Texte intégral
Bonjour à toutes et à tous,
Merci de votre présence nombreuse,
Quelques mots pour revenir sur la présence de la France à Commission de la condition de la femme avec une délégation représentative, à la fois parlementaire et de la société civile. Nous avons souhaité être présents à cette 57ème session de la Commission de la condition de la femme car ce qui sy joue nous semble majeur.
La précédente Commission de la condition de la femme navait pas réussi à conclure de façon concertée. Cela a créé des attentes extrêmement importantes pour cette année, dautant que la Commission de la condition de la femme porte cette année sur un enjeu prioritaire pour un certain nombre de pays, pour la France au niveau national comme au niveau international : la question de la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles.
Cest un sujet qui a connu un certain nombre de progrès ces derniers temps puisque la France a réussi notamment, avec lappui des Pays-Bas, à faire adopter à lAssemblée générale des Nations unies il y a quelques mois, une résolution incitant les Etats à intensifier cette lutte contre les violences.
Cest un sujet sur lequel nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas avoir dambitions tant il est vrai que partout dans le monde des femmes et des filles souffrent de ces violences multiformes quil sagit dabord de bien qualifier, de façon extensive.
Lun des objets de cette Commission de la condition de la femme est aussi de comprendre ce que lon met derrière le mot « violences faites aux femmes ». On ny met pas simplement les viols, les violences conjugales mais aussi les mariages forcés, les mutilations génitales par exemple. Le combat contre les mutilations génitales a également connu des progrès avec ladoption à lunanimité dune résolution récente sur ce sujet. Ceci en dit long sur le rehaussement du niveau de tolérance de nos sociétés à légard de ce type de violences.
Il faut poursuivre sur cette dynamique. Cest pour cela quil est si important aujourdhui que cette Commission de la condition de la femme sachève par des conclusions concertées. Dautant que le texte préparé par Michèle Bachelet, et soutenu par la France, est un texte de bon niveau. Nous souhaiterions donc réussir à trouver un accord avec lensemble des pays sur ce texte.
En ce qui concerne la France plus particulièrement, les violences faites aux femmes sont une priorité de notre action en faveur des droits des femmes. Depuis quelques mois les droits des femmes sont redevenus une priorité des politiques publiques ; un ministère de plein exercice en charge de cette question est revenu après 26 ans dabsence.
Nous avons dès le 25 novembre dernier adopté un plan daction très global sur la lutte contre les violences faites aux femmes sur notre territoire. Ce plan daction nous permet y compris de nous mettre en accord avec un certain nombre de conventions internationales que nous avons signées. Je pense par exemple à la convention du Conseil de lEurope, dite convention dIstanbul.
Dans ce plan daction désormais mis en uvre sur notre territoire, il est question de garantir aux femmes victimes de violences davoir accès facilement à un recours avec une plateforme téléphonique daccueil qui leur permet dêtre écoutées à toute heure du jour et de la nuit ; avec la formation de professionnels de police, de santé ou dassistantes sociales - qui permettent quand les femmes tirent la sonnette dalarme quelles soient entendues et accompagnées le plus efficacement possible ; avec la présence dans tous les commissariats et postes de gendarmeries dassistantes sociales qui permettent de répondre à toutes les dimensions de la violence faite aux femmes et des inquiétudes quelles peuvent nourrir sur laprès dénonciation ; avec aussi des réponses très concrètes que nous sommes en train de construire sur lhébergement durgence - par exemple sagissant de ces femmes qui ont besoin dêtre protégées - mais aussi sur un certain nombre de dispositifs de protection même physique dont certaines ont besoin lorsque la menace est particulièrement forte de récidive de la part des auteurs. Cest ainsi que nous développons un système appelé en France « téléphone portable grand danger » remis aux femmes menacées de récidive de la part des auteurs de violences et qui permet à la police dêtre extrêmement efficace tant son intervention est rapide.
Voilà ce sur quoi nous travaillons.
Par ailleurs, nous avons également ouvert le chantier de la prévention. Cest un point essentiel lorsquon sintéresse aux violences faites aux femmes puisque la meilleure façon de lutter contre les violences est dempêcher quelles se produisent.
