Texte intégral
Cest un grand plaisir dêtre ici avec vous aujourdhui pour le lancement officiel de ce nouveau « guide juridique sur la prévention et la lutte contre les incivilités, les violences et les discriminations dans le sport ».
Je tiens tout dabord à saluer et à remercier tous ceux qui ont oeuvré avec un grand professionnalisme et beaucoup denthousiasme, à la réalisation dun ouvrage, qui se veut exhaustif, pédagogique et accessible à tous les publics : les acteurs institutionnels (le ministère des Sports, de la Jeunesse, de lÉducation Populaire et de la Vie Associative, le ministère de lIntérieur, le ministère de la Justice, le Défenseur des droits), des membres du mouvement sportif (comme les Fédérations Française de Cyclisme et de Football, le CDOS de la Marne), des associations (comme la Ligue contre le racisme et lantisémitisme ou lAssociation Française du Corps Arbitral Multisports), et des chercheurs universitaires (en droit ou en sociologie comme les chercheurs du Centre de Droit et dÉconomie du Sport de Limoges), le CNDS...
Je remercie tout particulièrement Laura Flessel et Eric Berdoati, qui ont accepté les missions qui leur ont été proposées par le ministère antérieurement à ma prise de fonctions. Je souhaite que leur travail soit poursuivi et mis en valeur, car ce sont des missions nobles et importantes, des missions auxquelles ils ont consacré du temps, du coeur et de lénergie, et dont la réalisation de ce guide juridique est lun des principaux aboutissements.
La grande qualité de ce guide est, à mes yeux, de refuser les discours caricaturaux, manichéens, sur le sport, qui oscillent trop souvent entre angélisme et condamnation sans appel. Ce guide a choisi la voie de laction et la voie de la lucidité : celle qui apporte des outils simples, concrets, des fiches pratiques et appréhende la complexité du sport en tant que phénomène social.
Nous le savons tous, à travers nos expériences dans un stade, devant notre écran, ou au bord dune pelouse à encourager nos enfants : le sport est un formidable vecteur de lien social, de cohésion, déducation. Nous lavons encore vu avec la Coupe dAfrique des Nations et le beau parcours du Mali, avec le tournoi Grand Slam de judo à Paris auquel jai assisté hier et qui sest déroulé sous le signe du respect.
Mais il nen demeure pas moins que le sport est une activité humaine qui subit, au même titre que les autres, les maux de notre temps.
Lactualité se charge de nous le rappeler régulièrement, parfois de façon tragique et insupportable : personne na oublié le drame du Heysel en 85, mais parfois les violences et les gestes sont beaucoup plus sournois. Je pense à ce qui est arrivé récemment au joueur ghanéen du Milan AC Kevin-Prince Boateng qui a volontairement arrêté de jouer une rencontre, avec le soutien de son équipe, parce que les insultes racistes devenaient insupportables.
Oui, il existe des violences physiques et verbales dans le sport, des violences que subissent de trop nombreux bénévoles, de trop nombreux arbitres, de trop nombreuses équipes, chaque week-end sur les terrains de France. Les arbitres sont considérés comme chargés dune mission de service public dans le Code Pénal. Combien ont été menacés verbalement, combien ont été menacés physiquement ? Et ces menaces, inacceptables et répréhensibles par la loi, font parfois lobjet de passages à lacte. Le sport nest plus alors un vecteur de lien social, non, le sport devient alors une machine à produire de la haine et à encourager lagressivité.
Oui, encore oui, il existe des problèmes de violences sexuelles dans le sport. Les agressions sexuelles et les abus dautorité existent entre les entraîneurs et les jeunes, mais aussi au sein des équipes. Je pense au phénomène de bizutage, à la pression du groupe qui sexerce parfois de façon terrible sur ceux que lon a désignés comme souffre-douleurs et qui doivent se taire devant la pression de lobligation de dopage. Il faut le savoir, il faut en parler, pour faire régresser ces graves comportements.
Oui, malheureusement toujours oui, il existe de la discrimination, du racisme et de lhomophobie dans le sport. Il y a ce que tout le monde voit et entend, ces slogans haineux ou ces cris immondes dans les stades de football. Il y a aussi, au quotidien, des discriminations, dans nos clubs, dans nos associations.
Il ny a pas plus de problèmes de comportements dans le sport que dans dautres secteurs de la société, mais il ny en a pas moins non plus. Soyons lucides, sachons regarder cette réalité en face et agissons, comme le ministère le fait aujourdhui, pour tenter de répondre de manière pragmatique à ces maux.
Aujourdhui, des lois existent, des lois qui ont évolué, des lois pertinentes, tout un arsenal juridique de prévention et de répression qui permet de punir celui qui sadonne à des comportements racistes, homophobes, violents, discriminatoires quaucun dentre nous ne peut tolérer. Les interdits de stade fonctionnent.
Le rôle du gouvernement est dassurer lexécution de ces lois et de permettre quelles soient appliquées sur tout le territoire. Ce guide juridique est un pas de plus fait en ce sens.
