Texte intégral
Mesdames et Messieurs, bonjour à tous,
Je regrette de ne pas être ici avec vous, pour le Sommet international des entreprises coopératives. Mais je tenais absolument à être présente, ne serait-ce que par la voie électronique, pour vous faire part de mon enthousiasme et de ma détermination à promouvoir le modèle coopératif.
Depuis la crise de 2008, tout le monde a été sensibilisé aux dangers du court-termisme et du rendement à tout prix. Le modèle coopératif, pourtant né en même temps que le capitalisme au 19e siècle montre aujourd'hui, plus que jamais, son actualité et sa capacité à répondre aux défis économiques de demain.
Parce que nous croyons à cette alternative, parce que nous espérons dans cette voie d'avenir, la France a été l'un des premiers pays à reconnaître le mode coopératif à part entière. La dernière loi sur la coopération datait de 1947, mais en cette année 2014, - une année historique -, je suis fière qu'une loi d'envergure, inédite en termes d'ambitions et de moyens, permette à l'Economie Sociale et Solidaire, - l'ESS -, de changer d'échelle et de réaliser tout son potentiel.
Cette loi est importante, parce qu'elle comprend un volet central dédié aux coopératives, pour leur permettre de se moderniser mais aussi de mieux affirmer leur modèle démocratique, fondé sur la transparence.
La France est très engagée dans la voie de la coopération. En effet, il y a 23.000 entreprises coopératives en France, avec plus d'1 million d'emplois et un chiffre d'affaire de plus de 300 milliards d'euros, soit 15% de notre richesse nationale. Nous avons donc en France à peu près 1 entreprise sur 6 qui se réfère à une source de principes exigeants pour lutter contre les dérives de l'individualisme économique, à une source alternative de solutions pour les défis de demain.
Les principes de la coopération française sont fondés sur les 7 principes édictés par la Déclaration de l'Alliance Coopérative Internationale de 1895 : démocratie, solidarité, responsabilité, pérennité, transparence, proximité et service.
En pratique, ce sont des entreprises au service de leurs membres et des territoires, qui s'inscrivent dans le long terme et qui font le choix de la responsabilisation collective de la totalité des décisions. Coopérer pour entreprendre, c'est croire en l'homme et en sa capacité d'investir dans un projet mutuel commun, pour en recueillir les fruits, ensemble et de façon égalitaire. Coopérer pour entreprendre, c'est répondre autrement aux besoins collectifs, en s'intéressant à l'activité générée et non à la rentabilité.
Ces valeurs de concertation et de long-terme conduisent à donner aux coopératives des objectifs à haute valeur sociale ajoutée et à vérifier leur respect.
La vision française des coopératives s'inscrit à part entière dans cette démarche qui consiste à faire vivre les principes. C'est pourquoi nous accordons une importance particulière à la vérification périodique du respect des valeurs de la coopération. En effet, notre loi permet aux sociétaires de s'assurer tous les 5 ans de la bonne conformité de leur coopérative aux principes exigeants qui doivent être les siens. C'est ce que nous appelons la révision coopérative.
La force de notre pays, c'est précisément d'être parvenu à ce que toutes les coopératives signent un accord en ce sens, qu'elles rassemblent des agriculteurs, des commerçants, des consommateurs, des artisans, des salariés ou des banquiers. Cet accord est significatif et symbolique de notre volonté de placer les principes au coeur de la gouvernance particulière des coopératives. C'est aussi une façon d'affirmer haut et fort les valeurs de la coopération, d'en assurer la vérification périodique par un tiers indépendant, et d'alimenter davantage la démocratie en assurant la transparence de son fonctionnement pour ses sociétaires.
La gouvernance des coopératives n'est pas celle des sociétés commerciales parce que, par construction, le sociétariat d'une coopérative ne tire pas son bénéfice du dividende, mais de l'activité. Il est donc important que la France et ses partenaires européens ne calquent pas leur modèle de gouvernance sur ceux du capitalisme mondialisé, qui uniformise tout particularisme.
Nous devons défendre les spécificités du modèle coopératif face aux incompréhensions dont il peut faire l'objet. Dans l'Union Européenne, la réglementation ne s'intéresse qu'à l'activité économique et ne distingue pas selon le modèle de l'entreprise, notamment sa gouvernance démocratique. Nous avons la même difficulté pour les mutuelles qui exercent des activités assurentielles.
Mais soyons aussi réalistes ensemble. Le modèle coopératif n'est pas exempt de critiques. Certaines grandes banques coopératives ont été parties prenantes dans la crise de 2008, souvent par la création de filiales non maîtrisées par les sociétaires.
