflits dintérêts, et respecter les réglementations bancaires et financières propres aux deux métiers. Dans ce dispositif, je veillerai à ce quun compartiment dédié à léconomie sociale et solidaire soit mis en place. Dautres pistes de financement sont dores et déjà à létude, notamment en matière de mobilisation de l??épargne réglementée ; jy reviendrai ultérieurement.
Le volet territorial sera tout particulièrement privilégié, au moyen dun guichet de financement dédié à léconomie sociale et solidaire, dans lequel les régions verront leur rôle valorisé. Ainsi que je lai déjà dit à Marie-Guite DUFAY, qui représente lAssociation des Régions de France au sein de ce conseil, les régions pourraient jouer un rôle moteur afin de faciliter laccès des PME (et notamment celles de léconomie sociale et solidaire) à linformation sur les instruments financiers de la BPI ou les démarches administratives, regroupant lensemble des acteurs concernés. Les régions pourraient également se voir reconnaître un rôle dans la gouvernance de la BPI.
Une loi relative à la mise en oeuvre de la BPI est aujourdhui envisagée pour la fin de lannée 2012 de façon à concrétiser rapidement ces orientations, ce qui mamène à évoquer la loi relative à léconomie sociale et solidaire.
La loi sur léconomie sociale et solidaire
Jai bien évidemment pris connaissance des travaux du CSESS sous la houlette de sa commission « Gouvernance et Mutations » animée par Jean-Louis CABRESPINES. Jai également consulté les propositions émanant de parlementaires (Jean-René MARSAC et Geneviève GAILLARD à lAssemblée nationale, Marc DAUNIS et Marie-Noëlle LIENEMANN au Sénat), même si certaines ne sont pas encore tout à fait finalisées, ou ceux émanant des Etats Généraux de lEconomie sociale et solidaire de juin 2011. Il y a là un matériau important à partir duquel il sera possible de construire un texte qui fera date. Il y a encore beaucoup de travail mais jentends tenir le calendrier suivant :
- présentation dun document dorientation au Bureau du CSESS en septembre ; à charge pour lui de nourrir cette trame avec laide de ses groupes de travail ;
- saisine du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) sur la base de ces mêmes orientations, avec une demande de rapport à remettre début décembre ;
- présentation dun avant projet de loi fin 2012 devant le CSESS, puis arbitrages interministériels et consultations parlementaires ;
- examen de la loi par le Parlement au deuxième trimestre 2013.
Quant au contenu, il définira lappellation de ce texte législatif : loi-cadre, loi de programmation, loi dorientation toutes ces dénominations correspondent à des catégories juridiques précises parmi lesquelles je ferai mon choix en fonction des propositions que je soumettrai au Parlement. Les sujets à traiter ne manquent pas mais cette loi ne pourra pas se contenter daffirmer des principes ou dafficher des valeurs, même si son exposé des motifs exprimera la vision de la société qui sous-tend léconomie sociale et solidaire. Elle devra également faire lobjet dun important travail interministériel et dune étude dimpact, ce qui constitue une obligation qui na rien danodin pour les services de lEtat.
Ce sera une loi ouverte, respectant la diversité intrinsèque du secteur, mais ce sera aussi une loi daffirmation, marquant bien ce que sont ses frontières et qui définira aussi précisément que possible ce quest une entreprise qui concourt à léconomie sociale et solidaire, permettant aux autres législations de sy référer et dinscrire dans la durée les politiques publiques en faveur de ces entreprises.
Certaines dispositions que vous appelez de vos voeux prendront peut-être dici là leur place dans dautres textes législatifs préparés par le Gouvernement (je pense notamment aux dispositions fiscales ou à celles relatives à la BPI). Mais la loi que jentends défendre devra de manière générale contenir en son sein toutes les dispositions juridiques nécessaires à la constitution dune politique publique ambitieuse et durable en faveur de léconomie sociale et solidaire ; je vais les évoquer en retenant cinq orientations.
