Texte intégral
Interview dans "Le Journal du dimanche" :
Q - Quel message voulez-vous faire passer à travers ce forum ?
R - Je voudrais montrer que l'Europe n'est pas une affaire confinée, confisquée par les politiques, les experts ou les technocrates. Elle est un objet démocratique, citoyen, dont chacun doit s'emparer aujourd'hui. Il faut que tous les citoyens disent aujourd'hui ce qu'ils attendent de l'Europe, l'idée qu'ils en ont, les craintes et les espoirs qu'elle leur inspire.
Q - Comment expliquer que personne n'y comprenne plus rien ?
R - Cette entreprise originale de 15 pays mettant volontairement en commun une partie de leur souveraineté ne peut pas être simple à expliquer. Et on n'en parle pas assez. La place de l'Europe dans le débat public, dans la presse, est insuffisante.
Q - Mais pourquoi une aventure aussi originale trouve-t-elle si peu d'écho ?
R - Parce que l'Europe ne fait pas vendre ! Ce qui est complexe se prête mal à une présentation trop rapide. Le travail de pédagogie est difficile, on n'arrive pas à faire comprendre qu'il s'agit d'un ensemble pour la paix, pour la cohésion économique, sociale. En 1957 (signature du traité de Rome), l'agriculture française n'était pas autosuffisante, avec la PAC (Politique agricole commune), nous sommes devenus le deuxième exportateur mondial. Les régions n'auraient pas surmonté les crises successives de la sidérurgie, du textile, de l'automobile sans les fonds structurels. Il n'y a pas une faculté, pas un pont, pas un viaduc en France qui ne reçoive des aides de Bruxelles.
Q - Les dirigeants politiques ne sont-ils pas responsables de la confusion ? Vous dites vous-même que lorsque Chirac et Jospin prônent une Europe "Fédération d'Etats-nations" ils ne parlent pas en fait de la même chose !
R - Il y a un déficit de dialogue oui. Et les débats qui, dans nos régions, vont donner la parole à chacun sont faits pour y remédier. Ces débats doivent être très libres, sans vérités assenées d'en haut sans formules académiques ou fourre-tout. Toutes les catégories de population doivent s'exprimer : citoyens élus, associations, forces sociales, économiques et intellectuelles. Je dis à tous : l'Europe, c'est votre affaire, l'Europe c'est vous ! L'échange est plus propice que la propagande. Lors du référendum de Maastricht, on a eu tort de faire campagne sur le thème "Ceux qui sont contre sont des imbéciles".
Q - Vous voulez un grand déballage ?
R - Cette forme de démocratie directe est nécessaire ; aujourd'hui l'Europe est à la croisée des chemins. C'est un moment exaltant, difficile aussi : l'élargissement, de 15 à 27 pays, est pour demain. On tâtonne de traité en traité pour donner une forme plus politique à la construction économique qu'a d'abord été l'Union, mais il nous faut savoir jusqu'où les populations sont prêtes à aller dans les transferts de souveraineté. Qu'attendent-elles, par exemple, en matière de santé publique, d'éducation d'équivalence de diplôme, etc. ? Le pacte démocratique européen a besoin d'être refondé. Ce débat sera un bol d'oxygène pour tout le monde. L'alternative au débat, c'est la dilution de la construction européenne.
Q - Quand cette bataille de l'opinion sera-t-elle gagnée ?
R - Quand une Constitution européenne aura été adoptée par référendum.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 juillet 2001)
Interview à Ouest-France :
Q - Avez-vous une idée des sujets forts qui seront débattus ?
R - On sent des tendances. Mais il faut être prudent ; les gens qui viennent à ces réunions ne représentent pas forcément toute l'opinion. Les participants aux matinées "Europe en Pays de la Loire" sont très pro-européens. L'élargissement ne leur pose pas problème. Il y a des questions sur la gouvernance de l'Europe : Comment décide-t-on ? Comment faire en sorte que l'Europe soit plus démocratique, plus lisible, plus transparente, plus accessible, plus efficace ? Les fonds structurels intéressent les élus, la Politique agricole commune les agriculteurs. En dehors des cercles concernés, la demande d'Europe touche à des sujets concrets : échanges d'étudiants, bourses, éducation, recherche, investissements dans l'avenir. Tout cela interpelle l'Europe : comment soutenir les politiques communes existantes en étant capable de répondre à davantage de catégories de la population ?