Ainsi notre loi sur l'ESS actualise-t-elle le droit de la coopération pour leur permettre de faire face, avec plus de force, aux défis de ce nouveau siècle. Notre loi renforce leur attractivité et leur donne les moyens de se développer, y compris à l'international, de créer des filiales sous forme coopérative et de générer ainsi de l'activité et de l'emploi, autour de la coopération et non de la compétition.
Le modèle coopératif peut être un instrument de mobilisation des salariés. En effet, nous avons créé un nouveau statut pour faciliter la reprise d'entreprise. Il permet aux salariés de contrôler leur entreprise sans acquérir préalablement la majorité du capital. Pendant 7 ans, ils pourront renforcer d'année en année leur part au capital: ce statut, c'est la SCOP d'amorçage. Notre ambition est de démontrer que les salariés peuvent constituer une solution aux fermetures d'entreprises saines, faute de repreneurs.
Vous l'avez compris : avec la loi relative à l'Economie Sociale et Solidaire, nous souhaitons donner des horizons au paysage coopératif. Ce paysage est multiple et la France peut être fière de la diversité des modèles de gestion collective et participative : les coopératives d'entreprises, les coopératives d'utilisateurs ou d'usagers, les coopératives de production, les banques coopératives ou encore les coopératives multisociétariales, qui associent plusieurs parties prenantes, dont a minima les salariés et les bénéficiaires de l'activité.
Cette intelligence collective est déjà un atout aujourd'hui ; ce sera une force demain !
Les défis de demain nous obligent en effet à être imaginatifs et innovants, ambitieux et audacieux. Les coopératives offrent des solutions alternatives aux modèles de développement fondés sur la compétition économique. Les coopératives proposent des modèles patients, qui encouragent d'abord l'investissement et l'emploi, et non les profits et la rente. Les coopératives nous inspirent des valeurs de développement économique local et durable face aux délocalisations. C'est pourquoi nous devons protéger ce modèle, le promouvoir, pour qu'il ne soit pas mis en danger par les dynamiques de l'uniformisme et de la dimension unique.
La vision économique de la France, c'est une vision dans laquelle plusieurs modes d'entreprendre sont possibles, même à rebours des concepts d'individualisme et de propriété privée. Dans le monde de demain, nous gagnerons tous à faire de la coopération, notre première nature !
Source http://www.economie.gouv.fr, le 15 octobre 2014
Je regrette de ne pas être ici avec vous, pour le Sommet international des entreprises coopératives. Mais je tenais absolument à être présente, ne serait-ce que par la voie électronique, pour vous faire part de mon enthousiasme et de ma détermination à promouvoir le modèle coopératif.
Depuis la crise de 2008, tout le monde a été sensibilisé aux dangers du court-termisme et du rendement à tout prix. Le modèle coopératif, pourtant né en même temps que le capitalisme au 19e siècle montre aujourd'hui, plus que jamais, son actualité et sa capacité à répondre aux défis économiques de demain.
Parce que nous croyons à cette alternative, parce que nous espérons dans cette voie d'avenir, la France a été l'un des premiers pays à reconnaître le mode coopératif à part entière. La dernière loi sur la coopération datait de 1947, mais en cette année 2014, - une année historique -, je suis fière qu'une loi d'envergure, inédite en termes d'ambitions et de moyens, permette à l'Economie Sociale et Solidaire, - l'ESS -, de changer d'échelle et de réaliser tout son potentiel.
Cette loi est importante, parce qu'elle comprend un volet central dédié aux coopératives, pour leur permettre de se moderniser mais aussi de mieux affirmer leur modèle démocratique, fondé sur la transparence.
La France est très engagée dans la voie de la coopération. En effet, il y a 23.000 entreprises coopératives en France, avec plus d'1 million d'emplois et un chiffre d'affaire de plus de 300 milliards d'euros, soit 15% de notre richesse nationale. Nous avons donc en France à peu près 1 entreprise sur 6 qui se réfère à une source de principes exigeants pour lutter contre les dérives de l'individualisme économique, à une source alternative de solutions pour les défis de demain.
Les principes de la coopération française sont fondés sur les 7 principes édictés par la Déclaration de l'Alliance Coopérative Internationale de 1895 : démocratie, solidarité, responsabilité, pérennité, transparence, proximité et service.
En pratique, ce sont des entreprises au service de leurs membres et des territoires, qui s'inscrivent dans le long terme et qui font le choix de la responsabilisation collective de la totalité des décisions. Coopérer pour entreprendre, c'est croire en l'homme et en sa capacité d'investir dans un projet mutuel commun, pour en recueillir les fruits, ensemble et de façon égalitaire. Coopérer pour entreprendre, c'est répondre autrement aux besoins collectifs, en s'intéressant à l'activité générée et non à la rentabilité.
