Texte intégral
ENTRETIEN AVEC RTI :
Q - Monsieur le Ministre, au nom de toute la presse nous voulons vous saluer et vous souhaiter la bienvenue. Monsieur le Ministre, dans quel cadre se situe votre visite dans notre pays ?
R - Je viens pour une raison bien particulière : inaugurer demain matin, aux côtés du Premier ministre, de représentants des Nations unies, et je crois même d'un représentant du gouvernement américain, l'Ecole de maintien de la paix de Zambakro. C'est pour nous un moment important dans le partenariat que nous avons décidé de mettre en oeuvre avec les pays africains, pour les aider à assumer leur sécurité, et en particulier former au maintien de la paix soit des observateurs, soit des officiers.
L'Ecole de Zambakro va ainsi accueillir toute la région. Ce n'est pas seulement la Côte d'Ivoire qui est concernée, mais les pays de l'Afrique occidentale et tout particulièrement les pays de la CEDEAO, qui vont pouvoir envoyer ainsi des stagiaires qui vont donc être formés, par un encadrement qui d'ailleurs fait appel, lui-même, à plusieurs pays : la France y participe, la Grande-Bretagne, je crois, est également acteur dans cette opération, qui d'ailleurs fait suite à une convention qui avait été signée au mois de mai 1997 entre la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Ces trois pays ont décidé de s'allier pour participer, avec les Africains, au maintien de la paix dans ce continent.
Malheureusement, ce n'est pas un besoin superflu que de se préoccuper de la paix en Afrique, car dans trop de régions africaines il y a encore de la violence. Il faut se préoccuper de l'éradiquer et de mettre en oeuvre des processus de paix. Pour cela, il faut des hommes ou des femmes formés.
ENTRETIEN AVEC RFO - AITV :
Q - Si la France a financé en grande partie cette école de maintien de la paix, est-ce que c'est aussi une manière pour elle de prouver qu'elle est toujours présente en Afrique au même titre que les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne pour maintenir la paix ?
R - Bien sûr, c'est aussi la preuve qu'elle a fait à la fois le choix de la régionalisation. Il me paraît tout-à-fait indispensable d'encourager les pays d'une même région à se préparer ensemble au maintien de la paix, et donc à leur sécurité. Nous le faisons aussi en participation étroite avec les Nations unies parce que nous croyons beaucoup que le maintien de la paix est aussi de la responsabilité des Nations unies. C'est vrai que c'est aussi parce que le continent africain, - d'autres aussi, mais celui-là, malheureusement en fait la preuve -, a besoin de se préoccuper davantage du maintien de la paix et de la prévention de la guerre. C'est tout cela dont il va être question ici. Je suis heureux de voir que l'ensemble des pays de l'Afrique de l'Ouest vont pouvoir y être présents, que l'encadrement, d'ailleurs, fait déjà appel à la plupart de ces pays. C'est vrai, comme vous le rappeliez également, que c'est dans le cadre d'un partenariat avec les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, que nous allons aller dans cette direction, et pourquoi pas, demain, avec l'Europe.
Q - Il n'y a pas de rivalité entre les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France en matière de maintien de la paix ?
R - Je crois que nous sommes en train de dépasser cette rivalité qui parfois était une perte d'énergie, un gaspillage. Je crois que le moment est venu, qu'il est temps de considérer que c'est le partenariat qui doit faire prévaloir cet intérêt général qu'est le maintien de la paix sans lequel il n'y a pas de développement.
ENTRETIEN AVEC TV5 :
Q - Monsieur le Ministre, on a parlé de l'inauguration de l'Ecole de Zambakro ce matin. On a souvent et longtemps assimilé la France, abusivement d'ailleurs, à un rôle de gendarme en Afrique. Est-ce que cette école de maintien de la paix est une nouvelle approche de la coopération française ?
R - Complètement. C'est une autre présence française en Afrique. C'est une présence, d'abord, qui ne s'inscrit pas dans une relation exclusive de la France avec les pays africains ; la preuve en est qu'il y a eu une convention passée avec les Américains et les Anglais sur le même sujet en 1997. Ce n'est pas d'ailleurs non plus seulement avec l'un ou l'autre des pays africains. Si c'est en Côte d'Ivoire, - et je suis heureux que ce soit en Côte d'Ivoire, que cette école de maintien de la paix se soit installée, je crois que le président Houphouet Boigny menait un dialogue sur la paix qui était fort -, c'est à l'intention de l'ensemble des pays de la sous-région. Je crois que cela illustre bien ce qu'on a dit, ni ingérence, ni indifférence. Ce n'est pas à nous de mettre de l'ordre, en quelque sorte, en Afrique. C'est aux Africains de prendre en charge leur sécurité. Mais il faut les y aider, et c'est tout le sens de l'appui que nous allons donner, que nous avons déjà donné financièrement à cet équipement, que nous allons donner au travers de l'encadrement que nous y apportons.
