Déclaration de M. Matthias Fekl, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, à la promotion du tourisme et aux Français de l'étranger, sur le commerce international, à l'Assemblée nationale le 5 mai 2015.

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Circonstance : Audition devant les commissions des affaires économiques et des affaires européennes de l'Assemblée nationale, le 5 mai 2015

Texte intégral

Je suis heureux de répondre à votre invitation qui précède la réunion du Conseil des ministres du commerce extérieur de jeudi prochain à Bruxelles. Je suis à votre disposition tant avant ces échéances, qu'après elles, pour vous tenir au courant de l'évolution des négociations. Comme beaucoup d'entre vous, les présidents de vos deux commissions sont très impliqués dans le suivi des sujets de politique commerciale, dont il me semble important de traiter dans un cadre démocratique, devant la représentation nationale. C'est une chose plutôt neuve que ces débats intéressent autant les Français. Comme parlementaires, vous aurez d'ailleurs le dernier mot sur les accords, au moment de leur ratification.
Trois points sont à l'ordre du jour de cette réunion du Conseil. Il se penchera d'abord sur les négociations commerciales internationales avec les États-Unis et avec le Canada, et notamment sur le mécanisme d'arbitrage ou Investor-State Dispute Settlement (ISDS). Il abordera ensuite la préparation de la dixième conférence de l'OMC à Nairobi en décembre 2015, où les négociations s'étendront aux biens environnementaux. Enfin, il examinera les aspects économiques et commerciaux du partenariat oriental.
Je vous présenterai ces points en remontant dans l'ordre du jour du Conseil.
Un sommet du partenariat oriental se tiendra à Riga les 24 et 25 mai 2015, regroupant les vingt-huit États membres de l'Union européenne et les six pays partenaires, à savoir l'Arménie, l'Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, la Moldavie et l'Ukraine. Ce jeudi, la session du Conseil sera suivie d'une réunion commune avec eux sur les aspects commerciaux du partenariat.
Le sommet de Riga fournira l'occasion d'évoquer les accords d'association, y compris les accords de libre-échange complets et approfondis (ALECA) qui ont été signés avec la Géorgie, la Moldavie et l'Ukraine. La France s'est fixée pour priorité la mise en oeuvre effective de ces accords et des réformes qu'ils induisent, ainsi qu'une juste évaluation de leur impact. Il apparaît en outre nécessaire de développer des formules spécifiques de partenariat avec les États qui n'ont pas signé d'accord de libre-échange approfondi : l'Arménie, l'Azerbaïdjan et la Biélorussie.
Quant à la conférence de l'OMC et à la négociation sur les biens environnementaux, la réunion de décembre devrait clore le cycle de Doha, également appelé cycle du développement. Mais la fin de ces négociations, qui s'éternisent depuis quinze ans, a déjà été souvent annoncée.
Q - Vous nous confirmez néanmoins qu'elles ont commencé ?
R - Votre remarque espiègle renvoie à un réel essoufflement du multilatéralisme. Fidèle à sa tradition diplomatique, par-delà l'alternance des majorités, la France se montre toujours soucieuse que les négociations se déroulent dans un cadre multilatéral, qui garantit de bonnes négociations en excluant les surenchères. De manière paradoxale, ces dernières conduisent en effet souvent à retenir le moins disant. Tel est le risque quand la négociation se déroule en mode bilatéral ou entre blocs régionaux, outre le risque de fragmentation de l'espace commercial international, comme l'a souligné un récent rapport du Fonds monétaire international. Aussi la France appelle-t-elle, avec d'autres, à un retour des négociations commerciales dans le cadre multilatéral, estimant que le format actuel des négociations n'est pas satisfaisant.
La réunion ministérielle de décembre 2015 à Nairobi sera un moment important où il conviendra de défendra à la fois le multilatéralisme et nos intérêts. Il faut tendre vers un système de négociations internationales où les progrès s'enregistrent dans tous les domaines, sans fragmentation géographique ni sectorielle, en incluant donc à la fois les services, l'industrie et l'agriculture. Cette dernière s'avère la clef du succès dans la négociation globale. Nous devons mettre davantage en valeur les efforts de l'Union européenne, qui a su réformer la politique agricole commune (PAC), tout comme notre modèle agricole. Ils sont trop souvent banalisés.
