Déclaration de Mme George Pau-Langevin, ministre de la réussite éducative, sur l'adaptation scolaire et la scolarisation des élèves handicapés, Lille le 3 décembre 2012.

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Circonstance : Journée internationale des personnes handicapées à Lille le 3 décembre 2012

Texte intégral


Je suis ravie d’être parmi vous, dans l’hémicycle du Conseil régional du Nord-Pas-de-Calais pour clôturer votre séminaire de travail. Je tiens d’ailleurs particulièrement à vous remercier de votre invitation.
C’est une belle initiative de l’académie de Lille que d’avoir organisé ce séminaire ASH (Adaptation Scolaire et scolarisation des élèves en situation de handicap) aujourd’hui, lundi 3 décembre, journée internationale des personnes handicapées.
Cette journée revêt pour moi une dimension particulièrement importante par le symbole mais aussi pour la dynamique qu’elle impulse car elle est l’occasion de parler du handicap, notamment du handicap à l’école.
Elle permet de lever les tabous.
Elle participe de l’évolution de notre société.
Elle aide à faire changer les regards.
Et il faut bien reconnaître que dans nos sociétés actuelles, à l’heure de l’individualisme-roi, le temps consacré à l’autre est de plus en plus restreint. La journée du 3 décembre est le prétexte de prendre le temps et de mettre notre pierre à l’édifice pour faire évoluer les mentalités ! Bien plus qu’un symbole finalement.
Car c’est bien à une évolution sociale, à un changement sociétale que nous devons nous atteler. C’est sur le terrain idéologique, philosophique, je dirai même, que nous devons nous positionner.
Ce n’est pas aux personnes en situation de handicap à trouver leur place dans la société mais c’est bien à la société de s’adapter et de faire une place pour chacun. Nous pouvons d’ailleurs tous, être, à un moment, en situation de handicap.
C’est pourquoi, la société doit offrir les conditions à chacun non seulement de s’épanouir personnellement, mais aussi d’obtenir une reconnaissance sociale.
C’est pourquoi, la société doit permettre à chacun d’être citoyen à part entière, citoyen de plein droit !
Il en est de même dans nos écoles : c’est à l’école de créer les conditions d’inclusion des élèves en situation de handicap et non l’inverse.
Et c’est bel et bien cette démarche inclusive que nous avons impulsée depuis 1999, avec la mise en place des groupes départementaux Handiscol. La loi de 2005 sur l’égalité des droits et des chances s’inscrit dans ce prolongement et ces évolutions législatives ont porté leurs fruits puisque 227 000 élèves à besoins éducatifs particuliers sont scolarisés en école ordinaire depuis la rentrée 2012 contre moins de 190 000 en 2009.
Si l’inclusion dans nos écoles et nos établissements se fait, je sais combien les défis à relever sont grands. Oui, la tâche reste immense pour que l’inclusion et les parcours de scolarisation puissent se faire de façon continue et sans heurt pour les jeunes et les familles. Ministre déléguée à la réussite éducative, c’est la réussite de tous les élèves que je veux ériger comme possibilité potentielle mais surtout concrète, réelle...
Loin d’être un supplément d’âme ou des paroles en l’air, l’éducation est la priorité du Président de la République et du gouvernement. Elle se traduit d’ailleurs par des orientations claires et une hausse nette du budget de l’Éducation nationale en 2013. L’école est le fleuron de notre République et le creuset de nos valeurs communes. Elle doit dans ces conditions offrir à tous les mêmes chances. On a un impératif de réussite, loin du virage de l’école à deux vitesses vers laquelle nous dirigeaient dangereusement les gouvernements de François Fillon avec la suppression des Rased, la suppression de la carte scolaire, l’inaction face à l’échec scolaire et au décrochage de près de 150 000 élèves par an.
Parce que l’école conditionne la France de demain non seulement dans sa dimension de cohésion sociale mais aussi dans sa dynamique économique, je suis plus que jamais déterminée à agir pour que chacun -quel qu’il soit, d’où qu’il vienne- puisse trouver sa place dans notre parcours éducatif et ait des perspectives de réussite.
Telle est la feuille de route que nous nous sommes fixés avec Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale !
Cette ambition de réussite éducative concerne pleinement les élèves et jeunes en situation de handicap, parmi lesquels 80% ont un niveau inférieur au baccalauréat et dont seuls 20% des bacheliers poursuivent des études supérieures. Nous avons donc une obligation de construire ensemble les chemins qui mènent à l’insertion professionnelle. Mais l’inclusion des élèves en situation de handicap participe aussi de la réussite éducative de tout un chacun et de l’édification d’une autre société, plus interactive humainement, plus solidaire, plus ouverte !
Au-delà, je veux dire tout de même combien l’objectif du gouvernement est que chaque enfant trouve une réponse adaptée à ses besoins spécifiques. Car nous savons que pour certains jeunes, par la nature ou le degré de leur handicap, l’école n’est pas la meilleure réponse et que, dans ce cas, les établissements médico-sociaux leur offrent des perspectives d’épanouissement et de parcours de vie. Il y a donc pour moi une complémentarité réelle et de fait entre l’école et les établissements scolaires et les instituts médico-sociaux.
