Texte intégral
Sans doute parce quil se déroule en janvier, le Midem est traditionnellement un temps fort en termes de bilans et de perspectives.
Après huit mois dactivité comme ministre de la Culture et de la Communication, comme jai pu le dire très récemment à loccasion des voeux à la presse, dresser un bilan na guère de sens. Pour autant, concernant la musique, je veux rappeler que depuis ma prise de fonction, mon engagement est total.
Cet engagement est sur trois fronts :
- répondre aux difficultés conjoncturelles rencontrées par certains acteurs ;
- préserver, dans un contexte budgétaire inédit, les outils de la politique culturelle qui ont fait leur preuve ;
- engager le travail de refondation des outils de régulation élaborés au cours des années 80 que lère numérique a rendu indispensable, vital.
1.Dans un contexte économique difficile pour la musique, depuis ma prise de fonction, jai veillé à la mise en oeuvre immédiate de réponses aux difficultés conjoncturelles.
En 2012, il est incontestable que pour la musique le contexte économique est demeuré difficile.
Le chiffre daffaires de la musique enregistrée a connu une 11ème année consécutive de baisse bien que le chiffre daffaires lié aux ventes numériques progresse de manière de plus en plus significative.
2012 a été aussi une année en demi teinte pour le spectacle vivant dont les résultats masquent les difficultés de nombreuses TPE qui contribuent sur les territoires, avec les labels et les lieux, notamment les SMAC, au développement de nouveaux talents.
Lannée 2012 et le début 2013 ont été ponctués par les difficultés de différents acteurs, dont certains emblématiques.
Face à ces situations durgence, jai agit immédiatement.
Face à la liquidation judiciaire de Discograph, par décret, une aide exceptionnelle a été débloquée afin de soutenir un ensemble de maisons de disques contribuant à la création originale et à la diversité des répertoires.
215 000 ont été versés à une quinzaine d'entreprises, essentiellement des TPE, leur permettant ainsi de franchir un cap difficile qui aurait pu être fatal à plusieurs d'entre-elles et de poursuivre leur activité avec, à la clé, plusieurs dizaines d'emplois. J'ai également souhaité, face aux difficultés et à l'urgence que vivent certaines plates-formes de musique en ligne françaises, que soit mis en place un mécanisme de financement approprié avant la fin de l'année 2012, pour une enveloppe budgétaire de 260 000 . Cette intervention, opérée via le Fonds pour la création musicale (FCM), a permis de soutenir des acteurs tels que Starzik, Beezik, CD1D, Wiseband, Believe.
Dans un contexte de concurrence internationale extrêmement vive, plusieurs acteurs nationaux se distinguent particulièrement dans ce domaine par leur capacité à proposer des services innovants, à lever des fonds substantiels et à drainer un public important, je pense bien sûr à Deezer, qui est en passe de devenir un « champion » français à l'échelle mondiale, mais également à proposer des offres d'une qualité sonore et d'une intelligence dans l'éditorialisation qui méritent d'être saluées, je pense notamment à un service comme Qobuz.
Il reste que, dans la période transitoire actuelle où les relations commerciales ne sont pas encore normalisées, où les acteurs doivent se structurer technologiquement et où il doit encore être remédié à des distorsions fiscales, notamment en ce qui concerne les taux de TVA, lintervention de l'État pour soutenir les acteurs les plus fragiles apparaît déterminante pour éviter que ne subsistent à court ou moyen terme sur le marché français que quelques acteurs globaux.
2. Dans un contexte budgétaire inédit, je me suis totalement engagée pour défendre les outils soutenant la musique.
Le Crédit d'impôt en faveur de la production phonographique arrivait à échéance le 31 décembre 2012. Dans un contexte budgétaire fortement contraint, que nous avons tous à lesprit, je me suis totalement engagée pour que ce dispositif soit prorogé jusqu'au 31 décembre 2015 et quil soit intensifié.
Ce mécanisme est complémentaire du fonds davances remboursables pour lindustrie musicale (FA-IM) abondé par le ministère de la Culture et de la Communication et par la Caisse des dépôts et Consignations (CDC) et géré par l'Institut du financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC).
