Texte intégral
Monsieur le Directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l'environnement (Achim Steiner),
Madame la Secrétaire exécutive du Secrétariat de l'ozone (Tina Birmpili),
Mesdames et Messieurs les Présidents et les représentants des parties à la Convention de Vienne et au Protocole de Montréal (co-présidents : Patrick McInerney et Richard Mwendandu),
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureuse d'ouvrir avec vous cette 26ème réunion des Parties au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, qui associe également, ce qui est exceptionnel, la Conférence des Parties à la Convention de Vienne.
Permettez-moi de remercier toutes celles et tous ceux qui ont pris une part active à l'organisation de cette réunion ainsi, bien sûr, que l'UNESCO pour son hospitalité.
Le Protocole de Montréal signé, comme vous le savez, en 1987, est le premier traité relatif à l'environnement de dimension vraiment mondiale et universelle, assorti de dispositions librement consenties ayant une valeur contraignante et opérationnelle.
C'était un texte exigeant et pourtant, il a réussi à convaincre, à entraîner, à mobiliser, dans une démarche à la fois ambitieuse et constructive, volontariste et pragmatique.
La réunion de cette semaine réunit, dans le même esprit, toutes les parties prenantes de cet engagement que nous avons pris d'agir collectivement pour protéger la couche d'ozone, après que les scientifiques nous aient alertés sur sa dégradation et sur les risques qui en résultaient pour la santé humaine dès lors que sa fonction de protection des rayons ultra-violets était dangereusement entamée.
Cette mobilisation concerne l'ensemble de nos pays, ceux qu'on dit « développés » et ceux qu'on dit « en développement », termes, je vous l'avoue, que je n'emploie pas sans réticence car ils suggèrent qu'il n'y aurait qu'un seul modèle de développement alors qu'à mes yeux, de nouveaux modèles sont à inventer pour relever les défis environnementaux et conjuguer efficacement économie et écologie, nul n'ayant, en ce domaine, de monopole. C'est pourquoi je préfère parler, sans euphémiser la réalité, de pays riches et de pays pauvres, de pays à la puissance économique avérée et d'autres qui, à des degrés divers, veulent construire ou consolider la leur.
Cette mobilisation, donc, a concerné tous nos pays, dans leur diversité, c'est-à-dire non seulement les gouvernements et les Etats mais aussi la société civile et les organisations non gouvernementales, les agences d'exécution et les entreprises, bref toutes les forces vives dont l'engagement est décisif.
Je tiens à souligner ici le beau succès du Protocole de Montréal et l'efficacité de l'action conjointe qu'il a permise car ses objectifs sont en passe d'être atteints : la couche d'ozone, gravement endommagée, est en voie de réparation.
Ensemble, nous avons réussi à supprimer, à l'échelle mondiale, des substances chimiques qui érodaient et même trouaient par endroits l'ozone stratosphérique : nous avons éliminé les chlorofluorocarbones et l'élimination des hydrochlorofluorocarbones est en cours.
Les résultats sont là : l'objectif de reconstitution de l'ozonosphère devrait être atteint en 2050 pour la majorité de la surface planétaire et en 2065 au-dessus de l'Antarctique, région la plus exposée. Bénéfice secondaire quoiqu'en réalité tout aussi important : les CFC et les HCFC n'étant pas seulement destructeurs de la couche d'ozone mais aussi des gaz à fort effet de serre, leur éradication contribue directement à la lutte contre le dérèglement climatique, preuve que, dans l'environnement et la protection de la biosphère, tout se tient.
Le Protocole de Montréal a puissamment démontré ce que peut la communauté internationale quand elle décide d'unir ses efforts.
C'est aussi le succès d'une méthode :
- des décisions prises en s'appuyant sur une expertise solide (j'en remercie le GETE, Groupe d'évaluation technico-économique, et le SAPE, groupe d'évaluation scientifique, dont les rapports vont permettre d'avoir, au cours de cette semaine des discussions informées et éclairées) ;
- des institutions efficaces et soucieuses de solidarité, en particulier un Fonds multilatéral de financement des projets pour aider les pays qui n'ont pas, seuls, les moyens d'atteindre les objectifs contraignants du Protocole de Montréal.
