Interview de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international, avec RMC et BFM TV le 22 août 2014, sur le groupe terroriste l'Etat islamique et sur la situation en Ukraine.

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Texte intégral


JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent FABIUS est notre invité ce matin, bonjour.
LAURENT FABIUS
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Le Pentagone a déclaré hier soir « l'Etat islamique », « la menace terroriste de l'Etat islamique va bien au-delà de tout ce que l'on a connu jusqu'à maintenant. » Vous êtes d'accord ?
LAURENT FABIUS
C'est juste, ce sont des propos que j'ai tenu moi-même il y a déjà quelques temps, parce que, d'une part, il dispose de moyens, y compris de moyens financiers, considérables. Un chiffre, les attentats de 2001, du 11 septembre, New York, ça avait coûté 1 million, aujourd'hui on estime que l'Etat islamique, ce groupe terroriste, dispose de plusieurs milliards. Il est d'une cruauté inouïe et sa cruauté est un argument de propagande, en particulier pour terroriser les populations et pour attirer les fameux jihadistes, y compris de l'Europe. Et puis son objectif, il faut être clair, c'est non seulement de réaliser un califat, c'est-à-dire de contrôler à la fois l'Irak, la Syrie, la Jordanie, le Liban, la Palestine, mais de tuer, d'éliminer, tous ceux qui ne pensent pas comme lui. Et donc, quand on dit « l'Irak c'est important », oui, mais c'est une menace sur toute la région, c'est une menace sur l'Europe, et c'est une menace sur le monde. Et c'est la raison pour laquelle nous nous engagés, bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, je vais revenir sur le financement, c'est intéressant Laurent FABIUS, mais je vois ce que dit aussi le chef d'Etat-major de l'Armée américaine, le Général DEMPSEY, qui dit « pour défaire l'Etat islamique il faudra s'y attaquer aussi en Syrie. » Ça veut dire quoi, ça veut dire que les Etats-Unis préparent des frappes sur l'Etat islamique en Syrie ?
LAURENT FABIUS
Je ne sais pas exactement, je dois discuter avec John KERRY de ce sujet et de quelques autres, mais il faut bien voir comment le problème se pose, et monsieur DEMPSEY pose le problème. A l'origine l'Etat islamique, qui s'est séparé d'Al-Qaïda, parce qu'il trouvait Al-Qaïda trop mou, l'Etat islamique est né largement en Syrie, et monsieur Bachar EL-ASSAD l'a aidé à naître, puisqu'un certain nombre des dirigeants de l'Etat islamique ce sont des gens qui étaient prisonniers et que Bachar EL-ASSAD a libéré. Ils sont nés en Syrie, et en particulier ils se sont développés dans une ville qui s'appelle Racca. Ensuite, en vertu de leur théorie du califat, ils sont venus en Irak, et de là ils ont mis en déroute l'armée irakienne. Mais ils considèrent que leur empire, si je puis dire, c'est à la fois la Syrie et l'Irak, et donc, si on veut faire face à l'Etat islamique, il faut bien sûr y faire face en Irak, mais on ne peut pas éliminer la question de la Syrie, vous le comprenez bien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, pourquoi pas s'en prendre directement à l'Etat islamique en Syrie ?
LAURENT FABIUS
Ça pose le problème…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Puisque les Américains bombardent l'Etat islamique en Irak.
LAURENT FABIUS
Oui, mais là ils bombardent à la demande des Irakiens eux-mêmes, et évidemment, en Syrie, ce n'est pas du tout le même problème. En Syrie, actuellement, celui qui gouverne, c'est le dictateur monsieur Bachar EL-ASSAD. Et donc, il faut mettre ça à plat. Nous, les Français, nous avons depuis le début…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que nous sommes favorables à des frappes aériennes sur l'Etat islamique en Syrie ?
LAURENT FABIUS
Non. Ce que nous avons soutenu, depuis le début, et si on nous avait suivis les choses auraient été très différentes, vous le savez, parce qu'on en avait discuté Monsieur BOURDIN, nous avons dit qu'il fallait soutenir ce qu'on appelle l'opposition modérée en Syrie. D'un côté vous avez monsieur Bachar EL-ASSAD, qui est un dictateur, de l'autre vous avez les terroristes, et on ne peut pas dire à la population « vous choisissez, ou bien c'est le dictateur, ou bien c'est les terroristes. » C'est la raison pour laquelle dès le début nous avons dit il faut soutenir l'opposition modérée. D'ailleurs, je fais une petite parenthèse, Madame Hillary CLINTON, dans ses mémoires, et dans une série d'interviews, dit que la thèse que nous défendons, et que nous défendions, était juste. Maintenant, d'autres n'ont pas soutenu l'opposition modérée, et aujourd'hui vous avez face à face, la dictature de Bachar, qui n'est pas l'avenir de la Syrie, les terroristes, et vous avez en même temps l'opposition modérée. Donc, je ne vous donne pas la solution aujourd'hui, je dis simplement que le problème se pose.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous avons livré des armes.