Jentends tout dabord que la loi définisse clairement le secteur et les activités qui pourront bénéficier de cette politique publique ; je connais les débats qui traversent léconomie sociale et solidaire et je nentends pas les trancher dautorité ; jaffirme en revanche quil ny a pas de présomption irréfragable en matière dESS qui serait liée au seul statut (ce que dailleurs le droit européen ne permettrait pas). Cest donc sur la base des pratiques et surtout de leur pérennité que lappartenance dun organisme à léconomie sociale et solidaire sera validée. Je souhaite que votre groupe de travail sur la labellisation reprenne ses réflexions, et je lui demande tout particulièrement que la notion dimpact social soit retenue parmi les critères incontournables, et que les entreprises bénéficiant dun label fassent lobjet dune évaluation régulière.
La loi contiendra de plus toutes les mesures qui permettront aux organismes que vous représentez de se battre à armes égales sur des marchés concurrentiels, sans être disqualifiés par le modèle économique non-lucratif que vous avez choisi : cela concerne tout particulièrement laccès au crédit et aux marchés publics, la valorisation de lautofinancement, la fiscalité
Jentends également permettre aux organismes qui assurent des missions dintérêt général indispensables au maintien du lien social de continuer à le faire sans être disqualifiées du fait de leur statut ou de leur histoire ; bien souvent, ces missions sont loeuvre de précurseurs alors que ni la puissance publique ni le marché ne savaient ou ne voulaient répondre à certains besoins sociaux ; je veux conforter les organismes qui continuent dassurer leur mission sociale, en les dotant notamment dinstruments financiers spécifiques (par exemple en revisitant le principe des titres participatifs ou des titres associatifs) ou en veillant à ladaptation des règles qui les concernent.
Par nature, léconomie sociale et solidaire est également une économie ancrée dans les territoires, et les activités économiques quelle porte ne sont, le plus souvent, pas délocalisables. Je souhaite donc que la loi pose un cadre dincitation à une nouvelle contractualisation entre la puissance publique (Etat et collectivités locales) et des acteurs de léconomie sociale et solidaire. A limage des « pôles territoriaux » dont les premières expérimentations sont, comme jai déjà pu le dire, encourageantes, la loi constituera un cadre dexpérimentation pour la conclusion de nouveaux contrats territoriaux de développement de léconomie sociale et solidaire afin de créer, répliquer, mutualiser, fédérer des initiatives en matière de développement économique.
Enfin, je souhaite que la loi donne les moyens aux créateurs dactivités de le faire sans nécessairement passer par des statuts classiques dentreprises qui supposent dadopter un modèle économique capitalistique. Ces statuts ne permettent pas de répondre à tous les besoins, et ne résument pas la vision de léconomie portée par la nouvelle majorité présidentielle et parlementaire. Je pense bien sûr à tous ceux qui souhaitent reprendre leur outil de travail lorsquil est menacé par une mise en liquidation, mais aussi à tous ceux qui, notamment dans les quartiers populaires où la culture dentreprise est tout aussi forte que la solidarité, veulent créer une nouvelle activité. Jai la conviction que léconomie sociale et solidaire présente des opportunités et des outils efficaces pour la population de ces quartiers, et la loi portera des mesures de simplification en matière de création ou de reprise dactivité, sous une nouvelle forme de statut coopératif notamment. Jentreprendrai dans les prochains jours un cycle de déplacements dans ces quartiers de façon à expliquer ma démarche.
LEurope
Un dernier mot sur lEurope pour conclure. Je sais combien le droit européen, et la hiérarchie des normes qui va avec, a profondément heurté votre secteur, notamment en ce qui concerne vos activités concurrentielles. Votre statut ne vous permet plus de revendiquer un traitement spécifique, ce qui conduit parfois à des situations absurdes, puisque les acteurs lucratifs nont pas toujours fait la preuve de leur capacité à apporter des services de meilleure qualité ou garantissant notamment une solidarité aussi forte que vous ne le faisiez (je pense notamment au secteur de la mutualité).