Vous l’aurez compris, nous devons donc répondre à plusieurs défis ! Et ils sont de taille pour dessiner les contours de la société de demain. Nombreux acteurs de l’école ont d’ailleurs participé à la discussion notamment à l’occasion de la très large concertation sur la refondation de l’école impulsée par Vincent Peillon.
Je tiens donc à le rappeler, nous avons d’ores et déjà lancé le vaste chantier pour l’amélioration de l’accompagnement et de l’inclusion en milieu ordinaire des enfants en situation de handicap. Le Président de la République a en effet annoncé que la formation initiale des enseignants tiendrait désormais compte des problématiques et des pédagogies spécifiques au handicap. C’est une avancée majeure et nécessaire, d’une part pour les enseignants eux-mêmes qui, bien souvent, se retrouvent démunis dans leur classe pour répondre aux besoins des élèves, d’autre part pour les élèves au service de qui tous les moyens pédagogiques vers l’apprentissage et la réussite doivent être mis en œuvre.
Avec Marie-Arlette Carlotti, Ministre déléguée en charge des personnes handicapées, j’ai aussi mis en place, le 16 octobre dernier un groupe de travail sur la professionnalisation des AVS-i, accompagnants de vie scolaire. Celui-ci rendra un rapport au premier trimestre prochain et permettra, je l’espère, d’avancer vers une reconnaissance du rôle crucial des AVS dans le chemin pour l’inclusion de tous.
Par ailleurs, l’accompagnement du jeune doit être appréhendé dans sa globalité et dans tous les lieux fréquentés par l’enfant ou l’adolescent en situation de handicap : structure d’accueil de la petite enfance, établissements d’enseignement et de formation, structures d’activités culturelles, sportives, artistiques et de loisirs, transports. Ce sont bien les conditions vers la construction de l’autonomie du jeune que nous avons posées. Par ailleurs, nous devons travailler à l’accessibilité des outils et matériels pédagogiques qui constituent une grande part de l’adaptation de l’environnement aux situations de handicap. Des initiatives individuelles existent déjà. Ce matin, j’ai d’ailleurs regardé avec des élèves une série de dessins animés, nommée " Vinz et Lou et le handicap". Il s’agit d’un programme pédagogique, à la disposition des enseignants, qui permet d’aborder, avec humour, auprès des enfants de 7 à 12 ans les problématiques liées au handicap. Ils sont d’ailleurs entièrement e-accessibles. Une initiative parmi tant d’autres dont la dynamique nous incite d’autant plus à tendre vers une accessibilité généralisée des outils pédagogiques.
Ainsi, dans la logique des chantiers que nous avons entrepris, vous l’aurez compris, c’est bien le handicap qui entre à l’école !
Le handicap entre à l’école !
Ainsi, nous demandons à toutes les écoles et à tous les établissements scolaires d’établir un projet autour du handicap et de la scolarisation des enfants et adolescents en situation de handicap. Pour ce faire, cette mise en œuvre doit faire partie intégrante du règlement intérieur de chaque école et établissement scolaire.
Enfin, si je souhaitais annoncer cette disposition dans l’Académie de Lille, c’est aussi pour rendre hommage à l’initiative de grande envergure que vous avez impulsée, à travers non seulement l’organisation de deux journées de formation au handicap -dont la prochaine aura lieu en janvier- mais aussi à travers ce séminaire académique de réflexion, dont la lecture du programme m’a laissé entrevoir des échanges de grande qualité.
Cela s’inscrit pleinement dans notre volonté d’inclusion.
Cela participe à faire changer les regards.
Cela permet de faire évoluer les pratiques pédagogiques.
Par ailleurs, vous avez su réunir aujourd’hui les partenaires de vos actions : les Mdph, les Ars, les associations. Et c’est essentiel, car l’on sait combien les initiatives fonctionnent quand elles s’inscrivent dans le cadre de coordination, de réseaux, d’échange. Rien ne peut fonctionner sans l’union de tous les acteurs du handicap vers un objectif commun.
C’est aussi l’importance de l’initiative territoriale que je souhaite mettre en valeur. car je suis convaincue que l’évolution, la transformation de l’essai -pour reprendre le titre de votre séminaire- ne peuvent venir que du terrain et des acteurs qui agissent quotidiennement ! Elle répond aussi à la nécessité de s’inscrire dans le cadre spécifique d’un territoire et de ses besoins !
Vous l’aurez compris, je ne peux que souhaiter et encourager ce type de démarche sur tout le territoire national.
Monsieur le recteur, Voir représentation Conseil général (Présidents) et Conseil régional (vice-président), Chers personnels de l’Académie du Nord et de l’Education nationale, Chers enseignants, Chers élus, Madame, Monsieur,
L’inclusion de tous dans notre école, la réussite de tous et le lien humain qui doit accompagner chaque parcours me touchent particulièrement et me sont chevillés au corps pour faire évoluer -encore- notre école républicaine.
Aujourd’hui, je suis allée à la rencontre de nombreux élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire. Comme toujours, ces rencontres humaines ont été des moments uniques qui m’ont touchée, enrichie. La détermination des enseignants et des élèves est par ailleurs plus qu’encourageante! Je repars donc de Lille plus décidée que jamais à relever les défis qui nous sont communs.
Je vous souhaite une bonne soirée, en espérant que cette journée du 3 décembre 2012 aura permis, in fine, de changer les regards, du moins un peu, car comme l’a dit Antoine de Saint-Exupéry : "Si tu diffères de moi, frère, loin de me léser, tu m’enrichis."
Je vous remercie.
Source http://www.education.gouv.fr, le 4 décembre 2012