Texte intégral
Lexistence, au sein de votre institution, dune commission pour le contrôle de lapplication des lois est une très bonne nouvelle pour la démocratie. Je tenais à saluer le président de cette commission, David Assouline, et, plus largement, lensemble de ses membres, qui contribuent, par leur vigilance, à ce que nos lois ne restent pas lettre morte. Je vous remercie davoir inscrit ce débat à lordre du jour dune semaine sénatoriale de contrôle.
Le rapport qui nous rassemble aujourdhui met particulièrement à lhonneur Mmes Claire-Lise Campion et Isabelle Debré, vice-présidentes de cette commission. Quil me soit permis de leur adresser tous mes remerciements pour le travail remarquable et sans concession quelles ont réalisé. Je tiens également à saluer lengagement des sénateurs dont témoigne la qualité des interventions que jai pu entendre aujourdhui ; elles me seront fort utiles dans le cadre de ma mission.
Que vaut une loi qui ne serait pas appliquée ou qui le serait mal ? Vous veillez à ce que cela narrive pas, et, en lespèce, vous attirez mon attention sur une situation quelque peu préoccupante : la loi du 11 février 2005 est sans doute une grande loi de la République, mais sa mise en oeuvre a été certainement défaillante.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux saisir lopportunité de la publication de ce rapport pour faire un état des lieux de la prise en charge du handicap en France et vous dire quels seront les grands axes de mon action au service des personnes handicapées.
Dans les quatre grands domaines traités par le rapport laccessibilité, la scolarité, lemploi et les prestations , qui sont ceux de la loi de 2005, jagirai avec principes et méthode.
Mes principes sont les suivants : apporter aux personnes handicapées des réponses personnalisées, car les situations de handicap sont multiples, ainsi que les histoires de vie et les projets, et faire du handicap, autant que possible, une situation ordinaire. Par conséquent, les besoins diffèrent dune personne à lautre. Ce nest pas larchitecture figée de nos dispositifs actuels qui doit justifier le parcours de prise en charge de la personne handicapée, mais bien, a contrario, les besoins de cette dernière, à titre individuel et à chaque moment de son existence.
Je mefforce daller à la rencontre des acteurs de terrain, sur lensemble du territoire national. À ce titre, lorsque jai inauguré la maison daccueil spécialisée « Les Acacias » à Pierrefeu-du-Var, certaines personnes handicapées mont fait part de leur soulagement de nêtre plus internées en hôpital psychiatrique, et dêtre enfin encadrées et respectés. Jai rencontré danciens usagers des établissements et services daide par le travail, les ESAT, qui mont exprimé leur bonheur de travailler, parce quils le pouvaient et le voulaient, dans une entreprise adaptée, voire dans une entreprise ordinaire. Cest possible !
Chaque personne handicapée a le droit dêtre reconnue dans sa singularité : sa parole doit être écoutée et une réponse adaptée doit lui être proposée. Je le répète, mon but est de faire du handicap une situation ordinaire, car je repousse la perspective dune société dans laquelle la dépendance plus ou moins grande de certaines personnes deviendrait un prétexte pour les exclure ou les reléguer.
Faire du handicap une situation ordinaire, cest réaffirmer notre volonté et notre faculté de vivre ensemble, dans le respect de nos différences et la conscience de ce qui nous unit tous.
Cest dans cet esprit que François Hollande, alors candidat à lélection présidentielle, sétait engagé à ce que chaque projet de loi, chaque politique publique comprenne à lavenir un volet handicap : cette promesse a été tenue ! Tout récemment, le Premier ministre a du reste adressé une circulaire à lensemble de ses ministres, afin que chacun dentre eux prenne en compte, dans lensemble de ses propositions, le critère du handicap. Tel est le cas de la loi portant création des emplois davenir. Dores et déjà, nous incluons le handicap dans chacune de nos réformes, et nous poursuivrons dans cette voie pour lensemble des politiques de lemploi. Je développerai ce sujet dans quelques instants.
Ma méthode est claire : je veux agir dans la concertation et la transparence. Certains se sont moqués des corps intermédiaires, des élus et des associations. Le Gouvernement veut, au contraire, consulter ces derniers et les associer systématiquement aux concertations mises en oeuvre.
