Déclaration de M. Vincent Lurel, ministre des outre-mer, sur l'intégration des Outre-mer dans leur environnement régional et le rôle conjoint des ministères des Affaires étrangères et des Outre-mer dans le développement de la coopération régionale, à Paris le 29 août 2012.

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Circonstance : XXe Conférence des ambassadeurs : réception des ambassadeurs de France dans les pays des environnements régionaux des Outre-mer, à Paris le 29 août 2012

Texte intégral

Monsieur le Ministre des Affaires étrangères, Cher Laurent Fabius,
Monsieur le Ministre chargé du Développement, Cher Pascal Canfin,
Monsieur l'Ambassadeur, je devrais dire Monsieur le Premier Ministre, Cher Michel Rocard,
Madame la Présidente du Conseil régional de la Guadeloupe, Chère Josette Borel-Lincertin,
Monsieur le Président du Conseil régional de la Guyane, Cher Rodolphe Alexandre,
Monsieur le Président du Conseil régional de la Martinique, Cher Serge Letchimy,
Monsieur le Président du Conseil territorial de Saint Pierre et Miquelon, Cher Stéphane Artano,
Monsieur le Président de l'Assemblée territoriale de Wallis et Futuna, Cher Vetelino Nau,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Messieurs les Préfets,
Mesdames et Messieurs les directeurs,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi de vous exprimer la satisfaction qui est la mienne au moment de vous accueillir, à l'issue de la Conférence des ambassadeurs 2012, ici en l'Hôtel de Montmorin, qui abrite le ministère des Outre-mer.
C'est donc un très grand plaisir pour moi de vous souhaiter la bienvenue.
Je remercie tout particulièrement mon collègue Laurent Fabius qui, accompagné de Pascal Canfin, a bien voulu accepter de co-présider cette rencontre avec moi.
Par sa présence, il montre le grand intérêt du ministère des Affaires étrangères pour les départements et collectivités d'Outre-mer dont le rôle est essentiel dans la politique d'influence de la France à l'étranger.
Grâce aux Outre-mer, c'est en effet la France qui rayonne sur tous les continents et toutes les mers du monde. Ces Outre-mer qui apportent à notre pays tant d'atouts et tant de richesses qui sont autant d'avantages comparatifs dans un très grand nombre de domaines : 11millions de km² de zone économique exclusive (la deuxième plus grande zone économique exclusive du monde après les États-Unis), 80% de la biodiversité nationale, la plupart des espèces endémiques, la plus grande frontière terrestre de l'Union européenne avec le Brésil, la plus grande frontière maritime européenne avec l'Australie, un immense potentiel économique et stratégique avec le nickel de la Nouvelle Calédonie, les nodules polymétalliques de la Polynésie et de Wallis, la base spatiale, le bois, l'or et bientôt le pétrole de la Guyane, les nouvelles énergies de la Réunion, l'écotourisme de la Martinique, la géothermie de la Guadeloupe, et j'en oublie...
C'est pourquoi nous devons nous fixer des objectifs ambitieux pour être à la hauteur des enjeux.
Tout d'abord, il est impératif que les Outre-mer soient pleinement insérés dans leur environnement géographique.
Les ministères des Affaires étrangères et des Outre-mer travaillent de concert à faire en sorte que les départements français d'Amérique intègrent pleinement les organisations régionales que sont l'AEC, l'OECO, la CARICOM, le CARIFORUM, la CEPALC, que les collectivités du Pacifique approfondissent leur participation au FIP (Forum des îles du Pacifique), que la Nouvelle Calédonie puisse consolider le siège de la CPS à Nouméa, que la Réunion et Mayotte prennent toute leur place au sein de la COI (la communauté de l'Océan indien).
Bien avant d'être nommé ministre des Outre-mer, j'ai toujours milité pour que ces territoires disposent de représentations spécifiques dans les ambassades françaises des pays avoisinants.
