Texte intégral
Q - L'exode continue. Il est considérable. Qu'est-ce qui, pour vous, qui connaissez évidemment particulièrement bien ces questions humanitaires, caractérise aujourd'hui cette situation dans la région ?
R - Je dirais que c'est un drame humain, un drame politique. C'est insoutenable de voir comment cela se passe. Cela me révolte plus que la situation elle-même qui est forcément tragique. Ce sont des souffrances, des fatigues. Mais en l'Albanie, on les accueille bien. Il faut aider l'Albanie. Il faut que la solidarité se manifeste. En Macédoine aussi. D'une certaine manière, je ne crains pas trop, je le crains quand même, qu'on ne puisse venir en aide aux réfugiés au-delà des frontières du Kosovo. Ce qui est abject, c'est la façon...
Q - La façon dont on les chasse de leur pays.
R - Oui. C'est qu'au milieu de l'Europe il y ait des gens qui soient capables de tant de racisme, de tant de cruauté pratiquement sous nos yeux et qu'ils se préparaient. Au moment où on négociait à Rambouillet - vous vous en souvenez peut-être - les troupes de M. Milosevic venaient vers le Kosovo pour préparer cette besogne. Tout cela a évidemment été planifié. Maintenant on le sait. C'est quelque chose qui me révolte plus encore que la situation faite à ces gens, ces pauvres gens et qu'il faut, bien entendu, aider.
Q - Alors justement, avez-vous le sentiment que l'effort, aujourd'hui, est suffisant pour aider ces gens ? D''autre part, faut-il les laisser sur place ? Faut-il organiser des camps où vont pouvoir peut-être s'installer pour des années dans la région ou faut-il les déplacer, créer par exemple des corridors humanitaires et les déplacer dans d'autres pays ?
R - Là, il y a trois choses.
La première, c'est que Charles Josselin, le ministre en charge, est là-bas. Il revient demain, il nous dira. Le Dr Bonnot de la Cellule d'urgence est là-bas. Ils nous diront ce qu'il faut faire. L'effort de la France s'est déjà manifesté avec Alain Richard, avec ces avions français qui sont partis, avec les ONG.
Puis, il y a un effort international. Puisque Bonn a convoqué aujourd'hui une conférence humanitaire pour répartir les rôles, un effort de toute l'Europe, du Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies qui avait préparé peut-être insuffisamment. C'est assez étonnant d'ailleurs qu'on n'ait pas pensé que ces mouvements allaient se produire. Mais nous reviendrons là-dessus.
Q - Cet effort sera fait donc maintenant très vite. Il sera suffisant ?
R - Je ne sais pas s'il sera suffisant.
Q - Enfin, la volonté est d'agir est présente ?
R - Oui. Mais si M. Milosevic se met à chasser un par un tous les habitants du Kosovo, nous ne sommes, et pas eux surtout, pas au bout de leurs peines. Pour le reste, j'espère qu'on ne fera pas de camp mais cela dépendra du nombre de gens. La Macédoine est au bord de la constitution des camps. Il faut donc que l'effort soit immédiat. Il faut surtout trouver une solution. Mais qu'on ne vienne plus me dire, qu'on nous dise pas :"les gens sont trompés, ce sont les forces de l'OTAN qui ont déclenché ce mouvement". Qui se souvient ? On les voit ces réfugiés. Tout le monde s'indigne. Souvenez-vous en janvier, à Ochachk, ces cadavres,
300 000 personnes étaient déjà déplacées qui, couchaient par terre et n'étaient pas assistées par la communauté internationale. Et personne ne s'indignait. C'est pour cela que ce mouvement a eu lieu. C'est pour cela qu'on a essayé de négocier longuement, que M. Vedrine, M. Cook et les autres se sont acharnés à convaincre M. Milosevic qu'ils ne confondent pas avec le peuple serbe.
Q - On comprend donc bien évidemment que vous soutenez cette intervention de l'OTAN qui permettra peut-être de stopper donc l'action des troupes de Milosevic au Kosovo.
R - Je l'espère.
Q - Ce matin, il y a eu une nouvelle réunion du gouvernement qui est assez habituelle mais qui était consacrée en grande partie à la situation au Kosovo. Peut-on peut dire, ce soir, que, d'une certaine manière, Lionel Jospin a corrigé le tir et qu'en sortant, plus personne n'a émis de critique et qu'il est bon que cela fonctionne comme cela ?
R - Il est bon qu'en effet ce soit le Premier ministre qui indique comme normalement les décisions et la direction de travail du gouvernement. Vous savez, je crois que ce gouvernement est aimé pour cela. Il est sincère, honnête. Dans une situation comme celle-là, il y a des opinions qui se font entendre à l'intérieur d'une réunion du gouvernement.
Q - Un temps. C'est fini.
