Déclaration de M. Pascal Canfin, ministre du développement, sur la politique de migration et développement, à Paris le 22 février 2013.

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Circonstance : Table ronde des Assises du développement et de la solidarité internationale, à Paris le 22 février 2013

Texte intégral


Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux d’être parmi vous aujourd’hui, pour cette table ronde consacrée à la thématique de la migration internationale et du développement. Vous avez souhaité que cette thématique soit spécifiquement abordée lors d’une session des assises et je suis heureux de vous voir nombreux présents pour discuter de ces questions, vous qui traitez de cette problématique dans toute sa diversité.
Depuis trop longtemps, ce débat a été instrumentalisé par une partie de la classe politique. Nous savons dans quel objectif.
C’est pourquoi, je souhaite vous dire très clairement dès le début de mon intervention que ce gouvernement a rompu avec la logique qui liait développement et contrôle des flux migratoires.
Cette logique était aussi moralement problématique que fausse sur le plan factuel. Le lien entre développement des territoires et migrations n’est pas mécanique.
Il y a bien lieu de se réjouir de cette volonté de mobilité. La mobilité est une aspiration légitime pour tout individu. Le droit de vivre dans des conditions décentes dans son pays d’origine l’est tout autant
Je constate ainsi que plus les pays se développent, plus ils engendrent des migrations, comme l’attestent les pays dits « à revenu intermédiaires » (Chine, Brésil, Inde) qui enregistrent des hausses régulières de leurs migrants. Mais les migrations sud-nord ne doivent pas nous faire oublier que la réalité migratoire se compose aussi d’autant de flux nord-nord et on l’oublie souvent sud-sud.
Il y a aujourd’hui en France une politique migratoire, elle est de la responsabilité du ministre de l’intérieur Manuel Valls. Vous connaissez au sein de notre majorité les différences de sensibilités qui existent sur ces questions, je n’y reviendrai pas.
Il y a maintenant, à côté et j’insiste bien ces deux politiques ne sont plus liées, une politique de développement qui prend en compte les migrations et le rôle des migrants. Elle est de ma responsabilité en tant que ministre chargé du développement auprès du ministre des affaires étrangères Laurent Fabius. Les politiques de « co-développement » ont été pleinement réintégrées dans le champ du Ministère des Affaires étrangères. L’ancien programme 301 « développement solidaire et migrations », géré au ministère de l’Immigration puis de l’intérieur, est maintenant dissout et la composante « développement » de ce programme a rejoint au premier janvier 2013 le champ du ministère des affaires étrangères, au sein du programme 209 « aide au développement » que vous connaissez bien.
Le débat d’aujourd’hui, j’entends donc le placer dans cette nouvelle logique.
Qui dit nouvelle logique, dit aussi nouvelle approche. C’est pourquoi, la démarche de concertation est capitale sur ce sujet en particulier. Je tiens à ce que l’ensemble des acteurs de la société civile intéressés par cette thématique migration et développement soit associé à la politique que j’entends mener.
Cette nouvelle approche implique de tenir compte des nouvelles réalités de la migration. En 2010, le monde comptait 214 millions de migrants, soit environ 3 % de la population mondiale. Les flux migratoires sont aujourd’hui plus féminins, plus qualifiés et ils se dirigent vers un plus grand nombre de pays. De nombreux migrants sont à la fois enracinés dans les pays de destination mais également mieux connectés avec leur pays d’origine, en raison des facilités de transport et des nouveaux outils de communication. Il s’agit donc de raisonner autant en terme de mobilité et d’interdépendance que de migration au sens strict du terme.
Cette nouvelle politique, dite de migration et développement, ne se limite donc pas à la seule mobilisation des migrants. Elle vise plus largement à renforcer la contribution de la migration, sous toutes ses formes, au développement, à construire une mobilité qui soit bénéfique à tous. Ce gouvernement l’a compris. C’est pourquoi une des premières mesures du quinquennat a été d’abroger la circulaire Guéant sur les étudiants étrangers.
Cette nouvelle politique comprend toutes les actions visant à renforcer les liens entre migration et développement, notamment les capacités des Etats et institutions publiques à mieux interagir avec les diasporas, à encourager les investissements, à reconnaître les capacités sociales des migrants sur le double espace. Elle vise aussi, logiquement, à intégrer l’ensemble des acteurs : les associations de migrants, les ONG qui interviennent dans le champ de la migration comme les collectivités territoriales.
En tout premier lieu bien sûr, je me dois de mentionner la contribution des associations de migrants au développement. Les nombreux projets soutenus ces dernières années avec les associations qui mobilisent les diasporas témoignent, qu’en matière de développement local notamment, elles ont une véritable capacité à intervenir de façon coordonnée avec les autorités locales et les autres acteurs du développement en faveur de secteurs aussi importants que l’éducation, la santé, l’accès à l’eau et à l’assainissement, pour n’en citer que quelques uns.
La France est un grand pays de bi nationalité…
Vous savez maintenant quelle est notre philosophie. Je n’irai pas plus loin aujourd’hui car si je suis présent ici ce matin c’est avant tout pour vous écouter. J’en suis convaincu, cette politique est profondément liée aux acteurs qui la portent, c’est-à-dire vous. Je compte sur vous pour écrire cette nouvelle histoire, une histoire qui rapproche le nord et le sud, qui construit des ponts et non des murs.
Je vous remercie.
Source http://www.pascalcanfin.fr, le 15 mai 2013