Q - Les préfets sont-ils les mieux placés pour animer le débat des citoyens ?
R - Le préfet n'est pas là pour délivrer quelque message que ce soit. Il est là dans sa fonction de représentant de l'Etat. Il est le plus spontanément, de façon neutre, impartiale, au contact de tous : élus, forces sociales, économiques, universités... Il est plus organisateur qu'animateur. C'est à lui de veiller à ce que le débat soit ouvert à tous et pluraliste. En même temps, ce n'est qu'un moment du débat, qui devra se poursuivre dans les communes, les universités, les associations. Je tiens beaucoup à ce que ces forums soient des lieux de germination. Ne faisons pas de démagogie : on ne réunira pas tous les citoyens dans une seule salle. Internet est aussi un moyen moderne pour donner la parole au citoyen. Mais la meilleure façon d'associer le plus grand nombre, c'est encore que les médias de proximité s'intéressent à ce débat. Il faut que les acteurs se l'approprient. Ce n'est pas une campagne d'information officielle.
Q - Pourquoi démarrer en pleine période de vacances ?
R - Ce débat doit être achevé, dans sa première phase, avant le 15 novembre, parce que nous devons remettre une contribution française au Conseil européen de Laeken, en Belgique, en décembre. Cela nous laisse peu de temps.
- Peut-on attendre l'émergence d'options claires au niveau des citoyens en l'absence de propositions intellectuelles et politiques fortes ?
R - L'Europe est complexe. Mais, si on laisse les experts, les intellectuels, les politiques élaborer les options avant de les soumettre au débat, on tombe sous le reproche de technocratisme, de coupure avec la démocratie. Avant 2004, terme du processus, il faut d'abord que les gens expriment ce qu'ils veulent, ce qu'ils croient, ce qu'ils ressentent. Ensuite, il faudra canaliser tout cela. Trois étapes sont prévues : le débat national, dont la synthèse sera réalisée par un groupe de personnalités indépendantes ; puis une phase de débat européen, par exemple sous la forme d'une "convention" associant les Parlements, telle que celle qui a élaboré la Charte européenne des droits fondamentaux ; enfin, il faudra traduire cela dans un traité, qui sera adopté par les gouvernements. Si ce texte est issu d'une logique ascendante, alors, il aura plus de chances d'être accepté que le Traité de Nice, par exemple, dont l'élaboration s'est déroulée dans un cénacle clos. Ce débat est une expérience que l'on n'a jamais tentée. Je n'en connais pas encore le résultat, mais j'ai plutôt confiance. Après 50 ans de construction européenne, le temps est venu de faire en sorte que l'Europe soit plus clairement l'émanation de la volonté des peuples.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 juillet 2001)
Interview à "La Montagne" :
Q - Pourquoi ce "grand débat" sur l'Europe et pourquoi maintenant ?
R - Ce grand débat sur l'Europe est rendu nécessaire par la perspective de l'élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale qui va changer la dimension de l'Union européenne, puisque de 15 on va passera un jour à 27 ou 30 membres, mais aussi sa nature. Il y a donc un besoin de sensibiliser les Français à cet élargissement et de les faire réfléchir sur sa signification. Les questions fondamentales de l'Union européenne sont posées maintenant. Que devons-nous faire ensemble ? Quelles politiques concrètes mener ? Quelles institutions pour mener ces politiques ?
Et puis il y a aussi le fait que l'Europe a été construite sans les peuples. Une distance s'est établie entre une construction qui marche, mais qui est complexe et qui parait lointaine, et les citoyens. Le devenir de l'Europe ne peut pas être fait sans les citoyens, mais avec eux et pour eux.
Q - Dans quel esprit ce débat doit-il se développer ?
R - Nous avons choisi d'organiser des débats qui soient à la fois libres, décentralisés et pluriels. Dans les forums comme celui de Clermont-Ferrand, l'expression doit être libre, non encadrée. Chacun doit pouvoir s'exprimer : les élus, mais aussi des représentants des forces économiques et sociales, des universitaires, des syndicalistes, des étudiants... Il faut que l'Europe sorte du champ clos de quelques experts, de quelques politiques ou de quelques intellectuels, qui savent ou croient savoir, ce que la " base " dans sa diversité pense de la construction européenne et ce qu'elle en attend.
Q - Concrètement, sur quoi doit-il déboucher ?