Pour assurer lapplication de la loi de 2005, les élus locaux sont, certes, des partenaires essentiels. Mais, au-delà, je souhaite mobiliser tous les acteurs concernés par le champ du handicap pour mettre notre intelligence collective au service des personnes handicapées.
La transparence, cest la condition de la confiance sur laquelle repose notre travail en commun.
Ainsi, jai tenu à rendre public un rapport relatif au handicap, qui a été remis au mois doctobre 2011, par lequel trois inspections pointent les défaillances qua subies la mise en application de la loi de 2005. De fait, il me semblait urgent de sortir de la situation de non-dit et de défiance qui sinstallait entre lÉtat, les associations de personnes handicapées, les collectivités territoriales et, plus généralement, les acteurs du monde économique.
Jai souhaité cette publication parce que nous devons la vérité aux personnes handicapées, à leur famille et aux associations qui les représentent. Jai lhabitude de prendre les problèmes à bras-le-corps : encore faut-il avoir conscience des enjeux et porter un regard lucide sur ces derniers. Je distinguerai, à ce titre, les quatre principaux champs dintervention énumérés dans ce rapport.
Le premier est celui de laccessibilité. En la matière, je souhaite maintenir léchéance de 2015. De fait, nous navons pas le droit de reculer : emprunter les transports en commun, faire ses courses, aller chez le médecin, cest un parcours du combattant pour la plupart des millions de personnes en situation de handicap vivant dans notre pays.
Rendre nos villes, nos territoires, notre espace public accessibles aux personnes en situation de handicap, cest également y faciliter les déplacements de nos aînés, des jeunes parents, des jeunes enfants eux-mêmes, du plus grand nombre de nos concitoyens, bref rendre service à la société tout entière.
Laccessibilité universelle est une grande et belle idée. Tout le monde doit pouvoir avoir accès à tout, notamment aux moyens modernes de communication, qui occupent une si grande place dans nos vies. Voilà pourquoi un appel doffres sera lancé à la mi-octobre pour la création de centres relais téléphoniques généralistes, destinés à briser lisolement des sourds et malentendants.
Par ailleurs, laccès au débat public, et donc à la citoyenneté, qui est au fondement du vivre ensemble, doit encore être facilité. Dans cette perspective, le Gouvernement a publié, à lintention des personnes déficientes intellectuelles, une version facile à lire et à comprendre du discours de politique générale du Premier ministre. Ce travail a été accompli en partenariat avec des personnes en situation de handicap, ainsi quavec les associations chargées de les représenter. Pour aller plus loin, les services de communication de lÉtat seront associés à cette démarche, afin que lensemble des sites officiels deviennent totalement accessibles.
La traduction en langue des signes française et la vélotypie seront systématiquement employées lors des interventions du Président de la République et du Gouvernement. Toutefois, nous travaillons également à plus long terme : à cet égard, je souligne dès à présent quune mission de simplification des documents et des processus administratifs sera confiée à la direction générale de la modernisation de lÉtat, la DGME.
Néanmoins, comme lont rappelé les orateurs qui se sont succédé, le dossier le plus lourd, cest celui de laccessibilité du bâti et des transports.
Tous les lieux accueillant du public devraient être accessibles aux personnes handicapées dès 2015. Nous sommes loin du compte, il faut ladmettre. Cest dailleurs à cette conclusion quaboutissent le rapport de lIGAS et votre propre rapport, mesdames les rapporteurs. Il ne sagit pas dun écueil, ce nest pas grave de dresser ce constat, au contraire : il faut jouer le jeu de la vérité, et présenter les faits de manière claire et précise pour garder le cap, car tel est mon objectif.
Ainsi, sur mon initiative, le Premier ministre a confié à Mme Claire-Lise Campion la responsabilité de prolonger ces deux rapports par une mission parlementaire chargée de définir, avec lensemble des acteurs de terrain, les moyens à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés pour 2015. Cette mission sera courte trois mois et permettra de définir un échéancier et un plan daction crédibles sur la base des propositions synthétisées dans le rapport de lIGAS.
Nous procéderons avec volonté et pragmatisme pour avancer, essentiellement, sur ces deux sujets capitaux que sont le bâti et les transports. Jannoncerai des mesures précises à lissue de ces travaux, certainement au début de lannée 2013.
