Texte intégral
M. le Président. Madame le ministre, je vous cède la parole.
Mme Neuville. Monsieur le président, Madame la rapporteur, Chère Christelle Prado, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil économique social et environnemental, je voudrais débuter mon propos en remerciant ces jeunes qui nous ont fait un spectacle pour démarrer cette session. Très sincèrement, d'abord, ils ont apporté un peu de vie, de jeunesse dans cet hémicycle. Je ne dis pas que d'ordinaire il n'y en a pas, mais étant habituée moimême à des hémicycles comparables, il est vrai que, d'un coup, il y a eu un saut générationnel qui nous a fait du bien.
Au-delà de cela, je ferai un autre commentaire : dans ce type de spectacle, on voit que les codes sociaux sont différents. Finalement, on se rend compte que, bien souvent, les codes sociaux créent le handicap.
C'est vrai que si on prenait l'une, car c'était surtout des jeunes filles, l'un ou l'une de ces jeunes pour les mettre tout de suite à la tribune pour parler au milieu de nous tous, peut-être qu'il ou elle serait impressionné.
A contrario, si on prenait l'un ou l'autre d'entre nous pour nous mettre à danser là, devant nous tous, nous serions nous-mêmes largement handicapés.
Ce spectacle, vraiment, a bien montré ce que Christelle Prado vous a expliqué par ailleurs : que l'environnement est pour une grande part dans le handicap.
Ceci étant dit, aujourd'hui représente une étape importante pour la mise en oeuvre de la feuille de route du Comité interministériel du handicap qui s'est tenu en septembre 2013. Votre instance avait alors été saisie par le Premier ministre au sujet de la place des personnes handicapées dans la société dans le cadre de la préparation de la prochaine Conférence nationale du handicap qui se tiendra au mois de décembre.
Votre projet d'avis était particulièrement attendu, en particulier par moi-même, je vous le dis très sincèrement. Je me réjouis donc aujourd'hui de prendre connaissance de l'ensemble de vos préconisations. La discussion va encore avoir lieu. Certes, vous n'avez pas encore adopté ce projet mais je suis optimiste.
Je vois que nos jeunes artistes s'en vont. Nous pouvons leur dire au revoir et leur souhaiter un bon retour. Encore merci à vous !
(Applaudissements)
Je voudrais, Madame la rapporteure, saluer une démarche exemplaire et inédite que vous avez choisie pour votre projet d'avis. Vous savez combien cela m'est cher. Vous avez élaboré un rapport bilingue : en français compliqué et en français simple à comprendre pour tous. Vous allez me dire que ce n'est pas vraiment bilingue, car c'est la même langue, sauf que, parfois, on peut avoir l'impression que ce sont un peu deux langues différentes.
De ce fait, ce projet d'avis est accessible pour tout le monde. Vraiment, je voudrais vous en féliciter. C'est vraiment ce vers quoi nous devons aller. Quand on parle d'accessibilité, ce n'est pas que l'accessibilité des bâtiments pour les personnes qui ont un handicap moteur, même si c'est un préalable à tout. Il y a d'autres formes d'accessibilité, notamment l'accessibilité aux documents.
Nous travaillons avec des parlementaires sur l'accessibilité du processus électoral. Dans l'ensemble des documents électoraux, que ce soient les sites ou les documents papier, il y a un énorme travail à faire pour que tout le monde puisse les comprendre.
Vos 38 préconisations sont extrêmement concrètes et je vous en remercie. Certaines font écho à des actions que le gouvernement a déjà mises en place ou qui sont en cours. Certaines nous demandent d'aller plus loin. Nous allons les examiner. D'autres permettront de prolonger des débats sur les choix que nous aurons à faire pour permettre finalement que les personnes qui ont un handicap soient de véritables citoyens et citoyennes, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit.
Vous appelez par exemple, dans une partie importante de votre projet d'avis, à une meilleure prise en compte du handicap dans la formation, que ce soit à l'école, dans les études supérieures et dans la formation professionnelle. Nous partageons complètement cette priorité. Le principe avait été posé par la loi de 2005. Il faut maintenant aller plus loin.
Dans la réalité, il y a énormément de freins. On entend tous les jours des histoires de personnes malvoyantes qui n'ont pas pu continuer leurs études pour « x » raisons, d'enfants qui ont un handicap et qui ne sont pas correctement pris en charge à l'école.
Nous devrons aller plus loin, car l'école, les études, la formation peuvent mener à l'emploi. Le thème majeur de la Conférence nationale du handicap sera l'emploi des personnes handicapées. On voit bien qu'il y a là un préalable essentiel, d'où l'importance de vos recommandations sur ce thème. C'est une de mes priorités.