Cette approche différenciée permet de tenir compte des situations différentes pour avancer ensemble.
Le Fonds multilatéral est d'une grande utilité. Il a permis de financer des projets dans 145 pays pour un montant global de 3 milliards de dollars. La contribution de la France s'est élevée à plus de 236 millions de dollars de 1991 à fin 2013 dont, à travers le mécanisme de financement bilatéral, plus de 14 millions de dollars au bénéfice de 113 projets.
La France attache une très grande importance aux négociations qui vont se dérouler durant cette 26ème réunion sur la reconstitution de ce Fonds multilatéral pour la période 2015-2017. Elle est prête, à vos côtés, à assumer ses responsabilités et à s'engager pleinement pour parvenir à un résultat qui fournisse au Protocole de Montréal les moyens de continuer à réaliser ses objectifs.
Mais nous devons aujourd'hui relever de nouveaux défis qui sont, d'une certaine façon, la conséquence paradoxale de nos succès. En effet, les hydrofluorocarbones, les HFC, développés par l'industrie en substitution des gaz responsables de ce qu'on a appelé « le trou de la couche d'ozone », se sont révélés de très puissants gaz à effet de serre qui pourraient, si rien n'est fait, représenter en 2050 jusqu'à 20 % de nos émissions mondiales. Nous ne pouvons accepter qu'en réglant un problème environnemental, nous contribuions à en aggraver un autre : sauver la couche d'ozone au prix d'un dérèglement climatique accru, cela n'aurait pas de sens.
Nous devons donc agir sans attendre contre ce nouveau danger. Nous disposons pour cela d'un instrument qui a fait ses preuves : le Protocole de Montréal.
J'irai même jusqu'à dire, s'agissant de la diffusion des hydrofluorocarbones comme solution de substitution, que la responsabilité du Protocole de Montréal est, en quelque sorte, à la mesure de son efficacité contre les gaz qui détruisaient la couche d'ozone.
C'est pourquoi la France est favorable à un amendement de ce Protocole afin qu'il puisse encadrer, comme il a su le faire pour d'autres substances chimiques, la production et l'utilisation des hydrofluorocarbones. Nous devons avancer ensemble dans la recherche d'une solution qui soit acceptable par tous.
Lors du Sommet sur le climat organisé à New York, en septembre dernier, par le Secrétaire général de l'ONU, auquel j'ai participé avec le Président de la République et le Ministre des Affaires étrangères, la nécessité d'agir a d'ailleurs fait l'objet d'une déclaration sur les HFC qui a recueilli l'adhésion de nombreux pays, ONG et entreprises.
Je vous encourage à ouvrir cette semaine un groupe de contact qui examinerait et évaluerait les modalités précises d'un tel amendement.
En maintenant la comptabilisation des émissions de HFC sous la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique et en accélérant leur diminution sous le Protocole de Montréal, nous favoriserions une synergie que je crois fructueuse car utilisant au mieux les capacités de ces deux accords complémentaires tout en assurant la continuité de nos engagements et de nos actions.
Ces liens, de fait, existent déjà. Le Protocole de Montréal a permis de réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre de 11 milliards de tonnes équivalent CO² en supprimant des substances qui appauvrissaient la couche d'ozone.
Un nouveau risque climatique est né de la substitution d'un gaz à ceux qui ont été éliminés avec succès : empêcher que la diffusion de ce substitut annule les points marqués par l'action du Protocole de Montréal contre le réchauffement climatique, c'est en somme parachever le remarquable travail qu'il a permis d'accomplir.
L'Union européenne a, comme vous le savez, voulu s'appliquer à elle-même ce qu'elle préconise pour la planète. Elle a adopté cette année une règlementation ambitieuse des gaz fluorés à effet de serre et s'est fixé l'objectif de réduire de près de 80 % d'ici 2030 la quantité de HFC qu'elle utilise.
Cet effort volontariste des pays membres de l'Union européenne concerne, je tiens à le souligner, l'ensemble de ses territoires et notamment ceux dont les climat sont chauds, comme l'Espagne et la Grèce, et très chauds, comme les outre-mer français : la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion.