Je me félicite de sa nouvelle dotation en 2012 de 10 M de la part de la CDC.
Jai demandé au Président de l'IFCIC de disposer rapidement d'un bilan détaillé, qualitatif et quantitatif, du FA-IM. Mais dors et déjà, après 7 années dexistence, on peut noter :
Quun total de 110 avances remboursables ont été octroyées en faveur de 75 entreprises pour un montant de 20,8 millions deuros venus en appui de plus de 55 millions deuros dinvestissements.
Que conformément à lobjectif poursuivi de « re-bancarisation » des PME/ TPE du secteur par le FAIM, près de la moitié des avances a été accompagnée par un emprunt bancaire - bénéficiant, le cas échéant, de la garantie de lIFCIC.
Que le fonds a accompagné tous les acteurs de la filière mais les producteurs et les éditeurs en sont à ce jour les principaux bénéficiaires avec 72% des interventions en leur faveur représentant 11 millions deuros, pour des montants compris entre 10 000 et 1 500 000 couvrant donc les « petits » comme les « grands » labels indépendants.
Il me semble important que l'IFCIC puisse bénéficier de nouvelles ressources issues de la Banque publique d'investissement (BPI). La BPI a vocation à soutenir les PME et les TPE qui de toute évidence structurent largement les industries culturelles et le secteur de la musique en particulier. Jai donc mobilisé mes collègues de l'Economie et des Finances et du Redressement productif pour travailler en ce sens afin de :
- renforcer la capacité d'intervention du FA-IM, au bénéfice des entreprises des producteurs de musique et des plates-formes de musique en ligne ;
- le cas échéant, abonder un nouveau fonds d'avance, à l'étude, au bénéfice des commerces culturels, notamment les disquaires et les comptoirs multi-culturels.
Depuis ma prise de fonction, je me suis également fortement impliquée pour la rémunération pour copie privée.
Je me réjouis de ladoption des nouveaux barèmes le 14 décembre dernier, après des discussions constructives et dépassionnées entre les représentants des ayants droit, ceux des consommateurs et la FFT (fédération française des télécommunications).
Bien sur je nignore pas les différents fronts contentieux ouverts par les adversaires de la copie privée, en France et aussi en Europe. Cest pourquoi je reste totalement mobilisée pour la défense de ce mécanisme vertueux.
3. En 2012, jai engagé lacte de refondation vital pour le soutien à la création et aux industries culturelles : l' « Acte 2 de lexception culturelle ».
Comme vous le savez, jai confié à Pierre Lescure la mission, de réfléchir à la redéfinition des instruments de lexception culturelle à lère numérique. Les outils mis en place dans les années 1980 pour favoriser la création et la diffusion des oeuvres culturelles sont bousculés aujourdhui par la révolution numérique, qui transforme les relations entre les créateurs, les usagers et les fournisseurs daccès et de services par internet.
La mission Lescure qui, après une phase dauditions au cours de laquelle elle a entendu une centaine de personnes, travaille désormais à lélaboration de propositions.
Le rapport devant être remis fin mars devrait sarticuler autour de trois axes :
Le développement de loffre légale.
La lutte contre le piratage dont lune des pistes de travail est lapprofondissement la lutte contre la contrefaçon commerciale car il faut identifier les véritables bénéficiaires de la contrefaçon, autrement dit les sites qui tirent un profit commercial de leurs atteintes aux droits de propriété intellectuelle.
La rémunération des créateurs et financement de la création, alors que les modes de fonctionnement actuels de léconomie numérique entraînent un déplacement de la valeur de lamont vers laval, des contenus vers les services. La question du partage de la valeur dans le monde numérique fait partie de cet axe de réflexion, quil sagisse du partage au sein même des différentes filières ou de linclusion des nouveaux acteurs dans les mécanismes de rémunération des créateurs et de financement de la création.
Je vous rappelle le calendrier : le rapport sera remis fin mars, comme je lavais indiqué lors du lancement de la mission.
