Déclaration de Mme Fleur Pellerin, sur le développement de l'économie numérique dans tous les secteurs, à l'école, au travail, dans la vie quotidienne, et son engagement à réduire la fracture numérique, Paris le 11 octobre 2012.

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Circonstance : 5ème édition de l'Open World Forum 2012, à Paris du 11 au 13 octobre 2012

Texte intégral

Messieurs les Présidents de l’Open World Forum,
Monsieur le Président de Systematic Paris Région,
Monsieur le Directeur général de la modernisation de l'Etat, cher Jérôme,
Monsieur le Vice-président en charge du développement économique, des NTIC, du tourisme, de l'innovation et de l'économie sociale et solidaire pour la Région Ile-de-France, cher Jean-Paul,
Monsieur l’Adjoint au Maire de Paris, chargé de l'innovation, de la recherche et des universités, cher Jean-Louis,
Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie de votre invitation.
Je me réjouis d’être parmi vous ce matin pour ouvrir cette 5ème édition de l’Open World Forum.
Je voudrais d’abord saluer le travail de la Région et de la Ville de Paris, qui soutiennent cet événement depuis son origine, il y a 5 ans, mais aussi celui du Pôle Systematic qui organise cette manifestation.
Je voudrais aussi saluer les sponsors sans qui l’événement ne pourrait pas exister.
Cette année, vous avez décidé de centrer la thématique du Forum sur l'utilisateur. En entreprise, en administration, ou en collectivité, l’utilisateur est en effet au coeur de la transformation numérique. La magie du numérique, c’est de permettre à chacun d’être contributeur, d’être acteur, et pas seulement consommateur.
Cela fait plusieurs décennies que les technologies numériques bouleversent nos vies. Qui aurait imaginé qu’elles modifieraient à ce point notre accès à la connaissance, à la culture ? Le numérique change nos manières de communiquer, de partager, de nous déplacer. Il est porteur d’espoirs pour mieux apprendre, s’informer et participer à la vie démocratique. Il permettra aux citoyens de mieux travailler, aux entreprises de mieux produire, pour construire une société durable.
En tant que ministre chargée des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Innovation et de l’Economie numérique, je souhaite tout naturellement partager avec vous l’ambition numérique que je porte au nom du Gouvernement.
Mon souhait est de transformer la promesse technologique en progrès économique, social, démocratique et environnemental. Tous les pans de la société sont concernés. Je voudrais donc vous parler de tous ces nouveaux usages que permet le numérique.
Pour aborder cette transformation, la France dispose de nombreux atouts, vous le savez, car vous êtes nombreux ici à les incarner. La France possède une recherche publique de référence au niveau mondial. Son dynamisme repose sur des acteurs industriels qui ont fait le pari de l’innovation, et sur un tissu dense de PME et d’ETI. Enfin, les pôles de compétitivité jouent un rôle décisif en structurant un écosystème très dynamique d’innovateurs, de chercheurs, d’entrepreneurs, et de créatifs.
Ma première conviction, c’est que le numérique n’est pas qu’une révolution technologique. C’est une transformation globale de la société. Il est au coeur de tous les grands enjeux du quinquennat et des années à venir !
Je pense d’abord au redressement économique de notre pays, qui s’appuiera sur une nouvelle ambition numérique. Pour les entreprises, c’est un enjeu de compétitivité et pour les territoires, une question d’égalité et d’attractivité.
C’est pour cela que le Gouvernement a affirmé hier sa volonté de créer un grand quartier numérique à Paris, ou en proche banlieue. Il fera de Paris une capitale mondiale du numérique. Je suis heureuse de porter, au sein du gouvernement, un tel projet.
Pour les salariés, le numérique est une promesse d’améliorations des conditions de travail. En France, le constat est clair : aujourd’hui, le numérique irrigue le monde de l’entreprise dans sa quasi-totalité. Les outils numériques ont déchargé les travailleurs de taches pénibles ou répétitives pour leur permettre de se concentrer sur le coeur de leur activité.
Quel gain de temps et d’énergie dans les tâches quotidiennes de la vie professionnelle ! Le numérique permet aussi d’améliorer l’autonomie des travailleurs. Il les a émancipés de cadres contraignants comme les horaires, ou les lieux de travail. C’est la promesse formidable du télétravail qui, bien accompagné, offre plus de souplesse aux travailleurs !
Je pense aussi à la santé et à la dépendance. Le recours au numérique rend possible une transformation radicale du rapport du patient au système de santé. De cette évolution sera issue une médecine plus efficace, mais aussi plus proche des patients et plus personnalisée, dont nous allons tous profiter.
Le numérique rend possible des interventions plus précises : le développement de la simulation et de la modélisation enrichit considérablement les ressources de l’imagerie médicale.