R - Un temps et puis les décisions viennent. Et c'est le Premier ministre, Lionel Jospin, qui non seulement donne le "la" mais imprime le mouvement. Je vous assure qu'il y avait des choses à dire et qu'il était normal qu'elles soient dites mais que la cohésion gouvernementale, j'en suis sûr, ne fera aucun doute.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 06 avril 1999)
R - Je dirais que c'est un drame humain, un drame politique. C'est insoutenable de voir comment cela se passe. Cela me révolte plus que la situation elle-même qui est forcément tragique. Ce sont des souffrances, des fatigues. Mais en l'Albanie, on les accueille bien. Il faut aider l'Albanie. Il faut que la solidarité se manifeste. En Macédoine aussi. D'une certaine manière, je ne crains pas trop, je le crains quand même, qu'on ne puisse venir en aide aux réfugiés au-delà des frontières du Kosovo. Ce qui est abject, c'est la façon...
Q - La façon dont on les chasse de leur pays.
R - Oui. C'est qu'au milieu de l'Europe il y ait des gens qui soient capables de tant de racisme, de tant de cruauté pratiquement sous nos yeux et qu'ils se préparaient. Au moment où on négociait à Rambouillet - vous vous en souvenez peut-être - les troupes de M. Milosevic venaient vers le Kosovo pour préparer cette besogne. Tout cela a évidemment été planifié. Maintenant on le sait. C'est quelque chose qui me révolte plus encore que la situation faite à ces gens, ces pauvres gens et qu'il faut, bien entendu, aider.
Q - Alors justement, avez-vous le sentiment que l'effort, aujourd'hui, est suffisant pour aider ces gens ? D''autre part, faut-il les laisser sur place ? Faut-il organiser des camps où vont pouvoir peut-être s'installer pour des années dans la région ou faut-il les déplacer, créer par exemple des corridors humanitaires et les déplacer dans d'autres pays ?
R - Là, il y a trois choses.
La première, c'est que Charles Josselin, le ministre en charge, est là-bas. Il revient demain, il nous dira. Le Dr Bonnot de la Cellule d'urgence est là-bas. Ils nous diront ce qu'il faut faire. L'effort de la France s'est déjà manifesté avec Alain Richard, avec ces avions français qui sont partis, avec les ONG.
Puis, il y a un effort international. Puisque Bonn a convoqué aujourd'hui une conférence humanitaire pour répartir les rôles, un effort de toute l'Europe, du Haut-commissariat aux réfugiés des Nations unies qui avait préparé peut-être insuffisamment. C'est assez étonnant d'ailleurs qu'on n'ait pas pensé que ces mouvements allaient se produire. Mais nous reviendrons là-dessus.
Q - Cet effort sera fait donc maintenant très vite. Il sera suffisant ?
R - Je ne sais pas s'il sera suffisant.
Q - Enfin, la volonté est d'agir est présente ?
R - Oui. Mais si M. Milosevic se met à chasser un par un tous les habitants du Kosovo, nous ne sommes, et pas eux surtout, pas au bout de leurs peines. Pour le reste, j'espère qu'on ne fera pas de camp mais cela dépendra du nombre de gens. La Macédoine est au bord de la constitution des camps. Il faut donc que l'effort soit immédiat. Il faut surtout trouver une solution. Mais qu'on ne vienne plus me dire, qu'on nous dise pas :"les gens sont trompés, ce sont les forces de l'OTAN qui ont déclenché ce mouvement". Qui se souvient ? On les voit ces réfugiés. Tout le monde s'indigne. Souvenez-vous en janvier, à Ochachk, ces cadavres,
300 000 personnes étaient déjà déplacées qui, couchaient par terre et n'étaient pas assistées par la communauté internationale. Et personne ne s'indignait. C'est pour cela que ce mouvement a eu lieu. C'est pour cela qu'on a essayé de négocier longuement, que M. Vedrine, M. Cook et les autres se sont acharnés à convaincre M. Milosevic qu'ils ne confondent pas avec le peuple serbe.
Q - On comprend donc bien évidemment que vous soutenez cette intervention de l'OTAN qui permettra peut-être de stopper donc l'action des troupes de Milosevic au Kosovo.
R - Je l'espère.
Q - Ce matin, il y a eu une nouvelle réunion du gouvernement qui est assez habituelle mais qui était consacrée en grande partie à la situation au Kosovo. Peut-on peut dire, ce soir, que, d'une certaine manière, Lionel Jospin a corrigé le tir et qu'en sortant, plus personne n'a émis de critique et qu'il est bon que cela fonctionne comme cela ?
R - Il est bon qu'en effet ce soit le Premier ministre qui indique comme normalement les décisions et la direction de travail du gouvernement. Vous savez, je crois que ce gouvernement est aimé pour cela. Il est sincère, honnête. Dans une situation comme celle-là, il y a des opinions qui se font entendre à l'intérieur d'une réunion du gouvernement.
Q - Un temps. C'est fini.
R - Un temps et puis les décisions viennent. Et c'est le Premier ministre, Lionel Jospin, qui non seulement donne le "la" mais imprime le mouvement. Je vous assure qu'il y avait des choses à dire et qu'il était normal qu'elles soient dites mais que la cohésion gouvernementale, j'en suis sûr, ne fera aucun doute.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 06 avril 1999)