Ces valeurs de concertation et de long-terme conduisent à donner aux coopératives des objectifs à haute valeur sociale ajoutée et à vérifier leur respect.
La vision française des coopératives s'inscrit à part entière dans cette démarche qui consiste à faire vivre les principes. C'est pourquoi nous accordons une importance particulière à la vérification périodique du respect des valeurs de la coopération. En effet, notre loi permet aux sociétaires de s'assurer tous les 5 ans de la bonne conformité de leur coopérative aux principes exigeants qui doivent être les siens. C'est ce que nous appelons la révision coopérative.
La force de notre pays, c'est précisément d'être parvenu à ce que toutes les coopératives signent un accord en ce sens, qu'elles rassemblent des agriculteurs, des commerçants, des consommateurs, des artisans, des salariés ou des banquiers. Cet accord est significatif et symbolique de notre volonté de placer les principes au coeur de la gouvernance particulière des coopératives. C'est aussi une façon d'affirmer haut et fort les valeurs de la coopération, d'en assurer la vérification périodique par un tiers indépendant, et d'alimenter davantage la démocratie en assurant la transparence de son fonctionnement pour ses sociétaires.
La gouvernance des coopératives n'est pas celle des sociétés commerciales parce que, par construction, le sociétariat d'une coopérative ne tire pas son bénéfice du dividende, mais de l'activité. Il est donc important que la France et ses partenaires européens ne calquent pas leur modèle de gouvernance sur ceux du capitalisme mondialisé, qui uniformise tout particularisme.
Nous devons défendre les spécificités du modèle coopératif face aux incompréhensions dont il peut faire l'objet. Dans l'Union Européenne, la réglementation ne s'intéresse qu'à l'activité économique et ne distingue pas selon le modèle de l'entreprise, notamment sa gouvernance démocratique. Nous avons la même difficulté pour les mutuelles qui exercent des activités assurentielles.
Mais soyons aussi réalistes ensemble. Le modèle coopératif n'est pas exempt de critiques. Certaines grandes banques coopératives ont été parties prenantes dans la crise de 2008, souvent par la création de filiales non maîtrisées par les sociétaires.
Ainsi notre loi sur l'ESS actualise-t-elle le droit de la coopération pour leur permettre de faire face, avec plus de force, aux défis de ce nouveau siècle. Notre loi renforce leur attractivité et leur donne les moyens de se développer, y compris à l'international, de créer des filiales sous forme coopérative et de générer ainsi de l'activité et de l'emploi, autour de la coopération et non de la compétition.
Le modèle coopératif peut être un instrument de mobilisation des salariés. En effet, nous avons créé un nouveau statut pour faciliter la reprise d'entreprise. Il permet aux salariés de contrôler leur entreprise sans acquérir préalablement la majorité du capital. Pendant 7 ans, ils pourront renforcer d'année en année leur part au capital: ce statut, c'est la SCOP d'amorçage. Notre ambition est de démontrer que les salariés peuvent constituer une solution aux fermetures d'entreprises saines, faute de repreneurs.
Vous l'avez compris : avec la loi relative à l'Economie Sociale et Solidaire, nous souhaitons donner des horizons au paysage coopératif. Ce paysage est multiple et la France peut être fière de la diversité des modèles de gestion collective et participative : les coopératives d'entreprises, les coopératives d'utilisateurs ou d'usagers, les coopératives de production, les banques coopératives ou encore les coopératives multisociétariales, qui associent plusieurs parties prenantes, dont a minima les salariés et les bénéficiaires de l'activité.
Cette intelligence collective est déjà un atout aujourd'hui ; ce sera une force demain !
Les défis de demain nous obligent en effet à être imaginatifs et innovants, ambitieux et audacieux. Les coopératives offrent des solutions alternatives aux modèles de développement fondés sur la compétition économique. Les coopératives proposent des modèles patients, qui encouragent d'abord l'investissement et l'emploi, et non les profits et la rente. Les coopératives nous inspirent des valeurs de développement économique local et durable face aux délocalisations. C'est pourquoi nous devons protéger ce modèle, le promouvoir, pour qu'il ne soit pas mis en danger par les dynamiques de l'uniformisme et de la dimension unique.
La vision économique de la France, c'est une vision dans laquelle plusieurs modes d'entreprendre sont possibles, même à rebours des concepts d'individualisme et de propriété privée. Dans le monde de demain, nous gagnerons tous à faire de la coopération, notre première nature !
Source http://www.economie.gouv.fr, le 15 octobre 2014