Le deuxième champ dintervention est celui de la scolarité des enfants en situation de handicap. Les divers orateurs ont longuement évoqué ce sujet.
Les enfants qui souffrent de handicap font partie de la jeunesse de notre pays. Ils incarnent son avenir et son espoir, comme tous les enfants. Or un élève qui ne peut pas suivre convenablement sa scolarité, cest non seulement une tragédie personnelle, mais aussi un énorme gâchis collectif. Il nest pas acceptable que lécole de la République ne se donne pas les moyens daccueillir tous ses enfants dans de bonnes conditions.
Je vous signale, madame la rapporteur, quune mission a été confiée à lIGAS et à lInspection générale de léducation nationale, pour déterminer le nombre denfants concernés. De fait, derrière les données quantitatives, il faut considérer les vies humaines. On évoque le chiffre de 10 000 enfants. La réalité est sans doute plus proche de 6 000 individus. Quoi quil en soit, vous avez raison, il est impératif de connaître létat précis de la situation : même si des progrès ont été accomplis, il ne faut laisser aucun enfant sur le bas-côté.
Dans cette perspective, je précise quune partie des créations de postes dans léducation nationale sera destinée à accompagner les élèves en situation de handicap. Certains orateurs lont souligné à la tribune : dès la rentrée scolaire 2012, nous avons créé 1 500 postes dauxiliaires de vie scolaire individuels supplémentaires. À ce jour, nous comptons donc, globalement, 24 500 AVS individuels.
Le but est de répondre aux besoins daccompagnement, capitaux pour nombre de familles.
À lheure actuelle, dans le cadre de la refondation de lécole, trois chantiers sont en cours, sur lesquels je travaille précisément avec Vincent Peillon et George Pau-Langevin.
Premièrement, jévoquerai la professionnalisation des AVS, que lon nomme plus couramment les accompagnants. Un groupe de travail a été réuni. Il a dores et déjà commencé ses travaux, et rendra normalement ses préconisations à la mi-mars 2013.
Mon objectif est simple : il sagit de créer un métier pérenne, accessible au terme dune formation, sur la base dun niveau requis, afin de ne pas ajouter la précarité au handicap. Soit dit en passant, les enfants en situation de handicap sont les seuls pour lesquels les accompagnants se voient imposer un si faible degré de qualification ! Globalement, pour les autres enfants, les règles en vigueur sont bien plus rigoureuses.
Le but est donc davancer sur ce dossier, en mutualisant les moyens : évidemment, il ne sera pas possible de recruter un AVS pour chaque enfant handicapé. Il faut donc impérativement dégager des moyens via des mutualisations.
Madame Debré, comme vous, je souhaite éviter les ruptures, en accompagnant ces enfants vers la scolarité. Aujourdhui, 80 % des enfants en situation de handicap achèvent leur scolarité par lobtention dun BEP ou dun CAP. Il nest pas tolérable que, parmi les élèves handicapés, certaines intelligences soient abandonnées. La France ne compte que 11 000 étudiants handicapés. Ce nest pas acceptable ! Il faut accompagner les enfants en situation de handicap vers le plus haut niveau de scolarisation. Les universités font des efforts : elles concluent des conventions, travaillent avec les grandes écoles, lesquelles ont dailleurs de plus grandes difficultés à mettre en oeuvre ce chantier. Jespère donc que nous travaillerons également en ce sens dans le cadre de la refondation de lécole.
Deuxièmement, la question de la formation des enseignants et, plus largement, de lensemble des personnels de léducation nationale, a été longuement abordée. Les enseignants exercent leur métier avec passion, mais ils sont souvent démunis face aux enfants en situation de handicap. À cet égard, le Gouvernement tient à rétablir la formation initiale des enseignants, en y intégrant lapproche du handicap. Les professeurs ne deviendront certes pas des spécialistes en la matière, mais ils ne bénéficieront pas moins dune approche de ces enjeux, que nous souhaitons également promouvoir dans le cadre de la formation continue.
Il faut saluer le travail exceptionnel que les enseignants accomplissent au service de la jeunesse de notre pays, en leur donnant les moyens dexercer leur métier dans de bonnes conditions.