L'accessibilité ne concerne pas que les bâtiments. C'est aussi l'accueil en fonction du handicap. Dans le projet de loi sur l'accessibilité, qui est en cours d'adoption définitive par le parlement, a été adopté un amendement, il y a quelques jours, qui inclut la formation de tous les personnels qui sont amenés à accueillir du public sur toutes les formes d'handicap.
Tous les personnels pouvant accueillir du public, c'est extrêmement vaste. Cela comprend à peu près tous les métiers. Cela prendra du temps. L'objet est d'inscrire cette formation dans le répertoire des formations certifiées. Cela prendra énormément de temps, mais c'est indispensable si vous nous voulons avancer sur le sujet.
Encore à propos d'accessibilité, vous vous rappelez que le principe de la conception universelle doit s'imposer pour que tous les produits et services soient conçus pour un usage pour tous et qu'ils soient accessibles dès leur conception. Vous parlez de pôles de compétitivité dédiés. Nous sommes complètement d'accord avec cette vision et nous irons plus loin dans ce sens.
Vous insistez aussi sur la nécessité de développer les outils numériques permettant l'autonomie des personnes, en particulier dans leurs déplacements. Je voudrais saluer ici le président de l'association « Jaccede », qui oeuvre dans ce sens. Je partage complètement cette vision et je souhaite, avec ma collègue Axelle Lemaire, secrétaire d'État en charge du numérique, aller plus loin dans ce domaine. Nous serons extrêmement vigilantes, l'une et l'autre, à ce que tout développement de nouveau outil numérique s'accompagne d'une vision sur l'accessibilité pour toutes les formes d'handicap.
Il est vrai que, tous les jours, il y a de nouveaux outils numériques et que, de plus en plus, nous les utilisons tous. À chaque fois, il faut se poser la question pour le handicap mental ou psychique, pour toutes les formes d'handicap afin que ce soit vraiment une accessibilité partagée.
Je voudrais insister sur un dernier point qui rejoint mon autre délégation qui est la lutte contre l'exclusion.
Nous sommes tous convaincus qu'il faut faire pour les personnes, mais, surtout, qu'il faut, avant tout, faire avec les personnes. Aujourd'hui, dans la salle, certains ou certaines peuvent avoir un handicap. Comme j'ai l'habitude de le dire, avant d'être une personne handicapée, on est d'abord une personne, un citoyen ou une citoyenne et, presque secondairement, on a un handicap.
Je souhaite que, dans l'ensemble des réunions que nous pouvons peut faire, l'ensemble des groupes de travail, pour toutes les réflexions que nous pouvons mener, nous y associons les personnes qui sont concernées. C'est ce que nous avons fait au Collège national de lutte contre l'exclusion avec un collège spécifique de personnes qui sont en situation de pauvreté et qui viennent nous donner leur avis sur un certain nombre de dossiers.
Sur le handicap, il faut que nous soyons extrêmement vigilants à procéder de même et tout le temps, de façon transversale.
Vous l'avez dit aussi, Madame la rapporteure, chacun doit pouvoir choisir sa vie, son projet, être acteur de sa vie ; c'est la société inclusive. C'est notre rôle de mettre en place l'accompagnement qui permet à chacun ce choix.
Ce soutien, c'est une des clés de l'inclusion. Nous avons donc trois leviers - conception universelle, compensation, accompagnement - qui peuvent nous permettre d'avancer.
Pour tout cela, nous devons absolument en France développer la recherche sur le handicap. C'est absolument essentiel dans tous les domaines. En réalité, il y a encore des champs très vastes qui n'ont pas du tout été explorés. En particulier, nous devons aussi développer la recherche en épidémiologique sur le handicap.
Vous l'avez dit : nous n'avons pas de chiffres suffisants pour pouvoir évaluer les besoins, pour pouvoir mener à bien l'ensemble des politiques publiques. C'est actuellement ma priorité.
Cela paraît simple, mais il faut effectivement installer des systèmes d'information, des échelles d'évaluation des besoins, permettre de collecter toutes ces données. C'est un chantier énorme, mais qui est un préalable si nous voulons avancer. Ensuite, il faudra intensifier tous les programmes de recherche qui existent déjà et en créer de nouveaux dans tous les champs du handicap.
La France a le devoir d'être vraiment moteur et pilote dans tous ces domaines. Nous devons à tout prix mettre l'innovation sociale et la recherche au service du handicap et de l'inclusion sociale.
Telle est ma priorité, je voulais vous le dire ici aujourd'hui. Encore une fois, je veux vous remercier pour le travail accompli et vous souhaitez de bons travaux.
(Applaudissements)
M. le président. Merci Madame la ministre.
Source http://www.lecese.fr, le 9 juillet 2014