Texte intégral
Je suis heureuse d’être à vos côtés pour célébrer le 10ème anniversaire du GIP Esther.
J’ai eu l’occasion d’intervenir à la dix-neuvième Conférence internationale sur le Sida à Washington, pour dire tout le bien que je pensais d’Esther et de son action.
J’ai dit mon admiration devant les résultats obtenus grâce au modèle du jumelage hospitalier. J’ai rappelé toute l’importance du travail de partenariat mené par le GIP, notamment au sein de l’alliance européenne ESTHER, forte de 120 programmes dans 40 pays. A entendre les interventions qui précèdent, je vois que ce succès est reconnu par tous.
Parce que j’ai déjà évoqué le travail remarquable du GIP Esther, je peux tout de suite passer aux pistes pour l’avenir, qui concernent en réalité l’ensemble de « l’équipe-France ».
1. Notre pays est bien armé en matière de santé publique internationale
La contribution de la France est considérable. Mais les défis que nous avons à relever dans ce domaine sont encore nombreux. Notre monde est divisé en deux. Les pays riches disposent des médicaments. Les autres, et notamment en Afrique, sont ravagés par la maladie. La première fracture entre le Nord et le Sud, c’est une fracture sanitaire.
Le VIH cause chaque année la mort de 2 millions de personnes à travers le monde, parce que la majorité des malades n’a pas accès à des traitements.
La tuberculose tue près d’un million et demi d’individus tous les ans, alors même que nous savons la guérir. Le paludisme est à l’origine de 650 000 décès, alors que nous connaissons aujourd’hui les moyens de le prévenir.
Notre devoir, c’est de coordonner nos efforts pour combattre, sans relâche, cette injustice. Notre responsabilité, c’est de rassembler nos forces pour imaginer ensemble une réponse solidaire.
Notre pays est bien armé pour mener cette bataille. Nous disposons d’hommes et de femmes qui oeuvrent chaque jour au service de notre diplomatie de la santé. La qualité du travail des équipes du ministère des affaires étrangères et de celles de mon ministère est, à cet égard, remarquable. Nos chercheurs sont également parmi les meilleurs du monde. De l’Institut Pasteur à l’ANRS, en passant par l’IRD et bien d’autres, la France dispose d’institutions de recherche de tout premier plan, dont la renommée internationale n’est plus à démontrer.
Je tiens à saluer ce soir Françoise Barré-Sinoussi, qui a pris récemment la présidence de la société internationale pour la lutte contre le SIDA. Enfin, la France bénéficie d’un système de soins à la pointe de l’innovation. Cette excellence, à laquelle nos concitoyens sont particulièrement attachés, repose sur le dévouement des professionnels, dont le savoir-faire a fait la force du GIP Esther. Ils sont, eux aussi, représentés ce soir. Je tiens à les remercier.
Ce savoir-faire est rare, il est précieux. Nous avons donc la responsabilité d’en faire le meilleur usage, de le diffuser à travers le monde et de le partager avec ceux qui en ont le plus besoin.
Il ne manque pas grand-chose pour que nos plus grandes ambitions se réalisent. Mais il nous faut encore franchir une étape décisive. Car les financements les plus généreux au profit des grands fonds multilatéraux ne suffisent pas s’ils ne sont pas ensuite concrétisés sur le terrain. Les découvertes thérapeutiques les plus innovantes ne sont que des semi-victoires si elles ne trouvent leur application que dans les pays riches. C’est l’humanité tout entière qui doit en bénéficier. C’est à nous que revient la responsabilité de lever les barrières financières et humaines, qui tiennent éloignées les populations des pays du Sud de l’accès à ces traitements.
2. Pour aller plus loin, il est nécessaire de coordonner nos efforts.
Nos diplomates, nos chercheurs et nos professionnels de santé font chacun un travail exceptionnel. Mais notre mission, c’est d’allier leurs talents, c’est de rendre leur coopération quotidienne et évidente pour améliorer encore notre contribution à la santé publique mondiale. Pour y parvenir, nos financements multilatéraux doivent prendre appui sur le précieux savoir-faire dont nous disposons.
Parce qu’elle est mondialement reconnue, nombreux sont les pays qui sollicitent notre expertise en matière d’organisation des soins et de formation médicale. Mais je suis aujourd’hui contrainte de décliner la plupart de ces demandes.
Non pas que la France ne dispose pas des compétences requises : notre système de santé en regorge. Non pas que nous ne trouvions pas de médecins, de directeurs d’hôpitaux ou d’experts prêts à répondre à l’appel.
Vous le constatez chaque jour sur le terrain : la coopération internationale est comme inscrite dans l’ADN du médecin français. Je défie d’ailleurs quiconque de dénombrer l’ensemble des coopérations internationales qui sont aujourd’hui menées à l’initiative d’un médecin, d’un directeur d’hôpital ou d’un professeur de CHU ! Ce n’est pas non plus un problème de ressources : la France investit plusieurs centaines de millions d’euros chaque année dans la santé internationale.
Non, nous ne manquons ni de savoir-faire, ni de générosité, ni de financements. Ce qui fait défaut, aujourd’hui, c’est la structure capable d’articuler l’offre et la demande. La France ne dispose pas d’opérateur de référence ayant une taille critique et capable de mener à bien le travail que réalise aujourd’hui le GIP ESTHER, mais sur un champ thématique plus large.
3. Nous devons donc engager une réflexion sur la mise en place d’un opérateur compétent sur l’ensemble de la santé, adossé à une alliance plus large dans le champ social.
Je suis convaincue que les succès du GIP Esther doivent être une source d’inspiration forte pour construire une offre plus large au service de la santé mondiale. Ce soir, je veux proposer à l’ensemble des acteurs concernés d’engager une réflexion sur cette nouvelle ambition collective.
C’est en fédérant nos énergies et en s’appuyant sur les atouts de chacun, que nous organiserons la meilleure riposte contre la maladie.
Aujourd’hui, un opérateur plus large doit voir le jour en s’inspirant du savoir-faire développé par ESTHER. Un opérateur ancré dans le système de santé français et compétent sur l’ensemble des enjeux sanitaires et sociaux.
La France dispose d’un savoir-faire unique. Donnons-nous les moyens de l’exporter !
4. La crise ne nous impose pas moins de générosité, mais une attention de tous les instants à l’efficience de nos dépenses et à l’efficacité de nos actions.
Je sais que Pascal Canfin partage cette conviction, et cette attention aux résultats.
Il est aujourd’hui primordial d’engager la modernisation de notre système de coopération en santé. Système dont la dispersion des forces est bien connue et documentée. Nous devons doter l’Etat d’une véritable politique d’expertise internationale dans le champ social. Cher Pascal, je crois qu’il est de notre responsabilité commune de l’initier. Je m’engage, pour ma part, à ce que cet instrument puisse mobiliser l’ensemble des compétences sanitaires et sociales de notre pays.
Mesdames et messieurs,
Le GIP a 10 ans et de belles réalisations derrière lui. A 10 ans, on peut avoir des rêves et formuler des projets pour l’avenir. Je souhaite qu’Esther contribue à la naissance d’un grand opérateur français de la santé.
Cette nouvelle ambition est une marque de confiance pour le GIP ESTHER. C’est le signe de la réussite d’un modèle dont je souhaite, à nouveau, féliciter tous les acteurs.
Alors, joyeux anniversaire. Et sachez que vous pouvez compter sur notre soutien pour les projets que vous porterez, à n’en pas douter, dans la prochaine décennie.
Je vous remercie.
Source www.esther.fr, le 19 décembre 2012