Jy vois un défaut de régulation majeur au niveau communautaire, mais jy vois aussi une forme de renoncement de la part des pouvoirs publics français. Jai la conviction que toutes les possibilités nont pas été épuisées de façon à permettre à certains de vos organismes de ne plus subir une vision unilatérale et libérale. Tant en matière de reconnaissance des services sociaux dintérêt général (SSIG) que de statut de la mutualité européenne ou de règles financières ou fiscales, je sais pouvoir compter sur le soutien du Parlement Européen (et notamment son intergroupe), et jaurai bientôt un entretien avec le Commissaire Michel BARNIER pour évoquer ces sujets.
Comme vous pouvez le constater, lambition que je porte à la tête de ce ministère est importante et inédite pour léconomie sociale et solidaire. La nouvelle majorité présidentielle et parlementaire considère assurément léconomie sociale et solidaire comme une affaire sérieuse. Je mettrai toute mon énergie et mon poids politique dans sa réalisation et jaurai besoin de votre concours. Je compte sur vous de façon à ce que lexistence du ministère de léconomie sociale et solidaire ne soit plus à lavenir contestable ni contestée.
Je vous remercie.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 12 juillet 2012
Je vous remercie pour votre présence si nombreuse, qui est synonyme dune importante mobilisation. Je veux également vous dire ma satisfaction douvrir pour la première fois cette assemblée, dans un contexte où léconomie sociale et solidaire obtient pour la première fois une reconnaissance institutionnelle et trouve logiquement sa place au sein du Ministère de lEconomie et des Finances.
Jai déjà rencontré bon nombre dentre vous à loccasion dentretiens ces dernières semaines, et jai apprécié de constater que nos visions convergent largement. La création de ce ministère est une réponse aux attentes du secteur, mais aussi une opportunité pour créer en France une véritable politique publique en faveur de léconomie sociale et solidaire. Dans la situation économique que connaît notre pays, il sagit également den faire un vecteur important dune nouvelle stratégie de croissance et de « léconomie du changement » qui est partie prenante du projet du Président de la République. Mais ceci na été rendu possible que pour deux raisons.
La feuille de route du Président de la République
La première raison réside dans le fait que le Président de la République ma donné une feuille de route à la fois précise et ambitieuse ; je me permets den rappeler devant vous les points principaux :
- élaboration dune loi dorientation de léconomie sociale et solidaire ;
- participation à la mise en oeuvre de la BPI avec affectation de 500 millions deuros à léconomie sociale et solidaire ;
- accompagnement du secteur de linsertion par lactivité économique avec un objectif daugmentation du nombre de contrats dinsertion dès 2012 et la mobilisation des futurs emplois davenir ;
- améliorer les conditions de reprise des entreprises en difficulté par leurs salariés eux-mêmes, notamment sous une forme coopérative ;
- faciliter laccès aux marchés publics des entreprises de léconomie sociale et solidaire ;
- et inscrire léconomie sociale et solidaire à lordre du jour de la conférence sociale des 9 et 10 juillet.
Les travaux et le rôle du Conseil supérieur de léconomie sociale et solidaire (CSESS)
La deuxième raison qui a permis lexistence de mon ministère réside dans le secteur de léconomie sociale et solidaire lui-même. Fort de son dynamisme et de sa diversité, il ne manque pas didées et de projets, même sil faut parfois réconcilier les visions et surtout trouver les moyens pour mettre en oeuvre ces idées.
Je veux à ce titre vous remercier pour les travaux qui ont été conduits au sein du CSESS, de ses commissions et groupes de travail. Ils démontrent quil y a une dynamique propre à ce conseil depuis deux ans, sur laquelle jentends bien évidemment mappuyer encore. Le CSESS sera dailleurs sollicité directement pour accompagner la préparation de la loi que jentends présenter devant le Parlement. Je devrai également me pencher prochainement sur la composition de notre Conseil car il y a eu ces derniers temps des changements ou des évolutions de fonctions qui nont pas encore été actés ; je ne le ferai pas dans la précipitation, et les nouveaux textes réglementaires seront pris après lété.
