Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Je vous remercie de l'opportunité de venir ouvrir vos débats autour de l'innovation technologique et sociale au service de la santé et de l'autonomie.
Je me félicite tout particulièrement de voir que le Conseil général de l'économie dont je connais l'expertise en matière de télécoms notamment s'implique tout aussi fortement en matière d'innovations sociales, et de participation citoyenne.
En tant que secrétaire d'Etat chargée du Numérique je le constate chaque jour, les innovations techniques ne valent que si elles parviennent à répondre à un besoin des utilisateurs finaux. Savoir écouter et organiser une réflexion collective est la clé de la pertinence dans l'économie de l'innovation, qui est l'économie de demain.
La santé n'échappe pas à cette règle : pour réussir, il faut être « patient-centrique » tout autant que techniquement à la pointe. Cet enjeu n'est pas mince pour une filière qui représente plus de 75 Md de chiffre d'affaires, en forte croissance à l'international avec un potentiel supplémentaire de 70 Md d'euros d'ici 2017. Près de 200 000 emplois lui sont directement rattachés et on peut estimer à 100 000 emplois supplémentaires les effets indirects de son développement.
et les grandes tendances que fait émerger le numérique le soulignent. J'en citerai trois qui me semblent marquantes pour l'action du gouvernement, comme pour le développement des initiatives que vous portez :
1. Premièrement : Une prise en main de leur santé par les patients : que ce soit à travers l'utilisation d'objets connectés, ou plus simplement par l'échange sur les réseaux sociaux ou la demande d'information adressée aux professionnels.
J'ai pu rencontrer par exemple des associations de familles et de patients atteints de maladies rares qui expliquaient à quel point l'émergence des réseaux sociaux avait permis de renforcer le sentiment de communauté et d'entourer les patients tout autant que les informer des nouveaux traitements disponibles.
Je suis donc tout particulièrement sensible à cette dimension humaine et collaborative que portent les Living Labs et qui doit être une source d'inspiration également pour l'action publique.
2. Deuxième tendance numérique en santé, une modernisation et une transformation numérique des systèmes de soins eux-mêmes : le numérique est déjà très présent dans nos pratiques de santé :
- En ville avec les logiciels de gestion d'un cabinet, le développement des cartes Vitale et la pratique individuelle de nombreux médecins traitant qui échangent par courriel avec leurs patients par exemple,
- A l'hôpital avec des plateaux techniques de haute technologie. En décembre dernier, Manuel Valls et moi organisions un évènement de présentation des start-ups à Matignon : nous y avons accueilli par exemple une entreprise qui permettait aux opérations de chirurgie de gagner en précision grâce à la modélisation 3D du corps du patient.
- Les dispositifs médicaux eux-mêmes deviennent de plus en plus connectés et l'action du Gouvernement encourage les partenariats entre les pôles de compétitivité numérique, comme Cap Digital ou Systématic et les pôles de santé comme Medicen en Ile de France, Eurobiomed à Montpellier ou LyonBiopole pour n'en citer que quelques-uns.
Mais plus largement, les avancées à venir viendront de la meilleure interconnexion de ces îlots technologiques, d'un meilleur suivi des patients à travers le système de soin, j'en suis convaincue.
Numériser le parcours de soin fait l'objet de plusieurs mesures du Gouvernement, comme le dossier médical partagé que le futur projet de loi santé relance sur une gouvernance refondée et je sais à quel point ce sujet a pu être délicat ou contentieux, mais il me semble indispensable de pouvoir avancer - ou le programme de territoires de soin numériques, doté de 80 M de fonds d'investissements d'avenir. Je salue au passage les représentants des cinq régions lauréates, qui ont désormais des moyens pour fédérer numériquement les acteurs de leurs territoires.
3. Enfin, la santé comme l'ensemble de nos activités est marquée par l'émergence de la donnée. Plus de données permettent le développement des « 3P », d'une médecine personnalisée, préventive et prédictive.
Ces développements appellent naturellement un cadre protecteur des données personnelles et une relation de confiance entre patients et professionnels de santé et des données de santé.
Soutenir le développement d'acteurs français dans ce domaine fait également partie des mesures qui peuvent renforcer la confiance sur le traitement des données de santé. C'est l'un des axes du plan Santé numérique que je porte avec Emmanuel Macron et Marisol Touraine pour développer à la fois nos capacités en séquençage génétique et en analyse statistique.
Enfin, je pense nécessaire de le rappeler, l'émergence de techniques quantitatives nouvelles, ce que l'on appelle le « Big Data », ne peut se substituer à l'humain. Si IBM a son docteur Watson, il me semble élémentaire qu'une intervention médicale est avant tout une interaction humaine.