C'est désormais le cas de la Nouvelle Calédonie en Nouvelle Zélande. Une convention-cadre existe et il appartient à chacun de la mettre en oeuvre et de renforcer ainsi les liens entre nos collectivités et nos postes diplomatiques.
Il ne s'agit pas, bien sûr, de vouloir multiplier les présences sans aucun schéma directeur, mais bien de penser à valoriser nos domaines d'excellence chez nos voisins, dans une concertation étroite.
Ces nouveaux acteurs viendront compléter le dispositif existant qui, autour des Préfets, des ambassadeurs en résidence et des trois ambassadeurs délégués à la coopération régionale, oeuvre à donner du sens à la coopération régionale.
La période qui s'ouvre doit constituer un nouveau départ pour les Outre-mer en tant que socle de cette coopération régionale que Laurent Fabius, Pascal Canfin et moi-même, nous souhaitons voir se développer sur les trois océans.
Pour ce faire, il est impératif que nous puissions disposer d'outils précis d'évaluation de nos performances dans des domaines aussi divers que la coopération éducative et universitaire, la coopération sanitaire, la coopération juridique, douanière, policière.
Je suis avec une attention particulière le cas du traité sur l'orpaillage, qui n'est toujours pas ratifié par la partie brésilienne. Tout comme je plaide pour une relance du groupe de travail de haut niveau avec les Comores.
Au niveau économique, c'est une véritable symbiose qui doit s'imposer entre les ambassadeurs en résidence dans les pays proches et les Préfets.
Aux premiers un rôle que l'on peut qualifier d'ouvreurs de marchés pour nos entrepreneurs ultramarins, de facilitateurs, d'intégrateurs, de défenseurs de la francophonie...
Aux seconds, celui d'incitateurs, d'aiguillons pour aider nos entrepreneurs à investir leur environnement proche.
Pour les y aider, j'ai décidé, suivant en cela les engagements du président de la République lors de la campagne électorale, de repenser le concept de développement endogène. Les trois commissaires en poste aux Antilles, en Guyane et à la Réunion verront leur mission repensée et ils seront, sous l'autorité des Préfets, les relais dans nos Outre-mer du redressement productif.
Nous devons tous être convaincus que le développement économique est une priorité et que ces territoires ont de multiples atouts qui leur permettent d'être innovants en s'insérant dans leur environnement géographique.
Le tourisme est une activité de tout premier plan et présente de belles promesses lorsque l'offre devient collective comme en témoigne le concept «d'Iles Vanille» qui permet aux touristes de profiter de l'ensemble Maurice-Réunion, auquel vont bientôt s'agréger les Seychelles.
Nous travaillons avec le ministère de l'Intérieur à simplifier la procédure des visas afin de fluidifier la venue de ressortissants sud-africains à la Réunion.
Preuve supplémentaire de l'importance de la donne touristique dans les économies des Outre-mer, la tenue probable en mai 2013 de la 95e session du conseil exécutif de l'Organisation mondiale du tourisme à Saint-Denis de la Réunion.
Oui, je le dis ici avec force : les Outre-mer doivent prendre toute leur place dans leur environnement régional au plus grand profit de la France dans son ensemble.
En 2013, l'année de la République dominicaine en Guadeloupe raffermira les liens déjà forts entre Dominicains et Guadeloupéens. De même que l'année de l'Afrique du Sud en France, toujours en 2013, mettra La Réunion au premier plan des échanges culturels, touristiques et - souhaitons-le - économiques, avec la première puissance émergente du continent africain.
Avec la présence d'organismes de recherche de haut niveau, les Outre-mer ont un avantage comparatif indéniable en matière de lutte contre les maladies à vecteur (Dengue, Chikungunya, Paludisme, maladie de Chagas), d'éco-agriculture, de prévention des risques naturels qu'ils peuvent partager avec leurs voisins. L'IRD, le CIRAD, l'INRA, l'Institut Pasteur, le CNRS, sont des centre de recherche internationalement connus qui contribuent à renforcer l'attractivité de nos Outre-mer.