LAURENT FABIUS
A qui ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aux Syriens.
LAURENT FABIUS
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aux rebelles modérés syriens.
LAURENT FABIUS
Oui, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ces armes ont pu tomber entre les mains…
LAURENT FABIUS
Non. Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
LAURENT FABIUS
Parce que….
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'Etat islamique a bien récupéré des armes américaines auprès de l'armée irakienne.
LAURENT FABIUS
Oui, mais nous avons veillé, à la fois par les natures des armes, qui ont été livrées, conformément à ce qui est permis par l'Europe, je tiens à le dire, et, je ne vais pas entrer dans les détails techniques en fonction de ceux auxquels nous livrions, qu'il n'y ait pas de mauvaise utilisation ou de confiscation possibles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous avons livré des armes quand, c'était à quelle époque ?
LAURENT FABIUS
C'était il y a quelques mois.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a quelques mois ?
LAURENT FABIUS
Et, je tiens à le dire, parce que François HOLLANDE, dans son interview au « Monde » a abordé ces questions, ça a été fait conformément à ce que permet l'Europe et c'est en 2013, je ne crois pas me tromper, qu'il y a eu deux délibérations de l'Europe, l'une permettant – la deuxième permettant de livrer des armes qu'on appelle non létales.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La France a-t-elle livré des armes aux kurdes, en Irak ?
LAURENT FABIUS
Oui, nous l'avons dit, il n'y a pas de mystère là-dedans, mais…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quand ?
LAURENT FABIUS
Récemment, mais en conformité avec l'Irak.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quelles armes ?
LAURENT FABIUS
Ça ne je vous le dirai pas, parce que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Munitions, matériels… mais j'ai vu, j'ai vu que des membres de la commission de la Défense…
LAURENT FABIUS
On avait posé la question.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des Affaires étrangères, avait donné des précisions, roquettes, lance-roquettes, lourde artillerie, missiles.
LAURENT FABIUS
Peut-être qu'ils savent des choses que je ne sais pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce sont des socialistes qui ont dit ça !
LAURENT FABIUS
Oui, peut-être qu'ils savent des choses que je ne sais pas ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon, d'accord !
LAURENT FABIUS
Je mets un point d'interrogation. Non, mais, soyons sérieux. Nous n'allons pas livrer le détail, à nos adversaires, de ce que nous livrons à nos amis.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça, on est d'accord. Mais on peut comprendre ce que sont ces armes, cela dit.
LAURENT FABIUS
Le problème était tout simple, si je puis dire. Je me suis rendu en Irak il y a peu de temps et j'ai vu en particulier, à la fois les responsables de l'Irak et les responsables kurdes. J'ai parlé avec le président BARZANI, qui me dit « bravo la France », puisque nous avons été les premiers à livrer sur le plan humanitaire, etc. Mais il me dit « Monsieur FABIUS, les armes dont nous disposons », on les appelle les Peshmergas, « ce sont des armes qui, pour la plupart d'entre elles, datent du conflit entre l'Iran et l'Irak, et en face il y a l'Etat islamique, que j'ai appelé le califat de la barbarie, qui lui a pris des armes à l'armée irakienne, qui avaient été fournies par les américains. Et donc, si vous souhaitez » - c'est ce qu'on souhaite – « qu'il y ait un équilibrage, il faut nous aider. » Et, la France le fait, donc, mais ce qui est important, et que je veux signaler, et vraiment saluer, c'est que pour la première fois les Allemands, vous l'avez vu…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
LAURENT FABIUS
Ont décidé de le faire, parce qu'ils estiment à juste raison que c'est aussi leur sécurité qui est menacée, les Italiens décident de le faire, les Anglais sont dans la même direction, et c'est la France, vous le savez, qui a lancé ce mouvement qui, je crois, est indispensable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on doit aller jusqu'à intervenir militairement sur le terrain ?