Ainsi que je lai dit au Bureau du CSESS en le recevant dès ma prise de fonctions, le CSESS a vocation à devenir un lieu permanent de concertation entre les pouvoirs publics et les nombreux acteurs des différents secteurs de léconomie sociale et solidaire sur lensemble des questions qui lintéressent. Il doit également continuer à être un lieu autonome de réflexion et de proposition, notamment dans le cadre de ses commissions ou de ses formations spécialisées, dont la définition devra correspondre à la logique daction du ministère.
Comme vous sans doute, je regrette la décision du précédent gouvernement de supprimer la délégation interministérielle et avec elle lessentiel des moyens humains et techniques quelle comprenait. Cela nest guère surprenant au regard des orientations portées par lancienne majorité, mais cela traduit surtout la méconnaissance de léconomie sociale et solidaire et de son rôle majeur dans le développement économique et social de notre pays, en dépit des efforts méritoires de ses acteurs ou de parlementaires, et je veux saluer à ce titre et de façon républicaine le député Francis VERCAMER pour la qualité de son rapport.
La conséquence immédiate de cette disparition est que les moyens que nous pouvons consacrer au développement et à la promotion de léconomie sociale et solidaire sont aujourdhui des plus limités ; dans le contexte budgétaire actuel, je mettrai toute mon énergie dans la préservation des crédits dintervention de mon ministère, mais nous devrons également amplifier les accords de collaboration avec les acteurs eux-mêmes, que ce soit à laide des programmes existants (je pense notamment au programme « Jeunes ESS ») ou de nouveaux à élaborer. Je veux toutefois souligner le rôle que la MIIESES a continué de jouer en dépit dun contexte politique et administratif défavorable ; elle demeurera une structure dappui incontournable, même si la création du ministère et son rattachement à Bercy modifient quelque peu la donne.
Comme vous avez sans doute pu le constater, le décret dattributions de mon ministère me permet de solliciter de nombreuses ressources administratives. Par nécessité, la coordination interministérielle sera assurée par mon cabinet, avec le soutien de Sabine FOURCADE qui est toujours déléguée interministérielle en titre, et que je remercie pour son soutien ainsi que celui de Jérôme FAURE et de son équipe dans ces premières semaines. Je peux également compter sur lappui entier des services du Ministère de lEconomie et des Finances, et nous bénéficions déjà dune collaboration constructive avec le Ministère du Redressement Productif dans le cadre du traitement de la situation dentreprises en difficulté.
Prochainement, je madresserai aux préfets de régions pour leur demander leur concours dans la mise en oeuvre de nos orientations. Le développement de léconomie sociale et solidaire dépend en effet de notre capacité à aider concrètement des entrepreneurs pour créer leur activité ; le réseau des correspondants départementaux de léconomie sociale et solidaire sera donc fortement sollicité et au besoin revivifié. Je constate malheureusement dès aujourdhui le manque dexpertise publique en faveur du développement de léconomie sociale et solidaire (je pense notamment à la situation de salariés qui souhaitent porter un projet de reprise dentreprise sous forme coopérative, et qui se retournent légitimement vers mon ministère) ; ce manque pèsera sur la réalisation de nos ambitions si nous ny apportons pas une réponse.
Je nai pas pour projet de créer une administration dédiée à léconomie sociale et solidaire, ce qui serait un contre-sens par rapport à ses besoins, mais je souhaite que toutes les compétences, les énergies et les moyens soient fédérés au niveau local pour assurer le développement de léconomie sociale et solidaire. Des propositions existent, notamment la « consularisation » des CRESS, et il nest pas interdit den faire de nouvelles ; je vous ferai part de mes propositions sur ce sujet dici quelques semaines.
La Conférence sociale
Mais revenons à lactualité immédiate. Jai précisément souhaité tenir cette première réunion plénière sous ma présidence juste avant la Conférence sociale organisée par le Premier ministre car jai souhaité que la voix de léconomie sociale et solidaire, avec ses spécificités comme avec ses réalisations, soit entendue de tous.