R - Il a été décidé, lors du Conseil européen de Nice, que nous mettrions à plat les institutions européennes d'ici à 2004 avec la perspective d'un nouveau traité qui tranchera sur des points fondamentaux, par exemple la perspective d'une Constitution européenne. Ce débat aura donc lieu en trois phases. La première, c'est le débat national, dont le forum de Clermont-Ferrand est l'un des premiers rendez-vous. Il se déroulera jusqu'au 15 novembre. Le Conseil européen de Bruxelles, à la fin de l'année, décidera de la poursuite de ce débat, mais sous d'autres formes, au niveau européen. Enfin, en 2003-2004, se réunira une nouvelle conférence réunissant les Etats membres pour rédiger la Constitution européenne et, en même temps, procéder à de profondes réformes de politiques communes.
Q - Lionel Jospin et Jacques Chirac ont pris part à leur manière au débat sur l'Europe en avançant des propositions. Ne sont-elles pas finalement assez proches ?
R - Non. Quand on creuse les choses, Jacques Chirac et Lionel Jospin n'ont pas la même vision de l'Europe. Ce qui normal : Jacques Chirac est un lointain descendant du gaullisme (Valéry Giscard d'Estaing dirait "très lointain"). Lionel Jospin est un socialiste. On peut utiliser les mêmes mots, une fédération d'Etats-nations, mais Jacques Chirac et Lionel Jospin ne mettent pas dans cette idée les mêmes doses d'Europe ou les mêmes doses de politiques nationales.
Q - Comment voyez-vous l'évolution des Français à l'égard de l'Europe : adhésion ou euro-scepticisme ?
R - La France est un des pays dont la population est la plus attachée à l'Europe. Mais la France n'est pas à l'abri des questions que se posent les Européens. Comment franchir un nouveau pas maintenant ? Est-ce que l'élargissement représente une chance supplémentaire ou un risque de dilution ? Quelle politique agricole commune, quelle sécurité alimentaire ou maritime, demain, lorsque nous ne serons plus 15 mais 27 ou 30 ? Les Français, comme les autres, sont dans une phase d'interrogations. Mais ces interrogations ne sont pas négatives, et il n'y a sûrement pas d'Euro scepticisme.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juillet 2001)
Q - Quel message voulez-vous faire passer à travers ce forum ?
R - Je voudrais montrer que l'Europe n'est pas une affaire confinée, confisquée par les politiques, les experts ou les technocrates. Elle est un objet démocratique, citoyen, dont chacun doit s'emparer aujourd'hui. Il faut que tous les citoyens disent aujourd'hui ce qu'ils attendent de l'Europe, l'idée qu'ils en ont, les craintes et les espoirs qu'elle leur inspire.
Q - Comment expliquer que personne n'y comprenne plus rien ?
R - Cette entreprise originale de 15 pays mettant volontairement en commun une partie de leur souveraineté ne peut pas être simple à expliquer. Et on n'en parle pas assez. La place de l'Europe dans le débat public, dans la presse, est insuffisante.
Q - Mais pourquoi une aventure aussi originale trouve-t-elle si peu d'écho ?
R - Parce que l'Europe ne fait pas vendre ! Ce qui est complexe se prête mal à une présentation trop rapide. Le travail de pédagogie est difficile, on n'arrive pas à faire comprendre qu'il s'agit d'un ensemble pour la paix, pour la cohésion économique, sociale. En 1957 (signature du traité de Rome), l'agriculture française n'était pas autosuffisante, avec la PAC (Politique agricole commune), nous sommes devenus le deuxième exportateur mondial. Les régions n'auraient pas surmonté les crises successives de la sidérurgie, du textile, de l'automobile sans les fonds structurels. Il n'y a pas une faculté, pas un pont, pas un viaduc en France qui ne reçoive des aides de Bruxelles.
Q - Les dirigeants politiques ne sont-ils pas responsables de la confusion ? Vous dites vous-même que lorsque Chirac et Jospin prônent une Europe "Fédération d'Etats-nations" ils ne parlent pas en fait de la même chose !
R - Il y a un déficit de dialogue oui. Et les débats qui, dans nos régions, vont donner la parole à chacun sont faits pour y remédier. Ces débats doivent être très libres, sans vérités assenées d'en haut sans formules académiques ou fourre-tout. Toutes les catégories de population doivent s'exprimer : citoyens élus, associations, forces sociales, économiques et intellectuelles. Je dis à tous : l'Europe, c'est votre affaire, l'Europe c'est vous ! L'échange est plus propice que la propagande. Lors du référendum de Maastricht, on a eu tort de faire campagne sur le thème "Ceux qui sont contre sont des imbéciles".
