Déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre, sur la diversité des cultures de la francophonie, la pédagogie plurilingue, les industries de la langue et la solidarité nord-sud, Paris le 11 juin 1999.

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Circonstance : Réunion de la XVème session du Haut Conseil de la Francophonie à Paris les 10 et 11 juin 1999-dîner offert par M. Jospin le 11

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les membres du Haut conseil de la Francophonie,
C'est un grand plaisir pour moi d'être avec vous ce soir. Votre institution est essentielle : c'est un des lieux où s'exprime toute la diversité de la Francophonie.
Cette diversité est notre richesse commune. Vous venez de tous les continents. Vous offrez en partage à la Francophonie toutes les richesses de vos cultures respectives. Vous avez à raconter des histoires prestigieuses, celles de grandes civilisations. Or votre présence ici témoigne d'un attachement constant, fidèle, acharné pour certains d'entre vous, à une langue, le français, qui vous appartient parce que vous l'avez choisie. Je tiens à rendre hommage à ce choix et à l'instance qui vous rassemble ici et dont les sessions sont toujours riches d'enseignement.
Vivre cette diversité, c'est être fidèle à nos valeurs communes. Le thème que vous avez proposé cette année au président de la République "Philosophie et stratégie du projet francophone" est particulièrement judicieux. Car nous sommes non seulement réunis par une même langue mais aussi par un commun attachement à des valeurs humanistes. Des valeurs de liberté, de solidarité, que cette langue a portées bien loin d'ici. Des valeurs qu'il nous appartient de cultiver ensemble. Vos propositions aideront, j'en suis convaincu, l'espace francophone à mieux mettre en avant, dans sa stratégie internationale, ses préoccupations dans des domaines aussi divers que l'action humanitaire, la coopération économique et juridique, le développement scientifique et technologique, la circulation des biens et produits culturels... En effet, notre appartenance à de grands ensembles internationaux différents est un formidable atout pour la Francophonie, cet espace que nos différences enrichissent.
Nous sommes plus fort, ensemble, d'une diversité dont l'Europe partage les idéaux. Je souhaite, pour ma part, qu'une meilleure synergie s'instaure entre les projets de l'Union européenne et de la Francophonie, notamment en ce qui concerne la pédagogie plurilingue, les industries de la langue et la solidarité avec le Sud.
Cette diversité francophonie est gage de modernité. Nos valeurs de pluralisme, de solidarité, peuvent trouver, dans la modernité technologique et scientifique, des nouveaux territoires à conquérir. A cet égard, les conclusions du rapport sur la Francophonie et l'Internet, que m'a remis M. Patrick Bloche, tracent des perspectives mobilisatrices. Nous en avons d'ailleurs tiré, avec Catherine Trautmann et Hubert Védrine, un certain nombre de mesures décidées lors du Comité interministériel pour la société de l'information, le 19 janvier dernier. C'est aussi en encourageant une production audiovisuelle, des créations multimédia, des oeuvres nouvelles plus diversifiées que nous défendrons le mieux le français.
Victor Hugo se vantait d'avoir "libéré tous les mots du dictionnaire". La Francophonie est animée par le même esprit de liberté et accueille avec bonheur l'innovation et la libre création. Ainsi, mon gouvernement a tenu à faire cesser les discriminations terminologiques à l'égard des femmes et à promouvoir une politique ouverte aux langues de France. Dans le même esprit d'ouverture, le nouveau dispositif "EduFrance" favorise l'accueil des étudiants étrangers dans nos universités, de nouvelles procédures d'attribution de visas ont été adoptées pour les chercheurs et les créateurs du monde entier.
C'est, je le crois, en ce sens que vous oeuvrez vous-mêmes. Je veux vous en remercier. Croyez que je prendrai connaissance avec le plus grand intérêt des résultats de vos travaux.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 mai 1999)