Le numérique met aussi fin à la solitude du patient face à sa maladie. La constitution de réseaux virtuels sur Internet aide des malades à vivre avec leur maladie, à s'échanger des informations, voire à faire progresser la connaissance de la maladie. Le numérique est un puissant ressort d’amélioration de la vie des personnes dépendantes, mais aussi de celles de leur entourage qui les assistent au quotidien. Il permet de repousser les limites de l’autonomie et de réintégrer les personnes âgées ou handicapées dans la société.
Je pense à l’Ecole aussi. La pleine maîtrise des outils numériques sera au coeur de l’acquisition de nouveaux savoirs et de nouvelles compétences. Je pourrais souligner le travail de certaines start-ups françaises qui développent de nouvelles formes de pédagogies et de nouveaux outils numériques éducatifs. Leur travail doit être encouragé.
C’est le cas de l’application Chocolat, développée par un enseignant, qui permet de mettre à disposition des enseignants et de leurs élèves un cahier de textes en intranet ou sur Internet.
Bien plus qu’un simple outil, le numérique forme les élèves aux emplois du futur. Le numérique représente un levier puissant de transformation de l’enseignement supérieur et de la formation tout au long de la vie.
Il est aussi l’un des moteurs de l’attractivité internationale de la France. Ainsi, le Gouvernement souhaite lancer un projet ambitieux de déploiement de véritables Campus Numériques. C’est un investissement à la croisée des projets présidentiels en faveur de la jeunesse et du redressement productif.
Je pense enfin à la modernisation de l’action publique, qui connaitra avec l’administration numérique des progrès importants. La puissance publique se dotera d’une véritable stratégie technologique. Elle permettra non seulement de simplifier la vie des usagers et de faire évoluer des systèmes d’information, mais aussi de transformer la relation avec les citoyens. L’enjeu est simple : il s’agit de faire émerger un nouveau modèle d’action publique favorisant à la fois l’innovation décentralisée et la mutualisation.
Il faudra bien sûr prendre en compte les dynamiques du numérique comme celles de l’inter-opérabilité, des données et standards ouverts, ou encore du logiciel libre. C’est bien dans ce sens que le Premier ministre a souhaité donner des orientations claires aux administrations sur le bon usage des logiciels libres.
En deuxième lieu, je voudrais vous parler de la lutte contre la fracture numérique, sous toutes ses formes.
Si le numérique repose sur des valeurs de liberté et de partage, il ne doit pas être la source de nouvelles exclusions. Je veux ici le dire avec un peu de gravité. Personne ne restera en dehors de la révolution numérique.
Pour cela, la transformation numérique doit promouvoir nos valeurs fondamentales de liberté, d’égalité et de fraternité. C’est pour cela aussi que je souhaite qu’une forme de "droit au numérique" soit garantie. Je vois d’ailleurs dans cet impératif républicain de "droit au numérique" un puissant moteur de réflexion et d’innovation sociale. Ce renversement de perspective doit guider notre action.
On le sait, la "fracture" est de moins en moins un problème d’équipement ou de raccordement au réseau. Le coût récurrent des abonnements, et les modalités de paiement, sont des obstacles à l’accès pour les revenus les plus modestes. Des associations s’attachent à résoudre ce problème, je pense à l’initiative "téléphonie solidaire" d’Emmaüs Défi.
D’autres initiatives ont été lancées pour réduire les formes de "fracture numérique". Les médiateurs numériques de la M@ison de Grigny, dans la région du Rhône, se déplacent jusque dans les immeubles des habitants pour les accompagner dans leur usage du numérique : c’est un très bel exemple.
Le développement de "l’e-inclusion" tire aussi partie des outils numériques pour lutter contre l’exclusion. Plutôt que de créer des besoins qui n’existent pas, les entrepreneurs sociaux trouvent dans les difficultés existantes autant d’idées de start-ups. Ainsi, le site français Voisin’Age invite les jeunes à se rapprocher de leurs voisins âgés et isolés, alors qu’ils se croisaient jusqu’alors sans jamais se parler !
Tous ces nouveaux usages ne seraient rien si les droits des citoyens n’étaient pas garantis sur Internet. Sur Internet et dans le numérique, la liberté ne doit pas être un vain mot. Un projet d’ "Habeas corpus numérique" sera soumis au Parlement en 2013 pour affirmer un certain nombre de principes dans le domaine de la vie privée et de la liberté d’expression. La protection des citoyens face à la multiplication des fichiers est une priorité. Le Gouvernement sera attentif à la liberté d'innovation ouverte sur Internet et au respect du principe de neutralité de l’Internet.
Cette nouvelle ambition pour le numérique, j’entends la porter dans les mois à venir, avec tous mes collègues du Gouvernement. Elle trouvera très vite des traductions très concrètes avec l’ouverture de nombreux chantiers.
Je vous remercie et vous souhaite d’excellents travaux.
Source http://www.redressement-productif.gouv.fr, le 15 octobre 2012