Texte intégral
FABIENNE SINTES
Votre invité, ce matin, Jean-François ACHILLI, est ministre des Affaires sociales et de la Santé.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Marisol TOURAINE bonjour.
MARISOL TOURAINE
Bonjour.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Et bienvenue sur FRANCE INFO. Alors, vous avez participé samedi au Conseil stratégique de la dépense publique, présidé par François HOLLANDE. L'objectif, on le sait, est d'économiser, on dit 50 à 60 milliards d'ici à trois ans. La santé est en première ligne, a-t-on une idée du montant des économies à réaliser dans votre ministère ?
MARISOL TOURAINE
De quoi s'agit-il ? Le président de la République a indiqué que des économies étaient nécessaires pour pouvoir engager une politique de compétitivité et de maitrise des couts dans notre pays. Ce sont 50 milliards d'économies sur les trois prochaines années, qu'il s'agit de réaliser.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Et vous ?
MARISOL TOURAINE
L'Etat réalisera des économies, la Sécurité sociale, et c'est déjà engagé, la réforme de la politique familiale, la réforme de la politique des retraites vont permettre, sur les années qui viennent
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Combien ?
MARISOL TOURAINE
de réaliser des économies. La politique en matière de santé, est également concernée, mais je veux dire que cette politique elle est d'ores et déjà engagée.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Alors, combien ? On parle de 15 milliards.
MARISOL TOURAINE
En 2013 non mais attendez, la guerre des chiffres n'a absolument aucun sens, aujourd'hui aucun chiffre n'est mis sur la table, je tiens à la dire. Aucun chiffre n'a été avancé, dans le cadre de ce Conseil stratégique, en matière de santé, ni en matière de quoi que ce soit. Donc, ce sont des rumeurs et il ne s'agit pas de céder à ce petit jeu là. Mais moi, je donne des chiffres réels. Pour 2013, nous aurons réalisé 3,5 milliards d'économies, par rapport à 2012, dans le domaine de la santé, grâce à une politique de maitrise des couts, de réorganisation de notre système, ce qui veut dire que l'on peut aller de l'avant, maitriser les dépenses, sans pratiquer de nouveaux déremboursements, puisque c'est le cap clair que j'ai annoncé et que j'ai fixé, pas de déremboursement, pas de franchise, pas de charges nouvelles pour les patients français.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Et vous rognez sur quoi ? Les médicaments, la médecine ambulatoire ?
MARISOL TOURAINE
Il ne s'agit pas de rogner, je
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
La chirurgie à domicile
MARISOL TOURAINE
Non, Jean-François ACHILLI, il ne s'agit pas de rogner, ça c'est justement ce qu'a fait le gouvernement précédent, pratiquant une politique du rabot. Nous mettons en place des politiques structurantes, en matière de médicaments, nous l'avons commencé, le développement des médicaments génériques, alors que la France est en retard dans ce domaine, une meilleure maitrise des prescriptions, alors que les Français consomment plus de médicaments que leurs voisins européens. Nous devons donner plus d'élan encore à cette politique, mais il y a d'autres secteurs, en particulier, et je veux insister là-dessus, le fait de renforcer les soins de proximité, qui vont éviter d'aller à l'hôpital, et c'est dans cette perspective-là notamment qu'aujourd'hui je vais en Bourgogne, en Saône-et-Loire, pour faire le point sur un an de lutte contre la désertification médicale.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
L'idée est d'implanter des médecins généralistes dans les déserts médicaux. Alors, l'objectif, 2013, il était question d'en installer déjà 200, objectif atteint, Marisol TOURAINE ?
MARISOL TOURAINE
Objectif atteint De quoi s'agit-il ? Le Pacte territoire santé, que j'ai lancé il y a un an, a la volonté de permettre à tous les Français, où qu'ils habitent, de pouvoir se soigner à proximité de chez eux, et de pouvoir avoir des rendez-vous chez des médecins généralistes ou spécialistes, dans un délai raisonnable. Pour cela
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Vous disiez moins de 30 minutes, hein, c'est ça ?
MARISOL TOURAINE
Pour cela, j'ai activé pour les soins d'urgence. Pour cela, j'ai activé trois leviers. Si l'on veut que des médecins s'installent dans les territoires où ils ne vont pas spontanément, nous devons les inciter à s'installer et mieux les former. Mieux les former, d'abord. Le deuxième levier, nous devons transformer la manière dont ils travaillent. Pourquoi ? Parce que les jeunes médecins, aujourd'hui, ne veulent plus de cabinets isolés, comme leurs prédécesseurs, d'où l'accent mis sur le développement des maisons de santé. Et puis, le troisième levier, c'est l'investissement, ciblé, dans des territoires qui n'ont pas suffisamment de moyens de santé, par exemple aujourd'hui je vais inaugurer la mise en place d'un hélicoptère qui doit permettre de répondre aux besoins d'urgence de la population en Saône-et-Loire.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Alors, il y a deux mesures, hein, c'est le fameux hélicoptère, il y en aura plusieurs, et également une sorte de salaire minimum, 3 640 net, patients ou pas. Qui financera tout ça, finalement ?