En outre, nous allons conclure une convention avec lAssociation pour adultes et jeunes handicapés, lAPAJH, qui dispose dun réseau à léchelle nationale, et dont les membres sont souvent danciens enseignants, connaissant bien lunivers de léducation nationale. Cest préférable, dans ce domaine ! À la prochaine rentrée scolaire, dès quun enfant en situation de handicap sera signalé, ces derniers sefforceront de se tourner vers les écoles, collèges et lycées, pour accompagner, aider et préparer les personnes concernées. Troisièmement, et enfin, dans le cadre de la refondation de lécole, la coopération entre les établissements ordinaires et spécialisés doit devenir systématique. Lengorgement des unités localisées pour linclusion scolaire, les ULIS, ainsi que labsence de recrutement dAVS ces dernières années ont conduit à une triste situation : de nombreux enfants sont en effet « assignés » à domicile, si vous me passez lexpression !
Souvent, cet état de fait emporte des conséquences terribles sur la carrière des parents, plus exactement sur celle des mères.
Nous devons rester fidèles à lesprit de la loi de 2005 et adopter une logique de parcours, pour penser larticulation entre les établissements ordinaires et les établissements spécialisés dune part, entre ces établissements et la scolarisation à domicile de lautre. Il ne doit pas exister deux filières, lune spécialisée et lautre ordinaire, collaborant à loccasion. Au contraire, une seule forme de scolarisation est acceptable : le projet personnalisé de scolarisation.
Dans la même perspective, il nous faut renforcer laide apportée par les professionnels de la filière médico-sociale un orateur la précédemment souligné , à savoir les psychologues, orthophonistes, kinésithérapeutes, par le biais, notamment, de services déducation spéciale et de soins à domicile. Après lécole, le troisième champ capital est celui de lemploi : M. Teulade la amplement évoqué il y a quelques instants.
Comment ne pas opérer le rapprochement entre notre économie et le sort réservé aux personnes handicapées en France, lorsquon constate que la carte européenne des pays les plus gravement plongés dans la crise se superpose à celle des États les plus négligents quant à la prise en compte du handicap ? Cette corrélation ne se double peut-être pas dune causalité évidente, mais jose en souligner le caractère frappant. Au reste, aucune nation ne peut se permettre décarter de son économie une part considérable de ses forces vives, et surtout pas la France, déjà fragilisée par de nombreuses exclusions.
Le taux de chômage des travailleurs handicapés est deux fois supérieur à celui des travailleurs valides. Il est urgent dagir pour que le seuil de 6 % de personnes en situation de handicap dans les entreprises et la fonction publique soit enfin respecté.
Notre économie ne doit se priver daucun talent, daucune force. Or, dans ce domaine, le bilan du pouvoir sortant nest pas très bon.
Il faut à la fois inciter davantage les employeurs et sanctionner plus sévèrement les entreprises défaillantes dans ce domaine. LÉtat doit, quant à lui, se comporter de manière exemplaire en se conformant à la loi.
Évidemment, il nous faut toujours agir avec pragmatisme et discernement.
Aussi, je vous remercie, madame la sénatrice, davoir attiré mon attention sur la situation des services départementaux dincendie et de secours, les SDIS.
Nous aurons loccasion daborder ce sujet plus avant.
Avec le ministre du travail, Michel Sapin, et les syndicats, nous avons tracé le cadre dune grande négociation interprofessionnelle sur lemploi des travailleurs handicapés, qui se tiendra au début de lannée 2013. Elle traitera notamment de laccès à la formation et de ladaptation des postes.
Les jeunes adultes sont particulièrement touchés par le chômage. Laccès à un premier emploi stable est une gageure pour nombre dentre eux, puisquon leur demande de disposer dune expérience sans jamais leur donner la possibilité de faire leurs preuves.
Certains de ces jeunes sont en situation de handicap et cumulent, partant, les difficultés. Avec les dispositions spécifiques au handicap, la loi portant création des emplois davenir apporte une première réponse à leurs problèmes.
Lensemble de notre politique en faveur de lemploi visera le même objectif, en particulier dans le cadre du prochain dispositif présenté, relatif aux « contrats de génération ». Celui-ci concerne non seulement linsertion des jeunes, mais aussi le maintien dans lemploi des salariés désignés par le terme de « seniors ». Vous le savez, léviction précoce dont sont victimes ces actifs touche particulièrement les travailleurs handicapés.
