Texte intégral
A. Ardisson Ce soir nous attendons l'intervention de monsieur L. Jospin. Vous-même, qu'attendez-vous de lui ?
- "Ce que j'attends, comme tous les Français je crois, ce sont des clarifications sur ce que veut vraiment le Gouvernement. Entre les contradictions des uns et des autres, sur le Mont-Blanc, sur la Corse et l'amnistie, sur la façon de gérer les problèmes créés par les 35 heures, on se demande ce qu'est vraiment la politique du Gouvernement. Et puis je souhaiterais, aussi, comme les Français, avoir des clarifications sur sa politique économique et sociale, celle qu'il va mettre en oeuvre dans les six prochains mois, sa politique sur la sécurité. L'insécurité n'a jamais été aussi grande que celle que révèlent les dernières statistiques qui viennent de sortir, exceptionnellement au mois de juillet - généralement c'est en janvier que ça se passe. C'est la première fois qu'on a scindé en deux les résultats sur l'insécurité, probablement pour éviter de montrer l'ampleur de la dégradation au mois de janvier, quelques mois avant les élections présidentielles. Et puis ses intentions également sur la Corse, avec des déclarations sur l'amnistie de la part d'un Parti auquel appartient un membre du Gouvernement. Je crois que les Français sont inquiets et qu'ils ne comprennent pas. Ils attendent donc du Premier ministre qu'il leur dise ce qu'il veut vraiment."
Nous allons jouer à un petit jeu : imaginons, pure hypothèse, que "vous remplacez PPDA", victime d'une extinction de voix. Pure hypothèse. Quelle question lui poseriez-vous en priorité, parmi tous les thèmes que vous avez signalés ce matin ?
- "Rude tâche que vous m'assignez là, pour la rentrée. Je l'interrogerais probablement sur les trois questions que je viens d'évoquer, on ne sait pas où l'on va."
Mais dans quel ordre ?
- "Les Français sont d'abord intéressés par les problèmes de l'emploi. Je lui dirais: "monsieur Jospin, vous nous aviez promis que votre politique économique et sociale allait créer des emplois. Aujourd'hui que constate-t-on ? D'abord, on ne fait pas mieux que nos voisins, quoi que vous disiez, même parfois moins bien. Deuxièmement, on constate que toute baisse économique américaine entraîne des trains de centaines voire de milliers de licenciements. Donc, votre politique économique n'est pas indépendante comme vous nous l'aviez dit, pas mieux que ce qui se fait ailleurs. Troisièmement, les 35 heures, dont vous avez fait avec madame Aubry l'un de vos chevaux de bataille pour améliorer l'emploi, se révèlent aujourd'hui très difficiles à appliquer par les chefs d'entreprise, voire impossibles par des petites entreprises. J'étais encore dans le Périgord il y a quelques jours, où je voyais un pâtissier qui arrête son activité parce que, avec les 35 heures il n'arrive plus à survivre et à faire vivre son entreprise. Alors, je vous pose la question, monsieur Jospin : les Français sont inquiets, ils ont perdu confiance devant votre politique, est-ce que vous allez reconnaître votre erreur d'avoir voulu faire une politique des 35 heures obligatoire pour tout le monde qui est très rigide ? Est-ce que vous allez, enfin, revenir sur cette rigidité et écouter ce que vous disent les Français ? Deuxième question, la sécurité. Tous les Français sont inquiets sur la sécurité, y compris maintenant, c'est la première fois qu'on le voit, les plus jeunes, les moins de 25 ans sont inquiets de la montée de l'insécurité au même titre que les plus de 65 ans. Alors, quelles mesures concrètes allez-vous prendre ? Je dis bien mesures concrètes, parce que les discours aujourd'hui ça ne suffit plus aux Français ! J'ai entendu par exemple, que 15 000 appelés du contingents, donc les jeunes qui faisaient leur service militaire, affectés à la sécurité allaient, du fait de la disparition du service militaire, disparaître de ces moyens mis à la disposition des forces de l'ordre. Comment allez-vous faire pour les remplacer au moment où les 35 heures doivent être appliquées dans la fonction publique et où, là aussi, cela va créer des déficits ? Comment allez-vous faire, par exemple, lorsque le préfet de Corse demande des renforts - et on se rend compte que c'est bien nécessaire ! - et que le ministre de l'Intérieur lui répond que Matignon le refuse ?! Comment allez-vous faire, monsieur le Premier ministre, pour intégrer les 35 heures dans les préoccupations de sécurité. Voilà une deuxième question que j'aimerais poser au Premier ministre, si j'étais monsieur Poivre d'Arvor."
