Texte intégral
Je suis heureuse dêtre parmi vous aujourdhui, pour clôturer le 12ème congrès national du collège des enseignants de médecine générale. Cet évènement est un moment important pour la communauté des enseignants généralistes. Il est loccasion pour vous de présenter vos travaux, de partager vos expériences, de transmettre vos innovations et de mettre en lumière vos savoirs en matière de pédagogie.
Votre collège est lacteur principal de la formation des futurs médecins généralistes. A travers votre engagement, vous avez pleinement contribué à ériger la médecine générale en une véritable discipline scientifique et universitaire. Rares sont ceux, qui contestent aujourdhui et état de fait.
Nos concitoyens sont profondément attachés à la médecine générale. Parce quelle est souvent le premier contact, qui sétablit entre les Français et leur système de santé. Parce quelle intervient à un stade précoce et indifférencié du développement des maladies. Parce quelle permet de construire une relation de confiance, dans la durée, entre le médecin et son patient.
Toutefois, je sais que vos préoccupations sur lavenir de votre discipline sont nombreuses. Les évolutions de notre société transforment en profondeur lexercice de la médecine générale. Dans le domaine de la formation et de la recherche, je mesure lampleur des défis que vous avez à relever.
Contrairement à ce que jai pu lire, ou entendre, la politique que je conduis ne prend pas les médecins pour cible. Comme ministre, je suis responsable de la santé des Français. Mais je suis aussi garante de la relation de confiance qui doit nécessairement sétablir entre les responsables politiques et les professionnels de santé. Si jai souhaité mexprimer devant vous aujourdhui, cest parce que je suis convaincue, que la modernisation de notre système de soins, ne pourra pas se faire sans vous. Ce nest quensemble, que nous pourrons relever les grands défis de demain. Ce nest quensemble, que nous parviendrons à faire en sorte que chaque Français puisse se soigner, sur lensemble du territoire. Ce nest quensemble, que nous répondrons, le plus justement possible, aux attentes de nos concitoyens.
I) Un meilleur accès aux soins passera par la modernisation de la formation des étudiants en médecine.
Dès aujourdhui, il est essentiel de former autrement les étudiants, pour quils sadaptent aux transformations que connaît lexercice de la médecine. Les pathologies changent ; elles deviennent chroniques. Les patients changent ; ils vivent plus longtemps. Leurs attentes ne sont plus les mêmes vis-à-vis du corps médical. Ces grands enjeux, nous devons y faire face. Notre responsabilité, cest de préparer les étudiants aux exigences de demain. Notre devoir, cest dinitier la modernisation de la formation de nos médecins.
a) Dans ce domaine, je suis convaincue, quil nous faut aller plus loin dans la professionnalisation de la formation médicale. Il est essentiel, que les étudiants soient mieux préparés au métier quils pratiqueront.
Quelles sont les nouvelles attentes des patients ? Nos concitoyens souhaitent passer moins de temps à lhôpital. Ils aspirent à être soignés au plus près de leur domicile, ou chez eux, lorsque cela est possible. Notre rôle, cest danticiper ces changements, en développant la formation en médecine ambulatoire.
Pour cela, chaque étudiant en deuxième cycle détudes médicales devra effectuer au moins un stage chez un généraliste. Grâce à vous, grâce aux départements de médecine générale, cest aujourdhui le cas dans près de 2/3 des facultés. Mais je veux aller plus loin. Mon objectif, dès la rentrée 2013, cest de proposer à la totalité des étudiants un accès à cette formation. Par la suite, il nous faudra progresser vers un meilleur équilibre entre la formation en CHU, dont la nécessité est incontestable, et la formation en médecine ambulatoire.
Mais je ne me limiterai pas à la médecine générale. Je souhaite aussi, que les stages en médecine ambulatoire se développent dans dautres disciplines. Je pense en particulier à la pédiatrie ou à la gynécologie.
Cest vous, qui avez inventé le concept de stage en cabinet de médecine générale. Cest vous, qui en avez établi les modalités. Cest vous, encore, qui les animez au quotidien. Vous connaissez mieux que quiconque les difficultés que leur mise en oeuvre implique. Pour ces raisons, je souhaite que nous travaillions ensemble, pour définir léquilibre entre la formation pratique à lhôpital et la formation pratique « hors les murs ». Lobjectif, que je veux fixer devant vous, est concret : en 5 ans, la durée des stages pratiques en médecine ambulatoire représentera 30% du temps de la formation des futurs médecins.