C'est l'un des principes posés dès 1978 dans la loi Informatique et libertés : aucune décision produisant des effets juridiques ne peut être imposée à une personne par un ordinateur et sans intervention humaine. Ce principe doit être renforcé et le projet de loi numérique dont je présenterai les grands axes cet après-midi à l'Assemblée comportera des éléments sur le droit des algorithmes.
J'insiste devant vous sur ces questions car, si la nouvelle frontière réside dans l'économie de la donnée, celles-ci doivent être fiables, et les conditions de collecte et de leur mise en oeuvre nécessitent bien souvent une médiation, un accompagnement, une confiance que les Living Labs peuvent offrir.
Trois grandes tendances pour la filière santé et numérique, donc : la participation des patients, l'interconnexion des dispositifs, des professionnels, des systèmes numériques et enfin l'essor de la donnée.
Ces évolutions des métiers et ces avancées technologiques doivent être au service de notre modèle social. Il me semble important de souligner deux dimensions politiques fortes que je souhaite porter dans le travail gouvernemental et que vous partagez j'en suis convaincue :
1 - Tout d'abord, la pertinence de la démarche « d'innovation ouverte » pour imaginer ensemble les solutions aux défis de la santé, comme de l'innovation en entreprise ou de la rénovation des services publics. C'est la première ambition du projet de loi numérique que je porterai cette année : donner à la France 5 ans d'avance par l'innovation ouverte et la culture de la donnée.
- C'est au coeur de la philosophie d'action des Living Labs que de faciliter la rencontre des usagers et des producteurs de services. Cette culture de la rencontre et de l'écoute entre acteurs, je la porte au coeur des ministères avec l'initiative du « Jeudigital » : un jeudi par mois, des start-ups présentent devant un ministre, des acheteurs publics et des investisseurs privés, les innovations qu'elles peuvent apporter à un champ de politique publique. Après le Ministère des sports en novembre, j'aimerai engager organiser avec Marisol Touraine un jeudigital au Ministère de la santé avant l'été ;
- Dans une économie de la donnée que j'évoquais plus haut, il est encore plus important de travailler en commun entre grands groupes, start'ups et associations : les grands ont besoin de l'agilité des petits pour rester innovants, les innovateurs ont besoin de l'accumulation de données qu'ont pu constituer les plus grands.
Je me réjouis de voir ici ce mélange de grandes entreprises Sorin, Orange, et d'associations ou de start-ups certaines venues même du Canada pour que se croisent les expériences et que les acteurs s'enrichissent de leurs expériences mutuelles.
- Ma politique de soutien au start-ups s'incarne dans la French Tech : être fiers d'être des entrepreneurs innovants français, en régions comme à l'international. L'an 2 de la French Tech sera directement inspiré de cette démarche de co-construction des Living Labs pour que les start-ups aillent disputer les grands groupes, qu'ils diffusent l'innovation partout dans le corps économique.
2/ Le besoin de République, toujours présent, est valable également dans le numérique : C'est la seconde ambition forte du projet de loi numérique à venir : faire du numérique un soutien à la citoyenneté
- Une République participative : il s'agit de faire du « pouvoir de permettre » un levier aussi important que le « pouvoir de faire » pour l'Etat
A travers des initiatives telles que les Living Labs, ou les laboratoires d'innovation publique, les fablabs, les tiers lieux, il s'agit d'accroitre le « pouvoir d'agir » des citoyens grâce au numérique, sur les sujets qui leur tiennent à coeur y compris sur la santé et sur l'autonomie.
- Une République qui s'incarne dans les territoires, d'où la nécessité de la permanence d'une offre de soin, c'est-à-dire d'un service territorial de santé qui fonctionne : c'est l'ambition portée par le projet de loi Santé de Marisol Touraine et les projets « Territoires de soins numériques » que j'évoquais.
- C'est l'objet des initiatives en faveur des usages numériques dans les territoires que l'agence du numérique qui verra le jour d'ici un mois devra porter tout autant que les sujets d'infrastructures.
- Cette inclusion dans un numérique pour tous et par tous, c'est la seconde ambition forte du projet de loi numérique. L'expression de démocratie sanitaire est née il y a une dizaine d'années pour exprimer ce besoin de réappropriation citoyenne des enjeux de santé. Je pense qu'une citoyenneté numérique, une République numérique est aujourd'hui nécessaire y compris dans le domaine de la santé.
Je pense que cette « encapacitation » passe par des initiatives locales comme européennes et je vous souhaite de poursuivre l'aventure des Living Labs pour continuer à co-construire ce bien commun qu'est la santé publique.
Je vous remercie.
