Déclaration de Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'Etat à la politique de la ville, sur les contrats de ville et les projets de renouvellement urbain, Romainville le 28 mai 2015.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral


1- Est Ensemble : un territoire emblématique de la politique de la ville
Je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui pour signer le contrat de Ville de la communauté d'agglomération Est Ensemble, dans un territoire emblématique de la politique de la ville.
Un territoire emblématique parce qu'il bénéficie à plein de la réforme que nous conduisons depuis 2012 et qui est orchestrée par la loi de programmation pour la ville du 21 février 2014. Les élus et les parlementaires de la Seine-Saint-Denis y ont pleinement participé. Et je tiens ici tout particulièrement à rendre hommage à Claude Dilain qui a été le rapporteur de cette loi au Sénat et a tant oeuvré en faveur des quartiers populaires et plus généralement pour l'égalité dans notre pays.
La Communauté d'Agglomération Est Ensemble est un territoire qui a besoin de la politique de la ville et de la solidarité nationale. La réforme que nous avons engagée avec le gouvernement conduit à redistribuer les moyens là où ils sont le plus nécessaires. Il s'agit de simplifier les dispositifs existants, de mieux concentrer les moyens sur la base d'une refonte de la géographie des quartiers prioritaires. 40% de la population Est Ensemble est concernée par cette nouvelle géographie.
Ça n'est pas le fruit d'une décision politique opportune mais le résultat d'une analyse objective qui s'appuie sur un critère unique: celui du revenu des habitants. C'est vrai aussi pour des communes comme Auch ou comme Joigny où j'étais la semaine dernière pour signer le contrat de ville.
2- Le contrat de ville que nous allons signer aujourd'hui répond aux exigences de la réforme.
Le contrat de ville c'est un véritable projet de territoire, à une nouvelle échelle, celle de l'agglomération ; et je tiens à saluer la mobilisation remarquable qui a été celle des acteurs du territoire autour de la communauté d'agglomération et de son président Gérard Cosme.
Le pilotage des contrats de ville à l'échelle intercommunale est déterminant. C'est nécessaire pour inscrire le contrat de ville dans une perspective stratégique, faire jouer la solidarité locale, mobiliser les compétences de l'intercommunalité et arrimer les quartiers aux dynamiques de l'agglomération.
Bien sûr, cela ne signifie pas que l'EPCI devient le seul interlocuteur. Sur le territoire de la commune, le maire met en oeuvre les actions définies par le contrat de ville qui relèvent de toutes les compétences qui lui sont propres. Les maires sont aussi parties prenantes à la gouvernance du contrat, de l'élaboration jusqu'à sa mise en oeuvre.
3- Ce contrat de ville permet la mobilisation des services publics au service des habitants du territoire
La contribution de tous les services publics est nécessaire pour rétablir l'égalité républicaine et changer la vie dans nos quartiers. Je me réjouis de la de la mobilisation de tous les acteurs en faveur du contrat de ville d'Est Ensemble : les mairies, le département de la Seine-Saint-Denis, la Région Ile-de-France, Pôle Emploi, la Chambre de Commerce et d'Industrie, la Caisse des Dépôts, la Caisse d'Allocations Familiales, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie, l'Agence Régionale de Santé ainsi que les nombreux bailleurs sociaux.
Cette mobilisation est le gage d'engagements renforcés et dans la durée ; et cela passe d'abord par l'implication des politiques de droit commun. Pour ce qui est de l'Etat, tout n'est pas parfait, j'en suis parfaitement consciente, mais nous progressons résolument, concrètement. Je ne prendrai que trois exemples :
- Sur la sécurité et la prévention de la délinquance, nous concentrons l'effort : presque toutes les zones de sécurité prioritaire recouvrent ainsi les quartiers prioritaires de la politique de la ville : 77 des 80 ZSP. C'est le cas sur Est Ensemble avec la ZSP de Pantin, qui produit des résultats encourageants. C'est aussi le gage d'une action de prévention renforcée avec neuf délégués à la cohésion police - population déployés sur Est Ensemble. Je salue également la ville de Montreuil qui s'est portée volontaire pour s'engager dans l'expérimentation des marches exploratoires, sur le quartier de la Noue, en lien avec le projet de renouvellement urbain.
- Deuxième exemple, sur l'éducation, la réforme de l'éducation prioritaire bénéficie pleinement aux quartiers, puisque 80 % des établissements en REP, et même 99 % des établissements en REP+, sont situés dans les quartiers prioritaires.
