Texte intégral
Q - L'assassinat de nos deux confrères au Nord-Mali a montré que le pays était loin d'être sécurisé. On y reviendra mais d'abord le point de l'enquête : est-ce qu'on sait aujourd'hui qui a assassiné nos confrères ?
R - Ce crime dont ont été victimes Ghislaine Dupont et Claude Verlon ne doit pas rester impuni. Cet assassinat a des auteurs. Ils doivent être retrouvés et ils doivent être jugés.
Q - Est-ce qu'aujourd'hui on les connaît ?
R - Aujourd'hui l'enquête judiciaire est en cours. Elle se développe au Mali de manière rapide, avec le soutien des forces françaises présentes, avec le soutien des forces de police qui ont été diligentées sur place, avec aussi l'assistance des forces maliennes pour regrouper toutes les informations nécessaires afin d'identifier les coupables, afin en plus qu'ils soient jugés car le président de la République souhaite qu'on aille vite et que ce crime ne reste pas impuni.
Q - On parle aujourd'hui d'un commanditaire, un commanditaire qui serait un certain Abdelkrim le Touareg. Vous confirmez ?
R - Le crime a été revendiqué. Il a été revendiqué par AQMI. Il y a aujourd'hui plusieurs groupes au Mali mais aussi au Niger et dans la zone du Sahel qui se réclament d'AQMI. Même si ces forces terroristes ont été sérieusement éradiquées par l'intervention militaire, il en reste quelques-uns qui se regroupent ; vous avez cité Abdelkrim le Touareg mais il y en a d'autres. En tout cas, les efforts qui sont menés actuellement permettront rapidement, j'en suis sûr, à l'identification des coupables.
Q - Mais est-ce qu'on sait pourquoi nos confrères ont été assassinés ?
R - Il n'y a aucun mobile affiché. AQMI n'affiche jamais ses mobiles ; simplement la lutte globale pour le djihadisme généralisé. Il se trouve que ces deux journalistes étaient deux journalistes compétents, d'une radio, Radio France Internationale, qui est très écouté en Afrique. Il y a un aspect symbolique à cet assassinat ; c'est la raison pour laquelle il faut qu'ils soient punis.
Q - On a parlé d'une panne de voiture qui aurait obligé les ravisseurs à assassiner...
R - Oui, il y a des éléments que nous connaissons. Cette panne de voiture, l'itinéraire du pick-up, tout cela fait partie des éléments de l'enquête et ce sera aux policiers d'identifier les coupables et la manière dont cela s'est passé.
Q - Mais pour le moment, on ne sait pas encore vraiment ce qui s'est passé.
R - Pour l'instant, il y a beaucoup de gens qui parlent, qui ne savent pas et il y a beaucoup de gens qui savent et qui ne disent pas. C'est donc le rôle de la procédure judiciaire d'identifier tout cela.
Q - On parlait de la pacification du Mali, elle est loin d'être réalisée. Cela veut dire que l'armée française va rester encore longtemps au Mali ?
R - Il faut reprendre toute l'histoire. Au mois de janvier dernier, ce pays était menacé de destruction. Si nous sommes allés au Mali, c'est pour quatre raisons.
La première : il fallait arrêter la progression des djihadistes vers le sud, sinon le Mali aujourd'hui serait un État terroriste. Cela a été fait.
Il fallait ensuite aboutir à la destruction des bases logistiques des groupes djihadistes sur l'ensemble du territoire du Mali. Cela a été fait. Nous avons retrouvé plus de deux cent cinquante tonnes de matériel militaire qui était destiné pas uniquement au Mali, mais aussi à des interventions potentielles à l'extérieur, y compris en Europe. Cela a été fait. Aujourd'hui à Gao, à Tombouctou, les Maliens vivent libres.
Et puis, il fallait aussi faire en sorte que le Mali retrouve des éléments de souveraineté, qu'il y ait des élections.
Il y a eu des élections et il y a aujourd'hui une souveraineté malienne retrouvée, avec un président de la République qui a été élu avec un score important, avec surtout une participation électorale jamais connue au Mali. Et puis maintenant, dans quelques jours, il va y avoir le premier tour des élections législatives. Ce qui fait que le Mali va retrouver sa légitimité démocratique et les voies de son développement.
Quatrièmement, il faut assurer la permanence de la sécurité du Mali sur le moyen terme. Cela se fera à terme par les forces maliennes qui sont en cours de reconstitution, même si c'est long, et cela se fera aussi par la présence au Mali des forces des Nations unies.
Il faut assurer une capacité de contre-terrorisme pour éviter le retour des troupes djihadistes et appuyer, assister les forces maliennes et les forces des Nations unies. C'est pourquoi il restera au Mali des forces françaises en nombres significatifs le temps qu'il faudra. Il n'y a pas de date butoir.
Q - Ce sera un retrait progressif ?
