Déclaration de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères, sur le protocole de coopération entre les ministères des affaires étrangères et de la justice en matière de lutte contre le terrorisme, à Paris le 13 mars 2013.

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Circonstance : Signature entre les ministères des affaires étrangères et de la justice d'un protocole de coopération, à Paris le 13 mars 2013

Texte intégral

Je voudrais vous dire le plaisir, pour moi, de vous recevoir dans cette maison avec Mme Taubira, ministre de la justice, pour signer un protocole de coopération. C'est une nouvelle avancée dans la coopération entre nos deux ministères sur un sujet sensible puisqu'il s'agit des actes de terrorisme à l'étranger qui touchent directement nos compatriotes. L'actualité récente et moins récente témoigne malheureusement du fait que ce danger est bien présent.
Ce protocole, d'un point de vue formel, est signé entre la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice et le centre de crise du ministère des affaires étrangères que nous venons de visiter avec Mme Taubira parce que ce sont eux qui, directement, sont confrontés à la gestion opérationnelle des conséquences d'actes de terrorisme commis à l'étranger et qui impliquent des victimes françaises. Ce protocole marque notre détermination à protéger les ressortissants français, les intérêts des ressortissants français victimes d'actes de terrorisme à l'étranger. Pourquoi cela ? Parce qu'il faut réagir très rapidement lorsque des circonstances de cette nature se produisent. Il faut réagir de manière juridiquement impeccable pour protéger nos compatriotes à l'étranger et apporter, lorsque malheureusement c'est nécessaire, l'accompagnement qui convient aux familles et aux proches des victimes. Certains ici savent dans leur chair et dans leur mémoire exactement de quoi il s'agit.
À cette fin, le protocole que nous signons vient renforcer les relations de travail entre le parquet de Paris, à qui la mise en oeuvre du protocole est confiée, et le centre de crise. Il prévoit notamment que la coopération soit la plus étroite possible au moment de l'enquête préliminaire ou de l'enquête de flagrance dans le respect du secret de l'enquête et des intérêts diplomatiques.
Ce protocole va permettre d'améliorer notre coordination dans le rapport aux victimes et aux familles, pour la communication, pour les opérations de rapatriement notamment. Le protocole dispose qu'en cas d'enquête judiciaire en France, des échanges d'informations assurent l'établissement de la liste clinique des victimes communiquée à la direction des affaires criminelles et des grâces ainsi qu'au service de l'accès aux droits et à la justice et de l'aide aux victimes. Tout cela paraît terriblement administratif mais il s'agit simplement de faire les choses le plus efficacement possible.
Ce protocole prévoit enfin en cas de crise liée à un acte terroriste à l'étranger, la mise à disposition temporaire d'un magistrat de la section de lutte anti-terroriste du parquet de Paris au centre de crise.
Le protocole formalise et consacre une coopération qui est déjà ancienne entre la section centrale de lutte anti-terroriste du parquet de Paris et le centre de crise. Il illustre la coopération que je crois tout à fait excellente entre nos deux maisons.
Les échanges dans les faits sont déjà très bien établis. Je tiens à souligner à ce titre le soutien très précieux de la section lors d'événements dramatiques que nous avons tous en mémoire. Je pense notamment - mais malheureusement il y en a d'autres - à deux exemples. Quelques jours après l'attentat de Marrakech qui a coûté la vie à huit de nos compatriotes en avril 2011, à cet endroit même, le chef de la section centrale de lutte anti-terroriste était avec le directeur de crise aux côtés de plusieurs dizaines de membres de familles endeuillées. Je veux également rappeler ici la coopération excellente entre le parquet de Paris et le centre de crise au moment de l'attaque terroriste récente du site d'In Amenas, attaque qui a coûté la vie à l'un de nos compatriotes, M. Desjeux, à qui je veux bien sûr aussi rendre hommage.
Il y a d'autres sujets qui concernent conjointement nos deux ministères. À côté du terrorisme, nos compatriotes peuvent aussi, à l'étranger, être victimes de faits criminels. Il nous revient aussi de leur apporter l'appui et le soutien nécessaire. Il existe et nous en parlions, il y a quelques instants dans mon bureau, avec Christiane Taubira, 200 à 250 cas de disparitions inquiétantes pour lesquels nous sommes souvent sollicités par les familles en France qui se trouvent sans nouvelle de membres de leur famille ou de leurs proches.
L'entraide judiciaire est un autre sujet que nous avons en commun dans ce monde qui est ouvert à la mobilité des personnes mais aussi à la mobilité de la criminalité si on peut dire : cette entraide judiciaire est décisive. Nos ambassades y apportent leur concours en assurant la sécurisation de la transmission et du contrôle de l'exécution des demandes d'entraide. Sur tous ces sujets, notre souhait est de continuer à travailler excellemment ensemble afin d'apporter aux Français, le service qui le plus efficace possible surtout lorsqu'ils se trouvent dans des situations difficiles. C'est notre souci constant, à la fois parce que c'est la tâche de nos administrations et parce que c'est une certaine conception que Mme Taubira et moi-même partageons sur le plan philosophique.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 mars 2013