Texte intégral
Je vais commencer par vous souhaiter un très bon anniversaire ! Ce n'est pas la première fois que nous nous retrouvons.(...) Je fête bien volontiers et vous n'aurez pas de mal à comprendre pourquoi, cet anniversaire des 10 ans de la réunion des scouts (garçons) et des guides (filles) de France au sein d'une même fédération.
Et en voyant une assemblée générale aussi jeune, (la moitié d'entre vous a moins de 25 ans), aussi diverse, aussi paritaire, je peux affirmer que c'est bien sous le signe de la jeunesse et de l'éducation populaire que nous sommes réunis.
Vous faites plaisir à voir. Votre engagement, votre capacité à débattre, la confiance qui se dégage de vous. Le dynamisme de la fédération y est pour beaucoup. Bravo à elle d'avoir gagné autant de terrain, ces dernières années, auprès de jeunes de tous horizons.
Nous avons besoin de votre message. L'indifférence ne doit pas gagner, ne doit pas, comme dimanche dernier, balayer l'engagement.
Dimanche dernier plus de 100 000 jeunes qui utilisaient pour la première fois leur carte d'électeur ont déposé un bulletin du Front National dans l'urne. Plus d'un million ont décidé de ne pas utiliser du tout leur carte d'électeur. On ne peut pas ne pas avoir un sentiment d'un gâchis en y repensant. Mais on ne peut surtout pas se contenter de le déplorer.
Nous devons recevoir le message envoyé par les jeunes qui se sont abstenus ou se sont écartés de la République avec humilité. Je ne m'exprimerai pas à leur place. Je prendrai le temps de comprendre. J'ai demandé aux 35 000 jeunes qui réalisent aujourd'hui un service civique de me faire part de leur témoignage, de leurs explications, de leurs propres sondages. Et je souhaite aussi recueillir votre témoignage.
Il y a des choses que j'entends. La crise du travail, la peur de l'avenir, le sentiment de relégation, de délassement, le sentiment d'autisme que renvoie parfois la technocratie bruxelloise, sont déjà des explications que l'on me donne le plus souvent. Ma plus grande crainte est cependant que la plupart des jeunes ne donnent aucune explication. Que l'engagement civique aie tout simplement été balayé ce dimanche par une indifférence civique devenue dure comme la pierre.
Il n'y a pas de fatalité. Vous en êtes la preuve.
L'histoire nous apprend que la République française a des ressources insoupçonnées du moment que ses enfants croient en elle, en ses institutions, en son école et en sa valeur cardinale : l'égalité. Cette croyance n'est pas quelque chose qui se décrète. C'est une bataille culturelle de chaque instant, une bataille que l'Etat doit lancer, mais qu'il n'a pas vocation à porter seul, sans quoi il échouera.
L'éducation populaire doit être au coeur de la reconquête. Elle a la capacité de rendre les jeunes, et même les plus jeunes, conscients de leur pouvoir d'agir. Comme d'autres grands mouvements, avec vos spécificités bien sur, vous en faites, la démonstration évidente. Les chiffres sont impressionnants : vous représentez ici ces 17 200 chefs et cheftaines qui donnent bénévolement leur temps pour accompagner enfants et adolescents dans le parcours que vous avez connu.
Ma conviction est qu'il faut plus que jamais porter haut et fort le drapeau de l'éducation populaire et la remettre au goût du jour.
Notre pays est traversé par une tentation de l'entre-soi. Rien n'est plus indispensable que de soutenir, développer les espaces dans lesquels les jeunes issus de tous les horizons se rencontrent et échangent, comme vous le faites en ce moment même. Les arts, les sciences, le sport, les jeux bien sûr, la philosophie, le débat, l'écologie : tous les jeunes sont attirés par l'un ou l'autre au moins de ces sujets. C'est par l'éducation populaire, qui offre des lieux pour faire et penser ensemble, lieux de confrontation aussi, lieux de transformation de l'individuel en collectif, que l'on parvient à l'engagement citoyen. Son potentiel de mobilisation des jeunes est un gisement pour notre pays, pour que vive le lien social, le vivre ensemble. Nous manquons encore de lieux, physiques ou virtuels, dans lesquels les jeunes d'horizon divers se rencontrent et partagent des projets. Vous pouvez compter sur mon soutien pour cela. Je mobiliserai les moyens qu'il faut pour innover en la matière grâce à un grand appel à projets que je lancerai à l'automne.