Vous connaissez mon engagement sur les indications géographiques, qui établissent un lien entre la production, les terroirs et un savoir-faire. Dans une récente tribune avec le ministre de l'agriculture Stéphane Le Foll, j'ai défendu cette «diplomatie des terroirs», qui repose sur une certaine conception de l'agriculture et de l'alimentation. Le cycle de Doha pourrait ainsi s'achever sur l'adoption d'une liste mondiale des indications géographiques en vins et spiritueux. Ce serait un progrès extrêmement important. Voilà l'esprit dans lequel nous abordons ces négociations, où nous avons pour ambition de défendre le multilatéralisme, mais aussi de défendre les conceptions que je viens d'exposer.
Quant à la négociation sur les biens environnementaux, elle est fondamentale. Le commerce international n'a de sens que s'il n'est pas une fin en soi, comme je l'ai fait valoir lors de la dernière réunion du Conseil rassemblant les ministres en charge du commerce extérieur. Loin de toute routine, la politique commerciale doit s'inscrire dans une politique européenne d'ensemble au service de l'investissement, de l'innovation, de la croissance et du développement durable. Le commerce international n'est qu'un outil pour y parvenir. À l'heure où les négociations couvrent de nombreux domaines, personne n'établit paradoxalement de lien entre eux, comme par exemple entre le commerce et l'environnement. Aussi est-ce une première de négocier une baisse des droits de douane sur les biens qui contribuent à la préservation de l'environnement. Avant la COP21, il serait en effet paradoxal de les pénaliser. En font partie les outils de contrôle de la qualité de l'air, les appareils de traitement des sols et des eaux polluées, le matériel d'isolation phonique ou thermique, les appareils d'assainissement permettant de produire de l'eau potable, les composants d'installations d'énergie renouvelable... Trop souvent, ces produits sont aujourd'hui soumis à des distorsions tarifaires qui en compliquent le commerce.
Au niveau européen, la France soutient donc activement la démarche. Au niveau national, le gouvernement a organisé des réunions pour définir quels biens peuvent entrer dans la liste européenne qu'il est prévu d'établir. Il s'agit en effet d'agir de manière cohérente avec les objectifs de la COP21, enceinte par excellence pour traiter de l'enjeu climatique. Si vous me pardonnez cette lapalissade, je dirais que nous posons une seule condition à la négociation sur les biens environnementaux : qu'elle débouche sur une initiative crédible sur le plan écologique. Car nous aspirons à des résultats ambitieux, cohérents, exigeants et concrets, à des avancées réelles au service de l'environnement.
Pour nourrir l'agenda de la COP21, nous voulons que soient identifiés avec précision et avec soin quels sont les biens environnementaux. En conclusion sur ce point, la France soutient un aboutissement des négociations à la fin de l'année 2015, tout en étant que consciente que ce calendrier est ambitieux.
J'en viens aux négociations sur le TTIP et au mécanisme de règlement des différends (ISDS). Je rejoins tout à fait les propos du président Brottes sur les peurs et les craintes que ces négociations ont fait naître. Oui, certaines d'entre elles sont justifiées, mais d'autres sont parfois infondées. J'ai conduit une refonte de notre comité stratégique de suivi des négociations, dont vous faites partie, Madame la Présidente, Monsieur le Président. Les groupes de travail sont en cours d'installation. Des députés, des sénateurs, des parlementaires européens y participent, aux côtés des représentants des syndicats, des organisations non gouvernementales, des fédérations professionnelles.
J'ai considéré que toute demande de création d'un groupe de travail devait y être satisfaite, pour éloigner le spectre d'un refus de communiquer des informations sur quelque sujet que ce soit. Je remercie d'ailleurs ceux d'entre vous qui s'impliquent dans ces travaux. Nous ne pouvons négocier en secret. Nos positions doivent être exposées et étayées, sans exclure d'évolution lorsque la nécessité s'en impose.
Nous serons débriefés ce jeudi par la Commission européenne sur le dernier round de négociations. D'après les informations dont nous disposons, il faut encore attendre l'adoption par le Congrès de l'acte d'habilitation (Trade Promotion Authority, TPA) qui investira officiellement les négociateurs américains et sans lequel il est difficile de faire des progrès substantiels.