Au niveau international, un nombre croissant de pays se met également en mouvement, notamment avec la Coalition pour l'air pur et le climat, que la France a rejointe en juillet 2012 et dont un des domaines d'action prioritaire concerne la réduction des émissions de gaz fluorés à effet de serre. Je suis heureuse de vous annoncer que la France va lui apporter sa contribution financière afin d'aider les pays les plus démunis à mettre en place des projets concrets d'inventaire et de remplacement de ces gaz par des solutions à faible impact climatique.
Ces différentes initiatives préparent, dès maintenant, un traitement futur des HFC par le Protocole de Montréal, que j'appelle de mes voeux.
Elles procèdent d'une même conviction : les innovations technologiques en cours vont nous donner les moyens de développer des alternatives aux hydrofluorocarbones, dont tous les pays du monde pourront s'emparer pour limiter chez eux l'usage de ces gaz.
Des industriels, PME et grands groupes, sont d'ores et déjà en train d'expérimenter ou de mettre en oeuvre des réponses opérationnelles comme la climatisation solaire ou le froid magnétique, particulièrement adaptés aux régions fortement ensoleillées, comme le froid thermochimique ou le froid cryogénique pour le transport routier, comme la création de réseaux de froid urbain ou de systèmes de rafraîchissement par pompage d'eau de mer en grande profondeur, dont un exemple est celui actuellement développé à la Réunion, île au climat tropical.
Pays hôte de cette 26ème réunion des Parties, la France a voulu vous donner un aperçu du possible en présentant, dans le hall de l'Unesco, quelques projets et réalisations dans lesquelles des entreprises françaises sont engagés même s'il va de soi que nous ne sommes, fort heureusement, pas les seuls à défricher ce nouveau champ d'activités très prometteur. Il nous a simplement semblé utile d'illustrer, à partir de notre propre expérience, cette mobilisation industrielle qui s'amorce et a besoin d'être encouragée et accompagnée.
La bonne nouvelle, c'est que la croissance des besoins mondiaux de réfrigération et de climatisation ne condamne pas à utiliser toujours plus d'hydrofluorocarbones dès lors que des technologies novatrices permettent de protéger en même temps la couche d'ozone et le climat. Pour être plus nombreuses à se lancer et à investir dans ces filières d'avenir, les entreprises ont besoin d'un signal clair que leur donnerait avec force l'inclusion des HFC dans le champ du Protocole de Montréal et la fixation concertée par toutes les parties prenantes d'objectifs de limitation de ces gaz.
Ozone et climat : l'obligation d'agir pour une meilleure protection de notre environnement n'est pas à prendre comme une contrainte ou un fardeau à subir mais, au contraire, comme une opportunité et même une chance d'innover, de développer des activités nouvelles et de créer des emplois. C'est ce qu'en France nous appelons la croissance verte, dans laquelle la décision de transformer notre modèle énergétique engage aujourd'hui notre pays tout entier, et qu'on nomme aussi « nouvelle économie climatique ».
Le Protocole de Montréal a démontré que, quand nous unissons nos efforts, les résultats sont au rendez-vous.
C'est un formidable encouragement pour toutes les négociations environnementales internationales et en particulier pour la 21ème Conférence des Parties de la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique qui se tiendra à Paris en décembre 2015.
Ce sommet mondial sera une occasion historique de nous fixer des objectifs communs pour reprendre en mains notre destin climatique et nous en donner les moyens, juridiques et concrets.
La France, qui se réjouit d'accueillir ce grand rendez-vous et s'implique activement pour sa réussite, vient d'engager sa transition énergétique en lui donnant force de loi et en se fixant des objectifs ambitieux de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, d'économies d'énergie et de montée en puissance des énergies renouvelables.
L'Union européenne vient de s'accorder sur un plan également ambitieux de réduction d'au moins 40 % de ses émissions de CO² et de développement des énergies propres. L'accord que viennent d'annoncer les Etats-Unis et la Chine, premiers émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre, est un pas en avant d'une très grande importance.
Le G20 qui vient de se tenir à Brisbane a réaffirmé son soutien à la lutte contre le dérèglement climatique et au Fonds vert de l'ONU.