Source http://www.cgeiet.economie.gouv.fr, le 26 janvier 2015
Je vous remercie de l'opportunité de venir ouvrir vos débats autour de l'innovation technologique et sociale au service de la santé et de l'autonomie.
Je me félicite tout particulièrement de voir que le Conseil général de l'économie dont je connais l'expertise en matière de télécoms notamment s'implique tout aussi fortement en matière d'innovations sociales, et de participation citoyenne.
En tant que secrétaire d'Etat chargée du Numérique je le constate chaque jour, les innovations techniques ne valent que si elles parviennent à répondre à un besoin des utilisateurs finaux. Savoir écouter et organiser une réflexion collective est la clé de la pertinence dans l'économie de l'innovation, qui est l'économie de demain.
La santé n'échappe pas à cette règle : pour réussir, il faut être « patient-centrique » tout autant que techniquement à la pointe. Cet enjeu n'est pas mince pour une filière qui représente plus de 75 Md de chiffre d'affaires, en forte croissance à l'international avec un potentiel supplémentaire de 70 Md d'euros d'ici 2017. Près de 200 000 emplois lui sont directement rattachés et on peut estimer à 100 000 emplois supplémentaires les effets indirects de son développement.
et les grandes tendances que fait émerger le numérique le soulignent. J'en citerai trois qui me semblent marquantes pour l'action du gouvernement, comme pour le développement des initiatives que vous portez :
1. Premièrement : Une prise en main de leur santé par les patients : que ce soit à travers l'utilisation d'objets connectés, ou plus simplement par l'échange sur les réseaux sociaux ou la demande d'information adressée aux professionnels.
J'ai pu rencontrer par exemple des associations de familles et de patients atteints de maladies rares qui expliquaient à quel point l'émergence des réseaux sociaux avait permis de renforcer le sentiment de communauté et d'entourer les patients tout autant que les informer des nouveaux traitements disponibles.
Je suis donc tout particulièrement sensible à cette dimension humaine et collaborative que portent les Living Labs et qui doit être une source d'inspiration également pour l'action publique.
2. Deuxième tendance numérique en santé, une modernisation et une transformation numérique des systèmes de soins eux-mêmes : le numérique est déjà très présent dans nos pratiques de santé :
- En ville avec les logiciels de gestion d'un cabinet, le développement des cartes Vitale et la pratique individuelle de nombreux médecins traitant qui échangent par courriel avec leurs patients par exemple,
- A l'hôpital avec des plateaux techniques de haute technologie. En décembre dernier, Manuel Valls et moi organisions un évènement de présentation des start-ups à Matignon : nous y avons accueilli par exemple une entreprise qui permettait aux opérations de chirurgie de gagner en précision grâce à la modélisation 3D du corps du patient.
- Les dispositifs médicaux eux-mêmes deviennent de plus en plus connectés et l'action du Gouvernement encourage les partenariats entre les pôles de compétitivité numérique, comme Cap Digital ou Systématic et les pôles de santé comme Medicen en Ile de France, Eurobiomed à Montpellier ou LyonBiopole pour n'en citer que quelques-uns.
Mais plus largement, les avancées à venir viendront de la meilleure interconnexion de ces îlots technologiques, d'un meilleur suivi des patients à travers le système de soin, j'en suis convaincue.
Numériser le parcours de soin fait l'objet de plusieurs mesures du Gouvernement, comme le dossier médical partagé que le futur projet de loi santé relance sur une gouvernance refondée et je sais à quel point ce sujet a pu être délicat ou contentieux, mais il me semble indispensable de pouvoir avancer - ou le programme de territoires de soin numériques, doté de 80 M de fonds d'investissements d'avenir. Je salue au passage les représentants des cinq régions lauréates, qui ont désormais des moyens pour fédérer numériquement les acteurs de leurs territoires.
3. Enfin, la santé comme l'ensemble de nos activités est marquée par l'émergence de la donnée. Plus de données permettent le développement des « 3P », d'une médecine personnalisée, préventive et prédictive.
Ces développements appellent naturellement un cadre protecteur des données personnelles et une relation de confiance entre patients et professionnels de santé et des données de santé.
Soutenir le développement d'acteurs français dans ce domaine fait également partie des mesures qui peuvent renforcer la confiance sur le traitement des données de santé. C'est l'un des axes du plan Santé numérique que je porte avec Emmanuel Macron et Marisol Touraine pour développer à la fois nos capacités en séquençage génétique et en analyse statistique.
Enfin, je pense nécessaire de le rappeler, l'émergence de techniques quantitatives nouvelles, ce que l'on appelle le « Big Data », ne peut se substituer à l'humain. Si IBM a son docteur Watson, il me semble élémentaire qu'une intervention médicale est avant tout une interaction humaine.