À chaque stade des négociations, tous les domaines sont couverts. Il faut déplorer l'absence d'avancées américaines suffisantes au cours du dernier round. Pour la France, l'accord final sera un bon accord s'il résulte d'évolutions sur des points tels que l'ouverture des marchés publics américains. Malgré des prises de position libre-échangistes, ces marchés restent en effet très fermés. Ils doivent s'ouvrir, non seulement au niveau fédéral, mais au niveau subfédéral, à l'instar des solutions trouvées dans l'accord avec le Canada. Ce dernier impose à toutes les entités -provinces, administrations infra-fédérales... - le même standard élevé d'ouverture.
En matière d'indications géographiques, les États-Unis écartent pour l'instant les pistes de travail proposées par la Commission européenne, visant à renforcer leur reconnaissance. Il s'agit pour la France d'une ligne rouge, qu'elle défend avec constance dans les différentes enceintes internationales. En l'état actuel des négociations, les choses ne sont pas acceptables.
Les préoccupations montent dans l'opinion au sujet de la convergence réglementaire, objet de divergences marquées, notamment sur le volet institutionnel. En particulier, les États-Unis réclament de la partie européenne un dispositif de notification et d'information (notice and comment), sur toute évolution normative qui interviendrait dans l'Union européenne. Ce dispositif n'aurait pas d'équivalent du côté américain. Cela ne peut non plus rester en l'état.
Sur le plan sectoriel, peu d'avancées sont à enregistrer sur la dizaine de volets thématiques abordés. Les négociations achoppent sur l'implication des entités infra-fédérales dans l'ouverture des marchés publics. Il faut pourtant des engagements robustes sur ce point si les dispositions du futur traité doivent rester à l'abri d'un détricotage par les cours américaines et par la Cour suprême.
La France est très attentive au sort de l'agriculture. Il faut veiller à écarter tout risque de fragilisation des positions françaises sur ce sujet. Elle se focalise aussi sur les conditions de production qui puissent introduire des distorsions de concurrence, telles que le coût de l'énergie, les normes ou les standards environnementaux. Certains produits agricoles, dits produits sensibles, peuvent pâtir de cette différence des coûts de production dans le cadre d'une libéralisation accrue des échanges.
Enfin, j'en viens à l'arbitrage et au règlement des différends. Dans le cadre de notre comité de suivi stratégique des négociations, j'ai installé un groupe de travail sur l'ISDS. Cette question touche à la souveraineté, à la démocratie et à l'état de droit. La pratique de l'arbitrage a connu des dérives. D'abord conçu pour protéger les petites et grandes entreprises, y compris les nôtres, contre des décisions arbitraires, il a fait le lit de grands groupes qui attaquent devant les tribunaux des choix politiques souverains, à l'instar de Vattenfall qui a introduit contre la République fédérale d'Allemagne un recours pour sa décision de sortir du nucléaire, ou encore de Philip Morris, qui demande des milliards d'euros de dommages-intérêts à l'Australie.
La France est opposée à cette remise en cause de choix démocratiques. Elle n'a pas demandé l'introduction de telles dispositions dans le projet d'accord, car elle pourrait tout à fait s'en passer. En tout état de cause, il importe d'inventer des modalités de règlement des différends qui soient adaptées au commerce international du XXIème siècle, qui respectent le droit des États à légiférer et la capacité des juridictions nationales à dire le droit, et de trouver un juste équilibre entre les entreprises publiques et les investisseurs privés toujours susceptibles de déposer des plaintes abusives. Aussi faut-il clarifier les concepts trop flous qui peuvent rendre imprévisible la jurisprudence des tribunaux arbitraux.
Les procédures retenues doivent pouvoir être étendues à d'autres États. La France a déjà signé non moins de 107 accords prévoyant des clauses de règlement arbitral des différends. Ils sont 96 à être déjà en vigueur. Dans bien des cas, ces clauses ont certes permis de protéger nos entreprises. Mais c'est un sujet sur lequel nous restons engagés.
À terme, la négociation pourrait s'orienter vers une cour permanente de règlement des différends, qui garantisse une clarté des procédures, une professionnalisation des arbitres, une éthique, une transparence et la prévention des conflits d'intérêt. Pour faire avancer la cause européenne sur ce sujet, une démarche commune avec l'Allemagne est engagée depuis la publication du rapport de la Commission européenne sur le mécanisme ISDS. Je crois pouvoir dire que les lignes ont commencé de bouger.
