Déclaration de Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires, sur le déploiement du numérique dans la filière du bâtiment, à Paris le 25 mars 2015.

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Circonstance : Ouverture de la table ronde sur le thème "La feuille de route française pour la transition numérique de la construction", au salon BIM World 2015 à Paris le 26 mars 2015

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les professionnels,


Je suis heureuse d'être parmi vous à l'occasion de ce salon BIM WORLD dédié à la maquette numérique.

Mais également heureuse d'accompagner la véritable « révolution » qui se met en place avec le déploiement de l'outil numérique que je soutiens depuis ma prise de fonction qui est au service d'une ambition globale pour l'ensemble de cette filière.

Le numérique est au croisement des dimensions économiques, sociales et sociétales de nos vies et de nos territoires. Il concerne toutes les échelles: le bâtiment, le quartier, la ville. C'est ce qui en fait un levier particulièrement puissant et partagé.

Un levier puissant parce que l'outil numérique est à même de vous permettre, à vous professionnels mais également aux maîtres d'ouvrage, d'appréhender les enjeux relatifs à la construction de la ville d'aujourd'hui et de demain.

Un levier partagé parce que cette révolution du numérique repose sur des valeurs communes : la pluridisciplinarité, l'excellence professionnelle, l'ouverture sur le monde, la diversité dans les approches.


Comme vous le savez, les enjeux du numérique sont au coeur des préoccupations du Gouvernement, et en particulier de mon ministère.

En effet, l'entrée du bâtiment dans l'ère du numérique est une condition incontournable pour construire plus, mieux et moins cher.

Nous avons fait de la relance de la construction une de nos priorités et pris de très nombreuses mesures : simplification des normes, assouplissement des dispositifs d'investissement locatif, mesures fiscales fortes en faveur des quartiers de la politique de la ville (avec une TVA à 5%) ou des territoires moins denses (extension du PTZ).

Notre ambition : relancer la commande et rassurer les investisseurs pour susciter l'émergence de projets.

Notre conviction : seule une action résolue sur le développement de l'offre contribuera à enrayer la crise du logement qui sévit depuis de trop nombreuses années dans notre pays, et à permettre au secteur du bâtiment de retrouver la croissance.

Mais une reprise crédible et durable du secteur suppose une qualité renouvelée et ambitieuse des constructions, ainsi qu'une modernisation de la filière.

C'est la raison pour laquelle j'ai annoncé en décembre dernier une politique résolue de soutien à l'innovation et d'accompagnement des professionnels du secteur.

J'ai souhaité mobiliser 70 millions d'euros du Fonds de compensation de l'Assurance Construction (FCAC) en faveur de 3 plans de recherche et développement dédiés aux professionnels de la filière, et je vous annonce que le comité consultatif de ce fonds vient de valider le dispositif financier.

Le 1er plan vise à développer des techniques innovantes en matière de détection et d'extraction de l'amiante.

Le 2e plan prévoit la mise en place d'outils de formations dédiés aux entreprises de pose et de mise en oeuvre pour apprendre à manier les matériaux innovants et maîtriser les techniques nouvelles de pose.

Enfin le 3e plan, le fameux Plan pour la Transition Numérique du Bâtiment, présidé par Bertrand Delcambre, prépare le déploiement du numérique dans toute la filière du bâtiment, avec notamment le développement d'outils adaptés aux TPE et PME pour répondre aux exigences de la maquette numérique et 20 millions d'euros sont y consacrés Bertrand Delcambre va vous en présenter le détail dans quelques instants.

Le développement du numérique constitue un réel facteur de compétitivité et d'attractivité pour nos entreprises.

Les économies induites par son utilisation peuvent atteindre 35€/m² dans la construction neuve.

Nous devons donc investir rapidement dans ce plan si nous voulons accélérer la relance. C'est fondamental.

Et je veux ici saluer l'implication de Bertrand Delcambre en ce sens puisque le premier comité de pilotage a eu lieu le 11 février dernier et que le prochain se réunira le 7 avril pour valider la feuille de route opérationnelle du Plan de transition numérique et préciser le calendrier des travaux.

Nous devons investir dans ce plan pour avancer rapidement, mais nous devons aussi avancer ensemble, conjointement, sous peine d'être confronté à une « fracture du numérique » avec un marché à 2 vitesses.

La construction est une chaîne d'acteurs nécessairement solidaires et le plan de Transition Numérique du bâtiment rassemble naturellement tous les acteurs : bureaux d'ingénierie, fabricants de matériaux, maîtres d'oeuvre, maîtres d'ouvrage avec la FPI et l'USH. Il a également une dimension interministérielle puisque le ministère de l'Economie et celui des Finances y sont associés.

Dans ce contexte, le partenariat est la clé de la réussite.


Au début de mon propos j'ai employé le terme de révolution. Il n'est pas exagéré.

Car je suis convaincue du potentiel d'innovation dans le bâtiment grâce au numérique.

Que ce soit en matière de création de matériaux, de formes architecturales, ou encore de modalités de coopération.

L'innovation est un moteur de la confiance que nous souhaitons restaurer pour relancer l'économie.