C'est fondamental pour offrir à nos jeunes les mêmes chances de réussite quelle que soit leur adresse ou leur origine sociale.
- Troisième exemple, sur l'emploi, qui est la première préoccupation. Comment ne pas s'inquiéter devant la hausse du nombre de demandeurs d'emploi dans les quartiers depuis 2008 ? Sur Est Ensemble, elle est deux fois supérieure à celle de l'Ile-de-France. Eh bien, désormais, nous ciblons systématiquement les dispositifs sur les territoires qui en ont le plus besoin : les emplois d'avenir, les contrats aidés, la garantie jeune, l'apprentissage, le parrainage, le nouveau « contrat starter » qui bénéficiera à 13 000 jeunes dès cette année, le développement des centres deuxième chance en EPIDe et l'extension en métropole du service militaire adapté.
Les premiers résultats commencent à apparaître, avec un recul du chômage des jeunes en Seine-Saint-Denis. C'est encourageant. Près de 9000 personnes bénéficient ainsi d'un dispositif d'accompagnement vers et dans l'emploi à l'échelle de l'agglomération d'Est Ensemble ; plus de 1000 jeunes ont intégré la « garantie jeunes » ; et on compte près de 12 000 jeunes qui sont en contact avec l'une des 4 missions locales du territoire.
Les engagements de l'Etat, ce sont aussi les moyens d'action de la politique de la ville, pour lever le droit commun et financer des actions spécifiques. La réforme engagée depuis trois ans a permis d'augmenter les crédits d'action de 3 millions d'euros entre 2012 et 2015. De surcroît, les décisions prises lors du comité interministériel du 6 mars consacré à l'égalité et à la citoyenneté vont se traduire par une enveloppe complémentaire de 1 million 750 000 euros pour la Seine Saint-Denis. Ces crédits seront délégués dans les prochains jours, tout particulièrement pour soutenir le mouvement associatif et renforcer la réussite éducative dans les établissements en REP +. Au total, les crédits d'action de l'Etat en Seine Saint Denis, par habitant en quartier prioritaire, auront progressé de 26,2 euros en 2012 à 37,6 en 2015, soit une hausse de près de 45%.
Je sais par ailleurs combien les élus de votre territoire sont attentifs à l'enjeu de solidarité financière ; la péréquation est un levier fondamental et un outil de justice pour vos communes. Le Gouvernement en a fait une priorité :
- depuis 2012, la dotation de solidarité urbaine sur l'ensemble de vos 9 communes aura progressé de 40% (de 24 M€ au total en 2012 à 33,3M€ en 2015)
- le fonds de solidarité de la région Ile de France - qui bénéficie à 8 de vos communes - aura globalement progressé de 27% (de 19 à 24 M€) ;
- le fonds national de péréquation sera passé pour votre agglomération de 1,2 M€ en 2012 à 6,3 M€ en 2015, soit une augmentation de 520%.
C'est avant tout cela la politique de la ville et l'objectif de la réforme portée par ce Gouvernement et par cette majorité : redonner plus à ceux qui ont moins.
4- Au-delà des questions de moyens, ce contrat de ville vient soutenir le développement du territoire, par la création d'activités économique et par le renouvellement urbain.
L'une des clés de réussite, c'est le développement économique. Si les créations d'entreprises sont plus nombreuses dans les quartiers qui relèvent de la politique de la ville, elles sont aussi les plus fragiles. Nous le savons. C'est la raison pour laquelle nous devons mieux les accompagner. Un habitant qui crée son entreprise, c'est un habitant qui crée son emploi et qui peut en créer d'autres derrière.
Dans ce cadre, nous avons financé 3 clubs « ambition réussite » animés par pôle emploi. La Seine-Saint-Denis est d'ailleurs le seul département d'Ile-de-France à développer ces clubs au bénéficie des jeunes des quartiers prioritaires.
Nous avons également souhaité transformer les ZFU en « Territoires Entrepreneurs » sur la durée des contrats de ville 2015-2020, pour expurger les effets d'aubaine et renforcer l'impact sur la création d'activités et d'emplois : le dispositif d'exonérations s'appuie désormais sur une stratégie de développement économique globale qui doit impérativement s'inscrire dans les contrats de ville. Deux territoires sont d'ailleurs directement concernés : sur Bobigny/Pantin et sur Bondy.