Partout dans le monde, des villes, des territoires, des Etats, qu'ils soient riches ou pauvres, sont à l'initiative de réalisations exemplaires qui montrent la voie.
Jamais la prise de conscience n'a été aussi vive et largement partagée.
Les choses bougent aux quatre coins du globe, sous toutes les latitudes, et c'est un atout majeur pour que nous puissions finaliser et adopter un accord international fort sur le climat.
Je l'évoque devant vous car je suis convaincue que le Protocole de Montréal, fort de sa méthode et de ses résultats, a un rôle essentiel à jouer dans cette transition mondiale vers des sociétés affranchies de la sujétion au carbone, capables de réduire leurs pollutions et de maîtriser la dérive climatique en s'aidant mutuellement à procéder aux adaptations et aux reconversions nécessaires pour que chacun puisse tirer pleinement parti du potentiel d'une économie verte bonne pour la couche d'ozone et bonne pour le climat.
La prochaine réunion des Parties au Protocole de Montréal se tiendra juste avant la COP 21 sur le climat.
Outre la reconstitution triennale du Fonds multilatéral à laquelle, je vous le dis à nouveau, la France, 5ème pays contributeur, est très attachée, je crois profondément que l'adoption d'un amendement sur les HFC serait une heureuse préfiguration du possible dans la perspective du sommet mondial de décembre 2015 et une précieuse incitation à y conclure un accord utile à tous et bénéfique pour chacun de nos pays.
Je vous souhaite d'excellents travaux durant toute cette semaine de négociations dont j'espère qu'elle permettra de fécondes avancées dès cette 26ème réunion des Parties.
J'espère, pour vous le dire avec les mots d'un grand poète martiniquais, Edouard Glissant, qui fut pendant plusieurs années rédacteur en chef de la Revue de l'Unesco, que vos échanges et vos discussions permettront de voir le nécessaire non comme un improbable mais comme un possible « sculpté par de nouvelles clartés », source d'une volonté partagée.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 18 novembre 2014
Madame la Secrétaire exécutive du Secrétariat de l'ozone (Tina Birmpili),
Mesdames et Messieurs les Présidents et les représentants des parties à la Convention de Vienne et au Protocole de Montréal (co-présidents : Patrick McInerney et Richard Mwendandu),
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureuse d'ouvrir avec vous cette 26ème réunion des Parties au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, qui associe également, ce qui est exceptionnel, la Conférence des Parties à la Convention de Vienne.
Permettez-moi de remercier toutes celles et tous ceux qui ont pris une part active à l'organisation de cette réunion ainsi, bien sûr, que l'UNESCO pour son hospitalité.
Le Protocole de Montréal signé, comme vous le savez, en 1987, est le premier traité relatif à l'environnement de dimension vraiment mondiale et universelle, assorti de dispositions librement consenties ayant une valeur contraignante et opérationnelle.
C'était un texte exigeant et pourtant, il a réussi à convaincre, à entraîner, à mobiliser, dans une démarche à la fois ambitieuse et constructive, volontariste et pragmatique.
La réunion de cette semaine réunit, dans le même esprit, toutes les parties prenantes de cet engagement que nous avons pris d'agir collectivement pour protéger la couche d'ozone, après que les scientifiques nous aient alertés sur sa dégradation et sur les risques qui en résultaient pour la santé humaine dès lors que sa fonction de protection des rayons ultra-violets était dangereusement entamée.
Cette mobilisation concerne l'ensemble de nos pays, ceux qu'on dit « développés » et ceux qu'on dit « en développement », termes, je vous l'avoue, que je n'emploie pas sans réticence car ils suggèrent qu'il n'y aurait qu'un seul modèle de développement alors qu'à mes yeux, de nouveaux modèles sont à inventer pour relever les défis environnementaux et conjuguer efficacement économie et écologie, nul n'ayant, en ce domaine, de monopole. C'est pourquoi je préfère parler, sans euphémiser la réalité, de pays riches et de pays pauvres, de pays à la puissance économique avérée et d'autres qui, à des degrés divers, veulent construire ou consolider la leur.