La prévention commence dès le plus jeune âge. Nous sommes en train dinstaurer dans les plus petites classes une éducation à légalité entre filles et garçons qui nexistait pas auparavant. Cest inédit en France. Nous sommes aussi en train de mettre en place en collège et lycée une éducation à la sexualité qui va permettre aux filles et aux garçons dappendre le respect, dapprendre la protection, la prévention et la contraception. Ce sont des sujets essentiels pour nous.
Nous allons également renforcer notre législation dans les prochaines semaines sur trois sujets. Le premier est la lutte contre la traite, qui concerne très souvent les femmes. Le deuxième est la lutte contre les mariages forcés. Nous avons déjà une législation importante mais nous constatons que nos compatriotes sont protégées lorsquelles sont sur les territoires français, mais quelles le sont moins lorsquelles sont emmenées à létranger. Or cest souvent à létranger quelles subissent un mariage forcé. Cest pourquoi nous allons introduire un nouveau délit dans le code pénal : le délit de tromperie, lorsquon emmène quelquun à létranger pour lui faire subir un mariage forcé.
Par ailleurs nous renforçons également notre droit sur la question de lexcision et des mutilations génitales. Nous allons là encore introduire un nouveau délit qui est le délit dincitation à subir des mutilations génitales. Notre droit était assez complet - la France sest caractérisée ces dernières décennies par de grands procès qui ont fait reculer les pratiques dexcisions, nous voulons aller encore plus loin à un moment où, au plan mondial, on prend conscience de la gravité de ces pratiques. Il faut donc que nous soyons absolument exemplaires.
Voilà pour ce qui est de notre politique nationale. La lutte contre les violences faites aux femmes est pour nous une priorité absolue. Nous estimons que tant que nous narriverons pas à mener cette lutte de façon efficace avec de véritables résultats, nous narriverons pas à instaurer légalité entre les hommes et les femmes, puisque les violences faites aux femmes sont à la fois à la racine et en même temps lune des conséquences les plus cruelles des inégalités entre les hommes et les femmes. Il faut donc utiliser tous les moyens (prévention, protection, punition) pour les combattre et les faire reculer.
Ce que la France est venue défendre ici est luniversalisme des droits. Le combat que nous menons au sein de notre territoire, nous estimons quil doit être mené partout dans le monde de la même façon, sans rien céder aux justifications que certains qualifieraient de culturelles, religieuses ou traditionnelles. Les violences sont des violences, quel que soit le pays, la société dans laquelle elles se produisent. Il faut donc les combattre partout avec le même acharnement. Cest le message que nous sommes venus porter ici : le principe dégalité entre les hommes et les femmes est un principe intangible qui doit valoir dans tous les pays, dans toutes les sociétés. Nous nacceptons aucune forme de relativisme culturel lorsquil sagit des droits des femmes et de leur protection.
Pour le reste, nous avons décidé dêtre très pro-actifs sur le sujet des droits de femmes. Nous avons développé ce que nous appelons une « diplomatie active des droits des femmes » à lextérieur de nos frontières. Ce qui nous a guidé, par exemple, dans lintervention au Mali était bien sur lurgence de la situation, la nécessité darrêter la progression des terroristes, lappel au secours des autorités maliennes mais aussi la volonté de défendre les droits de lHomme. Au sein de ces droits de lHomme ce qui était en particulier attaqué été les droits des femmes. Cest forts de cette conception des choses, guidés par ces valeurs, par ce souci de défendre les droits de lHomme partout où ils sont menacés, que nous sommes intervenus. Et nous continuerons à préparer à laprès-conflit puisque nous espérons participer à ce que la place des femmes dans la situation post-conflit soit à la hauteur de ce quelle doit être.