LAURENT FABIUS
Non, ça ne nous est pas demandé, et nous ne le ferons pas. C'est aux Irakiens eux-mêmes à mener la guerre. Et c'est là où le politique et le militaire se rejoignent, ce n'est possible que s'il y a un gouvernement en Irak qui est un gouvernement uni et rassemblé, or, jusqu'à présent, le gouvernement de Monsieur MALIKI, mettait de côté ceux qu'on appelle les sunnites, les sunnites modérés…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, les tribus sunnites.
LAURENT FABIUS
Les tribus sunnites, qui, du coup, ont donné un coup de main aux terroristes. Maintenant il y a un nouveau Premier ministre, que nous soutenons…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il était temps.
LAURENT FABIUS
Et nous demandons qu'il y ait un gouvernement qu'on appelle inclusif.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même l'Iran, j'ai vu, même l'Iran accepterait de donner un coup de main…
LAURENT FABIUS
Oui, mais l'Iran est très influant là-bas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
En contrepartie de négociations sur le nucléaire.
LAURENT FABIUS
Non, alors là…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
LAURENT FABIUS
Il faut vérifier…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon !
LAURENT FABIUS
Parce que j'ai lu cette dépêche, comme vous, mais j'ai eu immédiatement un télégramme de mon ambassadeur sur place, qui a dit « attention, je vérifie, car il risque d'y avoir une erreur de traduction. » Non, non, mais c'est intéressant…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est important.
LAURENT FABIUS
Ce ne serait pas l'Irak qui serait concerné, mais le réacteur d'Arak, c'est tout à fait autre chose, et donc cette vérification de traduction est en train d'être faite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent FABIUS, la France demande une conférence internationale sur la sécurité en Irak, elle aura lieu ?
LAURENT FABIUS
Nous l'espérons, parce que quand on a une situation comme celle-ci, et quand il y a un danger, qui est d'une nature différente des autres dangers, que représente le califat de la terreur, l'Etat islamique, il faut que tous ceux qui n'acceptent pas se mettent ensemble. Alors, ça veut dire les pays de la région, ça veut dire, bien évidemment, ça dépend de l'Irak, les pays de la région, ça veut dire les pays, les membres permanents du Conseil de sécurité, et d'autres, et nous sommes en train de préparer cela, bien évidemment, ça dépend d'abord de l'Irak.
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'Allemagne, vous parliez de l'Allemagne tout à l'heure…
LAURENT FABIUS
Oui !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Accuse le Qatar d'avoir financé l'armée de l'Etat islamique, vous portez les mêmes accusations ?
LAURENT FABIUS
Non ! Moi je ne rentre pas là-dedans. Ce qui est certain, c'est que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Cette organisation terroriste a bien été financée ?
LAURENT FABIUS
Bien sûr !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais par qui ?
LAURENT FABIUS
Eh bien il y a différentes sources et…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais par qui ?
LAURENT FABIUS
On dit que certaines des sources sont des pays…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Arabie Saoudite, Qatar ?
LAURENT FABIUS
Certaines sources dit-on sont des pays arabes. Mais, mais, moi je me tourne...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ne faut-il pas lancer une enquête pour savoir ? Parce que c'est bien beau de combattre militairement…
LAURENT FABIUS
Oui !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais savoir d'où vient le financement…
LAURENT FABIUS
Oui ! Mais il faut surtout prendre des dispositions pour que ça s'arrête.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui !
LAURENT FABIUS
Et dans ce plan général auquel nous réfléchissons, avec cette conférence, il y a bien sûr des aspects de renseignements, des aspects militaires mais il y a des aspects de couper tous les financements possibles ; et vous avez peut-être vu que les Nations Unies, à notre demande…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut les connaître ces financements !
LAURENT FABIUS
Ont pris une résolution il y a quelques jours qui met hors-la-loi, avec toute une série de conséquences, tous ceux qui financeraient directement ou indirectement cet Etat islamique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais, enfin, une enquête est nécessaire pour savoir. Vous le savez ? Vous le savez ? Est-ce que la France sait, sans vouloir nous le dire, est-ce que la France sait qui finance l'Etat islamique ?
LAURENT FABIUS
Nous avons quelques indications et nous ne sommes pas naïfs !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des financements privés ?
LAURENT FABIUS
Oui ! Il y en a, bien sûr, bien sûr, bien sûr...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ?
LAURENT FABIUS
De gens qui se trompent complètement, qui croient qu'ils vont pouvoir se préserver eux-mêmes en aidant des terroristes comme l'Etat islamique. Mais l'Etat islamique, il faut bien comprendre – et c'est là où c'est d'une dangerosité spéciale…
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'argent vient…
LAURENT FABIUS
C'est que, hier, j'ai…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vient de la péninsule arabique, Laurent FABIUS ?