A mon tour de vous poser une question au plan économique: que pensez-vous de l'article de L. Fabius dans Le Monde, où il assure que les baisses d'impôts doivent continuer envers et contre tout, envers et contre la difficulté de la conjoncture ?
- "Là aussi, c'est probablement une question à poser au Premier ministre car cela fait partie des contradictions que nous voyons au sein du Gouvernement. Nous disons, en particulier au RPR, depuis longtemps, qu'à force d'avoir accumulé les impôts pesants sur les Français - il ne faut pas oublier qu'il y a 14 impôts ou taxes nouvelles qui ont été créés depuis trois ans ! -, on finit par désespérer ceux qui sont actifs, ceux qui voudraient progresser. Et il nous paraît indispensable, pour des raisons de simple bon sens et de dynamisme de notre économie, de baisser les impôts. Je souhaite que monsieur Fabius l'emporte sur d'autres membres du Gouvernement dans les arbitrages du Premier ministre."
Revenons-en à vos questions à monsieur Jospin, je suppose que vous en avez une sur la Corse ?
- "Ou, tout à fait, elle va être très simple. J'ai envie de demander à monsieur Jospin s'il va garder au Gouvernement des ministres, membres d'un Parti qui réclament l'amnistie pour les terroristes en Corse, y compris pour ceux qui ont participé à l'assassinat du préfet Erignac ? !"
Cela veut dire en clair que vous réclamez la démission de monsieur Cochet ?
- "Je demande au Premier ministre d'assumer ses responsabilités et de clarifier un peu ..."
...monsieur Cochet lui-même n'a pas demandé l'amnistie, c'est un de ses amis qui l'a demandée. C'est pour cela que je vous pose la question.
- "Monsieur Cochet appartient à un Parti qui demande l'amnistie, dans lequel plusieurs personnes, y compris son porte-parole, le porte-parole des Verts, a demandé aussi l'amnistie. Je crois qu'il y a là, c'est le moins qu'on puisse dire, une certaine contradiction."
Pour ce qui concerne la Corse toujours, certains de vos partisans du RPR, et je pense à J.-L. Debré qui était à ce micro il y a peu de temps, réclament soit un référendum soit la dissolution de l'Assemblée Corse. Il se trouve que l'Assemblée corse, en majorité, est dans le camp de la droite. Qu'en pensez-vous ?
- "Je crois qu'il y a un problème fondamental dans la préparation et dans la mise en oeuvre des accords de Matignon. On n'a pas respecté finalement les principes de la légitimité républicaine. On a mis un peu de côté, on a marginalisé le rôle des élus nationaux qui ont pour compétence de parler de tous ces sujets. Et en revanche, on a discuté, le Premier ministre a discuté avec les élus d'une Assemblée qui n'a pas été élue pour ça. L'Assemblée territoriale corse a été élue pour gérer un certain nombre de problèmes, de problèmes administratifs, techniques, etc, mais elle n'a pas été élue pour traiter du devenir de la Corse. Si on veut que les gens qui discutent de ce sujet soient légitimes, soient représentatif des Corses, il faut qu'ils soient élus sur cette question : sont-ils pour le devenir d'une Corse indépendante ou le devenir d'une Corse ..."
Il faut faire une élection ?
- "Donc, de ce point de vue, il serait logique de dissoudre l'Assemblée territoriale corse parce qu'un référendum c'est quelque chose de beaucoup plus lourd. Et de toute façon, je rappelle que le référendum, d'après notre Constitution, ne peut être organisé que sur l'ensemble du territoire national et pas simplement en Corse."
Venons-en à la rentrée du RPR. Vous avez, vous aussi, cette semaine, votre université d'été. Quelqu'un manquera-t-il à l'appel ?
- "Non, je crois que ce sera probablement la première fois depuis fort longtemps que tous ceux qui ont exercé et qui exercent des responsabilités politiques au sein du RPR viendront écouter un peu ce que les jeunes ont à dire, parce qu'il est important dans un parti politique que l'on sache entendre les jeunes ou les faire participer aussi aux décisions. C'est un peu la spécificité de nos universités par rapport à celles des autres partis."
C'est un peu une mise en place avant la campagne. C'est difficile pour un parti qui va soutenir un candidat qu'il connaît déjà de le soutenir avant qu'il ne soit déclaré ? Comment abordez-vous cette campagne ?
- "Nous souhaitons que J. Chirac soit notre candidat, parce qu'il nous paraît le meilleur candidat à la fois, pour représenter nos idées mais également pour défendre la France."
Et qu'il le dise vite ?