La question de la place des femmes dans les pays où lon a connu une révolution ou un conflit est une question majeure aujourdhui. On le voit au-delà du Mali avec, par exemple, ce qui sest passé dans les sociétés arabes qui ont connu des révolutions. Jai rencontré hier un certain nombre de femmes issues de ces sociétés. Alors même que ces révolutions ont été conduites avec laide, voire initiées parfois par les femmes elles-mêmes, celles-ci ont beaucoup de difficultés à trouver une place économique, politique, sociale dans laprès-révolution. La France est là pour soutenir la prise de participation réelle de ces femmes à la vie de leur société respective.
Cest pour cela que la France va organiser deux événements importants qui se tiendront à Paris. Le premier aura lieu le 20 mars prochain à loccasion de la journée de la Francophonie. Il sagit du tout premier Forum mondial des femmes francophones qui réunira 500 femmes de tous les pays de la francophonie, essentiellement des femmes actives dans les ONG, la société civile, avec lesquelles nous verrons comment rehausser le socle de protection qui doit leur être offert.
Puis nous organiserons un deuxième événement qui aura lieu les 3 et 4 juillet prochain à Paris. Il sagit de la troisième réunion ministérielle de lUnion pour la Méditerranée. Cette réunion de lUnion pour la Méditerranée sera consacrée au renforcement du rôle des femmes dans la société. Nous recevrons 43 ministres de lUnion pour la Méditerranée à Paris pour voir comment renforcer cette place des femmes. Il sera question de la place des femmes dans la vie politique, la vie économique, mais aussi de la lutte contre les violences puisque tout cela est lié.
Q : Sagissant du document final, est-ce que le groupe qui habituellement a une vue différente de celle de la majorité pourra à nouveau repousser les questions : le Vatican, lIran et la Russie aussi semble-t-il, et il y en a beaucoup dautres, quels seront les pouvoirs de ce document ? Deuxièmement, les femmes musulmanes en France qui sont victimes dabus vont-elles pouvoir signaler leur cas aux autorités ?
R : Clairement, lenjeu de cette Commission de la condition de la femme est de ne connaitre aucun recul sur la question des droits des femmes.
On a un certain nombre de textes, à commencer, par celui du Caire, les Objectifs du Millénaire pour le Développement ou encore Pékin, qui ont instauré un socle fondamental de droit des femmes. Il est extrêmement important que, quelles que soient les pressions des uns ou des autres, nous ne laissions place à aucun recul en la matière. Au contraire, nous cherchons à rehausser ce niveau de protection et de droits des femmes.
Quil y ait des pays qui soient hostiles à la position que je viens de défendre, cest une évidence, je crois que lune des façons dont nous pouvons faire progresser nos positions - que je qualifierais de progressistes - est de sappuyer sur un certain nombre de pays du Sud, par exemple, qui nous semblent porteurs de progrès.
Jai eu loccasion en parallèle de cette Commission de la condition de la femme, de rencontrer plusieurs homologues, par exemple, mes homologues dAfrique du Sud, de Turquie, du Maroc. Je verrai lEgypte et un certain nombre dautres, sur lesquels il nous faut nous appuyer, et avec lesquels il nous faut travailler de la façon la plus apaisée possible. Il ne sagit pas de monter les pays les uns contre les autres. Il faut veiller surtout à ne pas monter les régions du monde, les unes contre les autres. Je crois quil y a dans chaque région du monde des combattants de la liberté, des combattants des droits des femmes et quil faut nous appuyer sur les forces positives dans chacun de ces pays pour faire progresser cet enjeu.
Sagissant de votre deuxième question, oui les femmes, quelle que soit leur religion, seront en capacité de défendre leurs droits. Je prépare actuellement, en tant que ministre des Droits des femmes, un projet de loi qui sera présenté au Parlement en France au mois de mai prochain.
Ce projet de loi-cadre sur les droits des femmes abordera plusieurs dimensions. Jai décidé dy introduire la question du statut personnel des femmes. Aujourdhui, les droits personnels des femmes étrangères installées en France continuent à relever de leur pays dorigine. Cela signifie que souvent, elles sont soumises à une législation, en réalité, moins protectrice du droit des femmes que celle du pays où elles sont installées, la France.