Jai également la conviction quil nous faut consolider le réseau des établissements et services daide par le travail, les ESAT, et faciliter la mobilité des travailleurs entre ESAT, entreprise adaptée et entreprise ordinaire.
Chaque travailleur handicapé doit pouvoir se réaliser dans la structure qui lui convient et dans laquelle ses compétences seront mises en valeur.
La politique de création de places dans les ESAT menée ces dernières années a été bénéfique, mais elle sest faite au détriment des structures existantes. Je souhaite inverser complètement cette logique.
Je veux aussi aider les ESAT à conforter leur situation financière certains sont aujourdhui en grande difficulté et faire une pause dans lobligation de convergence tarifaire, qui simpose à ces établissements et les fragilise.
Nous procéderons également à la revalorisation des rémunérations des salariés, en dégageant plus de 10 millions deuros supplémentaires pour 2013, et développerons de nouveaux projets daccompagnement de sortie des ESAT.
Un effort particulier est demandé à Pôle Emploi et au réseau Cap Emploi pour améliorer la situation des travailleurs handicapés, qui souffrent plus que les autres encore des effets de la crise. Lassociation de gestion du fonds pour linsertion professionnelle des personnes handicapées, lAGEFIPH, doit intensifier son action dinformation des employeurs sur leurs obligations et les aides dont ils peuvent bénéficier. Enfin, je veux parler des établissements et services accueillant des personnes handicapées. Notre responsabilité est dêtre à lécoute de ces personnes, afin de leur proposer des soins adaptés, dans lenvironnement qui leur convient le mieux.
De ce point de vue, il est contre-productif dopposer milieu ordinaire, médico-social et sanitaire, car cest bien par la diversité de loffre et la combinaison des approches que lon peut espérer accompagner efficacement la personne handicapée, au plus près de son parcours de vie.
Les personnes handicapées doivent avoir le choix. Celui-ci est rendu possible, entre autres, grâce aux acteurs du secteur médico-social, qui, par leur professionnalisme et leur dévouement, apportent à des centaines de milliers de personnes les soins et laccompagnement social et éducatif que nécessite leur handicap. Comme les salariés des ESAT, ces professionnels verront leur rémunération revalorisée.
Ils doivent en outre recevoir une formation adéquate qui les prépare, notamment, à un travail en réseau avec lensemble des autres professionnels impliqués dans le suivi de la personne handicapée. Tout à lheure, nous avons évoqué le plan de création de 50 000 places, engagé en 2008. Nous assurerons la mise en oeuvre de ce plan, en créant 3 000 places en 2013.
Mais nous avons aussi relevé des besoins spécifiques, cela a été souligné au cours du débat. Tout dabord, on observe dans notre pays un énorme déficit dans la prise en charge de lautisme, tout comme dans celle du handicap psychique. Ensuite, nous devons répondre à un phénomène de société, celui des personnes handicapées vieillissantes. Car les personnes handicapées vieillissent, elles aussi, et il faut trouver des solutions adaptées. Nous y travaillerons dans le cadre de la préparation du prochain plan. Par ailleurs, des déséquilibres territoriaux très marqués ont été constatés. Il sagit par conséquent de procéder à un redéploiement plus homogène sur lensemble du territoire. Dans certains départements ou régions, on observe de vraies défaillances, de vrais retards.
La prestation de compensation du handicap, ou PCH, est un acquis majeur de la loi de 2005. Lidée même quun handicap peut être compensé est centrale, comme lindiquait tout à lheure Philippe Bas. On souligne ainsi que le handicap est toujours un handicap en situation. Si nous sommes capables de faire évoluer les situations, dadapter lenvironnement, alors le handicap sestompe.
La contribution de la PCH à lautonomie des personnes handicapées ne fait aucun doute. Nous devons donc agir pour pérenniser cette prestation. Certes, je garde en tête que certains besoins en termes daide à domicile ou de soutien à la parentalité ne sont pas couverts par celle-ci. Mais je voudrais reprendre les propos de Jean-Michel Baylet et affirmer que la pérennisation de la PCH implique de mieux encadrer le marché des aides techniques, pour éviter que les prix ne dérivent au détriment des finances publiques et, en fin de compte, des personnes handicapées. Jai demandé à linspection générale des affaires sociales, lIGAS, une mission sur ce sujet.