Q - Vous pensez que l'Afrique souffre d'un réel manque de savoir-faire dans la gestion de conflit ? Pourquoi une école, en fait ?
R - Je crois d'abord que c'est l'occasion de réunir des Africains de différents pays pour parler d'un même sujet qui est le maintien de la paix. Nous parions que cette obligation en quelque sorte de se rencontrer pour parler de la paix devrait déjà avoir de bons effets pour éviter de se faire la guerre demain. Je pense qu'un appui extérieur, des Français ou d'autres, est parfois nécessaire pour un meilleur éclairage de la situation. On pourra toujours objecter que les Africains ont l'habitude de la guerre, qu'ils ont peut-être un peu moins l'habitude de la paix négociée, même si je sais qu'à l'africaine, on arrive parfois à trouver des solutions qu'on n'imaginait pas. Il est vrai que l'Europe, par exemple, a, je crois, quand même ouvert la voie et fait la preuve qu'une organisation économique régionale qui est aussi productrice de paix. Si la France plaide pour une intégration économique régionale, c'est aussi en se disant, par référence à l'Europe, que c'est une bonne manière aussi de servir l'objectif de paix.
Q - Ce sera donc peut-être la prochaine devise en Afrique : si tu veux la paix, prépare la paix ?
R - Ah oui, mais ... évite la guerre.
ENTRETIEN AVEC LA BBC :
Q - Que signifie pour vous l'inauguration de cette école aujourd'hui ?
R - Pour moi, c'est un moment important que d'être aux côtés du Premier ministre pour inaugurer un équipement qui est probablement un des premiers de ce genre. Il est, je le rappelle, réalisé en partenariat par la France et la Côte d'Ivoire, mais destiné à accueillir des stagiaires venant de l'ensemble des pays de la sous-région, avec un encadrement venant lui aussi de plusieurs pays, qui peut associer demain des anglophones. Cela s'inscrit d'ailleurs dans la convention que la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne avaient conclue sur le thème du maintien de la paix en Afrique, chacun avec son système propre. Je crois vraiment que c'est une belle illustration de la volonté de la France d'une autre présence aux côtés des Africains, pour les aider à mieux assurer leur sécurité, - une sécurité dont nous avons tous besoin, la France aussi. On dit, mais pourquoi vous faites cela ? Tout simplement parce que la paix en Afrique, l'Europe aussi en a besoin.
Q - Ce n'est pas une façon, à long terme, pour les Occidentaux, de se dégager un petit peu de la sécurité en Afrique ?
R - J'ai tendance à penser qu'il n'est pas anormal que les Africains sachent éviter les causes des conflits et gérer leurs conflits, et, si on ne sait pas les éviter, hélas, conduire des guerres les plus brèves possible. Mais si nous aidons les pays africains à se doter d'une armée, c'est parce que nous considérons qu'un Etat a besoin aussi d'une puissance régalienne. Pour exister, un Etat a besoin de forces de police et d'une armée, à la condition que l'une et l'autre sachent pourquoi elles existent : c'est pour maintenir la paix ou rétablir l'ordre, pas l'inverse. Pourquoi est-ce que c'est a priori aux Français ou aux Européens qu'il reviendrait de mettre de l'ordre en Afrique ? On reviendrait au statut de gendarme qui nous a été à juste titre reproché. Non, il faut aider les Africains, il faut être partenaire des Africains dans cet effort de maintien de la paix et je crois qu'ils sont parfaitement capables de vouloir aussi fortement que nous la paix. C'est en tout cas, sur ce postulat, que je vais vous quitter dans quelques instants.
Q - Une toute dernière question à propos des trois personnes qui sont réfugiées à l'Ambassade de France au Congo. Est-ce que c'est une façon de cautionner l'un ou l'autre des camps ?