Cette mobilisation, donc, a concerné tous nos pays, dans leur diversité, c'est-à-dire non seulement les gouvernements et les Etats mais aussi la société civile et les organisations non gouvernementales, les agences d'exécution et les entreprises, bref toutes les forces vives dont l'engagement est décisif.
Je tiens à souligner ici le beau succès du Protocole de Montréal et l'efficacité de l'action conjointe qu'il a permise car ses objectifs sont en passe d'être atteints : la couche d'ozone, gravement endommagée, est en voie de réparation.
Ensemble, nous avons réussi à supprimer, à l'échelle mondiale, des substances chimiques qui érodaient et même trouaient par endroits l'ozone stratosphérique : nous avons éliminé les chlorofluorocarbones et l'élimination des hydrochlorofluorocarbones est en cours.
Les résultats sont là : l'objectif de reconstitution de l'ozonosphère devrait être atteint en 2050 pour la majorité de la surface planétaire et en 2065 au-dessus de l'Antarctique, région la plus exposée. Bénéfice secondaire quoiqu'en réalité tout aussi important : les CFC et les HCFC n'étant pas seulement destructeurs de la couche d'ozone mais aussi des gaz à fort effet de serre, leur éradication contribue directement à la lutte contre le dérèglement climatique, preuve que, dans l'environnement et la protection de la biosphère, tout se tient.
Le Protocole de Montréal a puissamment démontré ce que peut la communauté internationale quand elle décide d'unir ses efforts.
C'est aussi le succès d'une méthode :
- des décisions prises en s'appuyant sur une expertise solide (j'en remercie le GETE, Groupe d'évaluation technico-économique, et le SAPE, groupe d'évaluation scientifique, dont les rapports vont permettre d'avoir, au cours de cette semaine des discussions informées et éclairées) ;
- des institutions efficaces et soucieuses de solidarité, en particulier un Fonds multilatéral de financement des projets pour aider les pays qui n'ont pas, seuls, les moyens d'atteindre les objectifs contraignants du Protocole de Montréal.
Cette approche différenciée permet de tenir compte des situations différentes pour avancer ensemble.
Le Fonds multilatéral est d'une grande utilité. Il a permis de financer des projets dans 145 pays pour un montant global de 3 milliards de dollars. La contribution de la France s'est élevée à plus de 236 millions de dollars de 1991 à fin 2013 dont, à travers le mécanisme de financement bilatéral, plus de 14 millions de dollars au bénéfice de 113 projets.
La France attache une très grande importance aux négociations qui vont se dérouler durant cette 26ème réunion sur la reconstitution de ce Fonds multilatéral pour la période 2015-2017. Elle est prête, à vos côtés, à assumer ses responsabilités et à s'engager pleinement pour parvenir à un résultat qui fournisse au Protocole de Montréal les moyens de continuer à réaliser ses objectifs.
Mais nous devons aujourd'hui relever de nouveaux défis qui sont, d'une certaine façon, la conséquence paradoxale de nos succès. En effet, les hydrofluorocarbones, les HFC, développés par l'industrie en substitution des gaz responsables de ce qu'on a appelé « le trou de la couche d'ozone », se sont révélés de très puissants gaz à effet de serre qui pourraient, si rien n'est fait, représenter en 2050 jusqu'à 20 % de nos émissions mondiales. Nous ne pouvons accepter qu'en réglant un problème environnemental, nous contribuions à en aggraver un autre : sauver la couche d'ozone au prix d'un dérèglement climatique accru, cela n'aurait pas de sens.
Nous devons donc agir sans attendre contre ce nouveau danger. Nous disposons pour cela d'un instrument qui a fait ses preuves : le Protocole de Montréal.
J'irai même jusqu'à dire, s'agissant de la diffusion des hydrofluorocarbones comme solution de substitution, que la responsabilité du Protocole de Montréal est, en quelque sorte, à la mesure de son efficacité contre les gaz qui détruisaient la couche d'ozone.
C'est pourquoi la France est favorable à un amendement de ce Protocole afin qu'il puisse encadrer, comme il a su le faire pour d'autres substances chimiques, la production et l'utilisation des hydrofluorocarbones. Nous devons avancer ensemble dans la recherche d'une solution qui soit acceptable par tous.