Le Gouvernement, à la différence du précédent, a en effet décidé de mettre le dialogue social, et plus largement la concertation, au coeur de son action. Dans ce cadre, aux côtés des partenaires sociaux et des organisations professionnelles non représentatives invitées à la conférence, jai décidé de vous associer aux sept grands débats qui font lobjet de tables-rondes thématiques : ainsi sur lemploi, sur la formation professionnelle, sur les salaires, sur la protection sociale et les retraites, sur le redressement productif, sur la fonction publique, le CSESS peut apporter son avis. Vos contributions écrites, nos échanges du jour sur ce thème (cest le point 3 de notre ordre du jour) seront transmis au Premier ministre et aux ministres pilotes des tables rondes.
Ainsi les propositions du secteur de léconomie sociale et solidaire seront partie intégrante des travaux de ce premier temps fort du dialogue social du quinquennat. Dans cet esprit, je recevrai le 5 juillet les organisations syndicales et ce même jour, je terminerai avec lUNIFED le tour de consultation des organisations demployeurs du secteur, que javais entamé en recevant lUSGERES et le GEMA. Comme Alain CORDESSE le sait lui-même, jai dailleurs fait en sorte que lUSGERES soit représentée au meilleur niveau possible dans les tables-rondes ; ce sera finalement le cas pour les tables-rondes consacrées dune part à la formation professionnelle, et dautre part à légalité professionnelle et à la qualité de vie au travail. Cela constitue un premier signe de reconnaissance de la place des employeurs de léconomie sociale et solidaire dans le dialogue social.
Jajoute pour votre bonne information que jai veillé à ce que les grandes têtes de réseaux, mais aussi les acteurs qui lont explicitement souhaité, soient associés à lappel à contributions écrites organisé par le ministre du Travail, de lEmploi et du Dialogue social. Enfin, je piloterai, aux côtés de Pierre MOSCOVICI la table-ronde sur les salaires : le secteur de léconomie sociale et solidaire est plutôt exemplaire en la matière puisquil propose une répartition des salaires plus équitable. Ainsi, une étude de lINSEE réalisée cette année a confirmé que dans toutes les familles de léconomie sociale, les écarts de salaires sont plus resserrés que dans le reste de léconomie privée. Nous sommes donc légitimes à apporter notre pierre au débat.
La question de lexemplarité du secteur est pour moi essentielle. Je sais quelle lest aussi pour vous puisque au coeur de votre action figure la promotion dune économie fondée sur des valeurs. Elle manimera donc de façon continue et transversale dans les prochains mois, à la faveur des débats et des réformes que lancera le Gouvernement, par exemple en matière de rémunération des dirigeants et de gouvernance dentreprise : cela veut dire clairement que léconomie sociale et solidaire ne pourra pas sextraire des décisions qui sont à prendre concernant la modération de lécart salarial au sein des entreprises du secteur, quelle que soit leur activité économique.
Les emplois davenir
Il est un sujet sur lequel jattends tout particulièrement lengagement de vos organismes : celui des emplois davenir et des contrats de génération.
Au-delà de ce temps fort quest la Conférence sociale, jai souhaité que vos avis viennent nourrir les travaux qui ont débuté pour traduire concrètement les engagements pris par le Président de la République pour améliorer lemploi des jeunes. Le chômage a atteint un niveau historique dans notre pays, laccès des jeunes à un emploi stable est un véritable parcours du combattant. Les 150 000 emplois davenir et les 500 000 contrats de génération sont lun des remèdes à cette situation : ils doivent permettre aux jeunes peu ou pas qualifiés qui en bénéficieront dacquérir une première expérience et de bénéficier dune formation qui leur donnera les meilleures chances daccéder à un parcours professionnel durable.
