Déclaration de Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, sur l'architecture, l'enseignement et la formation dans les écoles d'architectes, Strasbourg le 20 septembre 2013.

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Circonstance : Inauguration du bâtiment de l'école nationale supérieure d'architecture de Strasbourg le 20 septembre 2013

Texte intégral


La France a besoin des architectes.
"L'architecture est la volonté de l'époque transformée dans l'espace » disait Mies Van der Rohe.
Elle au coeur de notre vie quotidienne, au plus près des préoccupations de nos concitoyens. Elle doit être attentive aux usages et aux espaces. Elle agit directement sur notre cadre de vie pour en assurer la qualité. Son impact sur les enjeux de logement et d’aménagement du territoire est considérable. Elle est au coeur des problématiques de développement durable et de la transition écologique. C’est par elle que passe la réalisation matérielle d’un « vivre ensemble » plus juste et plus harmonieux. Les architectes ont donc une responsabilité essentielle.
Je tiens aussi à le dire : nous tous comme citoyens, comme élus, comme décideurs publics, comme entrepreneurs, avons aussi une responsabilité importante en tant que maîtres d’ouvrage. Celle de faire appel aux architectes pour inventer nos villes de demain et nos espaces de vie quotidiens, au travail comme à la maison.
L’architecture, c’est aussi le signe d’une certaine excellence française. L’expertise et la créativité de nos plus grands architectes contribuent au rayonnement, de notre pays à travers le monde.
Je félicite Marc Mimram à qui le Prix Aga Khan vient d’être remis. C’est une très belle consécration internationale d’un architecte français, de l’architecture française.
Je remercie Marc Barani de nous faire le plaisir de sa présence. Marc Barani, à qui j’ai remis le Grand Prix National de l’Architecture.
Il y a dans vos bâtiments et vos constructions ce qui fait la force de l’architecture française qui s’est toujours construite sous le double signe de l’exigence et de l’innovation, sans jamais oublier l’élégance.
La formation de nos futurs architectes est donc capitale. C’est une responsabilité du ministère de la Culture et de la Communication. C’est là que commence son engagement en faveur de l’architecture.
Alors que nous inaugurons le nouveau bâtiment de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Strasbourg, je voudrais rappeler mon engagement aux côtés de du réseau des écoles d’architecture et vous présenter la feuille de route que je lui propose.
Avant toute chose, je voudrais saluer le remarquable travail de Marc Mimram qui vient de nous présenter cette réalisation. Je tiens à remercier chaleureusement toute son équipe ainsi que les personnels, les enseignants et les étudiants de l’école. Je veux également souligner toutes les énergies qui se sont mobilisées. Je pense en particulier aux collectivités territoriales qui ont bien voulu soutenir ce projet, la Région Alsace, le Conseil général du Bas-Rhin et la Ville de Strasbourg.
Cette extension est emblématique à bien des égards :
- d’abord parce qu’elle permet de créer des conditions de travail idéales pour les étudiants. C’est un facteur essentiel de leur réussite.
- ensuite, par son ouverture sur la ville et le public, elle inscrit l’école au coeur de la Cité.
- enfin, elle s’inscrit dans une démarche d’aménagement durable extrêmement innovante, en associant la géothermie et la ventilation naturelle.
En favorisant les conditions de formation de ses étudiants, ce projet a su répondre aux enjeux les plus contemporains. Il est, à ce titre, exemplaire. C’est cette même volonté qui a amené votre école à anticiper certains des objectifs fixés par la concertation nationale sur les écoles d’architecture que j’ai lancée, à travers notamment son rapprochement avec l’université de Strasbourg. Mais aussi en développant son partenariat avec les facultés de Karsruhe et de Dresde, ce qui lui permet d’offrir un double-cursus à ses étudiants.
C’est un exemple dont peuvent s’inspirer toutes les autres écoles de ce réseau. Elles auront beaucoup à gagner en prenant une part active dans le nouveau dispositif des « communautés d’universités et d’établissements » prévu par la loi Fioraso sur l’enseignement supérieur et la recherche. Je les engage également à amplifier leur inscription internationale, tant dans la perspective de favoriser leur attractivité que dans celle de donner aux étudiants l’ouverture indispensable à l’exercice de leur métier.
L’école d’architecture de Strasbourg a été pionnière dans son positionnement au sein du nouveau paysage de l’enseignement supérieur. Alors qu’elle fait aujourd’hui peau neuve, c’est très logiquement que je souhaite vous faire part de la feuille de route que je propose pour l’enseignement et la recherche en architecture.