R - Non, je n'ai pas eu encore la possibilité de contacter notre ambassadeur sur ce sujet, et vous comprendrez que je ne vous en dise rien avant d'en savoir davantage.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 juin 1999)
Q - Monsieur le Ministre, au nom de toute la presse nous voulons vous saluer et vous souhaiter la bienvenue. Monsieur le Ministre, dans quel cadre se situe votre visite dans notre pays ?
R - Je viens pour une raison bien particulière : inaugurer demain matin, aux côtés du Premier ministre, de représentants des Nations unies, et je crois même d'un représentant du gouvernement américain, l'Ecole de maintien de la paix de Zambakro. C'est pour nous un moment important dans le partenariat que nous avons décidé de mettre en oeuvre avec les pays africains, pour les aider à assumer leur sécurité, et en particulier former au maintien de la paix soit des observateurs, soit des officiers.
L'Ecole de Zambakro va ainsi accueillir toute la région. Ce n'est pas seulement la Côte d'Ivoire qui est concernée, mais les pays de l'Afrique occidentale et tout particulièrement les pays de la CEDEAO, qui vont pouvoir envoyer ainsi des stagiaires qui vont donc être formés, par un encadrement qui d'ailleurs fait appel, lui-même, à plusieurs pays : la France y participe, la Grande-Bretagne, je crois, est également acteur dans cette opération, qui d'ailleurs fait suite à une convention qui avait été signée au mois de mai 1997 entre la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. Ces trois pays ont décidé de s'allier pour participer, avec les Africains, au maintien de la paix dans ce continent.
Malheureusement, ce n'est pas un besoin superflu que de se préoccuper de la paix en Afrique, car dans trop de régions africaines il y a encore de la violence. Il faut se préoccuper de l'éradiquer et de mettre en oeuvre des processus de paix. Pour cela, il faut des hommes ou des femmes formés.
ENTRETIEN AVEC RFO - AITV :
Q - Si la France a financé en grande partie cette école de maintien de la paix, est-ce que c'est aussi une manière pour elle de prouver qu'elle est toujours présente en Afrique au même titre que les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne pour maintenir la paix ?
R - Bien sûr, c'est aussi la preuve qu'elle a fait à la fois le choix de la régionalisation. Il me paraît tout-à-fait indispensable d'encourager les pays d'une même région à se préparer ensemble au maintien de la paix, et donc à leur sécurité. Nous le faisons aussi en participation étroite avec les Nations unies parce que nous croyons beaucoup que le maintien de la paix est aussi de la responsabilité des Nations unies. C'est vrai que c'est aussi parce que le continent africain, - d'autres aussi, mais celui-là, malheureusement en fait la preuve -, a besoin de se préoccuper davantage du maintien de la paix et de la prévention de la guerre. C'est tout cela dont il va être question ici. Je suis heureux de voir que l'ensemble des pays de l'Afrique de l'Ouest vont pouvoir y être présents, que l'encadrement, d'ailleurs, fait déjà appel à la plupart de ces pays. C'est vrai, comme vous le rappeliez également, que c'est dans le cadre d'un partenariat avec les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, que nous allons aller dans cette direction, et pourquoi pas, demain, avec l'Europe.
Q - Il n'y a pas de rivalité entre les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France en matière de maintien de la paix ?
R - Je crois que nous sommes en train de dépasser cette rivalité qui parfois était une perte d'énergie, un gaspillage. Je crois que le moment est venu, qu'il est temps de considérer que c'est le partenariat qui doit faire prévaloir cet intérêt général qu'est le maintien de la paix sans lequel il n'y a pas de développement.
ENTRETIEN AVEC TV5 :
Q - Monsieur le Ministre, on a parlé de l'inauguration de l'Ecole de Zambakro ce matin. On a souvent et longtemps assimilé la France, abusivement d'ailleurs, à un rôle de gendarme en Afrique. Est-ce que cette école de maintien de la paix est une nouvelle approche de la coopération française ?
R - Complètement. C'est une autre présence française en Afrique. C'est une présence, d'abord, qui ne s'inscrit pas dans une relation exclusive de la France avec les pays africains ; la preuve en est qu'il y a eu une convention passée avec les Américains et les Anglais sur le même sujet en 1997. Ce n'est pas d'ailleurs non plus seulement avec l'un ou l'autre des pays africains. Si c'est en Côte d'Ivoire, - et je suis heureux que ce soit en Côte d'Ivoire, que cette école de maintien de la paix se soit installée, je crois que le président Houphouet Boigny menait un dialogue sur la paix qui était fort -, c'est à l'intention de l'ensemble des pays de la sous-région. Je crois que cela illustre bien ce qu'on a dit, ni ingérence, ni indifférence. Ce n'est pas à nous de mettre de l'ordre, en quelque sorte, en Afrique. C'est aux Africains de prendre en charge leur sécurité. Mais il faut les y aider, et c'est tout le sens de l'appui que nous allons donner, que nous avons déjà donné financièrement à cet équipement, que nous allons donner au travers de l'encadrement que nous y apportons.