LAURENT FABIUS
Attendez ! Hier j'accueillais 40 réfugiés Irakiens…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Oui, oui.
LAURENT FABIUS
Et j'entendais ce qu'ils me disaient - des récits absolument déchirants - et en particulier une femme, qui était de Karakoch, me disait : « cet Etat islamique est arrivé et les combattants m'ont dit tu te convertis ou demain tu es morte ».
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que nous allons accueillir d'autres réfugiés ?
LAURENT FABIUS
Oui ! Nous allons privilégier…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans quelle limite, dans quelle limite ?
LAURENT FABIUS
Nous allons privilégier ceux qui ont un lien avec la France parce qu'il se pose un problème de principe et un problème pratique, le problème de principe c'est que si tous les réfugiés quittent l'Irak ça veut dire Dach (phon), c'est-à-dire l'Etat islamique, a gagné… Bon ! Donc, ce n'est pas ça qu'il faut faire, il faut d'abord combattre, résister, arriver à surmonter cet adversaire. Mais il y a des cas extrêmes et par rapports à ces cas extrêmes il faut que des pays, pas seulement la France, puissent accueillir ces cas extrêmes, et nous le faisons, ça représente plusieurs centaines, peut-être quelque millier de personnes en ce qui nous concerne.
JEAN-JACQUES BOURDIN
James FOLEY…
LAURENT FABIUS
Et c'est conforme à notre tradition, vous le savez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc combien, jusqu'à combien de réfugiés ? On ne peut pas donner de chiffre, mais quand même…
LAURENT FABIUS
Ecoutez ! On ne peut pas donner de chiffre, mais…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On va en accueillir d'autres ?
LAURENT FABIUS
On en accueillera, mais en privilégiant je le répète pour des raisons d'insertion ceux qui ont un lien avec la France.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon ! Bien. James FOLEY, on a appris que les ravisseurs de James FOLEY avaient envoyé un message à la famille demandant une rançon de 130 millions de dollars, les Etats-Unis on le sait ne paient pas, c'est la politique américaine, ils le disent, il n'y a d'ailleurs pas de débat aux Etats-Unis, même dans la population américaine et même dans la famille - vous l'avez vu comme moi - de James FOLEY. Ce n'est pas la politique que nous suivons ?
LAURENT FABIUS
Non ! Je m'inscris en faux contre vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah !
LAURENT FABIUS
Si, je vous l'ai déjà dit à ce micro, je vous le confirme…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Bien sûr.
LAURENT FABIUS
L'état français ne paie pas de rançon… Voilà !
JEAN-JACQUES BOURDIN
A aucun moment ?
LAURENT FABIUS
Non !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Laurent FABIUS, sur la personnalité de celui que l'on voit sur la vidéo lors de la décapitation de James FOLEY, britannique…
LAURENT FABIUS
Semble-t-il !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Vous avez des…
LAURENT FABIUS
Non !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non.
LAURENT FABIUS
Non, je n'ai pas d'autre indication que ce qu'a donné le…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le gouvernement britannique ne vous a…
LAURENT FABIUS
Ce qu'a donné le gouvernement britannique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ! Pas plus.
LAURENT FABIUS
Simplement, s'il est avéré…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mise en scène, c'est-à-dire que ce ne serait pas lui qui aurait pratiqué…
LAURENT FABIUS
Je ne sais pas !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne savez pas ! Bon.
LAURENT FABIUS
Mais ce qu'il faut retenir, c'est deux choses : d'abord c'est que ce groupe terroriste, ce califat de la terreur, c'est d'une nature si je peux dire encore plus effrayante que les autres groupes terroristes, car je le répète ce qu'ils veulent, ce qu'ils demandent, ce qu'ils exigent c'est que tout le monde, tout le monde, soit soumis à leurs lois, sinon nous sommes - vous, moi, les autres - des chiens et nous devons être abattus. Bon ! Donc, c'est une guerre ; Deuxièmement, là en tuant de cette façon FOLEY l'Américain et probablement en utilisant un Anglais ça signifie – et j'ai trouvé cette expression juste, elle a été utilisée – que c'est un attentat terroriste contre, terroriste contre les Etats-Unis, contre la Grande Bretagne, c'est-à-dire que ça a une signification. Il y avait dans un journal une comparaison avec Daniel PEARL…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui !
LAURENT FABIUS
Donc j'en tire la conséquence – et c'est celle-là qu'il faut dire – c'est que ce n'est pas… parce qu'on peut se dire : « mais, écoutez, l'Irak c'est compliqué, c'est loin, on a suffisamment de problèmes, ne nous mêlons pas de ça » oui mais nous sommes impliqués parce que nous sommes au bout de l'objectif de la lutte…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils se retourneront contre nous ?
LAURENT FABIUS
N'employez pas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Chez nous ? Chez nous ?
LAURENT FABIUS
N'employez pas le futur, employez le présent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils se retournent contre nous chez nous ?
LAURENT FABIUS
Tous ceux qui ne veulent pas se soumettre à leurs lois de terreur ce sont des chiens qu'il faut abattre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je voudrais simplement, sur James FOLEY et la rançon, simplement il y a… vous avez vu le reportage du « New-York Times » sur les pratiques françaises différentes des pratiques américaines…
LAURENT FABIUS
Je ne rentre pas là-dedans !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ! Non, vous n'entrez pas là-dedans.
LAURENT FABIUS
Je ne rentre pas là-dedans.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les journalistes du « New-York Times » sont sérieux, hein, Laurent FABIUS.
LAURENT FABIUS
Je ne rentre pas là-dedans.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon ! Alors on va parler de la France… Non ! un mot sur quand même l'Ukraine si vous voulez…
LAURENT FABIUS
Oui !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les premiers camions sont entrés en Ukraine, contrôlés par la CROIX ROUGE, il n'y a pas de doute l'aide humanitaire c'est bien de l'aide humanitaire, parce que j'ai vu pendant longtemps on a mis en doute les transportises…
LAURENT FABIUS
Eh bien nous avons des…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Euh ! Les marchandises transportées.
LAURENT FABIUS
Oui ! Nous avons discuté de cela, j'étais dimanche à Berlin avec mon collègue Allemand…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je sais !
LAURENT FABIUS
Russe et Ukrainien, nous avons discuté de cela, du contrôle des frontières, de l'évolution politique… il est évident qu'il y a un besoin humanitaire très fort mais que ce besoin humanitaire ne peut pas être une espèce de cheval de Troie pour autre chose, donc les discussions ont été très lourdes, pas seulement sur l'humanitaire - mais il y a des hommes et des femmes qui meurent tous les jours là-bas - et donc la position de la France c'est depuis le début fermeté, parce qu'il y a des choses de la Russie qu'on ne peut pas admettre et en même temps dialogue, on ne va pas faire la guerre à la Russie, d'où la question des sanctions, d'où le fait que la France en permanence – vous rappelez la réunion de Normandie, d'autres réunions qui peuvent avoir lieu – nous sommes pour essayer la désescalade.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Rencontre, une nouvelle rencontre François HOLLANDE-Vladimir POUTINE…
LAURENT FABIUS
Elle peut avoir lieu ! Il y a une rencontre qui est prévue entre POROCHENKO et POUTINE à Minsk dans quelques jours…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Oui, oui, en Biélorussie.
LAURENT FABIUS
Mais si c'est souhaité et utile il peut y avoir une rencontre à 4, comme il y a eu une rencontre à Bénouville, en Normandie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien ! Cécile DUFLOT, vous avez siégé avec elle au conseil des ministres : la France peut faire face à un tsunami social dit-elle, inquiétude, grande inquiétude, progrès social en panne, elle est extrêmement sévère avec François HOLLANDE et Manuel VALLS dans le livre qu'elle vient de publier, qu'en pensez-vous ?
LAURENT FABIUS
Ce n'est peut-être pas exactement du même niveau que ce que nous abordions auparavant…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Non. Ah bon ! Ah bon.
LAURENT FABIUS
Mais j'ai là un petit carton blanc, j'ai mis une phrase qui est de monsieur Jean-Vincent PLACE – qui est le collègue de madame DUFLOT...
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Qui était hier matin ici même.
LAURENT FABIUS
Il dit : « Il faut éviter les commentaires excessifs et stigmatisants »…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a dit cela hier matin ici même !
LAURENT FABIUS
Eh bien il a raison.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il a raison.
LAURENT FABIUS
Il a raison.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, aucun commentaire sur cette attitude ?
LAURENT FABIUS
Ah ! Non, non, ce n'est pas ce que je veux dire. Là, il parlait…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Mais il… ses commentaires, oui je comprends.
LAURENT FABIUS
Voilà ! Voilà, il parlait de ce livre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment trouvez-vous son attitude ?
