Déclaration de Mme Carole Delga, secrétaire d'Etat au commerce, à l'artisanat, à la consommation et à l'économie sociale et solidaire, sur la vivacité de la coopération agricole et les mesures gouvernementales d'aide à ce secteur économique, Paris le 18 décembre 2014.

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Circonstance : Congrès de la coopération agricole, à Paris les 17 et 18 décembre 2014

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Stéphane le Foll, qui est avec le Premier Ministre aujourd'hui, à l'occasion du premier anniversaire du Pacte d'avenir en Bretagne, regrette beaucoup de ne pas être présent parmi vous.
J'ai accepté avec plaisir votre invitation, parce que la coopération agricole, c'est de l'Economie Sociale et Solidaire et qu'il arrive trop souvent que l'on ne mette pas assez en valeur votre spécificité.
Cela me permet aussi de vous exprimer au nom du Gouvernement tout notre soutien.
Vous avez décidé de vous rassembler autour de « l'avenir ». Et je tiens à vous féliciter pour votre campagne de communication, qui permet de voir au-delà du présent et de vous inscrire dans un projet mobilisateur et fédérateur, tout en rappelant les valeurs de la coopération.
L'écrivain Georges Bernanos disait que l'« on n'attend pas un avenir comme on attend un train. L'avenir, on le fait » !
De par votre volontarisme, l'avenir, vous le faites ! Et je suis ici aujourd'hui pour vous dire que nous sommes et serons à vos côtés !
I. L'investissement, c'est l'acte de préparation de l'avenir
Pour vous aider à préparer l'avenir, nous vous donnons des leviers de compétitivité pour investir, pour innover, pour former et pour recruter :
- Le Pacte de responsabilité : 1) A partir du 1er janvier 2015, l'employeur d'un salarié au Smic ne paiera plus aucune cotisation de sécurité sociale, 2) Baisse des cotisations patronales « famille » à partir de 2016 pour les salaires allant jusqu'à près de 4000 euros nets par mois.
Vous le savez, le Gouvernement est engagé dans la lutte contre le chômage et je tiens à rappeler l'importance pour la filière alimentaire de finaliser un accord dans le cadre du Pacte de responsabilité pour l'emploi.
- Dès 2015, suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) pour les TPE, ainsi que pour de nombreuses PME, soit un effort d'1 milliard d'euros. Cela permet dans une certaine mesure, de compenser le fait que les coopératives ne pouvaient pas bénéficier du Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) pour leur partie non filialisée. Cet engagement, mon prédécesseur et Stéphane Le Foll l'avaient pris l'année dernière. Je suis heureuse de venir cette année avec cet engagement concrétisé.
- Le Fonds impact coopératif au premier trimestre 2015 : Bpifrance mobilisera, via un fonds de fonds, une capacité d'investissement en fonds propres dans les entreprises de l'ESS et les entreprises recherchant un impact social. Un tour de table est en train d'être finalisé s'agissant du projet de fonds d'investissement dans des coopératives de croissance (projet dit « Impact coopératif »), dans lequel le Crédit coopératif et la Confédération générale des SCOP se sont engagés. Le tour de table constaté à ce jour fait état d'engagements fermes à hauteur d'au moins 50 millions d'euros. C'est un début encourageant, mais ce n'est qu'un début, nous ambitionnons d'aller au-delà.
- Mobilisation des financeurs privés : création de nouveaux fonds d'investissement en fonds propres, amplification de la collecte de l'épargne salariale solidaire, création de nouveaux produits d'assurance vie solidaires. Cette démarche sera encouragée par le continuum de soutiens mis en place par la Caisse des Dépôts et par Bpifrance. Les pouvoirs publics joueront un rôle de facilitateur pour la structuration de nouveaux vecteurs d'investissement solidaire, en favorisant la concertation avec les acteurs privés et en contribuant à lever les obstacles fiscaux, réglementaires ou prudentiels, si nécessaire.
