Déclaration de M. Manuel Valls, Premier ministre, sur le contrat de projet Etat région pour Mayotte et le développement de l'agriculture mahoraise, à Mayotte le 13 juin 2015.

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Circonstance : Déplacement du Premier ministre dans l'océan indien du 11 au 13 juin 2015 - Visite du lycée agricole de Coconi (Mayotte) le 13

Texte intégral

Mesdames les ministres,
Monsieur le président du Conseil départemental,
Monsieur le maire de Coconi,
Mesdames, messieurs les élus,
Mesdames, messieurs,
C'est avec un très grand plaisir que je viens pour la première fois à Mayotte. J'y découvre des paysages somptueux, une culture riche, et surtout des habitants chaleureux.
Merci pour ce formidable accueil que vous m'avez réservé. J'y suis très sensible.
Nous sommes, ici, Monsieur le président du Conseil départemental, au coeur de Mayotte, mais aussi au centre de votre canton. Vous recevez donc, si je puis dire, à domicile. Et c'est dans ce cadre favorable que nous avons signé, ce matin, deux documents majeurs pour le développement de l'île.
Tout d'abord, le contrat de projet Etat-Région qui arrête, pour la période 2015-2020, l'ensemble des priorités en faveur du développement, de la compétitivité et de l'attractivité du territoire.
L'Etat a veillé à consacrer à ce contrat l'enveloppe la plus élevée de France si on la rapporte au nombre d'habitants. Avec la part du conseil départemental, ce seront un peu plus de 378 millions d'euros qui viendront accompagner les projets.
Le second contrat « Mayotte 2025 » document ambitieux, dessine pour les dix ans à venir la voie pour Mayotte et les engagements partagés pour en garantir les résultats.
Ces deux documents misent donc sur l'avenir.
Et comment évoquer demain sans parler de la jeunesse, de celles et ceux qui sont appelés à construire l'économie de ce territoire par leur travail, leurs idées et leur volonté ?
C'est pourquoi, au-delà de ces actes politiques forts qui engagent le Gouvernement, j'ai souhaité aller à la rencontre des jeunes Mahorais. C'est tout le sens de ma visite, ici, au lycée agricole de Coconi.
C'est avec des établissements tels que celui-ci que se joue, aussi, le développement de l'économie mahoraise.
L'agriculture de Mayotte doit répondre à de nombreux défis : alimentaires – tant au niveau de la qualité que de la quantité – ; environnementaux, qui ne peuvent pas être passés sous silence ; économiques avec notamment la question de la rentabilité des exploitations agricoles.
Pour relever ces défis, l'agriculture mahoraise doit disposer de moyens de financement.
Ils doivent se faire, tout d'abord, à l'échelle européenne. Le programme de développement rural de Mayotte, présenté à la Commission européenne, a été le premier de France – et le seul à cette date ! – à avoir été approuvé dans le cadre du Fonds Européen Agricole de Développement Rural (FEADER).
Ce plan ambitieux de 60 millions d'euros pour la période 2014-2020 permettra aux filières agricoles de se structurer et de se professionnaliser – comme ici, dans ce lycée agricole – tout en accélérant les investissements nécessaires.
En contrepartie, naturellement, ne nous le cachons pas, nous nous devons d'être irréprochables dans l'utilisation des crédits européens. Mais je ne doute pas, monsieur le président du Conseil départemental, que vous y veillez.
Le financement des filières se fait également à l'échelle locale. C'est pourquoi, nous avons assuré l'éligibilité de Mayotte aux aides directes agricoles (le POSEI) qui permettent de soutenir la production locale et de la doter des infrastructures de base – irrigation, voiries rurales…
Ces financements permettront de créer la filière agricole mahoraise d'excellence que nous appelons tous de nos voeux.
Une filière agricole diversifiée, équilibrée et de haute qualité.
Diversifiée, car je sais que l'agriculture mahoraise reste encore très marquée par les cultures vivrières. C'est un fait. L'objectif affiché n'est pas une transformation radicale en quelques mois. La route sera longue et sans doute difficile, mais tracer une voie est possible, tracer une voie est nécessaire.
C'est pourquoi, il faut aussi noter les évolutions des territoires ! Le maraîchage est en plein développement, même si les témoignages entendus tout à l'heure mettent en évidence la professionnalisation et la modernisation progressives dont nous avons besoin.
Ensuite, l'agriculture mahoraise, pour être plus soutenable, doit être plus équilibrée. Car nous le savons, les importations alimentaires sont encore trop élevées.
Mayotte doit être volontariste, ambitieuse, persévérante. C'est ainsi qu'elle accédera à une agriculture de haute qualité.