LAURENT FABIUS
Pas d'autre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je ne parle pas de…
LAURENT FABIUS
Je pense que votre… la réponse est dans votre question.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah ! Bon, c'est-à-dire ?
LAURENT FABIUS
On s'est compris.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon !
LAURENT FABIUS
Voilà ! Je n'irais pas plus loin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est digne ou c'est indigne ?
LAURENT FABIUS
La réponse est dans votre question.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne voulez pas répondre !
LAURENT FABIUS
Oh ! Si, je réponds, je réponds…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon !
LAURENT FABIUS
Je réponds.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ! Vous répondez.
LAURENT FABIUS
Je réponds par un sourire distancié et attristé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, et attristé. Le travail dominical, projet de loi sur le pouvoir d'achat, volet sur le travail le dimanche, vous êtes concerné, puisque vous avez le tourisme en charge.
LAURENT FABIUS
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Réglementation adaptée, c'est cela qui va se passer, ce que vous aviez proposé, je vois Paris, certaines zones classées touristiques, qui permettrait de travailler le dimanche ?
LAURENT FABIUS
Oui, c'est un des aspects, c'est un des aspects, mais qui est un aspect de bon sens. On a vu ça encore cet été, mais c'est vrai tout le temps. C'est dans les zones touristiques, dans les zones très touristiques. Si les magasins sont fermés le dimanche, dans des zones très touristiques, en général ils sont ouverts, mais enfin quelques-uns sont fermés, on pense aux Galeries Lafayette…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
LAURENT FABIUS
Les touristes, qui sont là le dimanche, ils ne vont pas dire « on va revenir vendredi prochain », donc ça fait une perte très importante. Alors, il faut faire attention…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc ils seront ouverts ?
LAURENT FABIUS
Attendez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils seront ouverts.
LAURENT FABIUS
Il faut faire très attention. Il faut en même temps que ce soit sur la base du volontariat, on ne va pas obliger les gens à travailler, et que ce soit mieux rémunéré. Là, on revient toujours sur cet exemple, le patron des Galeries Lafayette me dit « si c'est autorisé, je recrute », je crois « 600 emplois et je les paye double. »
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il faut autoriser ?
LAURENT FABIUS
Je pense, j'ai pris position là-dessus, je pense que c'est raisonnable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans les gares aussi ?
LAURENT FABIUS
Dans les gares ce serait une bonne idée, oui. Par exemple, si vous allez, vous prenez l'Eurostar depuis Londres jusqu'à Paris, vous arrivez à Londres vous pouvez faire des achats, à Paris non, mais il faut bien sûr qu'il y ait toujours une compensation sociale, et que ce soit sur la base du volontariat. C'est un aspect parmi beaucoup d'autres.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les annonces c'est la semaine je crois, là-dessus.
LAURENT FABIUS
Alors, il y a eu ce qu'a annoncé le président de la République, dans son interview au « Monde », c'est, en gros, favoriser la relance. Il y a une activité économique, dans toute l'Europe, qui est trop faible, et donc il faut arriver à investir davantage, à lever un certain nombre de freins, pour qu'on ait davantage de croissance et donc davantage d'emplois, c'est du bon sens.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est du bon sens. J'ai juste une petite phrase à vous faire écouter, parce que je voudrais avoir un tout petit commentaire. Regardez ce que me disait Alain JUPPE, c'était le 25 juin dernier, il était à votre place, ici-même.
ALAIN JUPPE
Je ne suis pas encore septuagénaire, je vais fêter mon 69ème anniversaire dans deux mois, il faut peut-être mieux un sexa en forme qu'un quinqua amorti !
LAURENT FABIUS
Quelle est votre question ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais non, votre commentaire ?
LAURENT FABIUS
Ecoutez, tout le monde sait qu'Alain JUPPE est un homme que je connais depuis longtemps personnellement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est pour ça que je…
LAURENT FABIUS
Et que j'estime. Mais, cela dit, je ne veux pas me mêler des affaires internes de l'UMP.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce serait un bon candidat ?
LAURENT FABIUS
Je viens de vous le dire… une manière merveilleuse de dire oui et de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
LAURENT FABIUS
Personnellement j'estime, ce n'est pas parce que, aujourd'hui il veut être candidat, que je vais changer mon jugement, je le connais bien, mais, c'est l'affaire de l'UMP, voilà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Laurent FABIUS d'être venu nous voir ce matin.
LAURENT FABIUS
Merci. Bonne journée à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 août 2014