4. En 2013, je souhaite que la mission « musique » du ministère de la Culture et de la Communication anime une réflexion dynamique de modernisation de nos outils de politique culturelle en lien étroit avec les acteurs de lécosystème.
En octobre dernier, au MaMA, jai détaillée la feuille de route que jentends poursuivre en 2013 et dont je souhaite réaffirmer les axes prioritaires.
Tout dabord, il me semble nécessaire de rappeler pourquoi jai souhaité la mise en oeuvre dun nouveau mode de fonctionnement pérenne entre les deux directions sectorielles de mon ministère, la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) et la direction générale de la création artistique (DGCA).
Jai indiqué ma volonté de mettre en cohérence le fonctionnement du ministère de la Culture et de la Communication avec celui de la musique au sein duquel, la dichotomie entre musique enregistrée et spectacle vivant a largement perdu de son sens.
La mission « musique » est le lieu darticulation des travaux des équipes travaillant sur le champ de la musique, dans une dynamique transversale, poursuivant ainsi la concertation engagée dans le cadre de la mission de préfiguration du centre national de la musique.
Il s'agit de capitaliser sur ce travail, et de s'interroger en premier lieu sur le fond des problématiques actuelles liées à la structuration de la filière, à son financement et à la modernisation des organismes d'accompagnement sans préjuger de l'outil final, la période étant marquée par une incertitude financière aiguë, même si des missions de réflexion sont en cours sur la fiscalité numérique et sur d'éventuelles nouvelles ressources.
Jai demandé à la mission « musique » de conduire une réflexion dynamique de fédération de nos outils en synthétisant les demandes et les besoins de l'écosystème de la musique dans le cadre de la réflexion sur l'intérêt général et l'adaptation des organismes qui s'y rapportent.
Je suis déterminée à moderniser en profondeur ces organismes d'intérêt général et pour ce faire à sauvegarder les compétences existantes en leur sein.
A cet égard il me semble indispensable de mener ce travail en collaboration étroite avec les acteurs de la filière et notamment les sociétés de perception et de répartitions des droits (SPRD), qui partagent avec le ministère de la Culture et de la Communication les objectifs de diversité culturelle et d'intérêt général et co-financent les organismes qui le porte.
Cest pourquoi jentends proposer, dans le cadre de la réunion de travail qui suivra cette conférence de presse :
- d'effectuer le diagnostic sur les mesures d'urgence à prendre afin de sauvegarder les compétences des organismes d'intérêt général qui sont en péril immédiat.
Je souhaite souligner que jai adressé un courrier à Monsieur le ministre des Affaires Etrangères au sujet du besoin impérieux de la poursuite du soutien de son ministère à ces structures clés pour la défense de l'intérêt général de la filière.
- dengager dans le même temps et de manière liée, également de manière concertée, les indispensables travaux de modernisation en profondeur de ces organismes d'intérêt général. Travaux qui devront notamment aboutir à la création d'un véritable pôle d'observation et de ressources, attendu par l'ensemble de la filière, et à la mise en place d'un ensemble plus cohérent de soutiens sélectifs à la musique enregistrée.
Jai également demandé à la mission « musique », de prendre en compte les conclusions des travaux actuellement menés par la mission Lescure qui devraient intervenir au printemps 2013 sur l'adaptation des différents outils pour préserver l'exception culturelle française et sur les moyens de garantir la contribution des acteurs de lInternet au financement des industries culturelles, et notamment de lindustrie musicale.
La mission musique devra également prendre en considération les grands chantiers à venir en 2013 s'agissant notamment de :
- l'exposition de la musique dans les médias traditionnels
- la mobilisation du crédit dimpôt compétitivité emploi (CICE)
- la loi d'orientation sur la création ;
- la renégociation du régime d'indemnisation chômage des artistes et techniciens du spectacle.
Voici donc la feuille de route que jentends voir conduite par la mission « musique » dans une dynamique de concertation renforcée avec les acteurs de lécosystème.
Source http://www.culturecommunication.gouv.fr, le 29 janvier 2013