R - Il y a un retrait progressif. Aujourd'hui nous sommes à peu près trois mille. Nous allons progressivement descendre ce chiffre. Nous restons un nombre significatif pendant la période électorale, parce qu'il faut que les élections législatives qui sont très prochaines se déroulent normalement. Et puis, au début de l'année prochaine, nous resterons à mille militaires vraisemblablement dans la boucle du Niger, autour de Gao, pour éventuellement répondre à des demandes d'intervention, contribuer à sécuriser définitivement ce pays. Nous sommes sortis de la guerre, et nous sommes maintenant dans une logique de contre-terrorisme avec un pays qui a retrouvé sa liberté. Je suis allé plusieurs fois au Mali les temps derniers et on vit libre aujourd'hui au Mali, même s'il reste quelques poches sur lesquelles il faut attirer l'attention et être vigilant pour éviter tout retour.
Q - Il y a un autre pays qui est au bord de l'explosion : c'est la Centrafrique. Est-ce que la France, là aussi, va intervenir ?
R - C'est une situation très différente de celle du Mali. Il n'y a pas en Centrafrique une volonté terroriste d'occuper un territoire. La difficulté de ce pays, c'est que c'est devenu un non-État, sans aucune autorité, avec des coups d'État successifs et aujourd'hui un pays qui est à feu et à sang parce qu'il y a des groupes organisés, des bandes qui sont en train de mettre ce pays à feu et à sang et qui, aujourd'hui, ne permettent pas à la République Centrafricaine de trouver une légitimité.
La France est déjà présente. Nous avons quatre cents militaires présents à l'aéroport de Bangui qui assurent le seul lien qui reste aujourd'hui entre ce pays et le monde.
Il faudra sans doute faire davantage. Le président de la République a demandé aux Nations unies qu'il y ait un mandat pour que les forces africaines qui existent aujourd'hui - la MISCA - puissent intervenir prochainement, dès que le mandat sera donné par les Nations unies. Ce mandat, dès qu'il sera validé par le Conseil de sécurité, sera appuyé par les forces françaises qui accompagneront les forces africaines pour retrouver la sérénité.
C'est indispensable parce que c'est aussi notre propre sécurité qui est en jeu. Autour de la République Centrafricaine, il y a trois zones à risques : la zone du Congo des Grands lacs, la zone de la Corne d'Afrique et le Sahel. Trois zones à risques avec un pays au centre qui est aujourd'hui en situation de non-État. Il faut donc retrouver là une forme de sécurité et les voies de la démocratie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 novembre 2013
R - Ce crime dont ont été victimes Ghislaine Dupont et Claude Verlon ne doit pas rester impuni. Cet assassinat a des auteurs. Ils doivent être retrouvés et ils doivent être jugés.
Q - Est-ce qu'aujourd'hui on les connaît ?
R - Aujourd'hui l'enquête judiciaire est en cours. Elle se développe au Mali de manière rapide, avec le soutien des forces françaises présentes, avec le soutien des forces de police qui ont été diligentées sur place, avec aussi l'assistance des forces maliennes pour regrouper toutes les informations nécessaires afin d'identifier les coupables, afin en plus qu'ils soient jugés car le président de la République souhaite qu'on aille vite et que ce crime ne reste pas impuni.
Q - On parle aujourd'hui d'un commanditaire, un commanditaire qui serait un certain Abdelkrim le Touareg. Vous confirmez ?
R - Le crime a été revendiqué. Il a été revendiqué par AQMI. Il y a aujourd'hui plusieurs groupes au Mali mais aussi au Niger et dans la zone du Sahel qui se réclament d'AQMI. Même si ces forces terroristes ont été sérieusement éradiquées par l'intervention militaire, il en reste quelques-uns qui se regroupent ; vous avez cité Abdelkrim le Touareg mais il y en a d'autres. En tout cas, les efforts qui sont menés actuellement permettront rapidement, j'en suis sûr, à l'identification des coupables.
Q - Mais est-ce qu'on sait pourquoi nos confrères ont été assassinés ?
R - Il n'y a aucun mobile affiché. AQMI n'affiche jamais ses mobiles ; simplement la lutte globale pour le djihadisme généralisé. Il se trouve que ces deux journalistes étaient deux journalistes compétents, d'une radio, Radio France Internationale, qui est très écouté en Afrique. Il y a un aspect symbolique à cet assassinat ; c'est la raison pour laquelle il faut qu'ils soient punis.
Q - On a parlé d'une panne de voiture qui aurait obligé les ravisseurs à assassiner...
R - Oui, il y a des éléments que nous connaissons. Cette panne de voiture, l'itinéraire du pick-up, tout cela fait partie des éléments de l'enquête et ce sera aux policiers d'identifier les coupables et la manière dont cela s'est passé.
