Texte intégral
Je remercie Marie-Caroline BONNET-GALZY pour sa présentation du rapport annuel 2001 de l'Inspection générale des affaires sociales, consacré aux relations entre les institutions sociales et leurs usagers. Nul doute qu'elle aura suscité des questions de votre part.
Avant de vous donner la parole, je souhaite vous dire ce que j'ai retiré de la lecture de ce rapport public.
C'est une contribution riche et utile à la réflexion et à l'action de ceux qui, à tous les niveaux, agissent pour que les services publics sociaux soient toujours mieux à même de satisfaire leurs usagers.
Tant par le constat qu'il dresse des points forts et des points faibles de la situation actuelle que par les propositions qu'il formule.
Je tiens à féliciter l'IGAS pour ce travail inédit et de grande qualité.
Je veux laisser aux responsables de mon administration, qui sont autour de moi et qui ont pris récemment connaissance du rapport, le temps de préparer les avis et les propositions qu'il peut susciter de leur part, ainsi que des dirigeants des grandes institutions sociales concernées.
Ils s'attacheront en priorité, comme il se doit, à l'examen des dysfonctionnements constatés .
Deux d'entre eux ont particulièrement retenu mon attention.
Le rapport est très critique dans son appréciation sur l'organisation et le fonctionnement des juridictions sociales, donc des conséquences sur les usagers.
Ces constats conduisent les rapporteurs à proposer une réforme d'envergure et, en attendant, un renforcement des moyens des tribunaux, une meilleure formation des juges et le remplacement des présidents des tribunaux du contentieux de l'incapacité par des magistrats.
Dans l'immédiat nous avons déjà pris attache avec la ministre de la Justice pour étudier comment donner suite à ces propositions.
De son côté , le ministère de la Justice a lui-même engagé une démarche de réflexion sur l'évolution du système judiciaire dans son ensemble , "Les entretiens de Vendôme " dont l'objectif est d'améliorer le fonctionnement des juridictions par la recherche d'une meilleure qualité du service offert aux citoyens.
Enfin, dans le cadre du projet de loi de modernisation sociale nous avons déposé un amendement qui vise à réformer la composition de la commission nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail(CNITAAT) et des tribunaux du contentieux de l'incapacité.
Il est par ailleurs envisagé de réformer par voie réglementaire les procédures devant ces juridictions.
La rapport souligne également la nécessité, pour les services publics sociaux, d'être plus attentifs aux besoins spécifiques des publics les plus fragiles. Ce souci est le mien. C'est pourquoi je souhaite créer, dans le cadre du nouveau programme de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, des maisons de la solidarité pour accueillir les personnes en difficultés. Elles rassembleraient les services sociaux susceptibles de prendre en charge les problèmes d'accès aux ressources, aux soins et au logement : centres communaux d'action sociale (CCAS), services sociaux du département, caisses d'allocations familiales (CAF), caisses primaires d'assurance maladie (CPAM). Elle associeraient également les acteurs susceptibles d'aider les personnes en difficultés à bâtir un projet personnel, notamment le service public de l'emploi et les associations.
Mais aujourd'hui je souhaite mettre l'accent sur trois observations sur les relations entre les institutions sociales et les usagers.
1- Avec le recul on peut constater de réels progrès dans les relations entre les institutions sociales et leurs usagers. Le rapport le souligne dès la première partie.
Dans l'ensemble,
*l'usager est mieux informé,
*l'usager est mieux accueilli,
*l'usager est mieux accompagné.
Ces progrès n'étaient pas acquis d'avance. Ils récompensent les efforts de tous les acteurs de la chaîne du service public.
Depuis les rédacteurs des textes réglementaires jusqu'aux personnels en contact direct avec le public en passant par ceux qui ont la tâche d'administrer les institutions, d'organiser les opérations et de diriger les équipes.
Il faut faire encore mieux connaître cette réalité-là.
Cela doit faire partie de notre politique de communication en particulier vis à vis des associations et des élus, élus politiques nationaux et locaux ainsi qu'élus des instances sociales.
2- Il faut approfondir le travail concret sur la relation avec l'usager notamment par les échanges d'expériences entre les services publics sociaux.
Les institutions en contact avec le public tireraient sans doute grand avantage pour elles-mêmes, pour leurs personnels, et pour les usagers, à échanger, un peu plus qu'elles ne le font, leurs expériences, leurs observations, leurs projets en matière de service à l'usager.
Chacune à sa mission propre et ses spécificités mais elles ont beaucoup en commun notamment la préoccupation de l'accueil, de l'écoute et de l'accompagnement de l'usager, particuliers, associations ou entreprises.
Comment mieux travailler avec les publics les plus fragiles, ceux qui risquent de rester en marge du service public ? Comment concilier le traitement des grands nombres, et la personnalisation du service ? Comment tisser un réseau de services publics pour mieux appréhender des problèmes sociaux ou personnels qui relèvent de plusieurs institutions différentes ? Comment chacun procède-t-il pour mieux comprendre les demandes des usagers ? Comment faire une exploitation positive des plaintes recueillies ? Comment être mieux à la disposition des usagers là où ils se trouvent ?
Quelles méthodes d'évaluation de la qualité du service chaque institution utilise-t'elle ?