- "Il le dira quand il jugera bon de le dire. Il exerce aujourd'hui une fonction et il évident qu'il doit exercer cette fonction jusqu'au bout pour l'intérêt de notre pays."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 28 août 2001)
- "Ce que j'attends, comme tous les Français je crois, ce sont des clarifications sur ce que veut vraiment le Gouvernement. Entre les contradictions des uns et des autres, sur le Mont-Blanc, sur la Corse et l'amnistie, sur la façon de gérer les problèmes créés par les 35 heures, on se demande ce qu'est vraiment la politique du Gouvernement. Et puis je souhaiterais, aussi, comme les Français, avoir des clarifications sur sa politique économique et sociale, celle qu'il va mettre en oeuvre dans les six prochains mois, sa politique sur la sécurité. L'insécurité n'a jamais été aussi grande que celle que révèlent les dernières statistiques qui viennent de sortir, exceptionnellement au mois de juillet - généralement c'est en janvier que ça se passe. C'est la première fois qu'on a scindé en deux les résultats sur l'insécurité, probablement pour éviter de montrer l'ampleur de la dégradation au mois de janvier, quelques mois avant les élections présidentielles. Et puis ses intentions également sur la Corse, avec des déclarations sur l'amnistie de la part d'un Parti auquel appartient un membre du Gouvernement. Je crois que les Français sont inquiets et qu'ils ne comprennent pas. Ils attendent donc du Premier ministre qu'il leur dise ce qu'il veut vraiment."
Nous allons jouer à un petit jeu : imaginons, pure hypothèse, que "vous remplacez PPDA", victime d'une extinction de voix. Pure hypothèse. Quelle question lui poseriez-vous en priorité, parmi tous les thèmes que vous avez signalés ce matin ?
- "Rude tâche que vous m'assignez là, pour la rentrée. Je l'interrogerais probablement sur les trois questions que je viens d'évoquer, on ne sait pas où l'on va."
Mais dans quel ordre ?
- "Les Français sont d'abord intéressés par les problèmes de l'emploi. Je lui dirais: "monsieur Jospin, vous nous aviez promis que votre politique économique et sociale allait créer des emplois. Aujourd'hui que constate-t-on ? D'abord, on ne fait pas mieux que nos voisins, quoi que vous disiez, même parfois moins bien. Deuxièmement, on constate que toute baisse économique américaine entraîne des trains de centaines voire de milliers de licenciements. Donc, votre politique économique n'est pas indépendante comme vous nous l'aviez dit, pas mieux que ce qui se fait ailleurs. Troisièmement, les 35 heures, dont vous avez fait avec madame Aubry l'un de vos chevaux de bataille pour améliorer l'emploi, se révèlent aujourd'hui très difficiles à appliquer par les chefs d'entreprise, voire impossibles par des petites entreprises. J'étais encore dans le Périgord il y a quelques jours, où je voyais un pâtissier qui arrête son activité parce que, avec les 35 heures il n'arrive plus à survivre et à faire vivre son entreprise. Alors, je vous pose la question, monsieur Jospin : les Français sont inquiets, ils ont perdu confiance devant votre politique, est-ce que vous allez reconnaître votre erreur d'avoir voulu faire une politique des 35 heures obligatoire pour tout le monde qui est très rigide ? Est-ce que vous allez, enfin, revenir sur cette rigidité et écouter ce que vous disent les Français ? Deuxième question, la sécurité. Tous les Français sont inquiets sur la sécurité, y compris maintenant, c'est la première fois qu'on le voit, les plus jeunes, les moins de 25 ans sont inquiets de la montée de l'insécurité au même titre que les plus de 65 ans. Alors, quelles mesures concrètes allez-vous prendre ? Je dis bien mesures concrètes, parce que les discours aujourd'hui ça ne suffit plus aux Français ! J'ai entendu par exemple, que 15 000 appelés du contingents, donc les jeunes qui faisaient leur service militaire, affectés à la sécurité allaient, du fait de la disparition du service militaire, disparaître de ces moyens mis à la disposition des forces de l'ordre. Comment allez-vous faire pour les remplacer au moment où les 35 heures doivent être appliquées dans la fonction publique et où, là aussi, cela va créer des déficits ? Comment allez-vous faire, par exemple, lorsque le préfet de Corse demande des renforts - et on se rend compte que c'est bien nécessaire ! - et que le ministre de l'Intérieur lui répond que Matignon le refuse ?! Comment allez-vous faire, monsieur le Premier ministre, pour intégrer les 35 heures dans les préoccupations de sécurité. Voilà une deuxième question que j'aimerais poser au Premier ministre, si j'étais monsieur Poivre d'Arvor."
A mon tour de vous poser une question au plan économique: que pensez-vous de l'article de L. Fabius dans Le Monde, où il assure que les baisses d'impôts doivent continuer envers et contre tout, envers et contre la difficulté de la conjoncture ?