La PCH coûte aujourdhui 1,5 milliard deuros aux départements, lÉtat ne compensant ces dépenses quà hauteur de 500 millions deuros. Nous devons véritablement pérenniser cette prestation, mais aussi la consolider, en veillant à éviter les dérapages.
Par ailleurs, comme Mme Campion lindiquait tout à lheure, le Gouvernement est attentif à la situation des fonds départementaux de compensation. Je vous confirme que nous les abonderons prochainement à hauteur de 4 millions deuros.
Nous devons cependant assurer léquité sur lensemble du territoire, alors même que nous constatons de vraies disparités entre départements. Tous les acteurs conseils généraux, maisons départementales des personnes handicapées, caisse nationale de solidarité pour lautonomie et associations de personnes handicapées doivent se mettre autour de la table pour homogénéiser les prestations et les simplifier.
Une autre innovation remarquable de la loi de 2005 est précisément la création des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. À la fois « maisons communes » et « guichet unique », les MDPH jouent un rôle central dans laccueil, lévaluation et lorientation des personnes en situation de handicap. Il est très commode davoir un interlocuteur unique et proche de son domicile pour accomplir ses démarches. Il est rassurant de pouvoir sadresser à une personne connue quand on parle de choses aussi essentielles que la prise en charge de son handicap. Toutefois, la gouvernance des MDPH doit être clarifiée pour que la qualité du service rendu aux personnes handicapées soit améliorée.
En 2013, là aussi, lÉtat contribuera à hauteur de 62,8 millions deuros au fonctionnement des MDPH, sans compter les personnels mis à disposition, qui représentent environ un millier de fonctionnaires. Jai entendu vos suggestions de réorganisation et de simplification des démarches pour les demandes de renouvellement. Il sagit en effet de pistes sérieuses sur lesquelles nous pouvons travailler.
Par ailleurs, jai la conviction quil est possible de repenser notre système de financement et de tarification en vue dune plus grande équité, efficacité et simplicité. La mission IGAS-IGF rendra ses conclusions dans les prochains mois. Elles seront discutées avec lensemble des acteurs, les gestionnaires détablissements et de services, mais aussi les ARS, les conseils généraux et, bien sûr, les représentants des personnes handicapées et de leur famille. La réforme de la tarification sera certainement un chantier de moyen, voire de long terme, mais cela ne nous empêchera pas davancer plus rapidement en ce qui concerne lobjectif de simplification.
Mesdames, messieurs les sénateurs, globalement, je me félicite de ce que, dans cette période de grande tension budgétaire, alors que le Gouvernement met en oeuvre le redressement dans la justice, pour lequel les Français ont investi le président François Hollande, la solidarité envers les personnes handicapées reste une priorité. En 2013, les crédits alloués aux personnes en situation de handicap dépasseront 20 milliards deuros, avec 11,2 milliards deuros au titre du projet de loi de finances, soit une augmentation de 6,3 %, et 9 milliards deuros au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit une augmentation de 3,3 %.
Les défis que nous avons à relever sont à la fois nombreux et de taille. Votre concours est indispensable et, sans jamais remettre en cause votre indépendance, je vous associerai tout au long du chemin.
Nous navons pas dautre alternative que de réussir : nous le devons aux personnes handicapées, qui souffrent encore trop souvent dêtre reléguées de lécole, de lemploi, de la citoyenneté bref, de la société.
Une société qui, souvent, les oublie, une société atteinte de cécité, une société qui ne voit pas quen excluant, elle se prive de ressources précieuses ; quen excluant, elle sabîme ; quen excluant, elle cesse dêtre la République, cet idéal qui nous rassemble, dans le respect de nos différences et de nos singularités.
Je veux que vous maidiez à construire une société dans laquelle chacun peut sépanouir, une société dans laquelle les différences ne sont pas autant de justifications à la stigmatisation, à la relégation ou à la discrimination, une société qui fait sienne cette évidence fondamentale : oui, nous sommes tous différents, cest notre richesse ; mais nous sommes aussi tous unis, cest notre fierté, la fierté de la République.
Source http://www.social-sante.gouv.fr, le 9 octobre 2012