C'est l'un des principes posés dès 1978 dans la loi Informatique et libertés : aucune décision produisant des effets juridiques ne peut être imposée à une personne par un ordinateur et sans intervention humaine. Ce principe doit être renforcé et le projet de loi numérique dont je présenterai les grands axes cet après-midi à l'Assemblée comportera des éléments sur le droit des algorithmes.
J'insiste devant vous sur ces questions car, si la nouvelle frontière réside dans l'économie de la donnée, celles-ci doivent être fiables, et les conditions de collecte et de leur mise en oeuvre nécessitent bien souvent une médiation, un accompagnement, une confiance que les Living Labs peuvent offrir.
Trois grandes tendances pour la filière santé et numérique, donc : la participation des patients, l'interconnexion des dispositifs, des professionnels, des systèmes numériques et enfin l'essor de la donnée.
Ces évolutions des métiers et ces avancées technologiques doivent être au service de notre modèle social. Il me semble important de souligner deux dimensions politiques fortes que je souhaite porter dans le travail gouvernemental et que vous partagez j'en suis convaincue :
1 - Tout d'abord, la pertinence de la démarche « d'innovation ouverte » pour imaginer ensemble les solutions aux défis de la santé, comme de l'innovation en entreprise ou de la rénovation des services publics. C'est la première ambition du projet de loi numérique que je porterai cette année : donner à la France 5 ans d'avance par l'innovation ouverte et la culture de la donnée.
- C'est au coeur de la philosophie d'action des Living Labs que de faciliter la rencontre des usagers et des producteurs de services. Cette culture de la rencontre et de l'écoute entre acteurs, je la porte au coeur des ministères avec l'initiative du « Jeudigital » : un jeudi par mois, des start-ups présentent devant un ministre, des acheteurs publics et des investisseurs privés, les innovations qu'elles peuvent apporter à un champ de politique publique. Après le Ministère des sports en novembre, j'aimerai engager organiser avec Marisol Touraine un jeudigital au Ministère de la santé avant l'été ;
- Dans une économie de la donnée que j'évoquais plus haut, il est encore plus important de travailler en commun entre grands groupes, start'ups et associations : les grands ont besoin de l'agilité des petits pour rester innovants, les innovateurs ont besoin de l'accumulation de données qu'ont pu constituer les plus grands.
Je me réjouis de voir ici ce mélange de grandes entreprises Sorin, Orange, et d'associations ou de start-ups certaines venues même du Canada pour que se croisent les expériences et que les acteurs s'enrichissent de leurs expériences mutuelles.
- Ma politique de soutien au start-ups s'incarne dans la French Tech : être fiers d'être des entrepreneurs innovants français, en régions comme à l'international. L'an 2 de la French Tech sera directement inspiré de cette démarche de co-construction des Living Labs pour que les start-ups aillent disputer les grands groupes, qu'ils diffusent l'innovation partout dans le corps économique.
2/ Le besoin de République, toujours présent, est valable également dans le numérique : C'est la seconde ambition forte du projet de loi numérique à venir : faire du numérique un soutien à la citoyenneté
- Une République participative : il s'agit de faire du « pouvoir de permettre » un levier aussi important que le « pouvoir de faire » pour l'Etat
A travers des initiatives telles que les Living Labs, ou les laboratoires d'innovation publique, les fablabs, les tiers lieux, il s'agit d'accroitre le « pouvoir d'agir » des citoyens grâce au numérique, sur les sujets qui leur tiennent à coeur y compris sur la santé et sur l'autonomie.
- Une République qui s'incarne dans les territoires, d'où la nécessité de la permanence d'une offre de soin, c'est-à-dire d'un service territorial de santé qui fonctionne : c'est l'ambition portée par le projet de loi Santé de Marisol Touraine et les projets « Territoires de soins numériques » que j'évoquais.
- C'est l'objet des initiatives en faveur des usages numériques dans les territoires que l'agence du numérique qui verra le jour d'ici un mois devra porter tout autant que les sujets d'infrastructures.
- Cette inclusion dans un numérique pour tous et par tous, c'est la seconde ambition forte du projet de loi numérique. L'expression de démocratie sanitaire est née il y a une dizaine d'années pour exprimer ce besoin de réappropriation citoyenne des enjeux de santé. Je pense qu'une citoyenneté numérique, une République numérique est aujourd'hui nécessaire y compris dans le domaine de la santé.
Je pense que cette « encapacitation » passe par des initiatives locales comme européennes et je vous souhaite de poursuivre l'aventure des Living Labs pour continuer à co-construire ce bien commun qu'est la santé publique.
Je vous remercie.
Source http://www.cgeiet.economie.gouv.fr, le 26 janvier 2015