Tous ces leviers vont vous aider à préparer l'avenir et à vous inscrire dans la recherche de synergies pour un développement économique et social durable !
II. Les synergies économique, sociale et territoriale pour un développement économique et social durable
La force de l'Economie Sociale et Solidaire réside dans le fait qu'elle ne choisit pas entre l'économie, le social et le territorial, ou plutôt dans le fait qu'elle choisit tout :
A la fois l'économie, le social et le territorial ; à la fois les chefs d'entreprise et les salariés ; à la fois la performance économique et l'utilité sociale ; à la fois le réalisme et l'audace.
1) La loi ESS pour les coopératives
La coopération, vous la connaissez bien. C'est votre quotidien, c'est votre force, c'est votre avenir ! La loi ESS comprend justement un volet central dédié à la gouvernance des coopératives.
Comme vous l'avez rappelé, Monsieur le Président, nous accordons une importance particulière à la vérification périodique du respect des valeurs de la coopération. Leur respect vous permet d'affirmer votre modèle, vos principes et vos pratiques particulières par rapport au champ concurrentiel.
Je tiens à souligner d'ailleurs ici le fait que cette révision coopérative a été élaborée avec vous, et que l'ensemble du monde coopératif s'est engagé dans la généralisation de la révision coopérative avec enthousiasme et avec la volonté de réaffirmer ses valeurs.
2) Les territoires comme atouts pour les coopératives
J'aimerais insister sur le fait qu'il n'y a pas de projet économique, il n'y a pas de projet social, sans projet territorial. La loi ESS permet de créer des synergies entre différents partenaires, avec les Sociétés Coopératives d'Intérêt Collectif et les Pôles Territoriaux de Coopération Economique, pour faire naître des projets économiques et sociaux innovants, fondés sur la mutualisation et la coopération des moyens.
Vous pouvez être les acteurs et les artisans de l'économie de proximité, en établissant des relations directes.
En initiant des projets d'utilité sociale, en lien étroit avec les territoires.
En vous appuyant sur un capital patient, pour créer des bassins de compétences.
Cette coopération fructueuse fera de vous des entreprises non seulement responsables, mais aussi exemplaires.
III. L'Etat : garant de l'ordre public économique
1) La grande distribution : assurer l'équilibre dans les relations économiques
Vous connaissez l'engagement du Gouvernement à suivre de très près les relations commerciales.
Après deux réunions ministérielles, avant et après l'été, le premier comité de suivi des négociations commerciales s'est tenu hier, avec l'ensemble des parties prenantes et les Ministères de l'Economie et de l'Agriculture.
Comme vous le soulignez, les acteurs, les distributeurs, se sont engagés dans le label « relations fournisseurs responsables ». Il faut maintenant que les actes suivent!
La plupart des acteurs nous disent être prêts à changer d'époque, à travailler sur la création de valeur, sur les produits, en lien avec les territoires. Finalement, à suivre les évolutions d'une société de consommation qui veut aussi de l'authenticité et de la qualité.
Nous serons très attentifs, là aussi, à ce que les actes suivent les intentions, en nous appuyant s'il le faut sur des contrôles et des actions en justice. Ceux qui ne respectent pas la loi doivent être sanctionnés. Etre compétitif est une chose, mais c'est toute la filière qui doit être compétitive, et donc en capacité d'investir, et donc avec des marges de manoeuvre !
Nous serons aussi vigilants quant à l'application de la loi Consommation, avec notamment la clause de renégociation, en cas de forte volatilité des matières premières, qui sera obligatoire dans les secteurs concernés pour les contrats 2015.
En outre, les sanctions sont renforcées, et certaines sont améliorées avec l'injonction et la sanction administrative. Les services les utiliseront, lorsque cela est justifié.
2) Soutenir les circuits courts
Au-delà de l'ordre public économique qui vise l'équilibre entre les acteurs, il faut aussi prendre en compte les attentes des Français, qui s'intéressent de plus en plus aux produits locaux.