Lors du Sommet sur le climat organisé à New York, en septembre dernier, par le Secrétaire général de l'ONU, auquel j'ai participé avec le Président de la République et le Ministre des Affaires étrangères, la nécessité d'agir a d'ailleurs fait l'objet d'une déclaration sur les HFC qui a recueilli l'adhésion de nombreux pays, ONG et entreprises.
Je vous encourage à ouvrir cette semaine un groupe de contact qui examinerait et évaluerait les modalités précises d'un tel amendement.
En maintenant la comptabilisation des émissions de HFC sous la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique et en accélérant leur diminution sous le Protocole de Montréal, nous favoriserions une synergie que je crois fructueuse car utilisant au mieux les capacités de ces deux accords complémentaires tout en assurant la continuité de nos engagements et de nos actions.
Ces liens, de fait, existent déjà. Le Protocole de Montréal a permis de réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre de 11 milliards de tonnes équivalent CO² en supprimant des substances qui appauvrissaient la couche d'ozone.
Un nouveau risque climatique est né de la substitution d'un gaz à ceux qui ont été éliminés avec succès : empêcher que la diffusion de ce substitut annule les points marqués par l'action du Protocole de Montréal contre le réchauffement climatique, c'est en somme parachever le remarquable travail qu'il a permis d'accomplir.
L'Union européenne a, comme vous le savez, voulu s'appliquer à elle-même ce qu'elle préconise pour la planète. Elle a adopté cette année une règlementation ambitieuse des gaz fluorés à effet de serre et s'est fixé l'objectif de réduire de près de 80 % d'ici 2030 la quantité de HFC qu'elle utilise.
Cet effort volontariste des pays membres de l'Union européenne concerne, je tiens à le souligner, l'ensemble de ses territoires et notamment ceux dont les climat sont chauds, comme l'Espagne et la Grèce, et très chauds, comme les outre-mer français : la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion.
Au niveau international, un nombre croissant de pays se met également en mouvement, notamment avec la Coalition pour l'air pur et le climat, que la France a rejointe en juillet 2012 et dont un des domaines d'action prioritaire concerne la réduction des émissions de gaz fluorés à effet de serre. Je suis heureuse de vous annoncer que la France va lui apporter sa contribution financière afin d'aider les pays les plus démunis à mettre en place des projets concrets d'inventaire et de remplacement de ces gaz par des solutions à faible impact climatique.
Ces différentes initiatives préparent, dès maintenant, un traitement futur des HFC par le Protocole de Montréal, que j'appelle de mes voeux.
Elles procèdent d'une même conviction : les innovations technologiques en cours vont nous donner les moyens de développer des alternatives aux hydrofluorocarbones, dont tous les pays du monde pourront s'emparer pour limiter chez eux l'usage de ces gaz.
Des industriels, PME et grands groupes, sont d'ores et déjà en train d'expérimenter ou de mettre en oeuvre des réponses opérationnelles comme la climatisation solaire ou le froid magnétique, particulièrement adaptés aux régions fortement ensoleillées, comme le froid thermochimique ou le froid cryogénique pour le transport routier, comme la création de réseaux de froid urbain ou de systèmes de rafraîchissement par pompage d'eau de mer en grande profondeur, dont un exemple est celui actuellement développé à la Réunion, île au climat tropical.
Pays hôte de cette 26ème réunion des Parties, la France a voulu vous donner un aperçu du possible en présentant, dans le hall de l'Unesco, quelques projets et réalisations dans lesquelles des entreprises françaises sont engagés même s'il va de soi que nous ne sommes, fort heureusement, pas les seuls à défricher ce nouveau champ d'activités très prometteur. Il nous a simplement semblé utile d'illustrer, à partir de notre propre expérience, cette mobilisation industrielle qui s'amorce et a besoin d'être encouragée et accompagnée.