Car pour préserver le sport, notre passion, notre outil déducation, de ses erreurs et de ses maux, nous devons donner les moyens à ceux qui font du sport, à ceux qui enseignent le sport, à ceux qui promeuvent le sport ou à ceux, simplement, qui lencouragent, nous devons leur donner les moyens didentifier, de dénoncer et de réprimer les actes et les paroles contraires aux valeurs sportives. Des actes et des paroles, je le rappelle, que la justice est en mesure de punir.
Cette justice, elle peut être pénale, elle peut être civile ou elle peut être disciplinaire, selon les situations et selon les auteurs des comportements en question.
Cest donc une réalité complexe à laquelle nous sommes confrontés. Nous savons tous dire, devant certains comportements ou certaines paroles, « cest intolérable, cest inadmissible » ! Mais combien dentre nous savent dire précisément « voilà pourquoi cest inadmissible », « voilà pourquoi je ne ladmettrai pas » et « voilà ce que je peux faire pour y mettre un terme ! » ?
Il faut en avoir conscience : trop souvent les acteurs du sport se trouvent démunis face à la multitude des comportements, face à des explosions de haine, de colère ou simplement de bêtises, verbales ou physiques, que parfois on préfère banaliser pour ne pas avoir à se poser la question de la sanction.
Ce sentiment dimpuissance, nous lavons tous vu aussi bien dans le haut-niveau quau niveau amateur. Dans les environs ou les gradins du Stade de France comme dans ceux du petit club à côté de chez nous !
Ce guide est donc essentiel. Il est un outil accessible pour pallier le manque dinformation et de référence dans ce domaine complexe des comportements qui sont répréhensibles et pour lesquels il existe des moyens de sévir.
Construit par entrées synthétiques, nourri à l'aide des données juridiques les plus récentes, ce guide offre à lensemble des acteurs du sport un outil de sensibilisation et de prévention, grâce à une information juridique claire, exhaustive, facile daccès et actualisée.
Loin de toute représentation, qui empêcherait de percevoir la diversité des situations, des comportements et des acteurs (quils soient auteur ou victime), cet ouvrage apporte au fil des thématiques toutes les données pour mieux les comprendre, les appréhender et les dépasser, quil sagisse des discriminations au sens juridique strict, des incivilités, des menaces de violences, des violences physiques, des violences verbales et psychologiques et des violences sexuelles.
Ce guide met à la portée de chacun une meilleure connaissance de ce que dit le droit à propos de ces comportements déviants. Ce guide, cest lanti-banalisation. Il montre que tous ces actes ont des conséquences juridiques.
Il vient compléter laction que mène, au plus près des territoires, le ministère en charge des sports. Je pense aux campagnes dinformation, de prévention et de sensibilisation menées par les directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale et les directions départementales, en relation étroite avec le mouvement sportif, je veux ici citer le CDOS de la Marne dont je salue linvestissement. Je veux saluer aussi le responsable de lobservatoire de la FFF.
Ensemble, ils initient des programmes de proximité, en direction des éducateurs, des arbitres, des dirigeants de clubs, des supporters et des licenciés.
Je pense aussi aux conventions dobjectifs qui lient lEtat aux fédérations sportives, notamment les fédérations scolaires et multisports qui sont en première ligne pour former les jeunes à lesprit sportif et prévenir les dérives qui gangrènent le sport. Je pense au travail réalisé par la ligue pro de foot, par le ministère de lIntérieur.
Ce guide a été conçu pour accompagner tous ces acteurs qui, en silence, dans lombre, oeuvrent pour préserver lesprit sportif : les Ministères de lIntérieur, de la Justice, de la Jeunesse, des Sports, de lEducation Populaire et de la Vie Associative, les Services déconcentrés et territoriaux de lÉtat, les Établissements nationaux, les Centres de recherche, le Mouvement sportif (CNOSF CROS - CDOS, fédérations sportives, ligues, comités et clubs) le Mouvement associatif spécialisé, les collectivités locales ; les entreprises du sport.
Je tiens à les remercier chaleureusement car la plupart dentre eux ont collaboré pendant de longs mois pour produire ce guide juridique.
Je tiens aussi à avoir ici un mot pour les éducateurs dans les clubs, bénévoles ou salariés. Cest dabord par eux que passent les messages au quotidien, par des situations, par des actes, par des mots, par lexemple.
Je tiens enfin à dire à tous ces acteurs ma conviction que, dans la lutte pour préserver lesprit du sport, comme dans tout combat, cest lengagement, la détermination collective, la solidarité et la mutualisation des moyens entre toutes les parties concernées qui feront la différence, comme vous avez su le faire dans les deux comités que vous avez animés.
Cest pour cette raison que le futur Conseil National du Sport, qui se mettra en place dans quelques semaines, comprendra une large commission « Ethique et Valeurs du Sport ».
Cette commission sera chargée dagréger tous ces savoirs, de capitaliser sur toutes ces expériences, de les potentialiser et de les mutualiser pour émettre des propositions pour la future loi de modernisation du sport qui sera déposée en Conseil des ministres avant la fin de lannée.
Pour espérer, progresser, faire évoluer les mentalités, les comportements et les pratiques.
Pour espérer, enfin, bannir les outrances verbales, la haine, la violence, les discriminations de nos stades.
Je vous remercie.
Source http://www.sports.gouv.fr, le 13 février 2013