(Interventions des parlementaires)
Quant à l'appréciation globale du TTIP, je dirais qu'un accord mal négocié peut être en effet dangereux. Je m'efforce de vous présenter avec honnêteté l'état d'avancement des négociations, mais il est difficile de communiquer au sujet de ces négociations, alors qu'elles déboucheront sur des engagements qui sont encore devant nous. À ce stade, la France fait valoir ses souhaits et ses intérêts. Mais l'appréciation globale devra porter sur l'accord finalisé.
Pour le CETA, le gouvernement estime qu'il s'agit d'un bon accord, qui contient des avancées importantes sur la protection des indications géographiques. Il en reconnaît 42, qui viennent s'ajouter à celles qui étaient déjà reconnues dans l'accord de 2004 sur les vins et spiritueux. Mais ne nous voilons pas la face : rien de tel n'est finalisé aujourd'hui pour le TTIP.
Oui, Monsieur, mon sentiment est que les Américains veulent que les négociations progressent. L'année 2014 était peu propice à l'avancement des négociations, du fait des échéances électorales américaines, mais aussi du renouvellement des institutions européennes. Aussi les négociations arrivent-elles à un moment important avec l'adoption du TPA. Elle est prévue ce mois-ci, mais ce n'est pas l'administration américaine qui fixe l'ordre du jour du Congrès.
Les lignes rouges de la France sont constamment réaffirmées. Nous refusons de faire entrer dans le champ de la négociation les services audiovisuels ou la protection des données personnelles, non plus que les préférences collectives, car elles relèvent de choix de société. Sur le plan alimentaire, nous ne voulons pas de boeuf aux hormones, de poulet chloré, d'OGM ou de viande portant la trace d'une décontamination chimique.
En exigeant de pouvoir conserver nos propres règles, nous laissons à l'inverse à la partie américaine la liberté d'appliquer les siennes. Nous ne devrons pas forer pour chercher du gaz de schiste si nous n'en voulons pas. Mais les Américains pourront continuer à le faire s'ils le souhaitent.
Quant à la défense des services publics, le chapitre 20 du mandat de négociation est clair à leur sujet. Les clauses de préférence locale ou le recours privilégié aux circuits courts ne seront pas touchés par le TTIP, dans la mesure où ces mesures s'appliquent de manière égale à toutes les entreprises des États parties à cet accord.
Je persiste à penser, Monsieur, que la «diplomatie des terroirs» est une bonne formule. Elle fait sentir comment les négociations commerciales retentissent sur la réalité quotidienne des Français, consommateurs comme producteurs. Cela rend d'autant plus aigüe la nécessité d'en rendre compte.
Je rejoins les analyses de certains d'entre vous sur l'opacité qui entoure les négociations. Elles prenaient en effet un mauvais départ si le mandat de négociation n'avait pas été publié. Il n'est pas possible d'annoncer un grand accord à grand renfort de trompette et de le négocier en vitesse et en cachette pour mettre l'opinion devant le fait accompli.
Notre comité de suivi stratégique permet de mener à bien le nécessaire travail de transparence. Je me suis déjà rendu devant la commission des affaires économiques, devant la commission des affaires étrangères, mais aussi devant le Sénat. Sur le site Internet du ministère des affaires étrangères, une page spécifique est consacrée aux travaux du comité de suivi.
La question de votre accès aux documents consolidés se pose aussi. Le gouvernement exige que les parlementaires français puissent les consulter auprès d'administrations nationales et non dans les ambassades américaines, car ces lieux sont sous souveraineté américaine. Nous ne sommes parvenus à un résultat à ce stade.
Pour les études d'impact, je n'en reprendrai aucune à mon compte, car elles ne me semblent pas fiables. Des contributions supplémentaires doivent être apportées. Je rencontrerai prochainement des responsables d'organismes de recherche publics.
Mais le parlement peut lui aussi conduire ses propres évaluations, en complément d'une expertise universitaire faisant la place à différentes écoles de pensée économiques. En tout état de cause, il faut cesser de croire qu'il est possible de chiffrer à l'euro près par famille les gains attendus du TTIP.
Les agriculteurs comprennent très bien les enjeux de ces négociations, et les suivent de très près, comme je m'en rends compte au cours de mes échanges avec eux dans le Lot-et-Garonne. Il faut impérativement mener le combat des indications géographiques protégées (IGP). Les IGP et les marques incarnent deux systèmes qui véhiculent deux conceptions différentes de l'agriculture et de l'alimentation. Ce n'est pas grandiloquent de dire qu'une offensive mondiale est lancée en ce domaine.