La bonne nouvelle, c'est que la croissance des besoins mondiaux de réfrigération et de climatisation ne condamne pas à utiliser toujours plus d'hydrofluorocarbones dès lors que des technologies novatrices permettent de protéger en même temps la couche d'ozone et le climat. Pour être plus nombreuses à se lancer et à investir dans ces filières d'avenir, les entreprises ont besoin d'un signal clair que leur donnerait avec force l'inclusion des HFC dans le champ du Protocole de Montréal et la fixation concertée par toutes les parties prenantes d'objectifs de limitation de ces gaz.
Ozone et climat : l'obligation d'agir pour une meilleure protection de notre environnement n'est pas à prendre comme une contrainte ou un fardeau à subir mais, au contraire, comme une opportunité et même une chance d'innover, de développer des activités nouvelles et de créer des emplois. C'est ce qu'en France nous appelons la croissance verte, dans laquelle la décision de transformer notre modèle énergétique engage aujourd'hui notre pays tout entier, et qu'on nomme aussi « nouvelle économie climatique ».
Le Protocole de Montréal a démontré que, quand nous unissons nos efforts, les résultats sont au rendez-vous.
C'est un formidable encouragement pour toutes les négociations environnementales internationales et en particulier pour la 21ème Conférence des Parties de la Convention cadre des Nations Unies sur le changement climatique qui se tiendra à Paris en décembre 2015.
Ce sommet mondial sera une occasion historique de nous fixer des objectifs communs pour reprendre en mains notre destin climatique et nous en donner les moyens, juridiques et concrets.
La France, qui se réjouit d'accueillir ce grand rendez-vous et s'implique activement pour sa réussite, vient d'engager sa transition énergétique en lui donnant force de loi et en se fixant des objectifs ambitieux de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre, d'économies d'énergie et de montée en puissance des énergies renouvelables.
L'Union européenne vient de s'accorder sur un plan également ambitieux de réduction d'au moins 40 % de ses émissions de CO² et de développement des énergies propres. L'accord que viennent d'annoncer les Etats-Unis et la Chine, premiers émetteurs mondiaux de gaz à effet de serre, est un pas en avant d'une très grande importance.
Le G20 qui vient de se tenir à Brisbane a réaffirmé son soutien à la lutte contre le dérèglement climatique et au Fonds vert de l'ONU.
Partout dans le monde, des villes, des territoires, des Etats, qu'ils soient riches ou pauvres, sont à l'initiative de réalisations exemplaires qui montrent la voie.
Jamais la prise de conscience n'a été aussi vive et largement partagée.
Les choses bougent aux quatre coins du globe, sous toutes les latitudes, et c'est un atout majeur pour que nous puissions finaliser et adopter un accord international fort sur le climat.
Je l'évoque devant vous car je suis convaincue que le Protocole de Montréal, fort de sa méthode et de ses résultats, a un rôle essentiel à jouer dans cette transition mondiale vers des sociétés affranchies de la sujétion au carbone, capables de réduire leurs pollutions et de maîtriser la dérive climatique en s'aidant mutuellement à procéder aux adaptations et aux reconversions nécessaires pour que chacun puisse tirer pleinement parti du potentiel d'une économie verte bonne pour la couche d'ozone et bonne pour le climat.
La prochaine réunion des Parties au Protocole de Montréal se tiendra juste avant la COP 21 sur le climat.
Outre la reconstitution triennale du Fonds multilatéral à laquelle, je vous le dis à nouveau, la France, 5ème pays contributeur, est très attachée, je crois profondément que l'adoption d'un amendement sur les HFC serait une heureuse préfiguration du possible dans la perspective du sommet mondial de décembre 2015 et une précieuse incitation à y conclure un accord utile à tous et bénéfique pour chacun de nos pays.
Je vous souhaite d'excellents travaux durant toute cette semaine de négociations dont j'espère qu'elle permettra de fécondes avancées dès cette 26ème réunion des Parties.
J'espère, pour vous le dire avec les mots d'un grand poète martiniquais, Edouard Glissant, qui fut pendant plusieurs années rédacteur en chef de la Revue de l'Unesco, que vos échanges et vos discussions permettront de voir le nécessaire non comme un improbable mais comme un possible « sculpté par de nouvelles clartés », source d'une volonté partagée.
Je vous remercie.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 18 novembre 2014