Le nombre dinternes de médecine générale, qui accèdent à un stage de mise en responsabilité doit continuer daugmenter. Il est nécessaire, que durant leur dernière année de formation, tous les internes soient mis en responsabilité, afin dêtre mieux préparés à la pratique de leur métier. Aujourdhui, la situation, que nous connaissons est préoccupante : un tiers des généralistes sinstalle cinq ans après son inscription ordinale. Après de si longues années de formation, ils doivent pouvoir sinstaller dès lannée qui suit lobtention de leur diplôme. Nous engageons la modernisation des études médicales. Nous le faisons pour redonner confiance aux jeunes médecins et pour les préparer au mieux à leur futur métier.
b) Moderniser la formation médicale, cest également améliorer la qualité des conditions de travail de nos internes.
Ces dernières semaines, jai rencontré à plusieurs reprises les représentants des internes au ministère, mais aussi dans les services des hôpitaux de Bourges, dAuxerre ou à Lariboisière. Ils mont fait part de leurs conditions de travail particulièrement éprouvantes, parfois intenables.
La situation exige, que nous prenions des mesures rapides et efficaces. Le respect du temps de travail et du repos compensateur post-garde est une priorité. A ce titre, jai signé le 10 septembre dernier une circulaire exigeant le respect absolu du temps de travail réglementaire, notamment du repos de sécurité. Jai également rappelé la nécessité dindemniser tous les actes de permanence des soins des internes, en particulier les astreintes. Des sanctions seront prises à lencontre des établissements qui nappliqueront pas cette circulaire.
Sur ce sujet, jai par ailleurs engagé un important travail avec les représentants des étudiants et des internes, les présidents des conférences de doyens, les présidents des Commissions Médicales dEtablissement (CME), avec les CHU et les ARS. Les mesures, que nous mettrons en oeuvre, concerneront aussi les internes pendant leur stage en médecine ambulatoire. La formation et les soins ne sopposent pas et les internes doivent bénéficier dune formation théorique et pratique. Il est injuste, quils soient pénalisés, lorsquils sont retenus sur leur terrain de stage, ou lorsquils sont en repos compensateur.
Nous avancerons rapidement, pour que les externes et les internes ne soient plus les victimes dune mauvaise organisation de lactivité des soins.
c) Des solutions doivent également être trouvées pour les chefs de clinique arrivant au terme de leurs quatre années de clinicat.
Aussi, sans attendre, nous avons mis en place, avec la ministre de lenseignement supérieur et de la recherche, les dispositifs permettant aux jeunes médecins de poursuivre leur activité avec le titre de chef de clinique associé. Les nouveaux contrats aidés pour les chefs de clinique de médecine générale constituent une avancée majeure : je pense par exemple à lextension du contrat au statut des installés et aux mesures concernant les congés de maternité.
II) Pour former et pour encadrer les futurs médecins, nous avons besoin de tuteurs et denseignants.
a) Les enseignants de médecine générale sont encore trop peu nombreux.
Le nombre de chef de clinique de médecine générale a augmenté de 30% en un an. Cette progression doit se poursuivre au cours des prochains exercices de révision des effectifs. Comme vous le savez, cette révision est en cours. En lien avec Geneviève Fioraso, nous veillerons à ce que des efforts de recrutement en médecine générale soient réalisés.
b) Ensuite, la formation des maîtres de stage est essentielle pour garantir la qualité des études de médecine.
En 2011, vous avez formé près de 1200 médecins généralistes à être maître de stage. Votre mobilisation mérite dêtre saluée. Elle sinscrit pleinement dans la lutte, que jai engagée contre les déserts médicaux. Pour garantir un accès effectif aux soins sur lensemble du territoire, il faut dabord que nous formions davantage les étudiants en médecine ambulatoire. Mais pour les former, il faut également disposer de maitres de stage. Je sais que ces mesures ont un coût. Mais sur ce sujet, je tiens à vous rassurer. La crise ne sera pas un prétexte pour revoir nos exigences à la baisse en matière de santé publique et la formation des maîtres de stage sera financée en 2013
c) Je veux aussi rappeler, que les premières nominations au grade de maître de conférences des universités, par la voie classique de promotion sur titres et travaux, ont eu lieu.