Il y a ainsi de nombreuses questions très concrètes qui ne peuvent être résolues par décret ou par approche administrative. C'est l'affaire des professionnels en contact avec le public.
Pour ma part, je suis prête à aider tout ce qui pourrait favoriser les rapprochements entre les institutions, qu'ils se traduisent par des échanges de personnels et de cadres comme le suggère le rapport ou, plus prosaïquement, par l'organisation de journées d'études et d'échanges techniques communes.
3- Sous l'éclairage de ce rapport je constate que le gouvernement apporte nombre d'améliorations significatives aux relations entre les institutions sociales et les usagers.
C'est ce que nous faisons lorsque nous étendons la couverture sociale : c'est le but de l'allocation personnalisée d'autonomie.
Il fallait créer un nouveau droit : le gouvernement l'a fait.
Il fallait affirmer la proximité et la décentralisation de la gestion de cette allocation : le gouvernement l'a fait.
Améliorer la qualité du service aux usagers, c'est également le but de la nouvelle convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et la CNAV que j'ai signée le 15 mai dernier. C'est aussi la priorité de la convention d'objectifs et de gestion que je vais signer avec Ségolène ROYAL et la présidente de la CNAF le 3 juillet prochain.
Cela conduit à favoriser le rapprochement des institutions, de telle sorte que l'ensemble des problèmes de l'usager soit traité : c'est le rôle des centres locaux d'information et de coordination (CLIC) qui prennent en compte tous les aspect de la vie quotidienne des personnes âgées. Ce sera le rôle des sites pour la vie autonome (SVA), lieux uniques de traitement des demandes d'aide des personnes handicapées.
Améliorer le service rendu, cela consiste également à personnaliser les relations avec les publics, ce qui est un des traits majeurs du programme d'aide au retour à l'emploi mis en uvre par le service public de l'emploi.
Améliorer le service rendu, c'est dans ce dessein que j'encourage les chefs de services territoriaux de mon administration à élaborer leurs plans d'actions, d'une part en concertation avec tous les autres acteurs, d'autre part en fonction des réalités, des difficultés mais aussi des atouts, des territoires sur lesquels ils ont la responsabilité d'appliquer la politique du gouvernement. C'est le sens de la territorialisation de nos politiques, thème auquel j'ai vivement encouragé l'IGAS à consacrer son prochain rapport public annuel.
" Simplifier, simplifier encore et toujours ", c'est ce à quoi nous exhorte l'IGAS. Je veux m'attarder un peu sur le chapitre de la simplification.
Il est vrai qu'il y a encore du chemin à faire sur la route de la simplification. Mais il est vrai également que depuis 1997 a été menée une action vigoureuse de simplification au service des usagers des institutions sociales.
Les publics fragiles sont, bien entendu, les plus exposés à la complexité, du droit, des démarches et de l'accès à certaines informations, en particulier dans le domaine sanitaire et social.
C'est la raison pour laquelle, dès la mise en place de la Commission pour les simplifications administratives (la COSA) présidée par le Premier ministre, l'axe prioritaire définie à son action a été la réponse aux besoins des personnes en situation de détresse.
Ces usagers se trouvent, au premier chef, concernés par des dispositions de simplification de droit commun.
Je noterai ici :
- la suppression des fiches d'état-civil et des justificatifs de domicile.
- ou l'interdiction pour tout service d'exiger des renseignements qu'il détient déjà ou peut se procurer auprès d'un autre service.
Parallèlement, un travail de fond est réalisé afin de rendre accessibles et de simplifier les principaux formulaires et les pièces justificatives.
Ainsi, grâce à la constitution de panels d'usagers, il est apparu que l'hétérogénéité de documents pourtant destinés à un public proche, bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) et titulaires du revenu minimum d'insertion (RMI), et la difficulté de compréhension de certaines notions (telles que celle de " ressources ") sont légitimement mal ressenties par de nombreux bénéficiaires. C'est pourquoi ces documents (formulaires et notices) feront l'objet d'une actualisation à horizon de la fin 2001.
Avant de vous inviter à poser vos questions je veux ajouter ce commentaire.
J'ai lu ce rapport bien entendu comme ministre de l'emploi et de la solidarité, mais aussi avec d'autres préoccupations, d'autres expériences :
- celles de l'élue d'un conseil régional qui agit en partenariat avec des institutions sociales,
- celles d'une citoyenne, militante politique partie prenante du débat sur le service public,
- enfin celles d'un usager toujours plus exigeant à l'égard du service rendu, pour lui-même ou pour ses proches.
Je suis frappée par la passion qu'à tous égards continue de provoquer la réflexion sur le service public. Elle peut conduire parfois comme vous le savez à de rudes affrontements d'idées.
Je peux vous dire que dans ce ministère et dans les institutions sociales qui lui sont liées, je l'ai très vite constaté, cette passion est une source d'énergie où puisent les dirigeants, les cadres et tous les personnels soucieux de se mettre toujours mieux au service du public.
Je ne doute pas que le prochain rapport, que l'IGAS consacrera aux relations des services publics sociaux avec les usagers, fera le constat de progrès remarquables.
(source http://www.social.gouv.fr, le 9 juillet 2001)