Q - Vous voulez un grand déballage ?
R - Cette forme de démocratie directe est nécessaire ; aujourd'hui l'Europe est à la croisée des chemins. C'est un moment exaltant, difficile aussi : l'élargissement, de 15 à 27 pays, est pour demain. On tâtonne de traité en traité pour donner une forme plus politique à la construction économique qu'a d'abord été l'Union, mais il nous faut savoir jusqu'où les populations sont prêtes à aller dans les transferts de souveraineté. Qu'attendent-elles, par exemple, en matière de santé publique, d'éducation d'équivalence de diplôme, etc. ? Le pacte démocratique européen a besoin d'être refondé. Ce débat sera un bol d'oxygène pour tout le monde. L'alternative au débat, c'est la dilution de la construction européenne.
Q - Quand cette bataille de l'opinion sera-t-elle gagnée ?
R - Quand une Constitution européenne aura été adoptée par référendum.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 juillet 2001)
Interview à Ouest-France :
Q - Avez-vous une idée des sujets forts qui seront débattus ?
R - On sent des tendances. Mais il faut être prudent ; les gens qui viennent à ces réunions ne représentent pas forcément toute l'opinion. Les participants aux matinées "Europe en Pays de la Loire" sont très pro-européens. L'élargissement ne leur pose pas problème. Il y a des questions sur la gouvernance de l'Europe : Comment décide-t-on ? Comment faire en sorte que l'Europe soit plus démocratique, plus lisible, plus transparente, plus accessible, plus efficace ? Les fonds structurels intéressent les élus, la Politique agricole commune les agriculteurs. En dehors des cercles concernés, la demande d'Europe touche à des sujets concrets : échanges d'étudiants, bourses, éducation, recherche, investissements dans l'avenir. Tout cela interpelle l'Europe : comment soutenir les politiques communes existantes en étant capable de répondre à davantage de catégories de la population ?
Q - Les préfets sont-ils les mieux placés pour animer le débat des citoyens ?
R - Le préfet n'est pas là pour délivrer quelque message que ce soit. Il est là dans sa fonction de représentant de l'Etat. Il est le plus spontanément, de façon neutre, impartiale, au contact de tous : élus, forces sociales, économiques, universités... Il est plus organisateur qu'animateur. C'est à lui de veiller à ce que le débat soit ouvert à tous et pluraliste. En même temps, ce n'est qu'un moment du débat, qui devra se poursuivre dans les communes, les universités, les associations. Je tiens beaucoup à ce que ces forums soient des lieux de germination. Ne faisons pas de démagogie : on ne réunira pas tous les citoyens dans une seule salle. Internet est aussi un moyen moderne pour donner la parole au citoyen. Mais la meilleure façon d'associer le plus grand nombre, c'est encore que les médias de proximité s'intéressent à ce débat. Il faut que les acteurs se l'approprient. Ce n'est pas une campagne d'information officielle.
Q - Pourquoi démarrer en pleine période de vacances ?
R - Ce débat doit être achevé, dans sa première phase, avant le 15 novembre, parce que nous devons remettre une contribution française au Conseil européen de Laeken, en Belgique, en décembre. Cela nous laisse peu de temps.
- Peut-on attendre l'émergence d'options claires au niveau des citoyens en l'absence de propositions intellectuelles et politiques fortes ?
R - L'Europe est complexe. Mais, si on laisse les experts, les intellectuels, les politiques élaborer les options avant de les soumettre au débat, on tombe sous le reproche de technocratisme, de coupure avec la démocratie. Avant 2004, terme du processus, il faut d'abord que les gens expriment ce qu'ils veulent, ce qu'ils croient, ce qu'ils ressentent. Ensuite, il faudra canaliser tout cela. Trois étapes sont prévues : le débat national, dont la synthèse sera réalisée par un groupe de personnalités indépendantes ; puis une phase de débat européen, par exemple sous la forme d'une "convention" associant les Parlements, telle que celle qui a élaboré la Charte européenne des droits fondamentaux ; enfin, il faudra traduire cela dans un traité, qui sera adopté par les gouvernements. Si ce texte est issu d'une logique ascendante, alors, il aura plus de chances d'être accepté que le Traité de Nice, par exemple, dont l'élaboration s'est déroulée dans un cénacle clos. Ce débat est une expérience que l'on n'a jamais tentée. Je n'en connais pas encore le résultat, mais j'ai plutôt confiance. Après 50 ans de construction européenne, le temps est venu de faire en sorte que l'Europe soit plus clairement l'émanation de la volonté des peuples.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 juillet 2001)
Interview à "La Montagne" :
Q - Pourquoi ce "grand débat" sur l'Europe et pourquoi maintenant ?
