Texte intégral
Monsieur le Ministre Kader Arif,
Monsieur le Directeur de l'Université Paris I - Panthéon Sorbonne,
Monsieur le Président de la mission du Centenaire, Mon Général,
Monsieur le Directeur de l'Institut des études sur la guerre et la paix,
Mesdames et Messieurs les Professeurs,
Chers Étudiants,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse de vous accueillir aujourd'hui au ministère des affaires étrangères et du développement international pour l'ouverture de ce Colloque consacré aux «Travailleurs et soldats, hommes des colonies dans la Grande Guerre».
Je tiens à remercier et à saluer la mission du Centenaire de la Première Guerre mondiale, l'université Paris I - Panthéon-Sorbonne, l'Institut des études sur la guerre en partenariat avec le ministère de la défense pour leur participation à ce colloque international de haut niveau. C'est le premier colloque à remettre en perspective la participation des populations d'Afrique ou d'Asie directement impliquées par les pouvoirs coloniaux.
Dans son poème liminaire au recueil Hosties Noires, en 1948, Léopold Sédar Senghor, s'adressant aux tirailleurs sénégalais, leur disait : «Je ne laisserai pas la parole aux ministres, et pas aux généraux. Je ne laisserai pas - non ! - les louanges de mépris vous enterrer furtivement.»
Ironie du sort, c'est à moi, aujourd'hui, en qualité de ministre, que revient la lourde responsabilité d'ouvrir vos débats.
La meilleure façon d'éviter les «louanges de mépris» dont parlait Senghor, c'est justement de pouvoir analyser, comprendre, relater de la façon la plus historiquement fidèle, la manière dont ces millions d'hommes ont ainsi été requis, déplacés, souvent de force, utilisés pour alimenter l'effort de guerre.
La connaissance la plus juste est aussi un hommage. C'est tout le sens de notre rencontre d'aujourd'hui.
Ces hommes dont nous allons parler ne sont pas seulement venus pour la France ou l'empire français. Ils sont venus pour le Royaume-Uni, pour la Belgique. Ils sont venus pour l'Allemagne et le Portugal.
Près de 430.000 d'entre eux se sont battus pour l'empire français sur les fronts occidentaux et orientaux. Plus encore se sont mobilisés pour l'Empire Britannique.
D'autres ont été employés dans les colonies elles-mêmes, pour assurer l'ordre public, la défense ou la logistique. D'autres enfin, ont fourni leur force de travail à la France. Comme les Indochinois dans les usines d'armement ou les Chinois dans la manutention.
Si cette guerre fut mondiale, c'est d'abord par la multiplication des fronts, d'Est en Ouest, du Nord au Sud. On s'est battu en Europe, mais aussi en Mésopotamie, en Palestine, au Cameroun, en Angola.
Mais si cette guerre fut mondiale, c'est avant tout car des populations des cinq continents se sont retrouvées au combat, y compris des Indiens, des Antillais, des Kanaks, des Malgaches, des Australiens, des Néozélandais...
Un siècle plus tard, nous nous devons d'avoir à l'esprit cette approche globale de la mémoire de la Grande Guerre.
C'est pourquoi je me félicite que l'ensemble des représentants des États héritiers des troupes belligérantes de l'époque aient accepté l'invitation du président de la République à défiler aux cotés des troupes françaises le 14 juillet prochain sur les Champs Élysées à l'occasion de notre fête nationale.
Nous devons comprendre pourquoi cette première guerre globalisée est le moment que les historiens ont choisi pour faire démarrer le XXème siècle. Car malgré l'horreur du conflit, l'hypocrisie des réquisitions, le sacrifice de millions d'hommes, cette première guerre mondiale, multi-ethnique, multi-nationale, porte en elle notre propre modernité mondialisée, interconnectée, interdépendante.
En tant que secrétaire d'État au développement et à la francophonie, je suis le premier témoin de la puissance du lien qui existe toujours entre la France, ex-puissance coloniale, et les anciennes colonies françaises. Je sais combien, malgré les cicatrices du passé, et malgré les nouveaux équilibres du monde, les relations culturelles, linguistiques ou économiques sont toujours fortes. Mais je suis aussi témoin et acteur de leur évolution, de la subordination à la coopération, et de la coopération au partenariat d'égal à égal. C'est l'ambition qui habite aujourd'hui notre politique étrangère et notre politique de solidarité internationale.
C'est de cette ambition que nous tirons nos projets de développement, des projets qui ont aussi comme finalité de prévenir les conflits. Certes, le développement ne saurait être une condition suffisante pour la paix mais c'est une condition nécessaire. La France y contribue au travers des très nombreux projets qu'elle soutient. Les défis sont encore immenses.
Ensemble, travaillons au développement d'un monde durable, un monde plus humain, un monde en paix.
Je vous remercie et je vous souhaite des travaux fructueux.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 mai 2014