S'il faut se battre sur tous les sujets, il convient d'être conscient aussi de ce que les négociations commerciales internationales continueraient même en cas d'échec du TTIP, par exemple des négociations commerciales entre les États-Unis et l'Asie.
L'Union européenne courrait alors le risque de se voir imposer des normes définies indépendamment d'elle. Je regrette que les négociations actuelles se déroulent entre deux grands blocs plutôt que dans un cadre multilatéral. Leur échec ne consacrerait pourtant certainement pas un succès des positions françaises.
Quant aux clauses environnementales et sociétales, je connais votre attachement, M. Potier, à ces sujets. Au niveau international, la réflexion doit être menée dans les enceintes adéquates, là où elle peut aboutir. Je mettrais donc en garde contre la tentation de greffer sur des négociations où ne pourraient être obtenues que des avancées peu satisfaisantes le sujet du respect des droits de l'Homme par les entreprises. À la suite de la proposition de loi de l'Assemblée nationale à ce sujet, la Commission a déjà formulé des propositions dignes d'intérêt.
Pour ce qui est des préférences alimentaires, rien ne permet de dire à ce stade qu'elles pourraient être remises en cause. En matière d'environnement, le forum de négociation le plus pertinent me semble être la session du cycle de Doha consacrée aux biens environnementaux ainsi que la COP21, où peuvent être adoptés un relèvement des normes ainsi que des standards rigoureux qui seront opposables à tous.
J'ai organisé le premier forum des PME à l'international, au Quai d'Orsay, le 11 mars 2015. Il faut les soutenir dans leurs efforts pour exporter. Elles sont deux fois moins nombreuses à exporter en France qu'elles ne le sont en Italie, et trois fois moins qu'en Allemagne. Toutes les mesures visant à faciliter leur information, à simplifier les procédures et à les soulager des tracasseries administratives seront donc positives. Cela vaut tant pour les PME dans l'industrie que pour les petites exploitations agricoles. Il n'est pas normal qu'un petit producteur de pommes désireux d'exporter aux États-Unis doive soumettre sa production à deux contrôles phytosanitaires successifs, voire payer le déplacement des contrôleurs américains en Europe. Cela pénalise les petites entreprises plus encore que les grandes.
En matière d'énergie, les préférences de chacun sur le gaz de schiste ou les hydrocarbures seront respectées. Rien n'obligera la France à forer. Il en va de même pour la santé, la protection sociale, les services publics.
Quant à la nature juridique du TTIP, la Commission européenne n'a jamais dit qu'il s'agirait d'un accord mixte. La Cour de justice de l'Union européenne est consultée en ce moment sur la nature d'un accord similaire avec Singapour. Le service juridique du Conseil et les États membres sont cependant unanimes à constater qu'il s'agira d'un accord mixte. À ce titre, il sera soumis à votre approbation.
Sur le mécanisme de règlement des différends, un travail important a déjà eu lieu. À la réunion du Conseil, la France réitérera ses réserves de fond sur ce dispositif, car nous pensons qu'il n'est pas nécessaire dans cet accord. Nous ne sommes cependant pas seuls, de sorte qu'il faudra, le cas échéant, inventer de nouveaux mécanismes de règlement des différends, respectant des règles qui répondent aux différentes objections actuellement soulevées par votre assemblée et par le Sénat : des règles d'éthique visant à prévenir les conflits d'intérêt ; la possibilité d'appel devant une juridiction nationale ; l'établissement d'une cour permanente ; la clarification des concepts de nature à éviter que l'arbitrage ne puisse remettre en cause un choix souverain.
En ce domaine, le travail conjoint avec les autorités allemandes joue un rôle important. Si des progrès peuvent être réalisés, c'est par ce biais. La démarche franco-allemande reste au demeurant ouverte à d'autres États membres. Certains la rejoignent alors qu'ils s'étaient initialement prononcés en sens opposé à la fin de l'année 2014. La Commission européenne présentera demain mercredi, devant le Parlement européen, ses préconisations relatives à l'arbitrage, puis elle les présentera jeudi à la session du Conseil au sujet de laquelle nous nous réunissions. Je serai à votre disposition pour vous rendre compte de la teneur des discussions.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 mai 2015