Elles témoignent de la qualité de la formation, que vous avez prodiguée aux plus jeunes. Elles illustrent lintérêt, que vous avez suscité auprès deux, pour se lancer dans une carrière académique. Pour moi, ce sont des signes forts, qui ne trompent pas. Ils confirment la maturité de votre discipline et lexcellence de votre collège.
Nous poursuivrons le développement de votre filière de formation. Pour quil y ait demain davantage de jeunes en capacité dêtre recrutés comme maître de conférences, encore faut-il quils aient les moyens de se construire une épreuve de titres et travaux. Je veillerai à ce que, dès 2013, il y ait une augmentation substantielle du nombre dinternes de médecine générale bénéficiant de lannée recherche. Je veillerai également à développer avec vous des programmes de recherche en soins primaires.
III) Enfin, mon combat pour laccès aux soins se traduira par des actions concrètes en faveur de la médecine de proximité.
a) Pour lutter contre les déserts médicaux, nous déploierons, dès 2013, 200 praticiens territoriaux de médecine générale.
Pour soutenir les territoires les plus isolés, le gouvernement a fait le choix dagir vite. Pendant 2 ans, le jeune médecin qui sinstallera en zone sous-dotée, bénéficiera dun revenu minimum. Ces praticiens exerceront dans les zones, qui ont franchi un seuil critique. Ils viendront en aide aux médecins, qui travaillent déjà dans ces territoires. Mais ils auront également pour mission de faciliter laccueil des étudiants et des internes. Beaucoup de médecins doivent faire face à une surcharge dactivité. Il leur est de plus en plus difficile de consacrer du temps aux étudiants ou aux internes. Ces 200 praticiens territoriaux de médecine générale seront un appui pour les médecins et leur permettront de dégager le temps nécessaire au suivi des stages. Par ailleurs, ces praticiens territoriaux de médecine générale pourraient accéder à une carrière académique et renforcer ainsi votre filière universitaire.
b) Les maisons de santé joueront un rôle déterminant dans la réorganisation de loffre de soins.
Certaines dentre elles auront vocation à être universitaires. Jai pris connaissance de vos travaux sur le développement dune médecine de proximité de qualité. Vous mavez transmis vos propositions sur la définition des critères concernant les maisons de santé pluri-professionnelles, universitaires et de soins primaires. Elles auront une place importante dans la formation des professionnels de santé dans le domaine de la recherche en soins primaires. Ensemble, nous explorerons plus précisément les modalités dune telle organisation. Je mengage à ce que nous ayons, dès 2013, statué sur le sujet.
c) Enfin, je tiens à vous rappeler, une nouvelle fois, mon attachement aux valeurs fondatrices de la médecine libérale.
La modernisation de notre système de santé ne les remettra pas en cause. La liberté du patient daccéder partout à des soins de qualité, prodigués par le médecin de son choix, est essentielle. Le corollaire de la liberté du patient, cest celle du médecin de sinstaller là où il le souhaite. Ces deux principes fondent lidentité de notre modèle de médecine. Les Français y sont particulièrement attachés et je veillerai à les préserver.
Jai eu loccasion, à plusieurs reprises ces dernières semaines, daller à la rencontre des futurs médecins, sur leur lieu dapprentissage. Jai pu échanger librement avec eux. Jai mesuré à quel point ils étaient fiers du métier auquel ils se préparent. Beaucoup de ces internes ont manifesté le souhait de sinstaller, non pas dans les grandes villes, mais dans les zones rurales ou dans des quartiers déshérités. Ma détermination dans la lutte contre les déserts médicaux est totale. Dans cette bataille décisive pour les Français, je sais pouvoir compter sur la responsabilité des futurs médecins, de leurs enseignants et de lensemble des professionnels de santé.
Je vous remercie.
Source http://www.cnge.fr, le 5 décembre 2012