Or, tout cela dépend de ce quon entend par statut personnel. Aujourdhui je pense quil nous est possible de faire en sorte, sagissant des droits des femmes, sagissant des égalités entre les hommes et les femmes, que nous la considérions comme une question dordre public qui justifie que sapplique le droit français et non pas le droit dorigine. Cest ce que nous allons introduire par la loi et ce qui permettra de mettre fin à des situations invraisemblables dans lesquelles des femmes dorigine étrangère continuaient à être soumises, pour des questions dhéritage par exemple ou dautorité parentale, à un droit dorigine beaucoup moins protecteur que le droit français. Nous allons mettre fin à cela, ce sera la réforme du statut personnel.
Q : Madame la ministre, une question sur les violences sexuelles que subissent les femmes dans les pays où il y a des missions de lONU et dont les Casques bleus sont responsables et qui demeurent le plus souvent impunis par ce quils disposent dimmunités diplomatiques, quen pensez-vous et comment pourrait-on y remédier ?
R : Cest un sujet éminemment grave, évidemment. LONU a fait un certain nombre de progrès en la matière, avec le Secrétaire général BAN Ki-moon, en envoyant un signal clair de tolérance zéro sur ce sujet. Cela ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés, mais je crois, en tout cas, que le message a été passé et quil y a eu un certain nombre de sanctions qui sont tombées.
Ce qui me semble important, cest quil faut toujours semployer, dans les résolutions de maintien de la paix de lONU, à indiquer limportance que nous accordons aux droits de lHomme et donc aux droits des femmes aussi. Cest ce que nous avons fait dans la résolution 2085 à propos de lintervention au Mali. Cest ce que nous soutiendrons dans la prochaine résolution visant à faire intervenir une opération de maintien de la paix de lONU sur le territoire malien. La France défendra à la fois la question des droits de lHomme, mais aussi lidée de déployer sur le terrain, je viens den discuter avec Madame Bangura - Secrétaire g??nérale adjointe et Représentante spéciale du Secrétaire général chargé de la question des violences sexuelles commises en période de conflit -, des conseillers de protection chargés spécifiquement du droit des femmes.
Nous savons quil y a une spécificité aux violences sexuelles commises, malheureusement par différents acteurs. Elles sont dautant plus graves quand elles sont commises, je suis daccord avec vous, par des forces de maintien de la paix. En tout cas il y a une réalité de la spécificité de ces violences sexuelles qui sont si difficiles à dénoncer, dont les preuves sont si difficiles à identifier et dont la reconstruction des personnes est un enjeu majeur. Cest la raison pour laquelle la France a décidé de soutenir dans une prochaine résolution lenvoi de forces de maintien de la paix de lONU au Mali et lidée de déployer des conseillers de protection en charge des droits des femmes.
Q : Pendant cette session de lONU, on entend beaucoup de discours, il y a beaucoup de tables rondes, je suis intéressé de savoir quel est, selon vous, lefficacité de ce genre de symposium onusien, quels résultats attendez-vous et plus largement, quattendez-vous de lONU et sur la question du droit des femmes ?
R : Je crois quil faut attendre beaucoup. Il faut être exigent et ambitieux à légard de lONU. Je trouve quil y a eu, ces dernières années, une certaine évolution. Jévoquais la présence de Madame Bangura tout à lheure : le fait même quune Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies existe sur la question des violences sexuelles commises dans les zones de conflit est une nouveauté. Si mes souvenirs sont bons, cela doit dater de 2008 ou 2009. Cela nexistait pas avant.
Cela signifie quil y a une prise de conscience au niveau onusien qui est très forte. Il sagit pour les pays de soutenir cette prise de conscience. Chaque pays soutiendra cela de façon différente. Vous avez vu linitiative britannique, par exemple, qui consiste à envoyer des experts dans les zones en conflit pour mieux aider à identifier les preuves des exactions sexuelles qui ont été commises. La France intervient, comme je viens de lexpliquer, avec cette idée de déployer des conseillers de protection.