Et puis il faut s'appuyer davantage sur le bassin économique local. Pour cela je vous encourage à associer les acteurs économiques au contrat de ville. C'est tout l'enjeu de la « charte entreprises et quartiers ». Et c'est d'ailleurs en Seine-Saint-Denis que la toute première charte a été signée, en février 2014. 25 entreprises, parmi lesquelles des grands groupes, se sont engagées à travers cette charte. Et je sais que d'autres ont signé la charte depuis.
Le numérique est un secteur d'avenir et particulièrement créateur d'emplois. Il l'est pour les jeunes – notamment des quartiers – dont beaucoup d'entre eux maitrisent les usages. Il a cet avantage de ne pas renvoyer à l'échec. 40 000 emplois pourraient être créés d'ici 3 ans. Une mission de préfiguration sur la « Grande Ecole du Numérique » annoncée par le président de la République rendra ses propositions en juin. On peut tout à fait envisager qu'un site soit implanté sur le territoire Est Ensemble.
Et je salue d'ailleurs l'ouverture de l'école SIMPLON à Montreuil qui est à l'origine de la grande école du numérique. Elle va permettre à de nombreux jeunes de se former aux métiers du numérique et de devenir gratuitement un concepteur de sites web ou de jeux vidéo.
Le contrat de ville, c'est aussi l'amélioration du cadre de vie et le renouvellement urbain. Le rôle de l'ANRU est naturellement déterminant et contribue de manière significative au désenclavement et à la promotion des territoires. Le renouvellement urbain bénéfice tout particulièrement à Est Ensemble :
D'ores et déjà la transformation des quartiers est visible avec un grand nombre d'opérations engagées, en cours de réalisation ou livrées : Grand Pêchers et Bel-Air à Montreuil, Les Malassis à Bagnolet, les Quartiers nord de Bagnolet, les Quatre chemins et Courtillières à Pantin, Marcel Cachin à Romainville, Grand Quadrilatère à Bobigny ainsi que son centre-ville. Le montant total des aides de l'ANRU s'est élevé à 380 millions d'euros.
Et nous lançons en ce moment un nouveau programme national de renouvellement urbain. 8 quartiers d'Est Ensemble ont ainsi été retenus pour bénéficier de projets nationaux de l'ANRU.
Cet effort massif sera complété par des projets régionaux de l'ANRU, inscrits dans le contrat de plan Etat – Région. La liste est en cours de discussion entre le préfet de région et le Conseil Régional. Plusieurs quartiers d'Est Ensemble sont susceptibles d'y figurer.
5- Je veux remettre l'humain au coeur de la nouvelle politique de la ville.
Notre action doit se nourrir des préoccupations des habitants. Le contrat de ville est un outil au service de ceux pour qui nous agissons : avec lui, nous portons l'exigence de remettre les habitants au coeur de notre action publique et de la co-construire avec eux.
Les contrats doivent impérativement prévoir les conditions d'une participation effective des habitants, au travers de la mise en place des conseils citoyens. C'est une exigence incontournable. Je sais que vous y travaillez et que cette participation se structure progressivement dans chacune des neuf communes d'Est Ensemble. Je crois d'ailleurs que vous vous êtes associés à ATD Quart Monde qui vous accompagne dans cette démarche. C'est une bonne idée. Je vous encourage à poursuivre dans cette voie.
C'est à partir des réalités du terrain que vous connaissez, au plus près des quartiers, au plus près des habitants, sous l'impulsion des maires et en lien avec le réseau associatif local – qui réalise un travail remarquable dans les quartiers, que nous portons la dynamique des quartiers. Nous allons à ce titre renforcer notre dispositif d'aide aux associations (50 millions en 2015, 100 millions en 2016 et en 2017).
Conclusion
Vous le savez, il y a urgence à changer la donne dans les quartiers, à changer l'image des quartiers, à redonner espoir aux habitants, à renouer la confiance avec les acteurs publics.
La désertion des urnes ou le transfert de voix vers les extrêmes sont autant de préoccupations qui doivent nous alerter toutes et tous.
Nous n'avons pas le droit de décevoir. Et je sais pouvoir, à travers la signature de ce contrat de ville aujourd'hui, compter sur votre total engagement. Vous pouvez compter sur le mien également. Je vous en remercie.
Source http://www.ville.gouv.fr, le 1er juin 2015