Jai engagé les travaux sur ce sujet avec le Ministre du Travail, qui est le grand ordonnateur densemble de la politique publique de lemploi ; jai dores et déjà obtenu que le secteur non lucratif soit le bénéficiaire principal des emplois davenir, et que les contrats de génération puissent lui bénéficier, là où les besoins de main doeuvre et les activités en fort développement économique et social le justifieront. Je suis dailleurs convaincu que les contrats de génération constitueront une réponse pertinente au défi démographique du secteur.
Jai par ailleurs proposé au Premier ministre que la mise en oeuvre des emplois davenir se fasse dans le cadre dune procédure dappels à projets de recrutements, de façon à sassurer de la qualité des emplois et de leur utilité sociale. Jentends également mobiliser fortement mon ministère dans la mise en oeuvre concrète de ce programme, et jen territorialiserai laction autant que possible.
Les associations, les coopératives, les mutuelles et les fondations ayant ainsi vocation à recruter des jeunes en emplois davenir et en contrats de génération, jai souhaité, le plus en amont possible du processus de travail gouvernemental sur le sujet, recueillir votre avis. Nous échangerons au cours de cette réunion (cest le point 2 de notre ordre du jour) sur vos propositions mais je tenais dores et déjà à vous remercier davoir répondu à cet appel dans un délai très contraint. La richesse de vos contributions confirme lintérêt de cette consultation : le processus va donc se poursuivre sur les sujets « emploi » et plus largement sur dautres thèmes car manifestement la méthode est la bonne.
La Banque Publique d'Investissement
Dans le même esprit, jai souhaité quun certain nombre de vos organismes soient consultés en vue de la constitution de la future Banque Publique dInvestissement. Cest pourquoi jai transmis à Bruno PARENT, qui est en charge de la mission de préfiguration de la BPI, une liste dinterlocuteurs à prendre à considération, et jai signalé à la CDC comme à OSEO ma vision de la place de léconomie sociale et solidaire dans le dispositif, convaincu quelle est à même de construire de construire de nouvelles filières dactivités.
Je vous rappelle que le projet de Banque Publique dInvestissement, conçu par le Président de la République, vise à unifier lensemble des opérateurs publics de financement pour proposer un réseau unique local piloté par la BPI, en lien avec les régions. Il permettra donc damplifier les moyens de financement de léconomie sociale et solidaire, au-delà du programme « Investissement dAvenir » de 100 M géré par la CDC, puisque le Président de la République a annoncé un objectif de 500 M en faveur de léconomie sociale et solidaire.
Au-delà de lengagement financier, il sagit également de restaurer les capacités danalyse stratégique et de pilotage par lEtat du financement public des PME : cela pourra passer par une fusion des trois entités OSEO/CDC-Entreprises/FSI dont la holding sera contrôlée par lEtat. Une gouvernance forte permettra dassurer un pilotage stratégique des trois entités et dexploiter les synergies, dunifier le réseau commercial des trois entités, et une séparation stricte sera maintenue entre les métiers de prêts et de soutien au fonds propres pour éviter les conflits dintérêts, et respecter les réglementations bancaires et financières propres aux deux métiers. Dans ce dispositif, je veillerai à ce quun compartiment dédié à léconomie sociale et solidaire soit mis en place. Dautres pistes de financement sont dores et déjà à létude, notamment en matière de mobilisation de l??épargne réglementée ; jy reviendrai ultérieurement.
Le volet territorial sera tout particulièrement privilégié, au moyen dun guichet de financement dédié à léconomie sociale et solidaire, dans lequel les régions verront leur rôle valorisé. Ainsi que je lai déjà dit à Marie-Guite DUFAY, qui représente lAssociation des Régions de France au sein de ce conseil, les régions pourraient jouer un rôle moteur afin de faciliter laccès des PME (et notamment celles de léconomie sociale et solidaire) à linformation sur les instruments financiers de la BPI ou les démarches administratives, regroupant lensemble des acteurs concernés. Les régions pourraient également se voir reconnaître un rôle dans la gouvernance de la BPI.
Une loi relative à la mise en oeuvre de la BPI est aujourdhui envisagée pour la fin de lannée 2012 de façon à concrétiser rapidement ces orientations, ce qui mamène à évoquer la loi relative à léconomie sociale et solidaire.
