Interview de M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, à I-Télé le 10 février 2015, sur le déplacement du Premier ministre à Marseille, le projet de loi Macron et l'éventuelle candidature de Paris aux jeux olympiques de 2024.

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Média : Itélé

Texte intégral

BRUCE TOUSSAINT
Jean-Marie LE GUEN est l'invité de I TELE ce matin, bonjour…
JEAN-MARIE LE GUEN
Bonjour.
BRUCE TOUSSAINT
Merci d'être avec nous. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de regarder l'ouverture du journal de 8 h d'I TELE ?
JEAN-MARIE LE GUEN
De 8 h non, plus tôt oui.
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! L'ouverture aujourd'hui – et pas seulement chez nous – c'est Dominique STRAUSS-KAHN qui témoigne à Lille, vous avez des nouvelles ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui ! Mais ça n'appartient pas à la sphère publique et encore moins à l'activité qui est la mienne.
BRUCE TOUSSAINT
Je vous pose la question parce que vous êtes un proche de Dominique STRAUSS-KAHN et il y a quelque chose d'assez frappant, Manuel VALLS aussi, Jean-Christophe CAMBADELIS, enfin les proches de Dominique STRAUSS-KAHN aujourd'hui sont au pouvoir et occupent des postes-clé, c'est un hasard ou c'est… comment vous l'analysez ?
JEAN-MARIE LE GUEN
D'abord je ne crois pas qu'on puisse avoir complètement cette lecture, même si elle a – je l'ai vu dans la presse – été présentée comme cela. Je pense qu'il y a une génération, il y a des gens qui travaillent, il y a des gens qui ont des idées, peut-être des gens qui ont quelques qualités et donc… Voilà ! En son temps 60 % des Français étaient Strauss-Kahniens, si j'ai bien compris, donc…
BRUCE TOUSSAINT
Je ne vais pas vous demander ce que vous pensez de l'affaire, ça c'est un procès qui est en cours, je voudrais juste vous demander si vous avez une pensée pour lui ce matin ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Vous m'en parlez, je l'ai oui, forcément une pensée de tristesse.
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! Il reste quoi de DSK aujourd'hui à gauche, politiquement ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Il y a eu un certain nombre d'écrits politiques, de pensées politiques qui sont je crois un apport intéressant, ça été écrit il y a déjà un certain nombre d'années.
BRUCE TOUSSAINT
C'est le passé ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Oh ! Au plan politique oui, absolument oui.
BRUCE TOUSSAINT
Il n'y a pas de case retour ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non ! Je ne crois pas que ce soit… je ne crois pas qu'il le souhaite, je ne crois pas que ça soit possible et je ne crois pas que ça soit souhaitable d'ailleurs.
BRUCE TOUSSAINT
Manuel VALLS est à Marseille pour parler éducation et sécurité, manque de chance le Quartier de La Castellane a été dans la matinée le théâtre de coups de feu contre la police. Vous avez entendu Samia GHALI, sénatrice socialiste, elle compare la vie dans certains quartiers à Marseille à la guerre en Syrie, on en est là ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense qu'il y a peut-être une façon de s'exprimer à Marseille, d'une façon générale, qui est un peu forte et je crois que les incidents graves et inacceptables - et qui ont d'ailleurs amené une réponse immédiate des forces de police – ne doivent pas cacher que la situation s'améliorer à Marseille et d'ailleurs Samia GHALI l'a reconnu…
BRUCE TOUSSAINT
C'est vrai !
JEAN-MARIE LE GUEN
Il ya plus de moyens, il y a plus de résultats, moins 30 % sur les attaques à mains armées, bref des résultats qu'évidemment Manuel VALLS est là pour encourager cette action des forces de l'ordre, donc ne nous laissons pas non plus complètement distraire par des incidents par ailleurs inacceptables et qui sont combattus avec force.
BRUCE TOUSSAINT
Ecoutez ce que disait Samia GHALI hier soir sur I TELE !
SAMIA GHALI, SENATRICE PS, MAIRE DES 15EME & 16EME ARRDONISSEMENTS DE MARSEILLE
Nous avons aujourd'hui une délinquance qui est de plus en plus dure, de plus en plus juvénile, qui est prête à tout et qui n'a aucune limite et vous verrez c'est les mêmes qui sont capables d'être avec des armes dans une cité à empêcher les enfants d'aller à l'école, ce sera les mêmes malheureusement et c'est d'ailleurs les mêmes qui se retrouvent à faire des attentats en France.
BRUCE TOUSSAINT
Est-ce qu'on prend vraiment la mesure de ce qui se passe ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je le crois ! Je crois que les actions sont menées, mais après il faut des preuves, il faut trouver les personnes, il faut une action qui reste dans l'état de droit, mais elle est forte cette action. Vous avez vu la réaction quand même des forces de police qui ont été mises sur place…
BRUCE TOUSSAINT
Oui !