Nous agissons pour soutenir l'économie circulaire, ce qui permet de renforcer la transparence de l'origine des produits, de valoriser les producteurs et les artisans locaux et de réduire les coûts logistiques.
Approche territoriale qui encourage des synergies locales entre les différents acteurs concernés : producteurs, intermédiaires, artisans, commerçants, collectivités locales et consommateurs.
Renforcer l'utilisation de produits issus de circuits courts dans la restauration collective d'État :
Il faut faire connaître les outils juridiques offerts par le code des marchés publics : prendre en compte parmi les critères de sélection des offres, ceux qui favorisent les circuits courts, comme la saisonnalité des produits et l'impact environnemental des transports. C'est l'objet du guide pratique diffusé à tous les élus par Stéphane Le Foll début décembre. Il faut aussi parfois revoir son approche globale du sujet et ne pas toujours chercher le prix le plus bas.
Il faut aussi organiser l'offre et s'appuyer sur toutes les initiatives exemplaires, soutenues par le Gouvernement, comme la plateforme AGRILOCAL, celle des Chambres d'agriculture, de la Fédération Nationale de l'agriculture biologique : mise en relation directe des producteurs et artisans locaux et des acheteurs dans le cadre de la commande publique (cantines scolaires, maisons de retraite).
C'est cela, aussi, faire preuve de « patriotisme alimentaire », et c'est en ce sens qu'il est important de mettre en avant l'origine française des produits dans les Grandes et Moyennes Surfaces.
IV. Un Etat engagé auprès de vous
1) La simplification
Au-delà de l'exercice général qui touche positivement les coopératives au même titre que d'autres entreprises, notamment deux mesures portées par Coop de France ont été adoptées dans la loi sur la simplification de la vie des entreprises :
- un amendement sur la suppression de la déclaration des prises de participation au Haut Conseil de la Coopération Agricole,
- un amendement sur le caractère facultatif de la publication des comptes pour les petites coopératives dont le chiffre d'affaires est inférieur à 76.000 euros (soit essentiellement des Coopératives d'Utilisation du Matériel Agricole) par parallélisme avec les micro-entreprises.
2) La gouvernance des coopératives
Dans la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, des dispositions importantes sur la gouvernance des coopératives ont été introduites, notamment pour améliorer la transparence et donner plus d'information aux coopérateurs. Et ce, après un travail commun en bonne intelligence avec Coop de France.
Je tiens enfin à saluer l'initiative de Coop de France pour la création du pôle agroalimentaire coopératif. Cela permet de mettre en avant le fait que les coopératives sont aussi des transformateurs. Cette démarche va aussi permettre de poursuivre le travail engagé sur des sujets importants comme la logistique ou les relations commerciales.
Les défis de demain nous obligent en effet à être imaginatifs et innovants, ambitieux et audacieux.
Vous nous offrez, vous, les coopératives, des solutions alternatives aux modèles de développement fondés sur la compétition économique.
Vous nous proposez, vous les coopératives, des modèles patients, qui encouragent d'abord l'investissement et l'emploi, et non les profits court-termistes.
Vous nous inspirez, vous les coopératives, des valeurs de développement économique local et durable face aux délocalisations.
C'est pourquoi nous devons protéger votre modèle et le promouvoir, pour qu'il ne soit pas mis en danger par les dynamiques de l'uniformité et de la dimension unique.
La coopération :
- c'est l'énergie de nos territoires mise en commun,
- c'est la construction participative de notre avenir économique et social,
- c'est la concertation harmonieuse des acteurs, des professionnels et des habitants.
Henry Ford disait que « se réunir est un début ; rester ensemble est un progrès ; travailler ensemble, c'est la réussite » !
Alors à l'aube de la nouvelle année 2015, où nous serons à vos côtés, je vous souhaite de poursuivre votre réussite coopérative avec enthousiasme et confiance, avec énergie et audace !
Source http://www.economie.gouv.fr, le 5 janvier 2015