Vous pouvez compter sur moi aussi pour tirer parti de vos expériences et mettre à profit vos perceptions et analyses de la société dans la construction de nos politiques publiques : pour systématiser cela, j'organiserai régulièrement des Rencontres de l'Education populaire, visant à concevoir ensemble les réponses aux maux qui fracturent notre société.
Vous l'aurez compris, je crois, j'ai toujours cru en l'Education populaire. Je la crois susceptible, si tant est qu'on lui en donne la possibilité, de changer l'état d'esprit d'une société, d'une génération tout entière. Capable de former des citoyens, de donner corps aux valeurs républicaines, d'innover socialement, d'aider chacun à trouver sa place.
Cette Éducation populaire, Elle a commencé à prendre, je le sais, le virage du numérique, tournant essentiel de notre siècle, pour démultiplier sa capacité de mobilisation et son impact. Je veux accompagner et renforcer ce mouvement car je suis une fervente adepte des nouvelles technologies au service de belles causes.
C'est ainsi que nous sommes en train de développer des outils qui permettront d'aller au devant des jeunes qui n'ont pas encore cherché à s'engager. Je réunirai avant l'été les responsables des grandes entreprises du numérique pour leur proposer de mettre à disposition leurs technologies au service d'une plateforme de l'engagement, qui permettra à des associations agréées telles que la vôtre de proposer des projets aux jeunes en s'appuyant sur leur profil de navigation sur le web. Ce que google ou facebook peuvent faire aujourd'hui pour permettre à des agences de voyage de vous démarcher en vous proposant le billet d'avion qui vous fait le plus envie doit aussi être fait pour aller au devant des jeunes selon leurs centres d'intérêts, ceux qu'ils partagent sur les réseaux sociaux devenus leur principal canal d'information.
Je sais que les jeunes répondent présents quand on leur offre des possibilités d'engagement qui tiennent compte de leurs envies, du temps qu'ils peuvent y consacrer, de leurs centres d'intérêt.
Le succès du service civique, à cet égard est très parlant. La demande est très forte, et je me suis engagée à ce que nous puissions y répondre. Mais je veux aussi que l'engagement bénévole, spontané soit facilité partout et en tous lieux.
Vous êtes nombreux, enfin ici, à vous préoccuper du futur, et des moyens d'éviter que les tensions énergétiques soient des facteurs de division des populations. La France va présider et accueillir la conférence des parties de la convention cadre des Nations unies en 2015, la COP 21, avec l'objectif majeur de trouver un nouvel accord international sur le climat, qui limite le réchauffement climatique.
La France va bien sûr faire le maximum sur le plan diplomatique, en Europe, à l'international pour qu'un accord consensuel soit trouvé. Mais il faut que la voix de ceux qui héritent de cette planète soit entendue. Ainsi, je vous propose d'organiser, six mois avant la conférence internationale, une COP21 des mouvements d'éducation populaire, dont les conclusions seront présentées par le gouvernement français lors de la COP21.
Je sais que vous prendrez toute votre part dans ce projet, que l'habitat du futur vous concerne et que vous partagez et continuerez de partager d'intenses moments de réflexion et de travail pour projeter ce que l'avenir pourrait nous réserver de meilleur.
Vous êtes la preuve que notre jeunesse a des ambitions et qu'elle sait les porter dans le cadre d'un travail collectif. La voila la responsabilité d'un gouvernement qui met la jeunesse au coeur : ne pas proposer à notre jeunesse des habits trop étroits pour ses ambitions. Je suis donc venue pour vous dire que chaque fois que vous voudrez élargir le champ de vos ambitions, vous pourrez compter sur mon soutien.
Très bonne continuation à tous,
Je vous remercie.
Source http://www.sgdf.fr, le 4 juin 2014