JEAN-MARIE LE GUEN
Les résultats qui, au-delà des évènements, sont là aussi, donc il y a une action…
BRUCE TOUSSAINT
Il n'y a pas eu d'interpellation hier ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Il y aura des interpellations qui seront faites, parce qu'il y a des moyens globaux de la police, la force mais aussi la police scientifique, le droit, nous avons avançons et nous ne pouvons pas transformer à contrario ce type de cité en lieu de combat. Nous agissons de façon policière, c'est-à-dire l'Etat agit par la police, c'est-à-dire avec la police mais le discernement et la volonté d'aboutir.
BRUCE TOUSSAINT
Il n'y a pas de zone de non droit en France, c'est ce qu'a dit Manuel VALLS hier ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non ! La preuve.
BRUCE TOUSSAINT
Vous êtes vraiment sûr ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais bien sûr qu'il n' y a pas de zone de non droit, partout la police doit et rentre, maintenant il y a des zones qui sont des ghettos, il faut casser les ghettos, c'est une action qui est une action dans laquelle il y a une dimension policière, mais il y a évidemment les politiques publiques aussi globales : le logement – on en a parlé - l'éducation, l'action sociale, sur lesquelles le gouvernement est en train de réfléchir et fera des propositions dans les semaines qui viennent qui seront sans doute des propositions innovantes et qui changeront de ce qui a pu exister jusqu'à présent.
BRUCE TOUSSAINT
Les ghettos, vous assumez ce terme ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui ! Après n'ayons pas peur, il y a des lieux où se créent une contre-culture négative, tout à fait dangereuse et inacceptable pour la République et dont les premières victimes sont les personnes qui sont à l'intérieur de ces ghettos, donc arrêtons la sémantique et les débats philosophiques, il faut appeler un chat un chat et agir comme on doit agir.
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! Et on doit dire apartheid…
JEAN-MARIE LE GUEN
Et on doit dire apartheid parce que ça permet de décrire, rapidement et de façon compréhensible pour tout le monde, une situation et ça permet aussi de donner les moyens d'avoir une action résolue de l'Etat, c'est-à-dire qu'on doit avoir une action politique forte.
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! Mais enfin les mots ont un sens quand même et certains font polémique ou pas, écoutez ce que disait il y a quelques heures Christiane TAUBIRA, votre collègue du gouvernement, à Laurence HAIM qui est notre correspondante à Washington - Christiane TAUBIRA est en ce moment aux Etats-Unis et elle vient de rencontrer son homologue américain – alors sur ce mot apartheid, vous allez voir, il y a des silences qui en disent long, écoutez bien.
CHRISTIANE TAUBIRA, MINISTRE DE LA JUSTICE – DOC. EXCLUSIF I TELE
Il y a des territoires de relégation, c'est absolument incontestable et la question ce n'est pas une querelle sémantique, la question est qu'est-ce qui s'est empilé pendant toutes ces années ? Qu'est-ce qui devient…
LAURENCE HAIM, CORRESPONDANTE I TELE AUX ETATS-UNIS
Mais vous avez été choqué, vous personnellement, par ce mot ?
CHRISTIANE TAUBIRA
… (silence)…
BRUCE TOUSSAINT
Quand on lui demande si elle a été choquée par ce mot, elle ne répond pas.
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, vous comprenez aussi que le mot apartheid dans la pensée de Christiane TAUBIRA a une connotation qui est très particulière, il est vrai que le mot apartheid est passé dans le langage commun pour parler de séparation inacceptable et scandaleuse moralement. Maintenant il y a aussi une autre vision de l'apartheid, alors on peut avoir une vision juridique, vous savez que l'apartheid était une politique d'Etat, là personne ne prétend que c'est une politique d'Etat – encore qu'il y a eu beaucoup de laisser aller politique sur la création de ces zones – donc on peut toujours débattre, La réalité c'est de savoir s'il existe évidemment des zones qui sont différentes du reste du territoire national dans lesquelles des politiques publiques ne sont pas efficaces, dans lesquelles, parce que vous appartenez à ces quartiers, vous êtes tout particulièrement victime à la fois des discriminations mais aussi de la contre-culture qui existe dans ce quartier.
BRUCE TOUSSAINT
L'esprit du 11 janvier est-il en train de s'estomper ? Il y a un sondage, on va le regarder ensemble, sondage Ipsos pour Le Point, qui montre que François HOLLANDE et Manuel VALLS perdent respectivement 8 et 7 points. Vous vous attendiez d‘ailleurs à cette baisse de popularité, ce retour à la réalité d'une certaine façon ?
JEAN-MARIE LE GUEN
D'abord je note que les pourcentages sont quand même toujours plus élevés qu'ils ne l'étaient il y a quelques mois et relativement élevés, la question de l'esprit du 11 janvier c'est quelque chose qui s'adresse à nous, ce n'est pas le problème d'avoir des sondages qui sont positifs, c'est-à-dire les responsables politiques sont en charge d'un mandat, j'allais dire d'une gravité particulière - c'est ça l'esprit du 11 janvier – et c'est le regard de nos concitoyens sur notre action et la manière dont nous devons mener notre action qui a changé, c'est en ça qu'il y a un esprit du 11 janvier. C'est-à-dire qu'il faut hausser notre niveau d'exigence, avoir une capacité à parler avec plus de rassemblement mais aussi plus d'efficacité dans la politique, plus de pragmatique, plus de volonté, plus de rassemblement, plus de respect sans doute de ce qui peut exister…
BRUCE TOUSSAINT
Au Parlement notamment ? Enfin c'est votre dossier aussi…
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui ! Bien sûr.