La performance de nos projets ne doit pas relever de l'expérimentation, et se limiter à quelques projets confidentiels ou de grande ampleur. L'excellence doit devenir la règle pour chacune des opérations que nous engageons.

L'innovation permet la créativité.

Grâce à l'outil numérique, l'imagination des concepteurs n'a plus de limites. La maquette numérique permettra par exemple de passer de l'échelle du bâtiment à celle de la ville avec plus de facilité et de pertinence.

L'innovation est un facteur d'attractivité.

Grâce à l'outil numérique, l'industrie du bâtiment va bénéficier d'une nouvelle image, celle d'une industrie moderne tournée vers les nouvelles technologies. Ses métiers vont en être revalorisés, et attirer plus encore les jeunes générations.

L'industrie du numérique sera en outre créatrice d'emplois, et il est fondamental qu'une partie puisse bénéficier aux plus jeunes.

Enfin, et surtout, l'innovation est vecteur de qualité.

Elle apporte des réponses nouvelles pour améliorer le quotidien, pour répondre à des exigences de plus en plus élevées en matière de sécurité, de confort, de durabilité.

Par exemple, la maquette numérique est une formidable opportunité pour réduire la sinistralité.

En permettant une meilleure coordination des entreprises en phase chantier, en assurant la traçabilité des produits et matériaux mis en oeuvre, ou encore en améliorant la gestion du bâtiment une fois livré.


Le numérique doit donc nous permettre de construire mieux, en poursuivant les ambitions énergétiques et écologiques que nous nous sommes fixées.

Et de construire différemment, en respectant les besoins et le cadre de vie des habitants présents.

Nous sommes entrés dans l'ère du numérique et le plan que je viens de mettre en place s'accompagnera de changements réglementaires apportés par le projet de loi sur la transition énergétique et la croissance verte.

La mise en place, dès 2017, du carnet d'entretien des bâtiments neufs préfigurera les attentes en matière de maquette numérique à l'échelle du bâtiment.

Ce carnet numérique devra comprendre les données relatives aux matériaux et équipements de construction, mais aussi les éléments propres à la gestion de ces mêmes équipements.

Cette « carte vitale » du bâtiment sera bien évidemment d'autant plus facile à mettre en place que le processus de construction rassemblant maîtres d'ouvrage, entrepreneurs et fournisseurs, aura travaillé à partir du BIM. C'est toute une révolution culturelle qui voit le jour en matière de processus et de pratiques entre les différents acteurs de la construction.

La commande publique doit également porter cette aspiration du numérique mais de manière proportionnée pour ne pas créer de nouvelles inégalités.

Nous sommes à un moment décisif, comme nous l'avons été avant la mise en place de la RT 2012 en son temps, ou du dispositif RGE.

Le numérique est incontournable et il faut former nos entreprises, développer les outils, se préparer à l'évolution des règles et des normes en la matière.

Nous pouvons parler d'excellence française et être compétitifs à l'échelle internationale.


Pour conclure, je tiens à souligner que les initiatives se multiplient en matière de BIM, ce qui démontre l'étendue et la puissance du phénomène numérique.

Les industriels ont fortement investi le champ du numérique. J'assistais la semaine dernière à un colloque de l'AIMCC consacré à la question du BIM. J'ai pu constater que la filière industrielle est fortement impliquée dans cette mutation économique. Et je soutiens le travail de normalisation qu'elle porte à l'échelle européenne pour poser les bases des catalogues de données utiles aux entreprises.

Les pouvoirs publics développent également des stratégies d'accompagnement de plus en plus performantes.

Les collectivités locales mettent en place des démarches pragmatiques et efficaces.

Les initiatives comme celles du pôle de compétitivité de la Région Alsace, avec sa plate-forme régionale d'excellence numérique pour la construction et l'immobilier «BIM – Energie» doivent être reproduites et généralisées.

J'ai d'ailleurs demandé au CSTB, qui assure l'appui technique du plan transition numérique du bâtiment, d'appuyer la création de plateformes de l'innovation sur l'ensemble du territoire, et d'insister sur la question du numérique.

Je salue d'ores et déjà le projet de l'Etablissement public de Bordeaux Euratlantique, qui s'apprête à développer avec l'aide du CSTB un projet de maquette numérique à l'échelle d'un nouveau quartier.

De leur côté, les écoles d'architectures développent des modules spécifiques sur le numérique et forment de nouvelles générations de maîtres d'oeuvre, mieux rodés à cet outil collaboratif par excellence.

Enfin, je tiens à ce que le BIM soit au coeur des projets à venir en matière de production de logement social, à l'échelle nationale ou dans le cadre des travaux menés sur l'Opération d'Intérêt National multisite du Grand Paris.


La révolution numérique est en marche.

C'est une chance pour la France, pour ses industries, et notamment pour celle du bâtiment. C'est une opportunité que les entreprises doivent saisir, un défi qu'elles doivent relever.

Dans cette dynamique nouvelle, le Gouvernement est à vos côtés. La mise en place du Plan pour la Transition Numérique du Bâtiment en témoigne, cela nous permettra de renforcer compétence et notre attractivité pour l'ensemble des projets et l'ensemble des territoires.


Source www.territoires.gouv.fr, le 26 mars 2015