Vous le savez, puisque vous y avez participé activement, la concertation nationale nous a mobilisés toute l’année dernière. C’était essentiel parce que la recomposition de l’enseignement supérieur ne pouvait se faire sans vous. A partir des nombreuses contributions nourries par les débats, Vincent Feltesse m’a remis en avril dernier un rapport comportant dix propositions principales. C’est autour de leurs trois axes structurants, l’évolution de la gouvernance des écoles, l’évolution du statut des enseignants et les évolutions liées à la pédagogie et à la vie étudiante, que j’ai choisi d’orienter mon action.
Une feuille de route est maintenant tracée. Certains objectifs sont déjà atteints, d’autres le seront bientôt.
La tutelle conjointe avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche est désormais inscrite dans la loi.
Chaque école d’architecture disposera ainsi du cadre juridique adapté pour intensifier ses partenariats avec les universités et les autres grandes écoles tout en gardant son identité. C’est indispensable car nos écoles, par la singularité de leur approche pédagogique et de leur formation, par la qualité des débouchés qu’elles offrent à leurs diplômés, par leur capacité à développer une recherche de premier plan, ont beaucoup à apporter à ces partenariats.
Cette tutelle conjointe devrait se concrétiser par l’entrée des deux ministères de l’enseignement supérieur et de la recherche et de la culture dans les CA des écoles. En outre, nos deux ministères accréditeront conjointement les formations pour une meilleure reconnaissance et une plus grande visibilité des diplômes.
Plusieurs chantiers sont en cours, ils seront mis en oeuvre prochainement :
- l’évolution du mode de recrutement des étudiants ;
- l’introduction d’un mandat précis dans le temps et d’une lettre de mission pour les directeurs d’écoles ;
- l’évolution du statut des écoles vers un statut plus adapté à des établissements académiques.
Parmi ceux-ci, je voudrais insister sur la mise en place d’une relation contractuelle avec les écoles pour répondre à leur souhait d’une plus grande autonomie : cette relation nouvelle impliquera de définir conjointement des objectifs, n’excluant en aucun cas la nécessité de rendre des comptes…
L’évolution du statut des enseignants a été, au cours de la concertation, une des principales revendications des écoles d’architecture. Je sais que les attentes sont très fortes. Je me suis engagée à y répondre.
L’évolution du concours de recrutement des enseignants est d’ores et déjà acquise.
En outre, 30 postes ont été obtenus au budget 2013 et alloués aux écoles Cela permettra aux enseignants engagés dans une activité de recherche de disposer du temps nécessaire à l’avancement de leurs travaux. 20 contrats doctoraux ont été attribués. La recherche en architecture se trouve ainsi considérablement renforcée. C’est indispensable pour encourager l’excellence et l’innovation qui caractérisent la discipline en France.
L’adaptation du statut des enseignants engagés dans la recherche fera l’objet d’une mission conjointe de l’Inspection général des affaires culturelles et de l’IGAENR (inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche) d’ici fin 2013. Nous souhaitons, avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche qu’elle aboutisse en 2014 sur des avancées concrètes, y compris en termes d’emplois.
C’est une nouvelle page de l’histoire de nos écoles que nous sommes en train d‘écrire. Alors que nous sommes à une étape clef de la relation historique qui lie mon ministère et vos écoles, je veux affirmer mon engagement : j’ai mis en place 5 millions d’euros et les supports d’emplois nécessaires sur le budget 2014 pour financer l’amélioration des conditions d’emploi des personnels contractuels et mettre fin à la précarité de la situation de nombreux enseignants.
Après Strasbourg, l’école de Clermont-Ferrand, dont le chantier est en cours, sera la prochaine inaugurée. J’ai le plaisir de vous annoncer que j’ai décidé qu’une nouvelle école serait construite à Marseille au sein de l’Institut méditerranéen de la ville et des territoires. Pour les années suivantes, je demande l’étude de projets pour Paris la Villette, Toulouse et Bordeaux.
C’est par là aussi que commence la priorité faite à la formation de la jeunesse, en particulier celle de nos futurs architectes. C’est à eux que je voudrais m’adresser pour conclure.
A vous tous, étudiantes et étudiants, je veux dire, à la manière de Rilke s’adressant à un jeune poète, que ce métier que vous êtes appelés à exercer représente pour vous une chance inouïe : celle d’ «intervenir sur la vie des hommes ». C’est pour cela que vous êtes formés. C’est à cela que vous vous engagez : agir sur la qualité de notre cadre de vie et créer du mieux vivre ensemble. C’est une grande responsabilité, mon ministère veut vous donner les moyens de l’assumer.
Je vous remercie.
Source http://www.culturecommunication.gouv.fr, le 2 octobre 2013