Q - Vous pensez que l'Afrique souffre d'un réel manque de savoir-faire dans la gestion de conflit ? Pourquoi une école, en fait ?
R - Je crois d'abord que c'est l'occasion de réunir des Africains de différents pays pour parler d'un même sujet qui est le maintien de la paix. Nous parions que cette obligation en quelque sorte de se rencontrer pour parler de la paix devrait déjà avoir de bons effets pour éviter de se faire la guerre demain. Je pense qu'un appui extérieur, des Français ou d'autres, est parfois nécessaire pour un meilleur éclairage de la situation. On pourra toujours objecter que les Africains ont l'habitude de la guerre, qu'ils ont peut-être un peu moins l'habitude de la paix négociée, même si je sais qu'à l'africaine, on arrive parfois à trouver des solutions qu'on n'imaginait pas. Il est vrai que l'Europe, par exemple, a, je crois, quand même ouvert la voie et fait la preuve qu'une organisation économique régionale qui est aussi productrice de paix. Si la France plaide pour une intégration économique régionale, c'est aussi en se disant, par référence à l'Europe, que c'est une bonne manière aussi de servir l'objectif de paix.
Q - Ce sera donc peut-être la prochaine devise en Afrique : si tu veux la paix, prépare la paix ?
R - Ah oui, mais ... évite la guerre.
ENTRETIEN AVEC LA BBC :
Q - Que signifie pour vous l'inauguration de cette école aujourd'hui ?
R - Pour moi, c'est un moment important que d'être aux côtés du Premier ministre pour inaugurer un équipement qui est probablement un des premiers de ce genre. Il est, je le rappelle, réalisé en partenariat par la France et la Côte d'Ivoire, mais destiné à accueillir des stagiaires venant de l'ensemble des pays de la sous-région, avec un encadrement venant lui aussi de plusieurs pays, qui peut associer demain des anglophones. Cela s'inscrit d'ailleurs dans la convention que la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne avaient conclue sur le thème du maintien de la paix en Afrique, chacun avec son système propre. Je crois vraiment que c'est une belle illustration de la volonté de la France d'une autre présence aux côtés des Africains, pour les aider à mieux assurer leur sécurité, - une sécurité dont nous avons tous besoin, la France aussi. On dit, mais pourquoi vous faites cela ? Tout simplement parce que la paix en Afrique, l'Europe aussi en a besoin.
Q - Ce n'est pas une façon, à long terme, pour les Occidentaux, de se dégager un petit peu de la sécurité en Afrique ?
R - J'ai tendance à penser qu'il n'est pas anormal que les Africains sachent éviter les causes des conflits et gérer leurs conflits, et, si on ne sait pas les éviter, hélas, conduire des guerres les plus brèves possible. Mais si nous aidons les pays africains à se doter d'une armée, c'est parce que nous considérons qu'un Etat a besoin aussi d'une puissance régalienne. Pour exister, un Etat a besoin de forces de police et d'une armée, à la condition que l'une et l'autre sachent pourquoi elles existent : c'est pour maintenir la paix ou rétablir l'ordre, pas l'inverse. Pourquoi est-ce que c'est a priori aux Français ou aux Européens qu'il reviendrait de mettre de l'ordre en Afrique ? On reviendrait au statut de gendarme qui nous a été à juste titre reproché. Non, il faut aider les Africains, il faut être partenaire des Africains dans cet effort de maintien de la paix et je crois qu'ils sont parfaitement capables de vouloir aussi fortement que nous la paix. C'est en tout cas, sur ce postulat, que je vais vous quitter dans quelques instants.
Q - Une toute dernière question à propos des trois personnes qui sont réfugiées à l'Ambassade de France au Congo. Est-ce que c'est une façon de cautionner l'un ou l'autre des camps ?
R - Non, je n'ai pas eu encore la possibilité de contacter notre ambassadeur sur ce sujet, et vous comprendrez que je ne vous en dise rien avant d'en savoir davantage.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 juin 1999)