La loi sur léconomie sociale et solidaire
Jai bien évidemment pris connaissance des travaux du CSESS sous la houlette de sa commission « Gouvernance et Mutations » animée par Jean-Louis CABRESPINES. Jai également consulté les propositions émanant de parlementaires (Jean-René MARSAC et Geneviève GAILLARD à lAssemblée nationale, Marc DAUNIS et Marie-Noëlle LIENEMANN au Sénat), même si certaines ne sont pas encore tout à fait finalisées, ou ceux émanant des Etats Généraux de lEconomie sociale et solidaire de juin 2011. Il y a là un matériau important à partir duquel il sera possible de construire un texte qui fera date. Il y a encore beaucoup de travail mais jentends tenir le calendrier suivant :
- présentation dun document dorientation au Bureau du CSESS en septembre ; à charge pour lui de nourrir cette trame avec laide de ses groupes de travail ;
- saisine du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) sur la base de ces mêmes orientations, avec une demande de rapport à remettre début décembre ;
- présentation dun avant projet de loi fin 2012 devant le CSESS, puis arbitrages interministériels et consultations parlementaires ;
- examen de la loi par le Parlement au deuxième trimestre 2013.
Quant au contenu, il définira lappellation de ce texte législatif : loi-cadre, loi de programmation, loi dorientation toutes ces dénominations correspondent à des catégories juridiques précises parmi lesquelles je ferai mon choix en fonction des propositions que je soumettrai au Parlement. Les sujets à traiter ne manquent pas mais cette loi ne pourra pas se contenter daffirmer des principes ou dafficher des valeurs, même si son exposé des motifs exprimera la vision de la société qui sous-tend léconomie sociale et solidaire. Elle devra également faire lobjet dun important travail interministériel et dune étude dimpact, ce qui constitue une obligation qui na rien danodin pour les services de lEtat.
Ce sera une loi ouverte, respectant la diversité intrinsèque du secteur, mais ce sera aussi une loi daffirmation, marquant bien ce que sont ses frontières et qui définira aussi précisément que possible ce quest une entreprise qui concourt à léconomie sociale et solidaire, permettant aux autres législations de sy référer et dinscrire dans la durée les politiques publiques en faveur de ces entreprises.
Certaines dispositions que vous appelez de vos voeux prendront peut-être dici là leur place dans dautres textes législatifs préparés par le Gouvernement (je pense notamment aux dispositions fiscales ou à celles relatives à la BPI). Mais la loi que jentends défendre devra de manière générale contenir en son sein toutes les dispositions juridiques nécessaires à la constitution dune politique publique ambitieuse et durable en faveur de léconomie sociale et solidaire ; je vais les évoquer en retenant cinq orientations.
Jentends tout dabord que la loi définisse clairement le secteur et les activités qui pourront bénéficier de cette politique publique ; je connais les débats qui traversent léconomie sociale et solidaire et je nentends pas les trancher dautorité ; jaffirme en revanche quil ny a pas de présomption irréfragable en matière dESS qui serait liée au seul statut (ce que dailleurs le droit européen ne permettrait pas). Cest donc sur la base des pratiques et surtout de leur pérennité que lappartenance dun organisme à léconomie sociale et solidaire sera validée. Je souhaite que votre groupe de travail sur la labellisation reprenne ses réflexions, et je lui demande tout particulièrement que la notion dimpact social soit retenue parmi les critères incontournables, et que les entreprises bénéficiant dun label fassent lobjet dune évaluation régulière.