Q - Mais pour le moment, on ne sait pas encore vraiment ce qui s'est passé.
R - Pour l'instant, il y a beaucoup de gens qui parlent, qui ne savent pas et il y a beaucoup de gens qui savent et qui ne disent pas. C'est donc le rôle de la procédure judiciaire d'identifier tout cela.
Q - On parlait de la pacification du Mali, elle est loin d'être réalisée. Cela veut dire que l'armée française va rester encore longtemps au Mali ?
R - Il faut reprendre toute l'histoire. Au mois de janvier dernier, ce pays était menacé de destruction. Si nous sommes allés au Mali, c'est pour quatre raisons.
La première : il fallait arrêter la progression des djihadistes vers le sud, sinon le Mali aujourd'hui serait un État terroriste. Cela a été fait.
Il fallait ensuite aboutir à la destruction des bases logistiques des groupes djihadistes sur l'ensemble du territoire du Mali. Cela a été fait. Nous avons retrouvé plus de deux cent cinquante tonnes de matériel militaire qui était destiné pas uniquement au Mali, mais aussi à des interventions potentielles à l'extérieur, y compris en Europe. Cela a été fait. Aujourd'hui à Gao, à Tombouctou, les Maliens vivent libres.
Et puis, il fallait aussi faire en sorte que le Mali retrouve des éléments de souveraineté, qu'il y ait des élections.
Il y a eu des élections et il y a aujourd'hui une souveraineté malienne retrouvée, avec un président de la République qui a été élu avec un score important, avec surtout une participation électorale jamais connue au Mali. Et puis maintenant, dans quelques jours, il va y avoir le premier tour des élections législatives. Ce qui fait que le Mali va retrouver sa légitimité démocratique et les voies de son développement.
Quatrièmement, il faut assurer la permanence de la sécurité du Mali sur le moyen terme. Cela se fera à terme par les forces maliennes qui sont en cours de reconstitution, même si c'est long, et cela se fera aussi par la présence au Mali des forces des Nations unies.
Il faut assurer une capacité de contre-terrorisme pour éviter le retour des troupes djihadistes et appuyer, assister les forces maliennes et les forces des Nations unies. C'est pourquoi il restera au Mali des forces françaises en nombres significatifs le temps qu'il faudra. Il n'y a pas de date butoir.
Q - Ce sera un retrait progressif ?
R - Il y a un retrait progressif. Aujourd'hui nous sommes à peu près trois mille. Nous allons progressivement descendre ce chiffre. Nous restons un nombre significatif pendant la période électorale, parce qu'il faut que les élections législatives qui sont très prochaines se déroulent normalement. Et puis, au début de l'année prochaine, nous resterons à mille militaires vraisemblablement dans la boucle du Niger, autour de Gao, pour éventuellement répondre à des demandes d'intervention, contribuer à sécuriser définitivement ce pays. Nous sommes sortis de la guerre, et nous sommes maintenant dans une logique de contre-terrorisme avec un pays qui a retrouvé sa liberté. Je suis allé plusieurs fois au Mali les temps derniers et on vit libre aujourd'hui au Mali, même s'il reste quelques poches sur lesquelles il faut attirer l'attention et être vigilant pour éviter tout retour.
Q - Il y a un autre pays qui est au bord de l'explosion : c'est la Centrafrique. Est-ce que la France, là aussi, va intervenir ?
R - C'est une situation très différente de celle du Mali. Il n'y a pas en Centrafrique une volonté terroriste d'occuper un territoire. La difficulté de ce pays, c'est que c'est devenu un non-État, sans aucune autorité, avec des coups d'État successifs et aujourd'hui un pays qui est à feu et à sang parce qu'il y a des groupes organisés, des bandes qui sont en train de mettre ce pays à feu et à sang et qui, aujourd'hui, ne permettent pas à la République Centrafricaine de trouver une légitimité.
La France est déjà présente. Nous avons quatre cents militaires présents à l'aéroport de Bangui qui assurent le seul lien qui reste aujourd'hui entre ce pays et le monde.
Il faudra sans doute faire davantage. Le président de la République a demandé aux Nations unies qu'il y ait un mandat pour que les forces africaines qui existent aujourd'hui - la MISCA - puissent intervenir prochainement, dès que le mandat sera donné par les Nations unies. Ce mandat, dès qu'il sera validé par le Conseil de sécurité, sera appuyé par les forces françaises qui accompagneront les forces africaines pour retrouver la sérénité.
C'est indispensable parce que c'est aussi notre propre sécurité qui est en jeu. Autour de la République Centrafricaine, il y a trois zones à risques : la zone du Congo des Grands lacs, la zone de la Corne d'Afrique et le Sahel. Trois zones à risques avec un pays au centre qui est aujourd'hui en situation de non-État. Il faut donc retrouver là une forme de sécurité et les voies de la démocratie.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 novembre 2013