En matière de recherche spatiale, le CNES permet à la Guyane d'être au tout premier plan mondial avec des coopérations internationales de haut niveau à l'instar de celle existante avec Soyouz à Kourou.
Et que dire de la biodiversité et du maritime où notre savoir-faire peut assurément contribuer au développement de fructueuses coopérations.
Dans le Pacifique, une grande partie de la soixantaine de projets cofinancés annuellement par le fonds pacifique entre plusieurs États de la région et la Nouvelle Calédonie, la Polynésie française et Wallis et Futuna a trait à la conservation de la biodiversité marine. C'est le cas du projet CRISP de protection des coraux.
Dans les Caraïbes, je peux citer les projets Opaal, concernant les aires marines protégées, Caraïbes-Hycos sur la coopération internationale en matière de gestion des ressources en eau, Agoa- sanctuaire des mammifères marins, Cabare qui est le réseau caribéen pour la prévention et le contrôle durable des maladies émergentes du bananier, Magdalesa de gestion durable de la pêche dans les Caraïbes.
Tous ces projets bénéficient de financements INTERREG IV ou AFD.
En Guyane, les projets REDD (Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts, CARET2 destiné à la conservation de l'habitat des tortues marines sont financés principalement sur des fonds FEDER.
Dans tous ces domaines, la coopération entre les RUP, les PTOM et les ACP doit être renforcée en facilitant l'articulation du FED et du FEDER au profit de priorités partagées.
Je ne peux évidemment pas être exhaustif puisque le temps m'est compté, mais la coopération scolaire et universitaire - avec comme objectif le développement des universités de la Réunion, du Pacifique, des Antilles et de la Guyane - constitue, là aussi, un atout de nos Outre-mer qu'il convient de faire fructifier en valorisant des filières prometteuses dans les pays avoisinants comme l'apprentissage des langues ou la vulcanologie.
Je suis convaincu du potentiel énorme de nos Outre-mer qui doivent être considérés comme des relais indispensables à la grandeur de la France.
Les partenaires étrangers de la France en sont conscients et le montrent par des gestes diplomatiques forts : une récente tournée du ministre des affaires étrangères néo-zélandais à la tête d'une importante délégation d'entrepreneurs à Nouméa, des demandes d'audiences d'ambassadeurs étrangers au ministre des Outre-mer, des invitations à visiter leurs pays...
Reconnus comme des sources de stabilité politique dans leur environnement géographique, les Outre-mer doivent occuper pleinement leur place sur les trois océans.
Ce pari est en passe d'être gagné grâce à votre totale implication et à celle de vos équipes.
Enfin, n'oublions pas l'essentiel : ces femmes et ces hommes venus de tous les continents et qui, au cours des siècles, ont peuplé par strates successives ces terres des trois océans et les ont enrichies de leurs cultures.
Ce sont eux qui font de la France, un pays-monde, oui «un pays poreux au souffle du monde», un archipel si proche de l'Afrique, de l'Inde, du Levant et qui sont autant d'atouts pour construire des ponts entre notre pays et le reste du monde.
Je terminerai en rappelant les futures échéances qui nous permettront à la fois de faire le point sur le travail accompli et de surtout fixer les objectifs pour les douze mois à venir.
Tout d'abord, la conférence de coopération régionale de la zone Antilles et Guyane qui est programmée à Cayenne les 29 et 30 octobre 2012. Puis celle de l'océan indien qui pourrait se tenir mi-novembre 2012 à Saint - Denis de la Réunion.
Pour le Pacifique, une conférence de coopération régionale du Pacifique pourrait être prévue pour le printemps 2013.
Je passe maintenant la parole au ministre des Affaires étrangères.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 septembre 2012