Mayotte peut tout à fait s'inscrire dans une logique de spécialisation à haute valeur ajoutée. Je pense, bien sûr, aux plantes à parfums et aux épices qui, aujourd'hui, sont largement délaissés en raison d'une rentabilité insuffisante.
Pourquoi la production de vanille à Mayotte ne pourrait-elle pas se développer et être valorisée ? Pourquoi l'Ylang Ylang – cette fleur dont on extrait une huile essentielle très prisée en parfumerie – ne serait-elle pas à nouveau une source d'emplois et de véritable richesse pour l'île ?
Une agriculture diversifiée, équilibrée et de haute qualité ! Voilà l'objectif. Je suis persuadé qu'il peut exister un modèle mahorais fondé sur une filière agricole d'excellence et fonctionnant en circuit court.
A l'heure où la restauration scolaire est appelée à se développer et où la qualité des produits destinés aux élèves se doit d'être au rendez-vous, les établissements scolaires apparaissent comme un débouché naturel et conséquent.
En 2010, 1% seulement des exploitations possédaient un équipement agricole, et moins d'un tiers des agriculteurs commercialisaient une partie de leur production. Il y a donc des marges de progrès importantes !
Ce nouveau modèle mahorais doit enfin s'inscrire dans une coopération régionale.
Nous sommes, ici, entre Madagascar et le continent africain à quelques heures de vol à peine de marchés en pleine expansion de plusieurs millions d'habitants.
Et le lycée agricole, grâce à des échanges d'élèves, de stagiaires et de techniciens avec les pays voisins, a un rôle à jouer. C'est le but de ma venue aujourd'hui.
Mesdames, messieurs,
Ce modèle agricole mahorais sera porté par des instituts d'excellence, comme le vôtre, qui forment les professionnels et préparent les innovations de demain !
Former les futurs chefs d'entreprise et leurs salariés dans les domaines de l'agriculture, de l'horticulture, de l'environnement, de l'agroalimentaire et des services à la personne, voilà votre ambition. Elle est utile !
Il est capital que les établissements de formation soient à l'écoute du monde économique et travaillent en synergie avec les chefs d'entreprise, les représentants des filières.
Je suis heureux de voir les acteurs du monde économique si nombreux ce matin – j'aurai grand plaisir à échanger avec eux dans quelques instants à l'occasion du déjeuner. Votre présence souligne les enjeux éducatifs et économiques d'un tel projet.
Educatifs, car les conditions sont ici réunies pour la réussite des élèves. L'exploitation agricole du lycée, outil pédagogique grandeur nature, est le meilleur matériau pédagogique possible ! Elle constitue une ferme de référence et un lieu d'expérimentation et de démonstration, auprès des professionnels déjà installés.
Enjeux économiques également, pour le potentiel que ce lycée insuffle, tant pour les élèves que les professionnels. La chambre d'agriculture doit, dans ce contexte de développement des filières agricoles et d'accompagnement des professionnels, devenir un acteur essentiel de mutualisation des bonnes pratiques.
C'est pour toutes ces raisons que l'Etat continuera à soutenir l'installation d'agriculteurs et les centres de formation.
J'ai d'ailleurs le plaisir de vous annoncer la création sur ce site d'un internat mixte pour environ 80 élèves, ce qui représente un effort de 5 millions d'euros. Il permettra de résoudre les difficultés liées au déplacement des élèves et de faciliter les conditions d'apprentissage. Tout comme la nouvelle cuisine que je viens d'inaugurer participe, elle aussi, à l'amélioration des conditions de restauration des personnels et des élèves.
Je ne doute pas, avec l'ensemble de ces ressources et de ces talents, que dans quelques années, les formidables richesses de Mayotte seront exploitées et valorisées comme il se doit !
Mesdames, messieurs,
En venant à Mayotte, un peu moins d'un an après la visite du Président de la République, j'ai souhaité réaffirmé l'attachement de mon Gouvernement au développement de votre île.
En venant au lycée agricole de Coconi j'ai souhaité marquer le soutien de l'Etat à l'ensemble des acteurs économiques mahorais qui investissent, qui forment des jeunes et des adultes, qui innovent et veulent aller de l'avant.
Je tiens enfin à saluer aujourd'hui le travail extraordinaire réalisé par les équipes enseignantes et l'équipe de direction de l'établissement. Aux élèves, aux apprentis et aux adultes qui viennent s'y former, j'adresse tous mes encouragements. C'est par la formation, le travail et la persévérance qu'ils réussiront à atteindre leurs objectifs et développer des projets porteurs.
Vous êtes tous les acteurs de cette transformation.
Bravo donc à vous toutes et à vous tous !Source http://www.mayotte.pref.gouv.fr, le 25 juin 2015