- "Là aussi, c'est probablement une question à poser au Premier ministre car cela fait partie des contradictions que nous voyons au sein du Gouvernement. Nous disons, en particulier au RPR, depuis longtemps, qu'à force d'avoir accumulé les impôts pesants sur les Français - il ne faut pas oublier qu'il y a 14 impôts ou taxes nouvelles qui ont été créés depuis trois ans ! -, on finit par désespérer ceux qui sont actifs, ceux qui voudraient progresser. Et il nous paraît indispensable, pour des raisons de simple bon sens et de dynamisme de notre économie, de baisser les impôts. Je souhaite que monsieur Fabius l'emporte sur d'autres membres du Gouvernement dans les arbitrages du Premier ministre."
Revenons-en à vos questions à monsieur Jospin, je suppose que vous en avez une sur la Corse ?
- "Ou, tout à fait, elle va être très simple. J'ai envie de demander à monsieur Jospin s'il va garder au Gouvernement des ministres, membres d'un Parti qui réclament l'amnistie pour les terroristes en Corse, y compris pour ceux qui ont participé à l'assassinat du préfet Erignac ? !"
Cela veut dire en clair que vous réclamez la démission de monsieur Cochet ?
- "Je demande au Premier ministre d'assumer ses responsabilités et de clarifier un peu ..."
...monsieur Cochet lui-même n'a pas demandé l'amnistie, c'est un de ses amis qui l'a demandée. C'est pour cela que je vous pose la question.
- "Monsieur Cochet appartient à un Parti qui demande l'amnistie, dans lequel plusieurs personnes, y compris son porte-parole, le porte-parole des Verts, a demandé aussi l'amnistie. Je crois qu'il y a là, c'est le moins qu'on puisse dire, une certaine contradiction."
Pour ce qui concerne la Corse toujours, certains de vos partisans du RPR, et je pense à J.-L. Debré qui était à ce micro il y a peu de temps, réclament soit un référendum soit la dissolution de l'Assemblée Corse. Il se trouve que l'Assemblée corse, en majorité, est dans le camp de la droite. Qu'en pensez-vous ?
- "Je crois qu'il y a un problème fondamental dans la préparation et dans la mise en oeuvre des accords de Matignon. On n'a pas respecté finalement les principes de la légitimité républicaine. On a mis un peu de côté, on a marginalisé le rôle des élus nationaux qui ont pour compétence de parler de tous ces sujets. Et en revanche, on a discuté, le Premier ministre a discuté avec les élus d'une Assemblée qui n'a pas été élue pour ça. L'Assemblée territoriale corse a été élue pour gérer un certain nombre de problèmes, de problèmes administratifs, techniques, etc, mais elle n'a pas été élue pour traiter du devenir de la Corse. Si on veut que les gens qui discutent de ce sujet soient légitimes, soient représentatif des Corses, il faut qu'ils soient élus sur cette question : sont-ils pour le devenir d'une Corse indépendante ou le devenir d'une Corse ..."
Il faut faire une élection ?
- "Donc, de ce point de vue, il serait logique de dissoudre l'Assemblée territoriale corse parce qu'un référendum c'est quelque chose de beaucoup plus lourd. Et de toute façon, je rappelle que le référendum, d'après notre Constitution, ne peut être organisé que sur l'ensemble du territoire national et pas simplement en Corse."
Venons-en à la rentrée du RPR. Vous avez, vous aussi, cette semaine, votre université d'été. Quelqu'un manquera-t-il à l'appel ?
- "Non, je crois que ce sera probablement la première fois depuis fort longtemps que tous ceux qui ont exercé et qui exercent des responsabilités politiques au sein du RPR viendront écouter un peu ce que les jeunes ont à dire, parce qu'il est important dans un parti politique que l'on sache entendre les jeunes ou les faire participer aussi aux décisions. C'est un peu la spécificité de nos universités par rapport à celles des autres partis."
C'est un peu une mise en place avant la campagne. C'est difficile pour un parti qui va soutenir un candidat qu'il connaît déjà de le soutenir avant qu'il ne soit déclaré ? Comment abordez-vous cette campagne ?
- "Nous souhaitons que J. Chirac soit notre candidat, parce qu'il nous paraît le meilleur candidat à la fois, pour représenter nos idées mais également pour défendre la France."
Et qu'il le dise vite ?
- "Il le dira quand il jugera bon de le dire. Il exerce aujourd'hui une fonction et il évident qu'il doit exercer cette fonction jusqu'au bout pour l'intérêt de notre pays."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 28 août 2001)