MARISOL TOURAINE
Pas, « patients ou pas », il faut évidemment des consultations. Il y a plusieurs mesures qui ont été mises en place, et vous évoquez une mesure, qui est une mesure très importante, qui est la création d'un nouveau statut, le statut de praticien territorial de médecine générale. Ce sont des médecins qui vont obligatoirement s'installer dans un territoire où il n'y en avait pas, où il n'y en avait plus.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
D'accord.
MARISOL TOURAINE
200 ont été créés en 2013, ils se sont installés, ce sont 200 endroits où il n'y avait pas de médecin et où il y a des médecins. Il y aura, je l'annonce, 200 postes nouveaux, créés en 2014, de praticiens territoriaux de médecine générale, ce qui veut dire qu'en un an et demi, il y aura 400 professionnels de santé, 400 médecins qui s'installeront dans des territoires dans lesquels il n'y avait plus ou pas assez de médecins.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Question toute simple, à l'heure où il est question de faire des économies, hein, ceux qui ont beaucoup de patients, est-ce qu'ils vont payer pour les autres ? Nous avons reçu de nombreux courriels des professionnels de santé, des libéraux, qui craignent que leurs dépassements d'honoraires, au final, financent l'ensemble de ce système.
MARISOL TOURAINE
Il n'y a aujourd'hui pas de difficulté pour un professionnel, un médecin, d'avoir des revenus satisfaisants, donc on ne demande à personne, aucun médecin, de payer pour un autre, il s'agit aujourd'hui de faire en sorte que des médecins qui ont tendance à aller s'installer dans les centres-villes, ne s'installent pas dans les centres-villes, mais aillent s'installer dans les territoires où nous avons besoin de professionnels. Il y a toute une série de mesures qui ont été prises, et les résultats sont au rendez-vous. Ce que je veux dire, c'est que par une politique de mobilisation de tous, et au premier rang, des médecins eux-mêmes, par une politique d'engagement et d'implication des pouvoirs publics, on a les moyens de ne pas laisser s'installer des territoires dans lesquels il n'y a plus de médecins, et je suis satisfaite de considérer que même s'il y a encore du chemin à parcourir, il y a aujourd'hui des territoires dans lesquels la présence médicale est de nouveau une réalité.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Marisol TOURAINE, une question de politique générale, hein, dans le climat qui a suivi la Manif pour tous et le retrait de la loi famille, Jean-François COPE, c'était chez nos amis du Grand jury hier, s'est élevé contre un livre à l'école, qui serait diffusé, donc, intitulé « Tous à poil ». Faut-il renoncer, dans les écoles, aujourd'hui, à ce type d'ouvrage, destiné à enseigner l'égalité hommes/femmes ? Nos enfants sont-ils menacés ?
MARISOL TOURAINE
Quel est l'objectif de monsieur COPE ? D'agiter, de diviser. Je ne comprends pas bien en quoi l'agitation, agiter l'épouvantail d'un livre qui montre ce que sont les différences entre des garçons et des filles, des hommes et des femme, posent comme difficultés. Ce n'est pas par le retour à l'ordre moral, ce n'est pas en surfant sur les inquiétudes et les tensions qui peuvent exister, que la droite clarifiera ses positions, parce que c'est à la droite de dire ce qu'elle porte et ce qu'elle défend. Aujourd'hui nous n'avons pas besoin de retour à l'ordre moral, nous avons besoin de clarté dans les positions de la droite, qu'elle dise clairement qu'elle est en faveur de l'égalité.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Un mot rapide, très vite. Anne HIDALGO a regretté le retrait aussi vite, aussi rapide, de, enfin, le report de la loi famille, dès le lendemain de la manif. Et vous ?
MARISOL TOURAINE
La position du gouvernement est extrêmement nette, les cette loi a besoin d'être approfondie et de davantage de travail, dans le même temps, les éléments sur lesquels il y a aujourd'hui un consensus et qui peuvent être l'objet de dispositions législatives, le seront, dans un délai rapproché.
JEAN-FRANÇOIS ACHILLI
Marisol TOURAINE, ministre de la Santé, merci d'avoir été ce matin l'invitée de FRANCE INFO.
FABIENNE SINTES
Merci beaucoup, vous étiez l'invitée de 08h15 et l'interview est à retrouver en vidéo, très vite, sur franceinfo.fr.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 18 février 2014