R - Ce grand débat sur l'Europe est rendu nécessaire par la perspective de l'élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale qui va changer la dimension de l'Union européenne, puisque de 15 on va passera un jour à 27 ou 30 membres, mais aussi sa nature. Il y a donc un besoin de sensibiliser les Français à cet élargissement et de les faire réfléchir sur sa signification. Les questions fondamentales de l'Union européenne sont posées maintenant. Que devons-nous faire ensemble ? Quelles politiques concrètes mener ? Quelles institutions pour mener ces politiques ?
Et puis il y a aussi le fait que l'Europe a été construite sans les peuples. Une distance s'est établie entre une construction qui marche, mais qui est complexe et qui parait lointaine, et les citoyens. Le devenir de l'Europe ne peut pas être fait sans les citoyens, mais avec eux et pour eux.
Q - Dans quel esprit ce débat doit-il se développer ?
R - Nous avons choisi d'organiser des débats qui soient à la fois libres, décentralisés et pluriels. Dans les forums comme celui de Clermont-Ferrand, l'expression doit être libre, non encadrée. Chacun doit pouvoir s'exprimer : les élus, mais aussi des représentants des forces économiques et sociales, des universitaires, des syndicalistes, des étudiants... Il faut que l'Europe sorte du champ clos de quelques experts, de quelques politiques ou de quelques intellectuels, qui savent ou croient savoir, ce que la " base " dans sa diversité pense de la construction européenne et ce qu'elle en attend.
Q - Concrètement, sur quoi doit-il déboucher ?
R - Il a été décidé, lors du Conseil européen de Nice, que nous mettrions à plat les institutions européennes d'ici à 2004 avec la perspective d'un nouveau traité qui tranchera sur des points fondamentaux, par exemple la perspective d'une Constitution européenne. Ce débat aura donc lieu en trois phases. La première, c'est le débat national, dont le forum de Clermont-Ferrand est l'un des premiers rendez-vous. Il se déroulera jusqu'au 15 novembre. Le Conseil européen de Bruxelles, à la fin de l'année, décidera de la poursuite de ce débat, mais sous d'autres formes, au niveau européen. Enfin, en 2003-2004, se réunira une nouvelle conférence réunissant les Etats membres pour rédiger la Constitution européenne et, en même temps, procéder à de profondes réformes de politiques communes.
Q - Lionel Jospin et Jacques Chirac ont pris part à leur manière au débat sur l'Europe en avançant des propositions. Ne sont-elles pas finalement assez proches ?
R - Non. Quand on creuse les choses, Jacques Chirac et Lionel Jospin n'ont pas la même vision de l'Europe. Ce qui normal : Jacques Chirac est un lointain descendant du gaullisme (Valéry Giscard d'Estaing dirait "très lointain"). Lionel Jospin est un socialiste. On peut utiliser les mêmes mots, une fédération d'Etats-nations, mais Jacques Chirac et Lionel Jospin ne mettent pas dans cette idée les mêmes doses d'Europe ou les mêmes doses de politiques nationales.
Q - Comment voyez-vous l'évolution des Français à l'égard de l'Europe : adhésion ou euro-scepticisme ?
R - La France est un des pays dont la population est la plus attachée à l'Europe. Mais la France n'est pas à l'abri des questions que se posent les Européens. Comment franchir un nouveau pas maintenant ? Est-ce que l'élargissement représente une chance supplémentaire ou un risque de dilution ? Quelle politique agricole commune, quelle sécurité alimentaire ou maritime, demain, lorsque nous ne serons plus 15 mais 27 ou 30 ? Les Français, comme les autres, sont dans une phase d'interrogations. Mais ces interrogations ne sont pas négatives, et il n'y a sûrement pas d'Euro scepticisme.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 9 juillet 2001)