La loi contiendra de plus toutes les mesures qui permettront aux organismes que vous représentez de se battre à armes égales sur des marchés concurrentiels, sans être disqualifiés par le modèle économique non-lucratif que vous avez choisi : cela concerne tout particulièrement laccès au crédit et aux marchés publics, la valorisation de lautofinancement, la fiscalité
Jentends également permettre aux organismes qui assurent des missions dintérêt général indispensables au maintien du lien social de continuer à le faire sans être disqualifiées du fait de leur statut ou de leur histoire ; bien souvent, ces missions sont loeuvre de précurseurs alors que ni la puissance publique ni le marché ne savaient ou ne voulaient répondre à certains besoins sociaux ; je veux conforter les organismes qui continuent dassurer leur mission sociale, en les dotant notamment dinstruments financiers spécifiques (par exemple en revisitant le principe des titres participatifs ou des titres associatifs) ou en veillant à ladaptation des règles qui les concernent.
Par nature, léconomie sociale et solidaire est également une économie ancrée dans les territoires, et les activités économiques quelle porte ne sont, le plus souvent, pas délocalisables. Je souhaite donc que la loi pose un cadre dincitation à une nouvelle contractualisation entre la puissance publique (Etat et collectivités locales) et des acteurs de léconomie sociale et solidaire. A limage des « pôles territoriaux » dont les premières expérimentations sont, comme jai déjà pu le dire, encourageantes, la loi constituera un cadre dexpérimentation pour la conclusion de nouveaux contrats territoriaux de développement de léconomie sociale et solidaire afin de créer, répliquer, mutualiser, fédérer des initiatives en matière de développement économique.
Enfin, je souhaite que la loi donne les moyens aux créateurs dactivités de le faire sans nécessairement passer par des statuts classiques dentreprises qui supposent dadopter un modèle économique capitalistique. Ces statuts ne permettent pas de répondre à tous les besoins, et ne résument pas la vision de léconomie portée par la nouvelle majorité présidentielle et parlementaire. Je pense bien sûr à tous ceux qui souhaitent reprendre leur outil de travail lorsquil est menacé par une mise en liquidation, mais aussi à tous ceux qui, notamment dans les quartiers populaires où la culture dentreprise est tout aussi forte que la solidarité, veulent créer une nouvelle activité. Jai la conviction que léconomie sociale et solidaire présente des opportunités et des outils efficaces pour la population de ces quartiers, et la loi portera des mesures de simplification en matière de création ou de reprise dactivité, sous une nouvelle forme de statut coopératif notamment. Jentreprendrai dans les prochains jours un cycle de déplacements dans ces quartiers de façon à expliquer ma démarche.
LEurope
Un dernier mot sur lEurope pour conclure. Je sais combien le droit européen, et la hiérarchie des normes qui va avec, a profondément heurté votre secteur, notamment en ce qui concerne vos activités concurrentielles. Votre statut ne vous permet plus de revendiquer un traitement spécifique, ce qui conduit parfois à des situations absurdes, puisque les acteurs lucratifs nont pas toujours fait la preuve de leur capacité à apporter des services de meilleure qualité ou garantissant notamment une solidarité aussi forte que vous ne le faisiez (je pense notamment au secteur de la mutualité).
Jy vois un défaut de régulation majeur au niveau communautaire, mais jy vois aussi une forme de renoncement de la part des pouvoirs publics français. Jai la conviction que toutes les possibilités nont pas été épuisées de façon à permettre à certains de vos organismes de ne plus subir une vision unilatérale et libérale. Tant en matière de reconnaissance des services sociaux dintérêt général (SSIG) que de statut de la mutualité européenne ou de règles financières ou fiscales, je sais pouvoir compter sur le soutien du Parlement Européen (et notamment son intergroupe), et jaurai bientôt un entretien avec le Commissaire Michel BARNIER pour évoquer ces sujets.
Comme vous pouvez le constater, lambition que je porte à la tête de ce ministère est importante et inédite pour léconomie sociale et solidaire. La nouvelle majorité présidentielle et parlementaire considère assurément léconomie sociale et solidaire comme une affaire sérieuse. Je mettrai toute mon énergie et mon poids politique dans sa réalisation et jaurai besoin de votre concours. Je compte sur vous de façon à ce que lexistence du ministère de léconomie sociale et solidaire ne soit plus à lavenir contestable ni contestée.
Je vous remercie.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 12 juillet 2012