Il est important que la communauté internationale envoie un message à la fois fort et ambitieux et quon ne se repose pas que sur les organisations régionales. Cela pourrait être la tentation, de dire finalement que cela doit se faire au niveau régional, quil y a un plus grand consensus sur ce quon entend par les droits des femmes à ce niveau, etc. Justement si on veut lutter contre le relativisme culturel, il est très important que ça se passe au niveau international. Après au niveau régional, nous pouvons aller plus loin. Regardez au niveau pan-européen avec la Convention dIstanbul, nous allons vraiment très loin. Cette convention est formidable et la France procédera à sa ratification très prochainement. Je crois que nous serons le cinquième pays à le faire. Il est évidemment très important que cette convention soit ratifiée par le plus de pays possible.
Au niveau régional nous pouvons aller encore plus loin, mais il est important au niveau mondial davoir un socle commun très protecteur. Il est important de faire du sujet des droits des femmes un sujet à part entière - ce qui na pas toujours été le cas - non pas un sujet périphérique, qui arrive à la fin.
Cela signifie, enfin, un sujet qui soit transversal et qui apparait dans tous les textes des Nations unies. Cest aussi le nouveau combat qui doit être conduit. Mais jai le sentiment que le Secrétaire général est assez sensible à cette question. Cela veut dire que dans tous les textes, sur les Objectifs du Millénaire du Développement qui vont être rediscutés, sur le développement durable, sur léconomie, tous les textes relatifs aux forces de maintien de la paix, nous veillons à une considération spécifique pour la place et le rôle des femmes.
Hier soir jai eu la chance de pouvoir discuter avec des activistes des pays arabes post-révolutions. Jai été impressionnée par leur connaissance de la résolution 1325, par exemple, sur la situation des femmes dans les zones en conflit. Il y a vraiment, de la part des ONG et de la société civile, une appropriation extraordinaire des outils onusiens, beaucoup plus importante que ce quon pourrait imaginer à première vue, et sans doute beaucoup plus importante dans les pays dans lesquels les droits sont les plus menacés parce que finalement cest le seul recours que ces femmes ont. Nous autres, pays et institutions, ne devons surtout pas minimiser limportance de ces outils qui sont si utiles à la société civile pour, y compris, se retourner contre son propre pouvoir lorsquil ne respecte pas ses droits.
Q : Je voudrais vous poser une question concernant les violences sexuelles en Syrie. Il sagit dune des principales violations contre les femmes et contre les jeunes filles, en Syrie ou dans les camps de réfugiés dans les pays voisins. Est-ce que vous pensez que lONU peut faire quelque chose pour protéger les femmes et les jeunes filles dans ces endroits, si ce nest pas possible en Syrie, au moins dans les camps de réfugiés des pays voisins ? Est-ce que la France appuie toute action qui serait menée par lONU, par lAssemblée générale pour protéger les femmes et les jeunes filles en Syrie ?
R : Vous avez raison, les violences sexuelles commises ne sont pas seulement en Syrie mais aussi dans les camps installés dans les pays voisins. Jen discutais encore hier pour ce qui est de la Jordanie, un certain nombre de ce type de violences est constaté dans les camps.
Nous soutenons toute intervention de lONU. Vous savez que la France est demandeuse dune intervention de lONU, y compris en Syrie, depuis longtemps et donc sil y a un moyen de contourner le véto de certains pays quant à cette intervention en Syrie et sattaquer à des problèmes graves, comme les violences sexuelles commises dans les camps des pays voisins, la France soutiendra.
Q : Limmense majorité des délégations présentes ici sont des femmes, limmense majorité des ministres présents ici sont également des femmes, quest ce que cela vous inspire, est ce que cela veut dire que les femmes défendent mieux les droits des femmes que les hommes ou que les hommes ne peuvent pas simpliquer dans la défense des droits des femmes ? La même chose pour lONU, les femmes à lONU ne font que défendre les droits des femmes, on parlait de la transversalité de la question des droits des femmes, il ny en a pas beaucoup au Conseil de sécurité, dés quon sort des problèmes de femmes il ny en a pas. Est-ce que les femmes sont là uniquement pour défendre les droits des femmes, il faudrait pousser pour quelles soient ailleurs ?