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! Ca n'a pas toujours été le cas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non ! Je pense qu'au Parlement - et les parlementaires en sont les premiers conscients – c‘est qu'il y a parfois des jeux qui ne sont pas dignes de la situation et de la politique publique qui est la nôtre. Je vois que par exemple sur ce qu'on appelle la loi Macron, la loi croissance et activité, il y a un travail qui est relativement long – pour ne pas dire très long – mais qui se fait dans un état d'esprit qui est justement marqué un peu par cet esprit, c'est-à-dire qu'il y a une volonté d'avancer, il y a un dialogue puissant et j'espère d'ailleurs que chacun en tirera toutes les conséquences au moment du vote.
BRUCE TOUSSAINT
Et alors ce travail, justement sur la loi Macron, il va se terminer quand ?
JEAN-MARIE LE GUEN
La semaine prochaine ! Il sera terminé en temps et en heure, il y aura le vote au moment où nous pensons que le vote doit avoir lieu.
BRUCE TOUSSAINT
Et le vote ça va aller ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense que ce sera un vote…. un peu d'ailleurs aussi avec cet état d'esprit mais aussi avec la méthode qui a été celle du dialogue intense, les réponses assez nombreuses et fournies du ministre donnent des résultats et je pense que les parlementaires auront à coeur d'avoir une attitude aussi qui soit un peu moins caricaturale.
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! Il va rester quand même quelque chose dans cette loi Macron, parce qu'on a l'impression que les dispositions petit à petit…
JEAN-MARIE LE GUEN
Je peux vous faire la démonstration…
BRUCE TOUSSAINT
Se dégonfle ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Pas du tout Pas du tout. Nous avons avancé sur le permis de conduire au-delà de ce qui était prévu…
BRUCE TOUSSAINT
Vous ne reculerez pas sur le permis de conduire, parce que les auto-écoles sont mobilisées comme jamais ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Bien sûr ! Mais est-ce qu'il y a un scandale plus grand dans notre pays que le coût du permis de conduire et la difficulté d'avoir le permis de conduire, et les délais pour avoir le permis de conduire, sachant que c'est quand même un outil majeur d'insertion des jeunes notamment ? Je crois que nous devrions tous avoir conscience que les choses doivent changer d'une façon considérable sur ce domaine, c'est un enjeu majeur de société.
BRUCE TOUSSAINT
Je voudrais vous poser une dernière question, alors c'est moins au ministre qu'à l'élu parisien, les J.O on y va ou pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien, écoutez, je ne suis pas à même. Mais je pense que les choses…
BRUCE TOUSSAINT
Mais enfin vous avez… vous connaissez bien le sport…
JEAN-MARIE LE GUEN
Ca travaille bien…
BRUCE TOUSSAINT
Donc vous êtes élu parisien…
JEAN-MARIE LE GUEN
Ca travaille bien, ça travaille bien…
BRUCE TOUSSAINT
Vous êtes au gouvernement…
JEAN-MARIE LE GUEN
Et je pense qu'on commence à avoir l'idée qu'il pourrait y avoir, s'il y avait une candidature parisienne - puisque c'est bien de Paris qu'il s'agit - et ce sera une candidature qui aurait beaucoup de force.
BRUCE TOUSSAINT
Une candidature Grand Paris d'ailleurs ou Paris…
JEAN-MARIE LE GUEN
Forcément Grand Paris !
BRUCE TOUSSAINT
Forcément Grand Paris.
JEAN-MARIE LE GUEN
Parce qu'aujourd‘hui il n'y a pas de problèmes parisiens qui ne soient ceux du Grand Paris. C'est d'ailleurs là aussi une révolution douce que met en place ce gouvernement, moi j'avais entendu monsieur SARKOZY nous expliquer que les métropoles : le Grand Paris, le Grand Lyon, le Grand Marseille, mais singulièrement le Grand Paris, ça ne se ferait pas avant 30 ans, eh bien voilà en trois ans, en quatre ans, nous allons le faire.
BRUCE TOUSSAINT
Je vous pose la question parce que ce matin sort un sondage qui indique que ¾ des Parisiens souhaitent une candidature de Paris aux Jeux Olympiques, vous en faites partie ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Voilà !
BRUCE TOUSSAINT
Oui ! Il ne reste plus qu'à convaincre Anne HIDALGO ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais Anne HIDALGO elle travaille sur ces dossiers, elle vérifie que c'est possible, que ce sera opportun, que ce sera une candidature avec une capacité de succès qui soit très grande et qui apportera du bien-être pour les Parisiens, c'est bien normal.
BRUCE TOUSSAINT
Merci beaucoup, merci d'avoir été avec nous ce matin…
JEAN-MARIE LE GUEN
Merci !
BRUCE TOUSSAINT
Dans un instant le journal de 8 h 30.
source : Service d'information du Gouvernement, le 16 février 2015