R : Votre question est justifiée. Hier je suis passée devant la file dattente de toutes les délégations qui attendaient pour avoir leurs badges daccès à lONU et il est vrai quelle était extrêmement féminine.
On aura fait un pas supplémentaire en matière de droits des femmes et de combats contre les violences le jour où on aura réussi à y intéresser totalement les hommes, les hommes dont cest lintérêt par ailleurs. Légalité homme-femme est un jeu gagnant-gagnant. Lidée nest pas de remplacer une domination masculine par une domination féminine. Lidée est de faire légalité.
Je suis daccord avec vous, aujourdhui on peut déplorer le faible nombre dhommes dans les conférences consacrées à ce sujet, mais il y en a quand même quelques uns, par exemple hier, dans le side event consacré à la Convention dIstanbul, le ministre des Affaires étrangères de la principauté dAndorre ou dautres. Il y avait un certain nombre dhommes qui sont intervenus et qui nen étaient pas moins de farouches défenseurs des droits des femmes et qui même ont mis une énergie dans leurs discours qui ma agréablement surprise.
Cela fait partie des représentations et des schémas que lon conforte encore aujourdhui. Lorsquun ministère des droits des femmes se crée, on a tendance à le confier plutôt à des femmes. Pour rien vous cacher, jai demandé au Président de la République de veiller à ce que mon successeur soit un homme. Je ne sais pas sil me suivra dans ce sens mais je trouve que, comme on dit en français, « ça aurait de la gueule » !
Q : Pour rebondir sur la question de la Syrie et des violences sexuelles, une question sur la République démocratique du Congo. La France contrôle le principal poste des opérations de maintien de la paix, jaimerais revenir sur ce qui sest passé en novembre : 126 femmes ont été violées à Minova. Hervé Ladsous a dit que lidentité des violeurs était connue. Cependant la mission de maintien de la paix de lONU ne veut pas arrêter de travailler avec les autorités de la RDC et ne veut pas faire diligence. Jaimerais savoir, du point de vue de la France, combien de temps représente un trop long délai avant de commencer à mener les enquêtes sur ces viols et à prendre des mesures sur ces viols ? Merci.
R : Jen ai discuté avec la Procureur de la Cour pénale internationale, MmeFatou Bensouda. Il y a une volonté très claire et affichée de la part de la CPI daider à lidentification et la détection de preuves matérielles des violences le plus tôt possible. Je suis daccord avec vous, le temps est notre ennemi en la matière. Dans cette volonté, la France soutient la CPI et laide à chaque fois que cela est possible, cas particulier par cas particulier. Vous avez tout à fait raison de dire que plus on attend et moins on a de chances de détecter les preuves utiles à la qualification des faits.
Q : Encore une question sur le Mali. Vous parlez de déployer des conseillers de protection. Pouvez-vous nous en dire plus : doù viendront-ils, quel sera leur nombre, quel sera leur mandat et seront-ils intégrés à cette opération du maintien de la paix ?
R : Pour le moment, cest une position que nous souhaitons défendre dans le cadre de la prochaine résolution. Il est donc un peu prématuré de parler des détails.
Nous évoquions avec Mme Bangura le fait quaujourdhui, il y a dabord une nécessité de faire parler les victimes. Trop souvent, les violences sexuelles qui sont commises le sont impunément, notamment parce que les victimes, de peur de briser leur vie, leur réputation, leur retour en famille ne parlent pas. Il sagit donc davoir sur place, ce seraient quelques-uns par pays, des conseillers de protection qui auront pour rôle daccompagner les victimes dans la dénonciation des faits et dans le retour à une vie la plus normale possible. Il sagit aussi daider la société civile sur place à organiser laprès-conflit, cest-à-dire lempowerment des femmes, la façon dont elles réussissent à se saisir de la nouvelle donne, de la reconstruction, de tout ce qui est contenu aujourdhui dans la résolution 1325 et qui doit être encore rendue efficace et mis en uvre. Pour le reste, je nai pas détails chiffrés à vous donner mais cest une idée, nous semble-t-il, qui mérite dêtre soutenue. Je vous remercie.
Source http://www.franceonu.org, le 6 mars 2013